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02/05/2012 | FRANCE | N°09BX00227

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 02 mai 2012, 09BX00227


Vu la requête enregistrée le 23 janvier 2009, présentée par Me Courbis pour M. Michel A et pour Mme Dominique B épouse A, demeurant ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602492 du 5 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a, d'une part, rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux à leur verser la somme de 25 000 euros à titre de provision en réparation des conséquences dommageables de l'accident vasculaire cérébral dont M. A a été victime le 18 septembr

e 2003 et à la prescription d'une nouvelle expertise médicale et, d'autre par...

Vu la requête enregistrée le 23 janvier 2009, présentée par Me Courbis pour M. Michel A et pour Mme Dominique B épouse A, demeurant ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602492 du 5 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a, d'une part, rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux à leur verser la somme de 25 000 euros à titre de provision en réparation des conséquences dommageables de l'accident vasculaire cérébral dont M. A a été victime le 18 septembre 2003 et à la prescription d'une nouvelle expertise médicale et, d'autre part, mis à leur charge les frais d'expertise ;

2°) de condamner le CHU de Bordeaux à verser à M. A une somme de 25 000 euros à titre de provision à valoir sur la liquidation finale de leurs préjudices ;

3°) de réserver le préjudice moral et les préjudices matériels de Mme A ;

4°) d'ordonner une nouvelle expertise médicale aux frais du CHU de Bordeaux ;

5°) de mettre à la charge du CHU de Bordeaux le versement de la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu l'arrêté du 29 novembre 2011 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2012 :

- le rapport de M. Philippe Cristille,

- les conclusions de M. Pierre-Maurice Bentolila, rapporteur public,

- les observations de Me Michaud, avocat de l'ONIAM ;

Considérant que M. A, né en juin 1948, a été victime le 19 mars 2002 d'un accident vasculaire cérébral consécutif à une dissection de l'artère sylvienne droite, dont il n'a subsisté aucune séquelle motrice résiduelle ; qu'un traitement antiagrégant plaquettaire a été mis en place ainsi qu'un suivi médical ; qu'en août 2003, la survenue de troubles du rythme cardiaque a conduit à l'hospitalisation de M. A au service des urgences du centre hospitalier universitaire de Bordeaux où un flutter auriculaire a été diagnostiqué ; que le patient a été transféré dans le service de cardiologie du centre hospitalier où, devant l'échec des traitements médicamenteux, un traitement par choc électrique a permis de rétablir un rythme cardiaque normal ; que le patient a pu regagner son domicile le 22 août 2003 avec un traitement anticoagulant pour une durée de trois mois ; que M. A a présenté, cinq jours plus tard, une nouvelle symptomatologie se manifestant par des douleurs au thorax et à l'épigastre ; ces troubles ont conduit, de nouveau, à son hospitalisation au sein du service de cardiologie du centre hospitalier universitaire de Bordeaux pour un bilan d'angor d'effort ; que les médecins ont conclu, par défaut, à un spasme coronarien et placé le patient sous traitement antiagrégant plaquettaire à la place du médicament anticoagulant ; que le 4 septembre 2003, le patient a été transféré au centre de rééducation de Château-Lemoine (33) ; que le 18 septembre 2003, M. A a été victime d'un accident vasculaire cérébral avec hémiplégie droite consécutif à une occlusion de la carotide interne gauche par un embole ; qu'estimant que cet accident n'avait pu se produire qu'à la suite d'une erreur dans le choix du traitement qui avait été prescrit à M. A pendant son hospitalisation du 27 août au 4 septembre 2003 et maintenu à sa sortie, les époux A ont sollicité une expertise médicale qui a été ordonnée par le président du Tribunal administratif de Bordeaux le 22 septembre 2004 ; que l'expert désigné a déposé ses conclusions le 20 mai 2005 ; que par requête du 3 juillet 2006, M. et Mme A ont recherché la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Bordeaux devant le tribunal administratif à raison des conséquences dommageables de cet accident ; qu'ils relèvent appel du jugement du 5 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a, d'une part, rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Bordeaux à leur verser la somme de 25 000 euros à titre de provision en réparation des conséquences dommageables de l'accident vasculaire cérébral dont M. A a été victime le 18 septembre 2003, d'autre part, à la prescription d'une nouvelle expertise médicale et, enfin, à la condamnation du centre hospitalier à supporter les frais d'expertise ; que, par un avis du 6 avril 2011, la commission régionale de conciliation et d'indemnisation, que les requérants ont également saisie, après avoir diligenté deux expertises, a émis l'avis que la réparation des préjudices incombait à l'assureur du centre hospitalier à hauteur de 45 % ; que l'assureur du centre hospitalier n'ayant pas souhaité faire de proposition, M. et Mme A demandent, dans le dernier état de leurs écritures, à la Cour de condamner l'établissement hospitalier à verser à M. A la somme de 384 948,00 euros et à Mme A la somme de 114 592,34 euros en réparation des préjudices qu'ils ont subis à la suite de la faute du centre hospitalier consécutif à un choix thérapeutique erroné ; que la Caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde demande le remboursement des prestations servies à son assuré ; que l'ONIAM appelé à la cause en appel demande sa mise hors de cause ;

