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12/07/2012 | FRANCE | N°11BX01854

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 12 juillet 2012, 11BX01854


Vu la requête, enregistrée le 25 juillet 2011 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 27 juillet 2012, présentée pour M. Sovannova X, demeurant ..., par Me Laspalles ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100606 du 19 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 31 décembre 2010 portant refus de délivrance de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et décision fixant le Cambodge comme pays de renvoi ;



2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne ...

Vu la requête, enregistrée le 25 juillet 2011 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 27 juillet 2012, présentée pour M. Sovannova X, demeurant ..., par Me Laspalles ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100606 du 19 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 31 décembre 2010 portant refus de délivrance de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et décision fixant le Cambodge comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2012 :

- le rapport de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

Considérant que M. X, de nationalité cambodgienne, est entré irrégulièrement en France, selon ses dires le 5 octobre 2004 et a sollicité le 5 janvier 2005 le bénéfice de l'asile ; que sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 11 mars 2005, confirmée le 9 novembre 2005 par la Commission de recours des réfugiés ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ayant rejeté une nouvelle demande le 29 février 2008, dans le cadre de la procédure prioritaire, le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre le 15 avril 2008, une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, confirmée par le tribunal administratif de Toulouse le 18 septembre 2008, puis par cette cour le 27 octobre 2009 ; que M. X relève appel du jugement du 19 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 31 décembre 2010 portant refus de délivrance de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et décision fixant le Cambodge comme pays de renvoi ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

Considérant que la décision portant refus de séjour énonce les considérations de droit et de faits qui en constituent le fondement et est par suite suffisamment motivée ; que cette motivation révèle que le préfet de la Haute-Garonne a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. X ;

Considérant que, comme l'ont jugé les premiers juges, le courrier du 18 février 2010 adressé par le conseil du requérant au préfet de la Haute-Garonne ne se borne pas à demander la délivrance d'un formulaire de demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié, mais expose les raisons qui justifieraient une telle admission et fait mention, en tant que pièce jointe, d'une promesse d'embauche ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le préfet l'a regardé comme une demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si le requérant soutient qu'il n'a pas été mis en mesure de présenter des pièces complémentaires, dont au demeurant il ne précise pas la teneur, il ne ressort pas des pièces du dossier, et en particulier de la motivation de la décision contestée, que le préfet, qui refusait à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour pour la troisième fois, aurait été dans l'ignorance de la situation du requérant à la date du 31 décembre 2010 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; que M. X fait valoir qu'il réside en France depuis plus de six ans, que son frère a la nationalité française et sa soeur une carte de résident et qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche ; que, toutefois, compte tenu des conditions du séjour de l'intéressé en France, et de la circonstance qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Cambodge, où il a vécu jusqu'à l'âge de 41 ans et où résident ses deux enfants, le refus de séjour qui lui a été opposé n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes raisons, l'arrêté contesté n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. X ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l' entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 (...) " ;

Considérant que l'article L. 313-14 précité définit pour les personnes qui ne satisfont pas aux conditions fixées par le code pour la délivrance des cartes de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 313-11 ou portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 et qui sollicitent leur régularisation, un régime d'admission exceptionnelle au séjour en France ; que ces mêmes dispositions permettent la délivrance de deux titres de séjour de natures différentes que sont, d'une part, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et, d'autre part, depuis l'intervention de l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007, la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " " sur le fondement du troisième alinéa " de l'article L. 313-10 ; que par cette référence au troisième alinéa de l'article L. 313-10, le législateur a entendu, ainsi qu'il ressort des travaux parlementaires préalables à l'adoption de la loi du 20 novembre 2007, limiter le champ de l'admission exceptionnelle à la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " aux cas dans lesquels cette admission est sollicitée pour exercer une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national, laquelle, aujourd'hui, est annexée à l'arrêté des ministres chargés de l'emploi et de l'immigration du 18 janvier 2008 ; qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il réside en France depuis plus de six ans, que son frère a la nationalité française et sa soeur une carte de résident et qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche, ces circonstances ne suffisent pas à faire regarder l'intéressé comme devant bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour pour des raisons humanitaires ou au regard de motifs exceptionnels ; qu'en outre, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, si M. X se prévaut d'une promesse d'embauche en qualité d'aide cuisinier dans un restaurant, il ne justifie d'aucune promesse d'embauche ou de contrat lui permettant d'exercer une activité figurant dans la liste des métiers ouverts aux étrangers en Aquitaine par l'arrêté du 18 janvier 2008 susvisé, pour lesquels la situation de l'emploi n'est pas opposable ; que, dans ces conditions, le préfet a pu légalement se fonder sur l'absence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels pour refuser de délivrer à M. X un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision contestée, qui reprennent ce qui a été précédemment développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs, ainsi que celui tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation (...) " ; que par suite le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivée en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) " ; qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que la décision contestée, qui relève que l'intéressé a été débouté de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides à deux reprises, et qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine est suffisamment motivée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ; que si M. X fait valoir qu'il est recherché dans son pays en raison de sa participation à deux manifestations en faveur des droits de l'homme, il ne produit aucun élément probant de nature à établir qu'il encourrait des risques le visant personnellement en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise en violation des stipulations précitées ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions susvisées doivent dès lors être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. X doivent dès lors être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

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N° 11BX01854


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX01854
Date de la décision : 12/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : LASPALLES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-07-12;11bx01854 ?
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