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26/07/2012 | FRANCE | N°11BX03138

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 26 juillet 2012, 11BX03138


Vu, I, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 2 décembre 2011, sous le numéro 11BX03138, présentée par le PREFET DE L'INDRE ;

Le PREFET DE L'INDRE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101273 du 3 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Limoges a, à la demande de Mme Priscille A épouse B, annulé l'arrêté en date du 23 juin 2011 rejetant la demande de titre de séjour de celle-ci et assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et condamné l'Etat à lui verser la somme de 1 100 euros au titre de l'artic

le L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de...

Vu, I, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 2 décembre 2011, sous le numéro 11BX03138, présentée par le PREFET DE L'INDRE ;

Le PREFET DE L'INDRE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101273 du 3 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Limoges a, à la demande de Mme Priscille A épouse B, annulé l'arrêté en date du 23 juin 2011 rejetant la demande de titre de séjour de celle-ci et assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et condamné l'Etat à lui verser la somme de 1 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de Mme A devant le tribunal administratif de Limoges ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2012 :

- le rapport de M. Jean-Emmanuel Richard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;

Considérant que le PREFET DE L'INDRE fait appel du jugement du 3 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Limoges a, à la demande de Mme A épouse B, annulé l'arrêté en date du 23 juin 2011 rejetant la demande de titre de séjour de l'intéressée et assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français, et condamné l'Etat à verser la somme de 1 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant que les requêtes enregistrées sous les numéros 11BX03138 et 12BX00160 sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt ;

En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 211-2-1 dudit code : " (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " et qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " la commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-1 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (... ) ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls ressortissants étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les ressortissants étrangers qui se prévalent de ces dispositions et d'autre part, que la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à un étranger marié avec un ressortissant français est subordonnée aux conditions énoncées par les dispositions combinées du 4° précité de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 311-7 du même code qui exigent notamment la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; qu'en outre, en application de l'article L. 211-2-1 dudit code, seuls les étrangers entrés régulièrement en France sont admis à présenter une demande de visa de long séjour à l'autorité préfectorale dans les conditions prévues par cet article ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, Mme A ne justifiait ni de la possession d'un visa obtenu régulièrement des autorités grecques, ni d'une entrée régulière en France ; que, dans ces conditions, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, Mme A ne remplissait pas les conditions fixées par les dispositions combinées de l'article L. 311-7 et du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour l'obtention, de plein droit, d'une carte de séjour temporaire en qualité de conjoint d'une ressortissante française ; que, par suite, le PREFET DE L'INDRE n'était pas tenu de soumettre sa situation à la commission du titre de séjour ; qu'en conséquence, le PREFET DE L'INDRE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé, pour vice de procédure en l'absence de consultation de la commission du titre de séjour, la décision du 23 juin 2011 refusant de délivrer un titre de séjour à Mme A ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme A, tant devant le tribunal administratif de Limoges que devant la cour ;

Considérant que M. C, secrétaire général de la préfecture de l'Indre, qui a signé l'arrêté attaqué, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de l'Indre en date du 6 décembre 2010, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture le 9 décembre 2010, à l'effet notamment de signer les décisions de refus de séjour ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée manque en fait ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que Mme A soutient que la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle dès lors qu'elle s'est mariée le 22 mai 2011 avec M. B, ressortissant français ; que, toutefois, il ressort de l'ensemble des pièces du dossier, eu égard au caractère très récent de son entrée en France et de son mariage ainsi qu'à la circonstance qu'elle pourrait solliciter un visa "conjoint de français" dès son retour dans son pays d'origine où résident ses trois enfants, nés en 1997, 2004 et 2007, et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 35 ans, que l'arrêté attaqué ne porte pas au droit de Mme A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, cette décision ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant que Mme A n'établit pas l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de la violation de ces dispositions doit ainsi être écarté ;

En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) " ; qu'un refus de titre de séjour ayant été opposé à l'intimée, la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte ;

Considérant que, ainsi qu'il a été dit, l'intimée n'est pas fondée à soutenir que la décision, par laquelle le PREFET DE L'INDRE lui a refusé le titre de séjour, a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait elle-même entachée d'illégalité, doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2011 du PREFET DE L'INDRE ;

Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution :

Considérant que le présent arrêt statue au fond sur les conclusions du PREFET DE L'INDRE ; que par suite, les conclusions du préfet tendant au sursis à exécution du jugement attaqué ont perdu leur objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction, sous astreinte :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de l'intimée tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions de Mme A aux fins d'injonction sous astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 3 novembre 2011 est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête 12BX00160 présentée par le PREFET DE L'INDRE.

Article 3 : La demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Limoges et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

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Nos 11BX03138, 12BX00160


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. JACQ
Rapporteur ?: M. Jean-Emmanuel RICHARD
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : FENZE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 26/07/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11BX03138
Numéro NOR : CETATEXT000026237448 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-07-26;11bx03138 ?
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