Sur la régularité de l'expertise ordonnée par les premiers juges :

Considérant qu'il n'est pas établi que l'expert aurait, en méconnaissance du principe du contradictoire, discuté des conclusions de l'expertise avec le médecin-conseil de l'assureur du centre hospitalier en dehors de la présence de M. A ou de ses représentants ; que rien dans le rapport de l'expert, dont les constatations ou conclusions peuvent, d'ailleurs, être discutées par les parties devant le juge administratif pour lequel elles ne constituent que des éléments d'information, ne permet de présumer de son absence d'impartialité ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Bordeaux :

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen tiré du défaut d'information :

Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.(...) " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des expertises prescrites par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation d'Aquitaine, qui ont donné lieu a deux rapports déposés le 17 février 2010 et le 4 novembre 2010, que l'arrêt du médicament anticoagulant décidé par les médecins du centre hospitalier universitaire de Bordeaux à partir du 27 août 2003 et prolongé après le 4 septembre 2003 a constitué, eu égard aux antécédents d'accident vasculaire cérébral ischémique présenté dix-huit mois plus tôt par le patient et à l'efficacité comparée, dans le cas de M. A, de l'utilisation d'un traitement anticoagulant par rapport à l'utilisation d'un traitement antiagrégant, un choix thérapeutique non conforme aux règles de l'art et aux données acquises de la science ; que ce choix thérapeutique, qui a insuffisamment protégé le patient du risque de survenue de l'accident vasculaire cérébral qui s'est réalisé, est ainsi constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Bordeaux ; que la circonstance invoquée par le centre hospitalier et tirée de ce que le patient a été pris en charge à sa sortie de l'hôpital, du 4 septembre 2003 au 18 septembre 2003, par le centre de rééducation de Château-Lemoine et que le cardiologue de ce centre a reconduit le traitement antiagrégant plaquettaire prescrit alors qu'il avait toute latitude pour modifier cette prescription, circonstance qui serait exonératoire de sa responsabilité, n'est pas susceptible d'être utilement invoquée, dès lors qu'il résulte de l'instruction que le centre de rééducation n'est qu'un service de soins de suite chargé d'appliquer les traitements institués par le centre hospitalier et que la prise en charge du patient y a été conforme aux données acquises de la science ; qu'il suit de là et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, que M. et Mme A sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux n'a pas retenu l'existence d'une faute du centre hospitalier universitaire de Bordeaux de nature à engager sa responsabilité à leur égard et rejeté les demandes indemnitaires dont il était saisi ; que par suite ce jugement doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, en l'état du dossier, d'évoquer et de statuer sur la demande de M. et Mme A présentée devant le tribunal administratif de Bordeaux et devant la Cour ;

Sur la personne publique débitrice des indemnités :

Considérant que l'ONIAM est fondé, en tout état de cause, à demander à être mis hors de cause, dès lors qu'il résulte des dispositions du II de l'article L. 1142 du code de la santé publique qu'il ne saurait y avoir lieu à réparation au titre de la solidarité nationale lorsque que la responsabilité de l'établissement de soins est engagée ;

Sur la fraction du préjudice réparable :

Considérant que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage constaté mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu ; que la réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ;

