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29/03/2012 | FRANCE | N°11BX00648

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 29 mars 2012, 11BX00648


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 9 mars 2011, présentée pour la SOCIETE EDP RENEWABLES FRANCE, venant aux droits de la société Recherches et développement éoliens (RDE), dont le siège est 40 avenue des Terroirs de France à Paris (75012), par le cabinet HetG avocats, société d'avocats ;

La SOCIETE EDP RENEWABLES FRANCE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703166 du tribunal administratif de Toulouse du 13 janvier 2011 rejetant sa demande d'annulation de la décision du 4 mai 2007 du préfet de l'Aveyron refusant de faire droit au reco

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 9 mars 2011, présentée pour la SOCIETE EDP RENEWABLES FRANCE, venant aux droits de la société Recherches et développement éoliens (RDE), dont le siège est 40 avenue des Terroirs de France à Paris (75012), par le cabinet HetG avocats, société d'avocats ;

La SOCIETE EDP RENEWABLES FRANCE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703166 du tribunal administratif de Toulouse du 13 janvier 2011 rejetant sa demande d'annulation de la décision du 4 mai 2007 du préfet de l'Aveyron refusant de faire droit au recours gracieux tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er décembre 2006 portant refus de délivrance d'un permis de construire deux éoliennes à Alrance ;

2°) d'annuler la décision du 4 mai 2007 et l'arrêté du 1er décembre 2006 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aveyron de lui délivrer le permis de construire sollicité ou subsidiairement d'instruire à nouveau sa demande dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er mars 2012 :

- le rapport de Mme Evelyne Balzamo, premier conseiller ;

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

- et les observations de Me Ritz, avocat de la SOCIETE EDP RENEWABLES FRANCE ;

Vu la note en délibéré enregistrée à la cour le 2 mars 2012, présentée pour la SOCIETE EDP RENEWABLES FRANCE par Me Guinot ;

Considérant que par arrêté du 1er décembre 2006, le préfet de l'Aveyron a refusé de délivrer à la société Recherches et développements éoliens, aux droits de laquelle vient la SOCIETE EDP RENEWABLES FRANCE, un permis de construire deux aérogénérateurs à Alrance ; que la société EDP RENEWABLES FRANCE relève appel du jugement n° 0703166 du 13 janvier 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté, ensemble la décision du 4 mai 2007 par laquelle le préfet de l'Aveyron a rejeté son recours gracieux ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le tribunal administratif ne s'est pas borné à juger que la société ne remettait pas en cause les données du rapport de l'agence nationale des fréquences en date du 19 septembre 2005 mais, après avoir détaillé le contenu de ce rapport, a précisé que le préfet s'était fondé sur l'avis émis le 16 février 2006 par Météo-France sur le projet de parc éolien litigieux et a estimé, après les avoir rappelés, que les différents éléments produits par la société ne remettaient pas en cause les études et éléments sur lesquels se fondait l'administration ; qu'ainsi, le tribunal a suffisamment motivé son jugement ;

Considérant que le tribunal administratif a longuement répondu au moyen tiré de l'erreur d'appréciation qu'aurait commise le préfet de l'Aveyron quant à l'existence d'un risque de perturbation du fonctionnement du radar météorologique de Montclar par le projet de parc éolien litigieux, au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; que, par suite, la circonstance que le tribunal n'ait pas expressément écarté l'argument de la société invoqué au soutien de ce moyen, tiré de ce que le radar de Montclar ne fonctionnerait pas en mode Doppler et ne pouvait donc être perturbé par le projet, lequel était contredit par les termes mêmes de l'avis défavorable de Météo-France, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité le jugement ;

