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22/05/2012 | FRANCE | N°10BX01945

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 22 mai 2012, 10BX01945


Vu la requête, enregistrée le 30 juillet 2010, présentée pour la société COUBRIS JLC, dont le siège est 90 rue Marcelin Jourdan à Bordeaux (33200), représentée par son gérant en exercice, par Me Coubris ;

La société COUBRIS JLC demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600586 du 27 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996 ;

2°) de prononcer la décharge des impos

itions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement des frais de procès e...

Vu la requête, enregistrée le 30 juillet 2010, présentée pour la société COUBRIS JLC, dont le siège est 90 rue Marcelin Jourdan à Bordeaux (33200), représentée par son gérant en exercice, par Me Coubris ;

La société COUBRIS JLC demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600586 du 27 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement des frais de procès engagés et non compris dans les dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi 95-858 du 28 juillet 1995 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 février 2012 :

- le rapport de M. Patrice Lerner, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Marc Vié, rapporteur public ;

- les observations de Me Coubris pour la société COUBRIS JLC ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de la société COUBRIS JLC, société à responsabilité limitée, qui a une double activité d'exploitant viticole et de marchand de biens, ayant porté sur les années 1994, 1995 et 1996, l'administration fiscale a procédé à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée selon la procédure de taxation d'office pour la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1995, la société ayant déposé avec retard ses déclarations, et selon la procédure de redressement contradictoire pour l'année 1996 ; que la société a contesté ces redressements qui portent sur la taxe collectée sur des recettes omises, qui ont été reconstituées après que le vérificateur a écarté la comptabilité comme dépourvue de valeur probante, sur la taxe collectée sur les encaissements des acomptes payés lors de la vente de vins en primeur, sur la taxe déduite pour l'achat d'immobilisations dont les factures n'avaient pas été produites et qui auraient dû, selon le service, être prises en charge par le nu-propriétaire des locaux et non par la société qui en avait l'usufruit et, enfin, sur la taxe grevant une facture d'honoraires du 31 décembre 1995 dont la charge déduite n'avait été justifiée ni dans son principe, ni dans son montant ;

Sur la recevabilité des conclusions d'appel :

Considérant que les conclusions présentées par la société COUBRIS JLC dans son mémoire enregistré au greffe de la cour le 21 mars 2011 tendant au remboursement d'un montant de 74 400 F qu'elle aurait omis de déduire sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ;

Sur la procédure d'imposition :

Considérant que la notification de redressement indique les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et détaille notamment les calculs qui ont conduit à la reconstitution de recettes notifiée et les motifs pour lesquels la taxe sur les ventes de vins en primeur est exigible lors de l'encaissement des acomptes ; que le moyen tiré d'une insuffisance de sa motivation doit être écarté ;

Considérant que la circonstance que le vérificateur aurait pris et conservé la photocopie d'un brouillon rédigé au recto d'une page de l'inventaire de stock ne saurait être considérée comme un emport irrégulier de document dès lors qu'il ne s'agissait pas d'un document comptable et que la société a conservé l'original ;

Considérant que l'avis d'imposition adressé le 21 décembre 2000 comporte, la nature des impositions, le montant, les indications requises par les dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales et indique pour chaque imposition la notification de redressements correspondante ; qu'à supposer, comme le soutient la société appelante, que cet avis n'ait pas été notifié par lettre recommandé avec accusé de réception, contrairement aux dispositions alors applicables de l'article L. 256 du même livre, cette irrégularité est sans incidence sur le bien-fondé des impositions, dès lors qu'il est constant que le contribuable a bien reçu cet avis ;

Considérant que la notification de redressements précise la nature des éléments recueillis dans le cadre du droit de communication ainsi que leur origine, la recette locale des douanes de Castelnau ; que le moyen tiré de ce que le contribuable n'aurait pas été informé de la teneur des renseignements ainsi recueillis et n'aurait pas eu la possibilité de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition, doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que le moyen tiré de ce que les redressements effectués à l'occasion de la vérification, tant en matière d'impôt sur les sociétés qu'en matière d'impôt sur le revenu, aient été dégrevés est, en tout état de cause, inopérant ;

En ce qui concerne les redressements effectués en raison de la reconstitution des recettes :

