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10/04/2012 | FRANCE | N°11BX01602

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 10 avril 2012, 11BX01602


Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2011, présentée pour M. Jacques A, demeurant ..., exploitant de l'entreprise LEHM par Me Guarrel ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07005412 en date du 9 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Lachapelle-Auzac, en date du 10 octobre 2007, mettant en demeure l'entreprise LEHM, de faire assurer, dans le délai de deux mois, l'élimination de 598 tonnes de pneumatiques usagés stockés sur le dépôt situé sur le territoire d

e ladite commune, aux-lieux-dits " Champs Grezié ", " Les Terrausses ", " Com...

Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2011, présentée pour M. Jacques A, demeurant ..., exploitant de l'entreprise LEHM par Me Guarrel ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07005412 en date du 9 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Lachapelle-Auzac, en date du 10 octobre 2007, mettant en demeure l'entreprise LEHM, de faire assurer, dans le délai de deux mois, l'élimination de 598 tonnes de pneumatiques usagés stockés sur le dépôt situé sur le territoire de ladite commune, aux-lieux-dits " Champs Grezié ", " Les Terrausses ", " Combel de las Cabres " et " Pas del Moles ", par un collecteur ou un éliminateur agréé ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) de condamner la commune de Lachapelle-Auzac à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 février 2012 :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Marie-Pierre Dupuy, rapporteur public ;

- et les observations de Me Guarrel, avocat de M. A ;

Considérant que l'entreprise exploitée par M. A sous l'enseigne LHEM, qui a notamment une activité de vente et de montage de pneumatiques, a confié, de 2000 à 2004, l'élimination des pneumatiques usagés à la SARL Le Goff Pneus ; que la liquidation judiciaire de cette société a été prononcée par un jugement du tribunal de commerce de Cahors du 7 mars 2005 ; que, par un arrêté du 8 décembre 2005, le préfet du Lot a mis en demeure le mandataire judiciaire à la liquidation de faire procéder à l'enlèvement des pneus usagés stockés par la SARL Le Goff Pneus sur son dépôt de Lachapelle-Auzac dans le délai de deux mois ; que l'actif disponible de l'entreprise ne permettant pas de donner suite à cette demande, le mandataire judiciaire a demandé au tribunal de commerce de désigner un expert afin de rechercher les derniers détenteurs des pneus constituant le stock existant et de déterminer pour chacun d'eux les quantités qui lui sont imputables ; que le juge commissaire à la liquidation a fait droit à cette demande par une ordonnance du 24 janvier 2006 et a désigné un expert-comptable, lequel a remis son rapport le 16 octobre 2006 ; que, selon ce rapport, le stock total de pneus usagés se trouvant sur l'ancien site d'exploitation de la société Le Goff Pneus s'élève à 17 000 tonnes, dont 598 tonnes peuvent être attribuées à l'entreprise LHEM ; que, par un arrêté en date du 10 octobre 2007, le maire de la commune de Lachapelle-Auzac a, sur le fondement des articles L. 541-1, L. 541-2 et L. 541-3 du code de l'environnement, mis en demeure cette entreprise de faire assurer, dans un délai de deux mois, l'élimination de ces 598 tonnes ; que M. A fait appel du jugement en date du 9 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 541-1-II du code de l'environnement : " Est un déchet au sens du présent chapitre tout résidu d'un processus de production, de transformation ou d'utilisation, toute substance, matériau, produit ou plus généralement tout bien meuble abandonné ou que son détenteur destine à l'abandon. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 541-2 du même code : " Toute personne qui produit ou détient des déchets dans des conditions de nature à produire des effets nocifs sur le sol, la flore et la faune, à dégrader les sites ou les paysages, à polluer l'air et les eaux, à engendrer des bruits et des odeurs et, d'une façon générale, à porter atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement, est tenue d'en assurer ou d'en faire assurer l'élimination conformément aux dispositions du présent chapitre. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 541-3 dudit code : " En cas de pollution des sols, de risque de pollution des sols, ou au cas où des déchets sont abandonnés (...) l'autorité titulaire du pouvoir de police peut, après mise en demeure, assurer d'office l'exécution des travaux nécessaires aux frais du responsable. (...) Est réputé abandon tout acte tendant, sous le couvert d'une cession à titre gratuit ou onéreux, à soustraire son auteur aux prescriptions du présent chapitre et des règlements pris pour son application " ; qu'il résulte des articles précités que le propriétaire ou le détenteur des déchets a la responsabilité de leur élimination ; que la seule circonstance qu'il a passé un contrat en vue d'assurer celle-ci ne l'exonère pas de ses obligations légales auxquelles il ne peut être regardé comme ayant satisfait qu'au terme de l'élimination des déchets ;

