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08/08/2017 | FRANCE | N°17BX00096

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 08 août 2017, 17BX00096


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010.

Par jugement n° 1501106 du 1er décembre 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 19 mai 2016, M. et Mme A...B..., représentés par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'ann

uler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 1er décembre 2016;

2°) de prononcer la décharge de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010.

Par jugement n° 1501106 du 1er décembre 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 19 mai 2016, M. et Mme A...B..., représentés par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 1er décembre 2016;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition susmentionnée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Ils soutiennent que :

- la discordance entre les dates des droits de communication indiqués par l'administration dans la proposition de rectification du 17 avril 2013 et la date indiquée sur les attestations établies par EDF qui étaient jointes à cette proposition de rectification établit l'absence d'explications loyales de la part de l'administration sur l'origine des renseignements détenus en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76B du livre des procédures fiscales ;

- l'administration n'apporte pas la preuve que le droit de communication a été régulièrement exercé envers EDF ;

- il résulte tant de l'article 95 Q de l'annexe II au code général des impôts que de la doctrine administrative que le droit à réduction d'impôt naît de la livraison de l'investissement, aucune autre condition relative à sa mise en service n'étant exigée ; le critère du raccordement au réseau d'Électricité de France (EDF) exigé par le service n'est pas prévu par la loi ; conformément à l'instruction 5 B-2-07 n° 15 du 1er janvier 2007, les centrales photovoltaïques mises en location constituent des moyens d'exploitation permanents ou durables capables de fonctionner de façon autonome et on ne saurait reprocher à la société propriétaire l'absence de production d'électricité, dès lors que ces centrales sont mises à la disposition du locataire en état de fonctionnement ; en tout état de cause, un raccordement n'est pas nécessaire pour produire de l'électricité, le locataire pouvant utiliser l'énergie de la centrale pour sa propre consommation et, en raison de difficultés matérielles, EDF ne peut pas raccorder certaines centrales à son réseau ; l'investissement étant productif, les conditions prévues à l'article 199 undecies B du code général des impôts sont remplies ;

- en application de l'article 95 Q de l'annexe II au code général des impôts, précisé par le paragraphe 148 de l'instruction 5 B-2-07 du 1er janvier 2007, les centrales ont été livrées avant le 31 décembre 2010 dès lors qu'un accord sur la chose et le prix a été trouvé avant cette date conformément à l'article 1584 du code civil ;

- il n'appartient pas aux sociétés propriétaires, en application de l'article 1719 du code civil, de vérifier que les sociétés locataires ont effectué la demande de raccordement au réseau EDF ainsi que la demande de certification auprès du comité national pour la sécurité des usagers et de l'électricité ;

- en instaurant une solidarité fiscale entre le bailleur et le locataire, l'administration méconnaît l'article 199 undecies B du code général des impôts et porte atteinte au principe de la séparation des pouvoirs tel qu'énoncé à l'article 34 de la Constitution ;

- l'administration méconnaît les principes de clarté, d'intelligibilité et de prévisibilité de la loi fiscale ainsi que de sécurité juridique, dès lors que la législation relative aux investissements outre-mer a été modifiée à de nombreuses reprises et qu'un raccordement au réseau d'EDF, comme condition du bénéfice de la réduction d'impôts, n'est pas prévu par les textes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. En vertu du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue de l'article 3 du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016, les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours peuvent, par ordonnance, rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, " les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement ". Ces dispositions sont applicables, en vertu de l'article 35 du décret n° 2016-1480, à compter du 1er janvier 2017, y compris pour les requêtes enregistrées avant cette date.

2. M. et Mme B...sont les associés de sociétés en participation, Sunra Fluide 1130, Sunra Fluide 1131, Sunra Fluide 1132 par l'intermédiaire desquelles ils ont réalisé des investissements outre-mer consistant en l'acquisition de panneaux photovoltaïques ensuite donnés en location à des exploitants locaux. A ce titre, ils ont bénéficié au cours de l'année 2010 de la réduction d'impôt pour investissement outre-mer prévue par l'article 199 undecies B du code général des impôts. A l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a remis en cause cette réduction d'impôt et l'a réintégrée dans le revenu imposable des contribuables au titre de ladite année. M. et Mme B...relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Pau qui a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010.

Sur la régularité de la procédure :

3. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la procédure d'imposition en litige : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées. ". Aux termes de l'article L. 83 du même livre : " Les administrations de l'État, des départements et des communes, les entreprises concédées ou contrôlées par l'État, les départements et les communes, ainsi que les établissements ou organismes de toute nature soumis au contrôle de l'autorité administrative, doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les documents de service qu'ils détiennent sans pouvoir opposer le secret professionnel (...). ".

4. Il résulte de ces dispositions que le droit de communication reconnu à l'administration fiscale par les articles L. 81 et suivants du livre des procédures fiscales a seulement pour objet de lui permettre, pour l'établissement et le contrôle de l'imposition d'un contribuable, de demander à un tiers ou, éventuellement, au contribuable lui-même, sur place ou par correspondance, de manière ponctuelle, des renseignements disponibles sans que cela ne nécessite d'investigations particulières ou, dans les mêmes conditions, de prendre connaissance et, le cas échéant, copie de certains documents existants qui se rapportent à l'activité professionnelle de la personne auprès de laquelle ce droit est exercé. Ce droit de communication ne s'exerce que sur des documents de service que les personnes destinataires des demandes de l'administration fiscale détiennent du fait de leur activité. Un document de service au sens des dispositions précitées de l'article L. 83 du livre des procédures fiscales s'entend de tout document ou donnée élaboré dans le cadre des missions de l'organisme à raison desquelles celui-ci est regardé comme soumis au contrôle de l'autorité administrative.

