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26/07/2012 | FRANCE | N°10BX02109

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 26 juillet 2012, 10BX02109


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 13 août 2010, et le mémoire complémentaire, enregistré le 18 avril 2011, présentés pour M. Jean-Benoît A, demeurant ..., par la SCP Malherbe Tugas ;

M. B demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801791 du 30 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 23 juillet 2008 par laquelle le conseil municipal de Biarritz a autorisé le maire de la commune à signer le contrat de partenariat public-privé pour la réalisation de la

Cité du Surf et de l'Aquarium du Musée de la Mer ;

2°) d'annuler ladite délibé...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 13 août 2010, et le mémoire complémentaire, enregistré le 18 avril 2011, présentés pour M. Jean-Benoît A, demeurant ..., par la SCP Malherbe Tugas ;

M. B demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801791 du 30 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 23 juillet 2008 par laquelle le conseil municipal de Biarritz a autorisé le maire de la commune à signer le contrat de partenariat public-privé pour la réalisation de la Cité du Surf et de l'Aquarium du Musée de la Mer ;

2°) d'annuler ladite délibération ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Biarritz le paiement d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance fixant en dernier lieu la clôture de l'instruction au 5 septembre 2011 à 12h00 ;

Vu la directive 2004/18 CE du parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 ;

Vu les décisions 2003-473 DC du 26 juin 2003, 2004-506 DC du 2 décembre 2004 et n° 2008-567 DC du 24 juillet 2008 du Conseil constitutionnel ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marché publics ;

Vu le décret n°93-1268 du 29 novembre 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2012 :

- le rapport de M. Antoine Bec, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;

- les observations de Me Claude, avocat de la commune de Biarritz ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 11 juin 2012, présentée pour la commune de Biarritz ;

Considérant que M. B demande à la cour d'annuler le jugement du 30 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 23 juillet 2008 du conseil municipal de Biarritz autorisant le maire à signer avec la société en nom collectif Biarritz Océan un contrat de partenariat public/privé pour la réalisation de la Cité du Surf et l'extension de l'Aquarium du Musée de la Mer ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Biarritz :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 "La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge."

Considérant que la requête d'appel de M. B comporte une critique de l'appréciation portée par le tribunal administratif de Pau sur la régularité de l'avis émis par la commission consultative des services publics locaux ; qu'elle ne peut ainsi être regardée comme la seule reproduction littérale du mémoire présenté par celui-ci devant le tribunal administratif de Pau ; qu'elle énonce, à nouveau, de manière précise, les critiques adressées à la délibération dont il avait demandé l'annulation au tribunal administratif ; qu'une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 87 précité du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Biarritz doit être rejetée ;

Sur la légalité de la délibération du conseil municipal de Biarritz en date du 23 juillet 2008 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1414-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 17 juin 2004, applicable en l'espèce : "Les contrats de partenariat sont des contrats administratifs par lesquels la personne publique confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale relative au financement d'investissements immatériels, d'ouvrages ou d'équipements nécessaires au service public, à la construction ou transformation des ouvrages ou équipements, ainsi qu'à leur entretien, leur maintenance, leur exploitation ou leur gestion, et, le cas échéant, à d'autres prestations de services concourant à l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée (... ) Le cocontractant de la personne publique assure la maîtrise d'ouvrage des travaux à réaliser. Il peut se voir confier tout ou partie de la conception des ouvrages.(...)" ; que l'article L. 1414-2 du même code dispose : "Les contrats de partenariat ne peuvent être conclus que pour la réalisation de projets pour lesquels une évaluation à laquelle la personne publique procède avant le lancement de la procédure de passation : a) Montre ou bien que, compte tenu de la complexité du projet, la personne publique n'est pas objectivement en mesure de définir seule et à l'avance les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d'établir le montage financier ou juridique du projet, ou bien que le projet présente un caractère d'urgence ; - b) Expose avec précision les motifs de caractère économique, financier, juridique et administratif, qui l'ont conduite, après une analyse comparative, notamment en termes de coût global, de performance et de partage des risques, de différentes options, à retenir le projet envisagé et à décider de lancer une procédure de passation d'un contrat de partenariat. En cas d'urgence, cet exposé peut être succinct. "; qu'aux termes de l'article L.1414-5 dudit code: "Si, compte tenu de la complexité du projet, la personne publique est objectivement dans l'impossibilité de définir les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d'établir le montage financier ou juridique du projet, elle indique dans l'avis qu'il sera recouru à une phase de dialogue dans les conditions prévues à l'article L. 1414-7. " ; que selon l'article L 1414-13 dudit code : " Lorsqu'un contrat de partenariat confie au cocontractant tout ou partie de la conception des ouvrages, les dispositions suivantes sont applicables:a) Parmi les conditions d'exécution du contrat retenues par la personne publique contractante, figure l'obligation d'identifier une équipe de maîtrise d'oeuvre chargée de la conception des ouvrages et du suivi de leur réalisation ; b) Les offres comportent nécessairement, pour les bâtiments, un projet architectural ; c) Parmi les critères d'attribution du contrat figure nécessairement la qualité globale des ouvrages. Lorsque la personne publique ne confie au cocontractant qu'une partie de la conception des ouvrages, équipements ou biens immatériels, elle peut elle-même, par dérogation aux dispositions du quatrième alinéa de l'article 7 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée, faire appel à une équipe de maîtrise d'oeuvre pour la partie de la conception qu'elle assume."