Sur la légalité de l'arrêté du 1er décembre 2006 et la décision du 4 mai 2007 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 553-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " Ainsi qu'il est dit au premier alinéa de l'article L. 421-1-1 du code de l'urbanisme ci-après reproduit : Art. L. 421-1-1 (premier alinéa) : L'implantation d'une installation produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent d'une hauteur supérieure ou égale à 12 mètres est subordonnée à l'obtention d'un permis de construire. " ; que l'article L 553-2 du même code, alors en vigueur, prévoit que : " I. - L'implantation d'une ou plusieurs installations produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent dont la puissance installée totale sur un même site de production, au sens du troisième alinéa (2°) de l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, excède 2,5 mégawatts, est subordonnée à la réalisation préalable : a) De l'étude d'impact définie à la section 1 du chapitre II du titre II du livre Ier du présent code ; b) D'une enquête publique soumise aux prescriptions du chapitre III du titre II du livre Ier du présent code. (...) " ; que l'article L. 123-11 du code de l'environnement, qui codifie l'article 5 de la loi du 12 juillet 1983 relative aux enquêtes publiques, précise par ailleurs que : " Lorsqu'une opération subordonnée à une autorisation administrative doit faire l'objet d'une enquête publique régie par le présent chapitre, cette autorisation ne peut résulter que d'une décision explicite. " ; qu'en outre l'article R. 421-19 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : " Le constructeur ne peut bénéficier d'un permis de construire tacite dans les cas ci-après énumérés : ( ...) g) Lorsque la construction fait partie des catégories d'aménagements, d'ouvrages ou de travaux soumis à enquête publique en application des articles R. 123-1 à R. 123-33 du code de l'environnement ; " ; que l'article R. 123-1 de ce code dispose que : " I. - La liste des catégories d'aménagements, d'ouvrages ou de travaux qui doivent être précédés d'une enquête publique en application de l'article L. 123-1 est définie aux annexes I à III du présent article. " ; qu'enfin l'annexe I à l'article R. 123-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur, fixe la liste des catégories d'aménagements soumis à enquête publique et mentionne à la rubrique n° 34 les " Travaux d'installation des ouvrages de production d'énergie éolienne dont la hauteur du mât dépasse 50 mètres " ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que le pétitionnaire ne peut obtenir de permis de construire tacite si le projet doit être soumis à enquête publique selon les modalités prévues par la loi du 12 juillet 1983, codifiées aux articles L. 123-1 et R. 123-1 du code de l'environnement ; que le projet de parc éolien litigieux, qui entrait dans le champ d'application de l'article L. 553-2 du code de l'environnement alors en vigueur, et n'était pas soumis à la date de la décision litigieuse au régime des installations classées pour la protection de l'environnement, ne pouvait, par suite, faire l'objet d'un permis de construire tacite ; que, dès lors, ainsi que l'a estimé à juste titre le tribunal administratif, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 1er décembre 2006 devrait être regardé comme une décision retirant, en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et du délai de retrait des décisions, le permis tacite dont elle soutient avoir bénéficié ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date des décisions attaquées : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions projetées, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le parc projeté, comprenant deux éoliennes, doit se situer à environ 11 kilomètres du radar météorologique de Montclar dépendant de l'établissement public Météo-France ; que pour refuser l'autorisation sollicitée, le préfet de l'Aveyron s'est notamment fondé sur l'avis défavorable émis le 16 février 2006 par Météo-France au vu du rapport de la commission consultative de la compatibilité électromagnétique de l'Agence nationale des fréquences (ANFR) en date du 19 septembre 2005, dit " rapport CCE5 n°1 " ; qu'il résulte de ce rapport que l'implantation d'éoliennes dans un rayon de 20 kilomètres autour d'un radar météorologique fonctionnant, comme celui de Montclar, en fréquence " bande C ", est susceptible de perturber le fonctionnement de ce dernier par le blocage de son faisceau, par des échos fixes ou par la création en raison de la rotation des pales de zones d'échos parasites au sein desquelles les données recueillies par " mode Doppler " sont inexploitables ; qu'afin d'éviter une perturbation majeure de ces fonctions, l'Agence recommande en particulier de n'implanter aucune éolienne à moins de 5 kilomètres d'un tel radar et de subordonner leur installation, dans un rayon d'éloignement de 5 à 20 kilomètres, dite " distance de coordination ", à des conditions relatives à leurs caractéristiques techniques, et notamment leur " surface équivalent radar " (SER), à leur visibilité avec le radar, ainsi qu'à leur nombre et leur disposition ; que, s'agissant des risques de création d'échos parasites affectant les données recueillies par mode Doppler, ces conditions sont destinées, selon le guide sur la problématique de la perturbation du fonctionnement des radars par les éoliennes élaboré par la même commission consultative de la compatibilité électromagnétique le 3 juillet 2007, à ce que l'exploitant du radar puisse s'assurer que la taille de la zone de perturbation engendrée par les éoliennes ne soit pas supérieure, dans sa plus grande dimension, à 10 kilomètres, ou qu'elle ne se situe pas à moins de 10 kilomètres d'une autre zone de perturbation ;