Considérant qu'il résulte des énonciations des rapports d'expertise versés au dossier que compte tenu de l'état de santé antérieur du patient qui présentait un flutter auriculaire, facteur d'accident embolique, de l'existence et de la persistance du risque de thromboembolie malgré l'utilisation d'un anticoagulant ainsi que des risques hémorragiques afférents à ce traitement s'il avait été prescrit, le choix thérapeutique d'administrer un traitement antiagrégant plaquettaire n'a entraîné pour M. A qu'une perte de chance d'échapper aux complications qui se sont produites ; que la réparation qui incombe à l'établissement public hospitalier doit, dès lors, être évaluée à une fraction du dommage déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; qu'il sera fait une juste appréciation de la chance perdue en la fixant à 40 % des différents chefs de préjudice ayant résulté de l'accident vasculaire cérébral dont a été victime M. A ;

Sur les droits à réparation de M A et le recours subrogatoire de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant du III de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 applicable aux événements ayant occasionné des dommages et n'ayant pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée et, par suite, à la présente affaire : " Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conservent contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après. / Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent les préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel. / Conformément à l'article 1152 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée. / Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice (...) " ;

Considérant qu'en application de ces dispositions le juge saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et de recours subrogatoires d'organismes de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices patrimoniaux et personnels, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime ; qu'il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge du ou des auteurs du dommage au titre du poste de préjudice en tenant compte, s'il a été décidé, du partage de responsabilité avec la victime ; que le juge doit allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste de préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale ;

Considérant qu'en l'absence de dispositions réglementaires définissant les postes de préjudice, il y a lieu, pour mettre en oeuvre cette méthode, de distinguer, parmi les préjudices de nature patrimoniale, les dépenses de santé, les frais liés au handicap, les pertes de revenus, l'incidence professionnelle et scolaire et les autres dépenses liées à ce dommage ; que parmi les préjudices personnels, sur lesquels l'organisme de sécurité sociale ne peut exercer son recours que s'il établit avoir effectivement et préalablement versé à la victime une prestation réparant de manière incontestable un tel préjudice, il y a lieu de distinguer, pour la victime directe, les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique et les troubles dans les conditions d'existence envisagées indépendamment de leurs conséquences pécuniaires ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial de M. A :

Quant aux dépenses de santé :

Considérant que M. A demande le remboursement de frais de séances d'ostéopathie pour des soins réalisés entre juillet 2004 et novembre 2004 pour un montant de 225 euros ; qu'il n'apporte, toutefois, aucune précision sur la nature des frais en cause et sur leur lien avec la faute commise ; qu'il y a lieu de rejeter la demande de M. A fondée sur ce chef de préjudice ;

Considérant que, d'une part, la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde justifie par une attestation de son médecin conseil de l'imputation aux conséquences dommageables du choix thérapeutique erroné, des dépenses de santé qu'elle a prises en charge au bénéfice de M. A et qui s'élèvent à la date du 17 juin 2010 à la somme globale de 134 214,55 euros comprenant les frais d'hospitalisation pour un montant de 38 236,14 euros, des frais médicaux et pharmaceutiques pour un montant de 4261,49 euros, des frais d'appareillage pour un montant de 518,32 euros, des frais de soins de rééducation pour un montant de 11 870,96 euros, des frais de soins d'orthophonie pour un montant de 4933,08 euros, des frais de soins infirmiers pour un montant de 27 704,84 euros et des frais de transport pour un montant de 46 689,72 euros ; que la perte de chance pour M. A d'échapper à ce préjudice étant fixée à 40 %, la caisse primaire d'assurance maladie, qui a pris en charge l'intégralité de ces frais, peut ainsi prétendre à une indemnité s'élevant à 40 % de leur montant soit 53 685,82 euros; qu'il y a lieu de lui accorder cette somme ;

Considérant que, d'autre part, l'état clinique neurologique de M. A, qui n'est pas susceptible d'amélioration, entraîne des dépenses de santé, au titre notamment de frais médicaux et pharmaceutiques et de frais de soins infirmiers, de kinésithérapie et d'orthophonie ; que la caisse primaire a évalué, en juin 2010, ces dépenses futures certaines à une somme de 56 394,61 euros ; que sa demande doit être regardée comme justifiée ; que, dans ces conditions, la perte de chance de subir le dommage étant estimée à 40 %, il y a lieu d'accorder à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, au titre des dépenses futures, une somme égale à 40 % de 56 394,61 euros soit 22 557,84 euros ; que le centre hospitalier sera condamné à rembourser ces frais sur présentation de justificatifs au fur et à mesure qu'ils seront exposés, dans la limite d'un montant de 22 557,84 euros ;