Considérant que le contrat de partenariat constitue une dérogation au droit commun de la commande publique, réservée aux seules situations répondant aux motifs d'intérêt général les justifiant ; que répondent à un tel motif, outre l'urgence qui s'attache à la réalisation du projet, sa complexité, entendue comme mettant objectivement la personne publique dans l'impossibilité de définir, seule et à l'avance, les moyens techniques répondant à ses besoins ou d'établir le montage financier ou juridique du projet ; que l'incapacité objective de la personne publique à définir seule ces moyens doit résulter de l'inadaptation des formules contractuelles classiques à apporter la réponse recherchée ; que la démonstration de cette impossibilité incombe à la personne publique, et ne saurait se limiter à l'invocation des difficultés inhérentes à tout projet ; qu'à cet égard, ni le rapport final d'évaluation préalable, ni l'avis de la mission d'appui au partenariat public privé ne sauraient constituer, devant le juge, la preuve de la complexité invoquée ; que la possibilité ouverte à la collectivité publique par l'article L. 1414-13 de ne confier à son cocontractant qu'une partie de la conception de l'ouvrage ne saurait la dispenser de justifier de son incapacité à mener à son terme la part de l'ouvrage réalisée en partenariat, du fait de sa complexité ;

Considérant, en premier lieu, que, début 2008, la commune de Biarritz avait arrêté le projet d'une "cité du surf et de l'océan" incluant tant les aspects architecturaux et scénographiques que financiers de l'opération ; qu' ultérieurement, la commune a modifié son projet afin d'y associer l'extension du musée de la mer et, invoquant sa complexité, a décidé de recourir à la procédure du partenariat public privé institué par l'ordonnance du 17 juin 2004 et repris aux articles 1414-1 et suivants du code général des collectivités territoriales; que l'article 1er du règlement de consultation du contrat de partenariat, relatif à l'objet du contrat, indique expressément qu'en ce qui concerne la cité du surf et de l'océan, le cocontractant devra reprendre le contrat de maîtrise d'oeuvre conclu par la ville de Biarritz portant sur le bâtiment et la scénographie, lequel inclut la conception du projet et le suivi de sa réalisation ; que ce contrat a donné lieu à l'établissement, pour la conception architecturale, d'un avant-projet détaillé, annexé au programme fonctionnel, et des études de projet, remis par la personne publique à chaque candidat avant le début de la phase 2 et devant lui servir à établir ses propositions ; que, selon la définition qu'en donne le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993, les études de projet ont pour objet de préciser par des plans, coupes et élévations, les formes des différents éléments de la construction, la nature et les caractéristiques des matériaux et les conditions de leur mise en oeuvre, de déterminer l'implantation, et l'encombrement de tous les éléments de structure et de tous les équipements techniques, de préciser les tracés des alimentations et évacuations de tous les fluides, d'établir un coût prévisionnel des travaux décomposés par corps d'état, sur la base d'un avant-métré, de permettre au maître de l'ouvrage, au regard de cette évaluation, d'arrêter le coût prévisionnel de la réalisation de l'ouvrage et, par ailleurs, d'estimer les coûts de son exploitation et enfin, de déterminer le délai global de réalisation de l'ouvrage ; que les études d'avant projet définitif ont pour objet de déterminer les surfaces détaillées de tous les éléments du programme, d'arrêter en plans, coupes et façades les dimensions de l'ouvrage, ainsi que son aspect, de définir les principes constructifs, les matériaux et les installations techniques, d'établir l'estimation définitive du coût prévisionnel des travaux, décomposés en lots séparés, de permettre au maître de l'ouvrage d'arrêter définitivement le programme, et de permettre l'établissement du forfait de rémunération dans les conditions prévues par le contrat de maîtrise d'oeuvre ; qu'au regard du stade d'avancement du projet, la commune de Biarritz ne saurait donc être regardée comme ayant été dans l'impossibilité de définir, seule et à l'avance, les moyens techniques répondant à ses besoins ou d'établir le montage financier ou juridique du projet, au sens de l'article L. 1414-2 du code précité, sans que la possibilité de conserver une partie de la conception de l'ouvrage ouverte par l'article L 1414-13 du code général des collectivités territoriales précité ne permette à la commune de s'affranchir de la démonstration de cette impossibilité;