Considérant que l'administration a écarté comme non probante la comptabilité et reconstitué le chiffre d'affaires de la société ; que, pour rejeter la comptabilité, le vérificateur a notamment relevé que les stocks n'étaient pas valorisés en tenant compte du millésime de l'année de production mais globalement selon la méthode " premier entré premier sorti " et que, de même, un nombre significatif de factures des années redressées ne comportait pas la mention du millésime ; qu'en procédant ainsi la société interdisait toute reconstitution des mouvements physiques de marchandises et le récolement de ces mouvements avec les données qu'elle enregistrait en comptabilité ; que ces irrégularités étant suffisantes pour priver la comptabilité de l'appelante de valeur probante, c'est à bon droit que l'administration a reconstitué ses recettes ;

Considérant que, pour reconstituer le chiffre d'affaires, le vérificateur a déterminé un prix moyen de vente par millésime à partir des factures comptabilisées par la société et comportant cette mentions ; qu'il a reconstitué les quantités manquantes de produits vendus, pour chaque exercice et chaque millésime, en rapprochant le stock de fin d'année du stock de début d'année et en déduisant les factures de vente comptabilisées comportant l'indication du millésime ; qu'il n'a toutefois retenu que les omissions nettes, la minoration de certains stocks d'entrée étant déduite du volume des ventes ainsi reconstitué ; que la méthode suivie par l'administration n'est ni radicalement viciée, ni excessivement sommaire et se fonde sur des données pertinentes et propres à l'entreprise de nature à justifier les calculs auxquels elle a procédé ;

Considérant que si la société appelante fait valoir qu'en procédant ainsi, le vérificateur n'a pas pris en compte les ventes facturées et comptabilisées portant sur des vins non millésimés ou sur des vieux millésimes pour lesquels aucun stock n'était inscrit à l'inventaire, cette absence de prise en compte, est neutre au regard de la circonstance qu'aucun stock n'a été reconstitué pour ces vins pour être ajouté à l'actif de l'entreprise ;

Considérant que si la société appelante relève qu'elle aurait dû être taxée non sur les livraisons mais sur les encaissements, elle n'apporte aucun élément permettant de supposer que les produits pour lesquels un complément de recettes a été calculé par le vérificateur auraient fait l'objet d'une livraison différée due, par exemple, à une vente " en primeur " ;

Considérant, enfin, que s'agissant de l'exercice 1994, le vérificateur a également procédé à la détermination d'un complément de recettes d'un montant de 442 000 F hors taxe en comparant le stock d'entrée, le stock de sortie et les sorties déclarées à la recette locale des douanes durant l'année, chiffres qui lui ont permis de déterminer, par différence, des manquants bruts en sortie ; que la société requérante soutient, sans être contredite, que cette partie du redressement est erronée dès lors que n'ont été prises en compte que les seules sorties déclarées auprès de la recette des douanes de Castelnau alors qu'elle avait également déclaré des sorties auprès de la recette des douanes d'Ambarès pour une quantité de 390 hectolitres ; qu'il convient, dès lors, de faire droit sur ce point, à ses conclusions et de réduire la base des recettes reconstituées au titre de l'année 1994 de 442 000 F, soit au taux de 18,6 % un montant de taxe de 82 212 F ;

En ce qui concerne les redressements relatifs à la taxe sur la valeur ajoutée déduite au cours de l'année 1994 sur des achats d'immobilisations :

Considérant que la société produit, pour la première fois en appel, un ensemble de 26 factures justifiant, selon elle, le montant de taxe sur la valeur ajoutée de 146 878 F dont la déduction avait été refusée par le vérificateur au titre de l'année 1994 ; que ce dernier avait toutefois accepté, par la voie de la compensation, de déduire de ce montant, une somme de 74 400 F dont la récupération avait été omise au titre de la même année ; que le montant de ce chef de redressement s'élevait ainsi à un montant net de 72 478 F ;