Quant aux frais liés au handicap

Considérant que M. A justifie avoir dû exposer, à raison de l'incapacité résultant des séquelles de l'hémiplégie, des dépenses d'aménagement de son logement pour un montant de 1 476 euros ainsi que des frais pour acquérir un téléphone adapté d'un montant de 99 euros et un équipement sportif d'entretien d'un montant de 2 935 euros ; qu'en revanche, il ne ressort pas de l'instruction que l'intervention d'un jardinier professionnel ait été rendue nécessaire par le seul état de M. A et présente ainsi un lien suffisamment direct avec celui-ci ; qu'il y a lieu donc d'allouer à M. A au titre des frais liés au handicap une somme totale de 4 510 euros ; que, compte tenu de la fraction de 40 % retenue ci-dessus, il y a lieu d'accorder à M. A une somme de 1 804 euros à ce titre ;

Considérant qu'à supposer que l'état de santé de M. A ait nécessité une l'assistance d'une tierce personne depuis sa sortie de l'hôpital et jusqu'à la date de la consolidation, le 30 août 2006, M. A qui reconnaît qu'une aide lui a été apportée par son épouse, ne justifie pas avoir effectivement et personnellement engagé la somme de 44 792 euros qu'il réclame ; que la demande présentée à ce titre par M. A, pour des dépenses passées, ne peut donc qu'être rejetée ;

Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction et notamment des différents rapports d'expertise que les séquelles dont M. A reste atteint rendent difficile l'accomplissement de nombreux gestes du quotidien ; qu'il sera fait une juste appréciation de ses besoins en assistance d'une tierce personne en les évaluant à deux heures quotidiennes, soit une heure par jour par une personne spécialisée et une heure par jour par une personne non spécialisée ; que M. A fait état d'un tarif horaire non excessif de 13 euros pour l'assistance non spécialisée et de 18 euros pour l'assistance spécialisée, qui doit être retenu à raison de 390 jours par an, congés payés et frais de gestion inclus ; que les frais futurs correspondant à l'assistance d'une tierce personne s'élèvent donc 12 090 euros par an ; que, dans les circonstances de l'espèce, ces montants annuels seront convertis sous la forme d'un capital ; qu'il y a lieu pour procéder à cette conversion de retenir le barème de capitalisation dit de la Gazette du Palais actualisé en mai 2011 ; que sur la base de ces éléments rapportés à une victime âgée de 58 ans à la date de la consolidation, le coefficient de capitalisation s'élève à 17,912 ; qu'il en résulte que la somme qui doit être mise à la charge du centre hospitalier au titre des frais d'assistance d'une tierce personne s'élève, sous cette forme, à 216 556,08 euros ; que M. A peut prétendre à une somme s'élevant à 40 % de ce montant soit 86 622,43 euros ;

Quant aux pertes de revenus :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde justifie avoir versé à M. A une somme de 31 510 euros au titre des indemnités journalières pour la période d'incapacité temporaire totale ou d'incapacité temporaire à 80 % couvrant différentes périodes du 18 septembre 2003 au 30 septembre 2009 et une somme de 39 606,63 euros au titre de la rente de pension d'invalidité pour la période du 1er octobre 2005 au 30 juin 2008 ; que, compte tenu de la fraction de 40 % retenue ci-dessus, il y a donc lieu d'accorder à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde la somme de 28 446,65 euros ;

Considérant que M. A n'apporte pas d'éléments justifiant la perte de revenus futurs liée à sa cessation d'activité à l'âge de 60 ans ; qu'ainsi le préjudice qu'il invoque, consécutif à la minoration de sa pension de retraite du fait de sa cessation prématurée d'activité, n'est pas certain et sera écarté ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et des rapports d'expertise que M. A a souffert pendant 6 mois d'une incapacité temporaire totale puis d'une incapacité temporaire partielle de 80 % pendant deux ans et quatre mois ; qu'il souffre depuis la consolidation de son état de santé fixée au 30 août 2006 d'une incapacité permanente partielle qui peut être évaluée à 70 % ; que les divers troubles apportés par ces incapacités aux conditions d'existence de M. A, âgé de 55 ans à la date de l'incident, lui ont causé un préjudice qui doit être évalué à 165 000 euros, préjudice sexuel compris ; que, compte tenu de la fraction de 40 % retenue ci-dessus, il y a lieu d'accorder à M. A une somme couvrant 40 % de ce montant, soit 66 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des différents rapports d'expertise qu'il sera fait une juste appréciation des souffrances endurées, chiffrées à 5/7, en évaluant à 10 000 euros les indemnités destinées à les réparer ; que M. A a ainsi droit au versement d'une indemnité correspondant à 40 % de cette somme soit 4 000 euros ; que l'accident vasculaire cérébral dont a souffert M. A est également à l'origine d'un préjudice esthétique important, lié notamment à une boiterie et aux signes d'hémiplégie visibles ; qu'il y a lieu, à ce titre, d'allouer à la victime une somme de 10 000 euros ; que compte-tenu de la fraction de perte de chance de 40 % retenue ci-dessus, le centre hospitalier doit être condamné à verser à M. A la somme de 4 000 euros à ce titre ;