Considérant, en deuxième lieu, que, s'agissant du musée de la mer, l'article L. 1414-7 du code général des collectivités territoriales dispose que" Sur la base du programme fonctionnel qu'elle a établi, la personne publique engage un dialogue avec chacun des candidats, dont l'objet est de définir les moyens techniques et le montage juridique et financier les mieux à même de répondre à ses besoins. (...) La personne publique poursuit les discussions avec les candidats jusqu'à ce qu'elle soit en mesure d'identifier la ou les solutions, au besoin après les avoir comparées, qui sont susceptibles de répondre à ses besoins." ; que l'article 1er du règlement de consultation prévoit que les exigences, performances et besoins auxquelles doit répondre la solution présentée par chaque candidat sont décrits dans le programme fonctionnel et ses annexes, arrêtés par la personne publique ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les caractéristiques techniques, fonctionnelles et économiques des ouvrages correspondant aux exigences, performances et besoins décrits dans le programme fonctionnel établi par la commune de Biarritz présenteraient un degré de complexité tel qu'ils n'auraient pu être définis qu'à l'issue de la phase de dialogue prévue par l'article L. 1414-7 précité, et, faisant ainsi obstacle au recours aux formules contractuelles classiques, aurait justifié de déroger au droit commun de la commande publique ; que, par de simples allégations quant à la taille du nouveau bassin, la nécessité de travaux souterrains, la proximité d'autres ouvrages, et la présence du public, la commune n'établit pas non plus que les difficultés techniques présentées par la rénovation du musée de la mer excéderaient sa capacité à définir les moyens techniques répondant à ses besoins ;

Considérant, ensuite, que les perspectives de rapprochement des deux entités, présentées comme une source de rationalisation et de simplification, par le développement des synergies qu'impliquerait ce rapprochement, ne sont pas non plus de nature à conférer à cet ensemble un degré de complexité tel qu'il mettrait la commune dans l'impossibilité de définir les moyens techniques, financiers ou juridiques nécessaires ;

Considérant, enfin, qu'il résulte du règlement de consultation que la commune de Biarritz avait réuni les concours financiers nécessaires à la réalisation de l'opération, en complément de son propre apport, et les a transmis à son cocontractant ; qu'à cet égard, la commune ne saurait donc être regardée comme s'étant trouvée dans l'impossibilité d'établir le montage financier du projet ; que, dès lors, la délibération du 23 juillet 2008, par laquelle le conseil municipal de Biarritz a autorisé le maire à signer avec la société en nom collectif Biarritz Océan un contrat de partenariat public/privé pour la réalisation de la Cité du Surf et l'extension de l'Aquarium du Musée de la Mer, est intervenue en violation de l'article L. 1414-2 du code général des collectivités territoriales, et doit, par suite, être annulée ;

Considérant que l'annulation de la délibération est sans influence sur la validité du contrat ; que le règlement de consultation prévoit que les concours bancaires consentis aux cocontractants doivent l'être à titre irrévocable ; que, par suite, si la commune soutient que l'annulation de la délibération litigieuse porterait une atteinte excessive à un intérêt public, notamment en ce qu'elle serait de nature à remettre en cause les concours bancaires consentis à son contractant et constituerait ainsi une cause de résiliation du marché, elle ne l'établit pas ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune de Biarritz à verser à M. A la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que M. A n'étant pas, dans la présente instance, la partie qui succombe, les conclusions de la commune de Biarritz tendant à ce qu'il soit condamné à lui verser une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 30 juin 2010 et la délibération du conseil municipal de Biarritz en date du 23 juillet 2008 sont annulés.

Article 2 : La commune de Biarritz versera à M. A la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Biarritz tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 10BX02109


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX02109
Date de la décision : 26/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JACQ
Rapporteur ?: M. Antoine BEC
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : SCP MALHERBE TUGAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-07-26;10bx02109 ?
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