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05/04/2012 | FRANCE | N°11BX02391

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 05 avril 2012, 11BX02391


Vu la requête, enregistrée le 26 août 2011, présentée pour M. Mohamed A, demeurant ... par Me Dujardin ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103396 du 25 juillet 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal Administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) de surseoir à statuer sur sa requête jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit pronon

cée sur sa nationalité ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de vérifier si des piè...

Vu la requête, enregistrée le 26 août 2011, présentée pour M. Mohamed A, demeurant ... par Me Dujardin ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103396 du 25 juillet 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal Administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) de surseoir à statuer sur sa requête jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur sa nationalité ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de vérifier si des pièces d'identité françaises ont été éditées à son nom, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne des sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2012 :

- le rapport de Mme Richer, président-rapporteur ;

- et les conclusions de M. Normand, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant de nationalité marocaine, fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé sa reconduite à la frontière ;

Considérant, en premier lieu, que Mme Françoise Souliman, secrétaire générale, qui a signé l'arrêté du 30 juin 2011, avait reçu délégation à cet effet par un arrêté préfectoral du 13 février 2009, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Haute-Garonne ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte attaqué manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté contesté, qui énonce les éléments de fait et de droit sur lesquels est fondée la reconduite à la frontière, est suffisamment motivé au regard des obligations découlant de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ; que sa motivation n'est pas de nature à révéler que le préfet se serait abstenu de procéder à l'examen de la situation personnelle du requérant ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 18 du code civil : " Est français l'enfant dont l'un au moins des parents est français " ; qu'aux termes de l'article 20-1 du même code : " La filiation de l'enfant n'a d'effet sur la nationalité de celui-ci que si elle est établie durant sa minorité. " ; qu'aux termes de l'article 22-1 de ce code : " L'enfant mineur dont l'un des deux parents acquiert la nationalité française, devient français de plein droit s'il a la même résidence habituelle que ce parent ou s'il réside alternativement avec ce parent dans le cas de séparation ou divorce. Les dispositions du présent article ne sont applicables à l'enfant d'une personne qui acquiert la nationalité française par décision de l'autorité publique ou par déclaration de nationalité que si son nom est mentionné dans le décret de naturalisation ou dans la déclaration " ; qu'aux termes de l'article 27-1 dudit code : " Les décrets portant acquisition, naturalisation ou réintégration, autorisation de perdre la nationalité française (...) n'ont point d'effet rétroactif " ; qu'il résulte des dispositions de l'article 30 du code civil que la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause, sauf s'il est titulaire d'un certificat de nationalité française et que l'exception de nationalité ne constitue, en vertu de l'article 29 du code civil, une question préjudicielle que si elle présente une difficulté sérieuse ;

Considérant que si M. A soutient que son père était français, il n'établit ni même n'allègue qu'il eût la nationalité française au jour de sa naissance ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il n'a entrepris aucune démarche pour reconnaître sa filiation ; que la filiation d'un enfant n'ayant d'effet sur sa nationalité que si elle est établie durant sa minorité, ainsi qu'il ressort des termes mêmes de l'article 20-1 précité, il ne saurait dès lors utilement se prévaloir de l'article 18 du code civil ; que, par ailleurs, il ne donne aucune précision permettant d'établir qu'il satisfaisait aux conditions énoncées à l'article 22-1 ; qu'en particulier, il n'établit pas qu'un décret portant acquisition de la nationalité française, naturalisation ou réintégration ait été pris avant la décision attaquée ; que, dès lors, le moyen tiré de l'exception de nationalité française, qui ne soulève aucune difficulté sérieuse, doit être écarté sans qu'il y ait lieu de poser une question préjudicielle à la juridiction judiciaire ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 7° Si l'étranger a fait l'objet d'un retrait de son titre de séjour ou d'un refus de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour, dans les cas où ce retrait ou ce refus ont été prononcés, en application des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, en raison d'une menace à l'ordre public (...) " ;

Considérant que pour prononcer la reconduite à la frontière de M. A, le préfet de la Haute-Garonne s'est fondé sur la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour prise à son encontre le 6 juin 2011 au motif que son comportement délictuel, sanctionné par de multiples condamnations pénales entre 1995 et 2010, constituait une menace pour l'ordre public ; qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant s'est rendu coupable à plusieurs reprises d'escroquerie, de contrefaçon ou falsification de chèque et usage de chèque falsifié ou contrefait, de vol, de menace de mort réitérée, de vol aggravé et enfin de prise de nom ou d'un accessoire du nom différent de l'état civil dans un acte public ou authentique ou dans un acte administratif, faits pour lesquels il a été condamné à six reprises à des peines d'emprisonnement allant de quatre mois à trois ans, une seule condamnation ayant été prononcée avec sursis ; que, dans ces conditions, le préfet a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que les faits sanctionnés faisaient regarder la présence en France de M. A comme étant une menace à l'ordre public de nature à justifier le refus de séjour et se fonder sur les dispositions de l'article L. 511-1 II 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour décider, par arrêté du 30 juin 2011, la reconduite à la frontière de l'intéressé ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au litige : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) " ;

Considérant, d'une part, que M. A soutient qu'il est né le 26 juillet 1971 au Maroc et qu'il est entré en France en 1973 à l'âge de 2 ans ; que, toutefois, il n'apporte aucun élément de nature à établir avec certitude son entrée en France en 1973 et sa résidence habituelle sur le territoire national depuis qu'il a atteint au plus l'âge de 13 ans ; que le certificat de scolarité établi le 25 juin 2009, duquel il ressort que le requérant a été scolarisé en France pour les années scolaires 1977-1978 et 1978-1979, ne constitue pas, à lui seul, une preuve suffisante permettant d'établir que M. A réside en France de manière habituelle depuis qu'il a l'âge de 13 ans ; que, d'autre part, si le requérant fait valoir qu'il est père de plusieurs enfants français dont Amal B, née le 23 septembre 1995, auprès de qui il dit avoir toujours été présent et à l'éducation et à l'entretien de laquelle il aurait participé, dans les limites de ses capacités financières, il n'établit, par aucune des pièces versées au dossier, contribuer effectivement à l'entretien et à l' éducation des enfants depuis leur naissance ou depuis au moins deux ans ; que, compte tenu de ce qui précède, M. A n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions susmentionnées du 2° et du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. " ; que, si M. A soutient qu'il réside en France depuis 1973, que ses frères et soeurs sont de nationalité française et qu'il n'a plus aucune attache avec son pays d'origine, il n'apporte aucun élément probant pour justifier ses allégations ; qu'il ne prouve pas résider de manière habituelle et continue en France depuis 1973 ; qu'il n'établit pas davantage entretenir des relations avec ses enfants de nationalité française ni avoir un lien de filiation avec les personnes qu'il présente comme étant des membres de sa fratrie ; qu'il ne démontre pas ne plus avoir d'attaches avec son pays d'origine ; que, par suite, eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du 30 juin 2011 n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels cette mesure a été prise ; que, dès lors, l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande aux fins d'annulation ; que le présent arrêt, qui rejette sa demande d'annulation, n'appelle lui-même aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions présentées en ce sens devant la cour doivent être rejetées ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 11BX02391 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX02391
Date de la décision : 05/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-02-01-03 Étrangers. Reconduite à la frontière. Légalité interne. Étrangers ne pouvant faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière. Parents d'enfants français résidant en france.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: Mme Michèle RICHER
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : DUJARDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-04-05;11bx02391 ?
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