Considérant que son incapacité permanente partielle interdit à M. A les activités sportives et de loisir qu'il pratiquait antérieurement ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice d'agrément ainsi subi par M. A en le fixant à la somme totale de 20 000 euros ; que, la perte de chance de ne pas subir ce préjudice étant fixée à 40 %, il y a lieu d'allouer à M. A la somme de 8 000 euros ;

En ce qui concerne les préjudices de Mme A :

Considérant que si Mme A fait état de pertes de revenus liées à l'invalidité de son époux qui l'aurait conduite à réduire son temps de travail pour se consacrer à ce dernier, elle n'apporte aucun élément concret de nature à établir que le préjudice financier qu'elle allègue serait en relation de causalité directe et exclusive avec l'état de santé de son époux ; qu'à cet égard, la seule production de la réponse datée du 2 janvier 2009 de l'employeur de Mme A à sa demande de diminution de son temps de travail, où au demeurant il n'est pas fait mention de sa situation familiale, ne saurait justifier la demande présentée à ce titre ;

Considérant, enfin, qu'il sera fait une juste appréciation des troubles subis par Mme A dans ses conditions d'existence, incluant le préjudice sexuel, en lui allouant la somme de 15 000 euros ; que Mme A a ainsi droit au versement d'une somme égale à 40 % de ce montant, soit 6 000 euros ;

Considérant que M. et Mme A ont droit à ce que les sommes qui leur sont allouées portent intérêts à compter du 22 avril 2010, comme ils le demandent ;

Sur le total des sommes dues par le centre hospitalier universitaire de Bordeaux :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux doit être condamné à verser à M. et Mme A une indemnité de 176426,43 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2010 et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde une somme de 82 132,47 euros pour ses débours ainsi qu'au titre des frais futurs une somme de 22 557,84 euros sur présentation de justificatifs ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant que les frais d'expertise ordonnée en référé par le tribunal administratif de Bordeaux, liquidés et taxés par ordonnance du président du tribunal administratif de Bordeaux du 31 mai 2005 à la somme de 500 euros doivent être mis à la charge du centre hospitalier universitaire de Bordeaux ;

Sur l'indemnité forfaitaire :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde a droit à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 997 euros auquel elle est fixée, à la date du présent arrêt, par l'arrêté interministériel du 29 novembre 2011 ; qu'il y a lieu de mettre la somme de 997 euros à la charge du centre hospitalier universitaire de Bordeaux ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstance de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Bordeaux une somme de 1 700 euros au profit de M. et Mme A et une somme de 500 euros au profit de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 0602492 en date du 5 novembre 2008 est annulé.

Article 2 : L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales est mis hors de cause.

Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Bordeaux est condamné à verser à M. et Mme A une somme de 176 426,43 euros. Cette somme portera intérêts à compter du 22 avril 2010.

Article 4 : Le centre hospitalier universitaire de Bordeaux est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde une somme de 82 132,47 euros et, sur justificatifs, une somme au titre des frais exposés dans le futur dans la limite de 22 557,84 euros. Il versera également à la caisse une somme de 997 euros au titre de l'indemnité forfaitaire.

Article 5 : Le centre hospitalier universitaire de Bordeaux supportera les frais d'expertise ordonnée en référé par le tribunal administratif de Bordeaux, liquidés et taxés à la somme de 500 euros.

Article 6 : Le centre hospitalier universitaire de Bordeaux versera une somme de 1 700 euros à M. et Mme A et une somme de 500 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus de la requête de M et Mme A et le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde devant la cour administrative d'appel et devant le tribunal administratif sont rejetés.

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N° 09BX00227


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