Considérant que contrairement à ce que soutient la requérante, le tribunal administratif n'a pas renversé la charge de la preuve mais s'est borné à constater qu'elle n'apportait pas d'éléments de nature à remettre en cause la pertinence de la " surface équivalent radar " SER de 200 m2 retenue par Météo-France, en notant à titre surabondant qu'elle avait été invitée au cours de l'instruction de sa demande à présenter cette surface calculée à partir du projet ; que la société n'apporte aucun élément à l'appui de son allégation selon laquelle le radar de Montclar ne fonctionnerait pas en mode Doppler, l'avis émis par Météo-France le 16 février 2006 faisant au contraire état d'une part, de la nécessité de préserver les mesures des précipitations rendues plus difficiles par les échos fixes générés par les éoliennes et, d'autre part, des perturbations des mesures de vents-Doppler générées par les éoliennes ; qu'elle n'établit pas non plus que les conclusions de l'ANFR seraient erronées scientifiquement et que Météo-France disposerait des moyens permettant de pallier les perturbations générées par les parcs éoliens ; qu'enfin, la société n'est pas fondée à soutenir que le préfet ne pouvait prendre en compte l'existence du parc éolien de Lévézou, situé dans la zone d'impact du doppler, au motif que la trentaine d'éoliennes prévue n'aurait pas encore été installée, dès lors que ce projet avait déjà fait l'objet d'une autorisation en 2005 et devait par suite être pris en considération quant aux conséquences de son fonctionnement ;

Considérant enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de construction du parc éolien, distant de 11 kilomètres du radar de Montclar, est situé dans la zone " de coordination " de 20 kilomètres définie par le rapport précité et dans le secteur défini par Météo-France comme une zone d'exclusion mutuelle correspondant à la zone d'impact de 10 kilomètres sur le radar Doppler des perturbations générées par les parcs éoliens déjà autorisés ; qu'il n'est pas contesté que le radar de Montclar est utilisé par Météo-France pour identifier et suivre le développement des phénomènes dits des " lignes de convergences " et prévoir les évènements tels que les pluies cévenoles occasionnant des débordements de cours d'eaux dans l'Aveyron ; qu'ainsi, l'implantation des aérogénérateurs est susceptible de perturber le bon fonctionnement du radar de Montclar alors qu'il ne ressort d'aucun élément du dossier que la densité de son réseau de radars permettrait à Météo-France de pallier les perturbations occasionnées par la présence des parcs éoliens comme le soutient la requérante ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré que le préfet de l'Aveyron avait pu refuser de délivrer le permis de construire litigieux sur le fondement de l'article R. 111-2 précité du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE EDP RENEWABLES FRANCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt de rejet n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par la SOCIETE EDP RENEWABLES FRANCE doivent être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la société EDP RENEWABLES FRANCE et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société EDP RENEWABLES FRANCE est rejetée.

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No 11BX00648


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11BX00648
Date de la décision : 29/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis - Permis tacite - Existence ou absence d'un permis tacite - Absence.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : GUINOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-03-29;11bx00648 ?
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