Considérant que, ainsi que le ministre du budget le relève en défense, parmi ces 26 factures produites ne peuvent être considérées comme des justificatifs probants la pièce n°1, facture de la société Via Casa, dont les chiffres sont incohérents, la pièce n°3, facture de la société Next Destination, la pièce n°8, facture du fournisseur Boulanger et la pièce n°9, facture du fournisseur Metro, dont les libellés n'indiquent pas qu'elles concernent la société appelante et qui portent une adresse qui n'est pas la sienne, la pièce n°15 dont le libellé " annule et remplace la facture adressée au cabinet Coubris " est ambigu et pour laquelle aucun paiement n'est mentionné, la pièce n°20 qui est un bon de commande, la pièce n°24, facture d'acompte du fournisseur Bernard A, dont le libellé ne précise pas la nature et le lieux des travaux pour lesquels cet acompte est demandé, les pièces n°12, 13, 14, 18 et 19, factures des fournisseurs B, C, et D dont aucun élément ne permet d'affirmer qu'elles concernent des travaux effectués sur le siège social de la société appelante ; qu'en revanche, la seule circonstance que les pièces n°21 facture du fournisseur Feralu qui comporte l'adresse de la société Coubris JLC, n°22 et n°23 factures du fournisseur E soient datées des 27 et 30 décembre ne saurait les faire regarder comme non probantes ; qu'ainsi, même en écartant, pour les raisons précédemment énumérées, les pièces n°1, 3, 8, 9, 12, 13, 14, 15, 18, 19, 20 et 24, comme n'ouvrant pas droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui les a grevées, la société justifie encore d'un montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible de 88 258 F supérieur au montant de 72 478 F redressé et dont elle est fondée, pour ce motif, à demander la décharge ;

En ce qui concerne le rappel de taxe ayant grevé une facture d'honoraires :

Considérant que la société ayant été taxée d'office au titre de l'année 1995, pour n'avoir pas souscrit dans le délai légal les déclarations qu'elle était tenue de déposer, les moyens relatifs à la procédure d'imposition sont inopérants à l'appui de la demande de décharge du redressement d'un montant de 39 346 F portant sur la taxe sur la valeur ajoutée déduite sur une facture d'honoraires administratifs et relative à cette année ; que la société ne développant aucun moyen critiquant le bien-fondé du redressement, sa contestation sur ce point doit être rejetée ;

En ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée opéré au titre de l'année 1996 portant sur les encaissements d'acomptes pour des ventes de vins en primeur :

Considérant qu'aux termes de l'article 269 du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l'espèce : " 1 Le fait générateur de la taxe se produit : a) Au moment où la livraison, l'achat au sens du 10° de l'article 257, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; (...) 2 La taxe est exigible : a) Pour les livraisons (...) lors de la réalisation du fait générateur ; (...) " ; qu'en vertu du 2° du I de l'article 298 bis du même code applicable aux exploitants agricoles soumis au régime simplifié, l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée due à raison des ventes effectuées intervient lors de l'encaissement des acomptes ou du prix ; qu'en application de ces dispositions, la taxe sur la valeur ajoutée est exigible dès l'encaissement d'acomptes sur des ventes de vin en primeur et alors même que la livraison des vins vendus en primeur et donc le fait générateur de la taxe ne sont pas intervenus ; que, par suite, l'administration pouvait légalement rappeler la taxe sur la valeur ajoutée sur le montant de 1 195 807 F des acomptes encaissés en 1996 qu'elle a chiffrée à la somme de 187 538 F ; que la société COUBRIS JLC fait valoir que ce redressement entraîne une double imposition, les ventes pour lesquelles les acomptes encaissés ont été redressés ayant été déclarés pour la totalité de leur prix, et pas seulement pour le solde restant à payer, dans le chiffre d'affaires de l'année 1997 et la taxe sur la valeur ajoutée y afférente payée, cette même année, sur la totalité de ce prix ; que, toutefois, si cette circonstance, à la supposer établie, permettait à la société, soit de régulariser la taxe acquittée à tort, soit de présenter une réclamation contentieuse pour en demander la restitution, elle n'entraîne pas l'irrégularité du redressement opéré au titre de l'année 1996 ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société COUBRIS JLC est seulement fondée à demander la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge à hauteur de 154 690 F (23582 euros) au titre de l'année 1994 ainsi que des pénalités dont il a été assorti ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat, qui n'est pas pour l'essentiel la partie perdante, à payer à la société COUBRIS JLC la somme que celle-ci demandent au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La société COUBRIS JLC est déchargée du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie à hauteur de 154 690 F (23 582 euros) au titre de l'année 1994 ainsi que des pénalités dont il a été assorti.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 27 mai 2010 est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société COUBRIS JLC est rejeté.

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N°10BX01945


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX01945
Date de la décision : 22/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: M. Patrice LERNER
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : COURBIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-05-22;10bx01945 ?
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