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21/02/2012 | FRANCE | N°11BX01408

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 21 février 2012, 11BX01408


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 10 juin 2011 sous forme de télécopie et en original le 14 juin 2011, présentée pour M. Hocine A, demeurant ... ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004665 du tribunal administratif de Toulouse en date du 12 mai 2011 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 septembre 2010 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a retiré sa carte de résident, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté co

ntesté ;

3°) d'enjoindre au préfet, sous astreinte, à titre principal, de lui délivre...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 10 juin 2011 sous forme de télécopie et en original le 14 juin 2011, présentée pour M. Hocine A, demeurant ... ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004665 du tribunal administratif de Toulouse en date du 12 mai 2011 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 septembre 2010 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a retiré sa carte de résident, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet, sous astreinte, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de statuer à nouveau sur son cas ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 janvier 2012 :

- le rapport de M. A. de Malafosse, président de chambre ;

- et les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;

Considérant que M. A, de nationalité algérienne, fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 12 mai 2011 rejetant ses conclusions dirigées contre l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne en date du 29 septembre 2010 lui retirant le certificat de résidence valable dix ans dont il était titulaire et l'obligeant à quitter le territoire dans le délai d'un mois ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié : Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit : a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6-2 et au dernier alinéa du même article ; qu'aux termes de l'article 6 du même accord : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 2. Au ressortissant algérien marié à un ressortissant de nationalité française à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres d'état civil français. (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2 est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux ; qu'il résulte de ces dispositions que la délivrance du certificat de résidence de dix ans est subordonnée à la condition que la communauté de vie entre les époux soit effective ;

Considérant que M. A est entré en France le 14 février 2000 et a sollicité vainement le bénéfice de l'asile territorial ; qu'il a épousé le 23 avril 2002 une ressortissante française et s'est vu délivrer à ce titre un certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale ; que, sur sa demande formulée le 2 décembre 2003, un certificat de résidence valable dix ans lui a été délivré le 15 juillet 2004 sur le fondement des stipulations précitées de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien ; que, par l'arrêté contesté du 29 septembre 2010, le préfet de la Haute-Garonne a procédé au retrait de ce certificat en se fondant sur ce qu'il avait été obtenu par fraude, M. A ayant dissimulé sa véritable situation familiale ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a, conjointement avec son épouse française, déposé le 7 juin 2004 une requête en divorce et que le divorce a été finalement prononcé le 9 février 2005 ; que M. A avait eu en 2003 un enfant avec une compatriote, a reconnu cet enfant le 28 février 2005 et s'est marié avec la mère de celui-ci le 4 octobre 2005 ; qu'en s'abstenant d'informer l'administration de l'engagement de la procédure de divorce et de ce qu'il avait eu un enfant d'une autre femme que son épouse, M. A a volontairement dissimulé des éléments relatifs à sa situation familiale dont la connaissance était susceptible d'avoir une incidence sur ses droits à la délivrance d'un certificat de résidence valable dix ans ; que, dans ces conditions, l'administration a pu à juste titre estimer que le certificat de résidence délivré à l'intéressé le 15 juillet 2004 avait été obtenu moyennant une dissimulation frauduleuse justifiant le retrait de ce titre de séjour ;

Considérant toutefois que selon l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A était en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté ; qu'il exerce depuis 2004 une activité de commerçant en fruits et légumes qui lui a procuré des revenus d'environ 18 000 euros en 2010 ; qu'il est marié depuis 2005 avec une compatriote dont il a eu trois enfants nés respectivement en 2003, 2006 et 2010 qui ont toujours vécu en France où les deux aînés sont scolarisés ; que, par une décision de ce jour, la cour a annulé, en se fondant sur la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le refus de titre de séjour qui a été opposé à son épouse ; que de nombreuses attestations témoignent de la bonne insertion de cette famille dans la société française ; que, dans ces conditions, la mesure de retrait en litige assortie d'une obligation de quitter le territoire français, qui a privé M. A de tout droit au séjour en France, a porté au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi ; que l'arrêté contesté doit, dès lors, être annulé dans toutes ses dispositions ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de délivrer à M. A, ainsi que le demande ce dernier, une carte de séjour temporaire, c'est-à-dire un certificat de résidence d'Algérien d'une durée d'un an, et ce, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. A la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1004665 du tribunal administratif de Toulouse en date du 12 mai 2011 est annulé, de même que l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 29 septembre 2010.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de délivrer à M. A un certificat de résidence d'Algérien d'une durée d'un an dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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No 11BX01408


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX01408
Date de la décision : 21/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Aymard DE MALAFOSSE
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : BENZEKRI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-02-21;11bx01408 ?
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