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22/06/2017 | FRANCE | N°15BX01542

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 22 juin 2017, 15BX01542


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la délibération du 18 janvier 2005 par laquelle le conseil municipal de Septfonds a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur les parcelles cadastrées section E n° 288, 297 et 1494 situées 8 rue de Strasbourg et 15-17 rue de la République et la décision du 19 janvier 2005 par laquelle le maire a indiqué, que sur la déclaration d'intention d'aliéner, la commune de Septfonds a décidé d'user de son droit de préemption urbai

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Par un jugement n° 1202439 du 11 mars 2015, le tribunal administratif de T...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la délibération du 18 janvier 2005 par laquelle le conseil municipal de Septfonds a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur les parcelles cadastrées section E n° 288, 297 et 1494 situées 8 rue de Strasbourg et 15-17 rue de la République et la décision du 19 janvier 2005 par laquelle le maire a indiqué, que sur la déclaration d'intention d'aliéner, la commune de Septfonds a décidé d'user de son droit de préemption urbain.

Par un jugement n° 1202439 du 11 mars 2015, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la délibération du 18 janvier 2005, a enjoint à la commune de Septfonds de proposer à MmeA..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, l'acquisition de l'ensemble immobilier composé des parcelles cadastrées section E n° 288, 297 et 1494 pour un montant maximum de 65 000 euros, et rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2015, la commune de Septfonds, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 11 mars 2015 ;

2°) de rejeter la demande de MmeA... ;

3°) de mettre à la charge de Mme A...la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure de notification de la décision de préemption a été respectée puisqu'un notaire mandaté par la commune a adressé à Mme A...un courrier recommandé du 21 janvier 2005 l'informant de son intention de préempter ; le délai de deux mois à compter de la notification était donc expiré à la date d'introduction de la requête ;

- la mention " exercice par la commune de son droit de préemption " portée par la commune sur la déclaration d'intention d'aliéner retournée au propriétaire suffit à faire reconnaître la réalisation de la vente ;

- la décision de préemption est suffisamment motivée ;

- les documents déjà produits et ceux nouveaux en appel attestent de la réalité des projets qu'elle entendait mener ; les locaux étaient suffisamment vastes pour permettre d'accueillir un double projet, à la fois création d'un musée du chapeau et création de logement sociaux en centre bourg ; enfin, elle entendait réhabiliter une partie des locaux afin de développer un circuit court bio sur le Pays Midi Quercy dans le centre de la commune ; ces projets n'ont pu aboutir uniquement pour des raisons politiques indépendantes de sa volonté.

Par lettre du 10 mai 2017, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions de la demande de première instance présentées par Mme A...tendant à l'annulation de la délibération du 18 janvier 2005 dès lors que l'intéressée a introduit son recours juridictionnel devant le tribunal administratif de Toulouse au-delà d'un délai raisonnable à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de cette décision.

Mme A...et la commune de Septfonds ont produit des mémoires en réponse à ce moyen d'ordre public, enregistrés respectivement les 17 mai et 23 mai 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Cécile Cabanne ;

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

- et les observations de MeF..., représentant Mme A...;

Une note en délibéré présentée pour Mme A...par Me E...a été enregistrée le 26 mai 2017.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 18 janvier 2005, le conseil municipal de Septfonds (Tarn-et-Garonne) a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur les parcelles cadastrées section E n° 288, 297 et 1494 situées 8 rue de Strasbourg et 15-17 rue de la République, proposées à la vente dans le cadre de la liquidation d'une entreprise de chapellerie. Le 19 janvier 2005, le maire de cette commune a indiqué, sur la déclaration d'intention d'aliéner, que la commune de Septfonds a décidé d'user de son droit de préemption urbain. MmeA..., acquéreur évincé, a demandé en 2012 au tribunal administratif de Toulouse l'annulation pour excès de pouvoir de ces deux décisions. Par un jugement n° 1202439 du 11 mars 2015, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la délibération du 18 janvier 2005, a enjoint à la commune de Septfonds de proposer à MmeA..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, l'acquisition de l'ensemble immobilier composé des parcelles cadastrées section E n° 288, 297 et 1494 pour un montant maximum de 65 000 euros, a mis à sa charge la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions. La commune de Septfonds, qui demande l'annulation du jugement en sa totalité, doit être regardée comme relevant appel des articles 1, 2 et 3 du jugement du 11 mars 2015 dès lors qu'elle ne critique pas le rejet du surplus des conclusions de MmeA....

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance.

3. La règle énoncée ci-dessus, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà du délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs. Il appartient dès lors au juge d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance, sans que puissent utilement être invoqués les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Les premiers juges ont à juste titre considéré que la commune de Septfonds n'apportait pas la preuve de la notification à MmeA..., propriétaire évincée, de la décision de préemption du 18 janvier 2005 ni de la mention des délais et voies de recours. Si, par suite, le délai de deux mois fixé par l'article R. 421-1 du code de justice administrative ne lui était pas opposable, il ressort toutefois des pièces du dossier que par courrier du 21 janvier 2005, Me B..., notaire, lui a adressé une copie de la déclaration d'intention d'aliéner avec une mention signée par le maire le 19 janvier 2005 selon laquelle " la commune de Septfonds a décidé d'user de son droit de préemption urbain ". De même, le courrier du notaire mentionnait expressément que la commune de Septfonds entendait exercer son droit de préemption sur la propriété dont elle se portait acquéreur. Mme A...a reconnu dans ses écritures de première instance que ce courrier accompagné de cette déclaration d'intention d'aliéner lui avait été adressé par lettre recommandée. Dans ces conditions, l'intimée a eu connaissance de ce qu'une préemption avait fait échec à la vente de l'ensemble immobilier qu'elle entendait acquérir. Mme A..., qui est réputée avoir eu connaissance de la décision contestée fin janvier 2005 compte tenu des délais normaux d'acheminement du courrier par les services postaux, ne se prévaut d'aucune circonstance particulière qui l'aurait empêchée d'exercer un recours contentieux à son encontre dans un délai raisonnable. Par suite, il résulte de ce qui précède, que le recours dont Mme A...a saisi le tribunal administratif de Toulouse sept ans après la date à laquelle il est établi qu'elle a eu connaissance de ce que la commune de Septfonds entendait exercer son droit de préemption, excédait le délai raisonnable durant lequel il pouvait être exercé. Sa demande devait en conséquence être rejetée comme tardive.

5. Il résulte de ce qui précède que la commune de Septfonds est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la délibération du conseil municipal du 18 janvier 2005 et a enjoint à la commune de Septfonds de proposer à MmeA..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, l'acquisition de l'ensemble immobilier composé des parcelles cadastrées section E n° 288, 297 et 1494 pour un montant maximum de 65 000 euros et a mis à sa charge la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, en tout état de cause, obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Septfonds, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande Mme A...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1, 2 et 3 du jugement n° 122439 du 11 mars 2015 du tribunal administratif de Toulouse sont annulés.

Article 2 : La demande de Mme A...est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Septfonds est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de Mme A...présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Septfonds et à Mme C...A....

Délibéré après l'audience du 24 mai 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 juin 2017.

Le rapporteur,

Cécile CABANNELe président,

Catherine GIRAULTLe greffier,

Vanessa BEUZELIN

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 15BX01542


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX01542
Date de la décision : 22/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-01-07 Procédure. Introduction de l'instance. Délais.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Cécile CABANNE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP CAMBRIEL DE MALAFOSSE STREMOOUHOFF GERBAUD-COUTURE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-06-22;15bx01542 ?
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