5. En second lieu, aux termes l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, " l'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l' article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.

6. Il résulte des termes de la proposition de rectification du 17 avril 2013 que les demandes adressées par l'administration à EDF dans le cadre de son droit de communication avaient pour objet d'obtenir des informations sur l'existence et les dates de raccordement effectif des installations concernées au réseau public d'électricité, et que les attestations d'EDF jointes à la proposition de rectification se limitaient à récapituler des données issues de documents de service d'EDF qui n'ont nécessité ni retraitement ni investigations particulières de la part de l'opérateur et qui entraient ainsi dans la catégorie des documents de service au sens des dispositions de l'article L. 83 précitée du livre des procédures fiscales.

7. L'administration n'était pas tenue d'indiquer les modalités d'exercice du droit de communication, notamment la date des demandes de communication, et la circonstance qu'une erreur matérielle ait pu, le cas échéant, être commise par EDF sur les dates des différentes demandes de communication est sans incidence sur l'obligation d'information qui pèse sur l'administration. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que, pour établir les motifs et le montant des redressements contestés, l'administration aurait eu recours à d'autres éléments ni qu'elle aurait utilisé d'autres documents obtenus de tiers. Il en résulte que l'administration s'est régulièrement acquittée de son obligation d'information au sens de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en annexant à la proposition de rectification les attestations d'EDF indiquant la teneur des informations demandées avec une précision suffisante et mentionnait l'identité du tiers qui avait communiqué à l'administration les renseignements en cause, en l'occurrence la date de demande de raccordement et la société exploitante ayant demandé un raccordement.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

8. Aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant (...) une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 / (...) La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) ". Aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au même code, dans sa version applicable au litige: " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée, sous réserve des dispositions de la deuxième phrase du vingtième alinéa du I du même article au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...) ".

9. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. Par suite, s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques installées sur les toits des habitations des particuliers et données en location à des sociétés en nom collectif en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, et non à être consommée et stockée par ces dernières, ne peuvent être effectivement exploitées et par suite productives de revenus qu'à compter de cette date.

10. Il n'est pas contesté par M. et Mme B...qu'aucune des centrales photovoltaïques acquises dans le département de la Martinique par les sociétés en participation, Sunra Fluide 1130, Sunra Fluide 1131, Sunra Fluide 1132, au capital desquels il avait souscrit, n'avaient fait l'objet d'un raccordement au réseau électrique au 31 décembre 2010. Dans ces conditions, les installations photovoltaïques en cause ne pouvant ni être effectivement exploitées ni être productives de revenus à la date du 31 décembre 2010, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'administration a pu à bon droit estimer que les investissements déclarés par ces derniers ne pouvaient être regardés comme ayant été effectivement réalisés au cours de l'année 2010 et remettre en cause, en conséquence, la réduction d'impôt pratiquée au titre de ladite année sur le fondement de l'article 199 undecies B du code général des impôts.

11. Dès lors, les requérants ne peuvent utilement soutenir qu'en application de l'article 1584 du code civil, la vente des centrales était réalisée dès l'année 2010 ou, qu'en application des articles 1719 et 1727 du code civil, il n'appartient pas aux sociétés propriétaires de vérifier que les sociétés locataires ont effectué la demande de raccordement au réseau EDF ainsi que la demande de certification auprès du comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité.

12. Enfin, il n'appartient pas au juge administratif, en dehors du cas prévu par les dispositions de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 prise pour l'application de l'article 61-1 de la Constitution, d'apprécier la constitutionnalité de dispositions législatives. Par suite, les moyens d'inconstitutionnalité de la loi fiscale invoqués par les requérants et tirés de ce que les nombreuses modifications de la législation relative aux investissements outre-mer et l'interprétation faite par l'administration de cette législation, dès lors qu'elles empêchent le contribuable de prévoir raisonnablement le montant de l'avantage fiscal et la date à laquelle il pourra en bénéficier, méconnaîtraient les principes de clarté, d'intelligibilité et de prévisibilité de la loi fiscale ainsi que de sécurité juridique, qui n'ont pas été présentés par mémoire distinct, ne peuvent qu'être écartés.

En ce qui concerne l'invocation de l'instruction du 30 janvier 2007 :

13. Les requérants se prévalent sur le fondement de ces dispositions, du paragraphe n° 148 de l'instruction référencée 5-B-2-07 du 30 janvier 2007 aux termes duquel : " Conformément aux dispositions du vingtième alinéa du I de l'article 199 undecies B, la réduction d'impôt est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. Le premier alinéa de l'article 95 Q de l'annexe II prévoit que l'année de réalisation de l'investissement s'entend de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée, c'est-à-dire achevée, par l'entreprise ou lui est livrée au sens de l'article 1604 du code civil, ou est mise à disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail. ".

14. Toutefois, il ne ressort pas des énonciations de l'instruction du 30 janvier 2007 que l'administration ait entendu donner, en ce qui concerne le fait générateur de la réduction d'impôt subordonné, ainsi qu'il a été dit, à la condition tenant à l'exploitation effective de l'immobilisation, une interprétation du texte fiscal différente de celle qui figure au point 9 ci-dessus, qui lui serait opposable sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

15. Il résulte de ce qui précède que la requête de M. et Mme B...est manifestement dépourvue de fondement et peut, dès lors, être rejetée en toutes ses conclusions selon la procédure prévue par les dispositions précitées du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. et Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée au ministre des outre-mer et à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Fait à Bordeaux, le 8 août 2017

Le président de la 4ème chambre,

Philippe Pouzoulet

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

6

N° 17BX00096


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 17BX00096
Date de la décision : 08/08/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : CABINET B2M2

Origine de la décision
Date de l'import : 22/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-08-08;17bx00096 ?
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