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02/02/2015 | FRANCE | N°14BX01886

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 02 février 2015, 14BX01886


Vu la requête enregistrée le 23 juin 2014, présentée pour M. D...C..., élisant domicile..., par MeA... ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305526 du 3 avril 2014 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 octobre 2013 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de

la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dès la notification de la décision à interven...

Vu la requête enregistrée le 23 juin 2014, présentée pour M. D...C..., élisant domicile..., par MeA... ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305526 du 3 avril 2014 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 octobre 2013 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dès la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de la situation du requérant, dès lors que la décision mentionne que son épouse et ses quatre enfants résident en Russie alors que son fils mineur B...réside en France où il est scolarisé depuis mai 2013 ;

- le tribunal n'a pas tiré toutes les conséquences de cette situation de fait et a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il a apporté des certificats médicaux qui établissent qu'il présentait, avant la décision contestée de refus de séjour, de multiples crises d'épilepsie pour lesquelles il bénéficiait d'un suivi neurochirurgicale à l'hôpital de Rangueil et des examens multiples pour en connaître la cause depuis le 1er octobre 2013 ; ces éléments devaient susciter un questionnement de la part du préfet et aurait dû le conduire à saisir le médecin de l'agence régionale de santé pour avis ;

- le tribunal a considéré que ces éléments n'ont pas eu d'influence sur la prise de décision dès lors que le préfet aurait pris la même décision s'il en avait eu connaissance, alors que le défaut de saisine de l'agence régionale de santé l'a privé d'une garantie ;

- ces omissions révèlent l'absence d'examen sérieux de sa situation ;

- l'article 41 de la Charte européenne des droits fondamentaux a été méconnu, dès lors qu'il n'a pas été mis à même de présenter les éléments relatifs à son état de santé avant l'édiction du refus de séjour litigieux ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 7.2 de la directive 2008/115/CE ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination sont privées de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une erreur de droit, dès lors que le préfet s'est estimé lié par la décision de l'office français de protection des réfugiés et des apatrides alors que cette décision n'était pas définitive ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 26 septembre 2014, présenté par le préfet de la Haute-Garonne, qui conclut au non-lieu à statuer sur la requête et au rejet de l'ensemble des conclusions indemnitaires ;

Il fait valoir que :

- M. C...est actuellement sous couvert d'un récépissé valable du 21 août au 20 novembre 2014 dans l'attente de la fabrication de son titre de séjour temporaire en qualité d'étranger malade ;

- il a été admis, de fait, à séjourner sur le territoire français et la délivrance de ce titre a pour conséquence d'annuler la décision contestée ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 15 mai 2014 admettant M. C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-547 du 11 juillet 1979, modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2015 :

- le rapport de M. Philippe Delvolvé, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que M.C..., de nationalité arménienne, est entré en France le 7 février 2013 et y a sollicité le bénéfice de l'asile ; que par une décision du 25 mars 2013, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de l'admettre provisoirement au séjour au motif que l'Arménie est un pays d'origine sûr ; que par une décision du 28 juin 2013, l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, saisi dans le cadre de la procédure prioritaire, a rejeté la demande d'asile de l'intéressé ; que M. C...fait appel du jugement du 3 avril 2014 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 octobre 2013 du préfet de la Haute-Garonne portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que si le préfet de la Haute-Garonne soutient qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la requête dès lors que M. C...est titulaire d'un récépissé de titre de séjour en qualité d'étranger malade valable du 21 août au 20 novembre 2014 l'autorisant à circuler sur le territoire français, ce récépissé, qui ne constitue pas le titre de séjour sollicité, autorise seulement M. C...à séjourner provisoirement en France ; qu'ainsi, les conclusions de la requête en tant qu'elles sont dirigées contre le refus de titre de séjour ne sont pas devenues sans objet ; qu'en revanche, ce récépissé qui a été renouvelé le 20 novembre 2014 pour une durée de trois mois, a implicitement abrogé la décision portant obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination de cette obligation qui n'avaient reçu aucun commencement d'exécution ; que, par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions du requérant tendant à l'annulation de ces deux dernières décisions contenues dans l'arrêté du 7 octobre 2013 ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

3. Considérant que la décision contestée expose la situation de M. C..., notamment quant à sa date d'entrée en France, le 7 février 2013, et indique que la demande d'asile a fait l'objet d'un rejet par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 28 juin 2013 fait état du recours non suspensif formé par l'intéressé devant la Cour nationale du droit d'asile et de l'absence d'atteinte disproportionnée portée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, compte tenu de son entrée très récente en France et de la présence en Russie de son épouse et de ses quatre enfants ; qu'elle cite de nombreux articles notamment du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le préfet a entendu faire application ; que si le préfet ne mentionne dans son arrêté ni la présence de son filsB..., qui serait venu en France en mai 2013, ni les difficultés d'ordre médical dont le requérant est atteint, ce dernier ne justifie pas l'avoir informé de telles circonstances ; que le refus de séjour est donc suffisamment motivée tant en droit qu'en fait au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 979 relative à la motivation des actes administratifs ;

4. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de la motivation de la décision en litige, que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M.C... ; que le requérant ne saurait, en tout état de cause, utilement reprocher au préfet de la Haute-Garonne de ne pas avoir sollicité l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, dès lors qu'il ne l'avait pas informé d'éléments relatifs à son état de santé et ne l'avait d'ailleurs pas saisi d'une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade ;

5. Considérant que M. C...soutient que le préfet aurait dû recueillir ses observations avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour ; que, d'une part, l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qu'il invoque, n'est applicable qu'entre Etats membres de l'Union européenne ; que M. C...ne peut donc utilement invoquer sa méconnaissance à l'encontre du refus de séjour ; que si le requérant peut être regardé comme invoquant la méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le refus de séjour en litige faisant suite à une demande de titre de séjour en qualité de réfugié, un tel moyen est lui aussi inopérant ;

6. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 742-1, L.742-3, L.742-6 et L.741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les recours présentés devant la Cour nationale du droit d'asile contre les décisions de rejet des demandes d'asile examinées en procédure prioritaire par l'Office français pour la protection des réfugiés et des apatrides, n'ont pas de caractère suspensif à l'encontre des décisions portant refus de séjour ; que la demande d'asile présentée par M. C...a été traitée en procédure prioritaire par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides ; qu'ainsi, la circonstance selon laquelle le préfet n'a pas attendu la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile saisie par l'intéressé est sans incidence sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour ;

7. Considérant que M. C...est entré en France en 2013 ; que sa femme et trois de leurs quatre enfants résident en Russie ; que rien ne fait obstacle à ce qu'ils poursuivent leur vie familiale hors de France ; que, dans ces circonstances, la décision de refus de séjour n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui lui ont été opposés ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de refus de séjour du 7 octobre 2013 ; que par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. C...tendant à l'annulation du jugement n° 1305526 du 3 avril 2014 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a rejeté sa demande dirigée contre les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi contenues dans l'arrêté du 7 octobre 2013 du préfet de la Haute-Garonne.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 5 janvier 2015 à laquelle siégeaient :

M. Bernard Chemin, président,

M. Jean-Louis Joecklé, président-assesseur,

M. Philipe Delvolvé, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 2 février 2015.

Le rapporteur,

Philippe Delvolvé

Le président,

Bernard Chemin

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier

Cindy Virin

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No14BX01886


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX01886
Date de la décision : 02/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Philippe DELVOLVÉ
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : CABINET ATY AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-02-02;14bx01886 ?
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