Considérant que, pour établir son rapport, lequel constitue une pièce du dossier même si les opérations d'expertise n'ont pas été contradictoires à l'égard de M. A, l'expert désigné par le tribunal de commerce a dû, après avoir évalué le stock total de pneus présent sur le site, et en l'absence d'inventaire permanent permettant d'identifier les pneus stockés en fonction de leur origine, déterminer la part du stock imputable à chaque entreprise qui avait eu recours aux services de la SARL Le Goff Pneus ; que le stock total a été évalué à un poids total de 17 000 tonnes correspondant à l'équivalent de 2 550 000 pneus de véhicules légers ; que cette évaluation n'est pas contestée ; que pour procéder à la répartition de ce stock entre les différentes entreprises concernées, l'expert a d'abord déterminé les quantités de pneus enlevées par la SARL Le Goff Pneus auprès des différentes entreprises en recourant à des grilles établies par ladite société à partir du dépouillement des bons d'enlèvement des pneus pour les années 1986 à 2004 et a recoupé ces données avec celles provenant des factures établies par la SARL Le Goff Pneus indiquant la " participation aux frais d'enlèvement " demandée à ces entreprises, en retenant pour effectuer ce recoupement un échantillon de sept entreprises, dont l'entreprise LEHM, représentant 60 % du total des enlèvements ; que ces recoupements ont permis, au moins pour quatre des sept entreprises, dont l'entreprise LEHM, de valider les données provenant des grilles de dépouillement ; que l'expert a ensuite évalué, à partir des enlèvements opérés sur la période 1986-2004, la durée de rotation des stocks à sept ans ; que seules les données afférentes aux sept dernières années d'enlèvements de pneus par la SARL Le Goff Pneus ont donc été prises en compte pour déterminer la part du stock imputable aux entreprises concernées ; que les quantités enlevées par la SARL Le Goff Pneus au cours de ces sept années s'élevant à 24 912 tonnes et les quantités de pneus stockées sur le site étant de 17 000 tonnes, le coefficient de 0,6825 a été appliqué aux quantités de pneus enlevées par chacune des entreprises clientes de la SARL Le Goff Pneus au cours de la même période afin de déterminer la part du stock pouvant leur être imputée ; que l'application de ce coefficient aux 876 tonnes de pneumatiques confiés par l'entreprise LEHM à la société Le Goff Pneus au cours de la période a permis de fixer à 598 tonnes les quantités de pneumatiques usagés qui, encore présents sur le site, devaient être imputés à cette entreprise ;

Considérant que la méthode utilisée par l'expert désigné par le tribunal de commerce était, compte tenu des éléments disponibles, à même de permettre une évaluation correcte des quantités de pneus stockés sur le site de la SARL Le Goff Pneus pouvant être attribuées aux entreprises qui avaient eu recours aux services de cette société ; qu'il ne ressort aucunement de l'instruction que les bons d'enlèvement à partir desquels ont été établies par la SARL Le Goff Pneus les grilles dont s'est notamment servi l'expert pour évaluer les quantités de pneus enlevées auprès de chaque entreprise étaient des documents distincts des " bordereaux de suivi des déchets industriels " (BDSI) dont fait état le requérant et qui permettent, pour chaque enlèvement de pneumatiques, d'identifier le producteur des déchets, le collecteur-transporteur et le destinataire chargé de les éliminer ainsi que les quantités concernées ; que si M. A soutient que les pneumatiques confiés à la SARL Le Goff Pneus par certaines entreprises, et notamment la société Michelin, auraient été seulement destinés au stockage et non à l'élimination, il ne le démontre pas en produisant un " mémorandum " établi le 24 septembre 2004 par la SARL Le Goff Pneus qui contient des informations contradictoires sur les obligations qu'avait cette dernière à l'égard de la société Michelin ; qu'il ne produit aucun élément permettant de penser que les obligations contractuelles de la SARL Le Goff Pneus à l'égard de l'entreprise LEHM étaient différentes de celles qu'elle avait à l'égard des autres entreprises et notamment de la société Michelin ; que, de plus, les BDSI établis pour les enlèvements effectués auprès de l'entreprise LEHM au cours des années 2002 et 2003, produits par le requérant en première instance, comportent, sous la rubrique " mode d'élimination finale ", des informations variables selon les périodes ; que l'affirmation contenue dans le courriel du 21 décembre 2009 adressé à Mme Machat par le sous-préfet de l'arrondissement de Gourdon, selon laquelle les bons d'enlèvement produits par la société Le Goff montrent qu'il n'y a " pas de stock provenant de LEHM dans la masse à enlever ", ne constitue pas, par elle-même, un élément de preuve de l'inexactitude des données prises en compte par l'expert ; qu'en définitive, ni les données sur lesquelles s'est fondé l'expert pour déterminer les quantités de pneus usagés que la SARL Le Goff Pneus a enlevées auprès de l'entreprise LEHM au cours des années 2000 à 2004, ni la durée de rotation du stock retenue par cet expert, ni la part pouvant au final revenir à l'entreprise LEHM dans le stock de pneus présents sur le site ne sont sérieusement contestées par M. A ; que, dans ces conditions, en fixant à 598 tonnes les quantités de pneumatiques usagés qui, présents sur le dépôt de la SARL Le Goff Pneus, devaient être éliminés par l'entreprise LEHM, le maire de Lachapelle-Auzac n'a pas commis d'erreur d'appréciation ; que le moyen tiré de ce que la commune aurait pu ou aurait dû, antérieurement à la liquidation judiciaire de la SARL Le Goff Pneus, mettre en oeuvre à son encontre une procédure de contravention de grande voirie est, en tout état de cause, inopérant pour contester l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que la commune de Lachapelle-Auzac n'étant pas la partie perdante, les conclusions de M. A tendant à sa condamnation au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne sauraient être accueillies ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. A à verser à la commune la somme qu'elle demande au titre de ce même article ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Lachapelle-Auzac au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 11BX01602


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX01602
Date de la décision : 10/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-035-05 Nature et environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : GUARREL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-04-10;11bx01602 ?
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