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12/07/2001 | FRANCE | N°98DA00428

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1e chambre, 12 juillet 2001, 98DA00428


Vu l'ordonnance du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Aldo Y... demeurant ..., par Me B..., avocat ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy le 27 février 1998, par la

quelle M. Y... demande à la Cour :
1 ) d'annuler les articles...

Vu l'ordonnance du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Aldo Y... demeurant ..., par Me B..., avocat ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy le 27 février 1998, par laquelle M. Y... demande à la Cour :
1 ) d'annuler les articles 1 et 4 du jugement n 95-1434 et suivants en date du 18 décembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté municipal du 7 décembre 1989 de la commune de Marles-les-Mines, à l'annulation des arrêtés des 14 et 21 décembre 1989 et du 9 janvier 1990 du préfet du Pas-de-Calais et à l'annulation des décisions d'admission et de maintien du directeur du centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant pris entre le 7 et le 15 décembre 1989 inclus, ainsi que, d'autre part, à la condamnation de l'Etat, de la commune de Marles-les-Mines et du centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant à réparer les préjudices qu'il a subis du fait de son placement d'office ;
2 ) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
3 ) de condamner le centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant à lui verser la somme de 2 000 000 francs augmentée des intérêts au taux légal à compter du 7 février 1997 et de la capitalisation des intérêts ;
4 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 000 francs augmentée des intérêts au taux légal à compter du 5 avril 1997 et de la capitalisation des intérêts à raison des fautes commises par les autorités préfectorales et des divers organes de l'Etat dans l'absence de contrôle pertinent du fonctionnement du centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant précédemment à son internement et lors de celui-ci ;
5 ) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité supplémentaire augmentée des intérêts au taux légal à compter du 24 mai 1997 en réparation du préjudice né des violations des articles 8 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par le sous-préfet de Béthune ;
6 ) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité supplémentaire de 1 000 000 francs augmentée des intérêts au taux légal à compter du 24 mai 1997 en réparation du préjudice né du défaut d'information des raisons de son arrestation et de sa séquestration dans les locaux du commissariat de police de Marles-les-Mines ;
7 ) de condamner la commune de Marles-les-Mines à lui verser une indemnité supplémentaire de 2 400 000 francs augmentée des intérêts au taux légal à compter du 5 avril 1997 ;
8 ) de condamner la commune de Saint-Venant à lui verser une
indemnité supplémentaire de 1 000 000 francs augmentée des intérêts au taux légal à compter du 7 février 1997 et capitalisation des intérêts ;
9 ) de condamner le centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant à lui payer la somme de 50 000 francs sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
10 ) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 50 000 francs sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
11 ) de condamner la commune de Marles-les-Mines à lui payer la somme de 40 000 francs sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
12 ) de condamner la commune de Saint-Venant à lui payer la somme de 15 000 francs sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
13 ) de condamner chaque partie défenderesse à verser, en application de la loi du 8 février 1995, une astreinte de 500 francs par jour de retard pris dans le versement des sommes allouées par l'arrêt à intervenir et ce à l'issue d'un délai de 15 jours commençant à courir à compter de la notification dudit arrêt ; ---- ---- -- Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code des communes et le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n 99-435 du 28 mai 1999 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2001
- le rapport de M. Yeznikian, premier conseiller ;
- les observations de Me B..., avocat, pour M. Aldo Y...,
- les observations de Me Z..., avocat, substituant Me Rapp, avocat, pour la commune de Marles-les-Mines,
- et les conclusions de M. Bouchier, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté en date du 7 décembre 1989 par lequel l'adjoint au maire de la commune de Marles-les-Mines a placé d'office à titre provisoire M. Y... au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-13 du code des communes, alors applicable : "En cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement, le maire est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l'ordre des nominations, et, à défaut d'adjoints, par un conseiller municipal désigné par le conseil, sinon pris dans l'ordre du tableau" ;
Considérant que, si, le 7 décembre 1989, "à raison de l'absence du maire", M. C..., 6ème adjoint de la commune de Marles-les-Mines, a signé l'arrêté prononçant le placement provisoire d'office de M. Y... au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant, il ne résulte pas des pièces du dossier que les cinq adjoints précédant M. C... dans l'ordre des nominations aient été absents ou empêchés ; que, par suite, l'arrêté municipal litigieux a été pris par une autorité incompétente et doit être annulé ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête présentés à l'appui des conclusions susanalysées, M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 4 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté municipal du 7 décembre 1989 ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté en date du 14 décembre 1989 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a placé d'office M. Y... au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant :
Considérant qu'aux termes de l'article L.343 du code de la santé publique dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté préfectoral contesté ; "A Paris, le préfet de police, et, dans les départements, les préfets ordonneront d'office le placement, dans un établissement d'aliénés, de toute personne ..., dont l'état d'aliénation compromettrait l'ordre public ou la sûreté des personnes. / Les ordres des préfets seront motivés et devront énoncer les circonstances qui les auront rendus nécessaires ..." ;
Considérant que, lorsqu'un arrêté préfectoral de placement d'office est motivé par référence à un certificat médical, cette motivation ne peut être regardée comme satisfaisant aux exigences des dispositions précitées du code de la santé publique que si le certificat médical décrit lui-même avec précision l'état mental de la personne à l'époque où son placement d'office est ordonné ;

Considérant que, pour décider, par l'arrêté en date du 14 décembre 1989, de placer d'office, au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant, M. Y... qui y avait été admis à titre provisoire le 7 décembre 1989 sur le fondement d'un arrêté municipal du même jour, le préfet du Pas-de-Calais s'est référé au certificat médical du Dr A... en date du 7 décembre 1989 et au certificat médical établi le 8 décembre 1989 par le Dr de X... suite à l'admission de l'intéressé ; que, dans les circonstances de l'espèce, ces certificats médicaux ne permettaient pas au préfet de connaître, avec suffisamment de précision, à la date où il a ordonné le placement d'office de M. Y... au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant, l'état mental de la personne et les risques qu'il faisait courir à l'ordre public ; que, par suite, l'arrêté préfectoral litigieux doit être annulé ; que, dès lors, M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 4 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté préfectoral du 14 décembre 1989 ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté en date du 21 décembre 1989 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a autorisé deux sorties provisoires de M. Y... :
Considérant que M. Y... avait présenté, sous le n 96-1058 devant le tribunal administratif de Lille, une demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté en date du 21 décembre 1989 par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a autorisé à effectuer deux sorties provisoires ; que ces conclusions sont au nombre de celles qu'il appartient au juge administratif de connaître ; que, dès lors, M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions susmentionnées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; que, par suite, l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Lille en date du 18 décembre 1998, en tant qu'il rejette la demande enregistrée n 96-1058, doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu, dans cette mesure, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Lille ;
Considérant que les deux sorties provisoires du 24 décembre 1989 et du 1er janvier 1990 autorisées par le préfet du Pas-de-Calais, le 21 décembre 1989, sont des mesures relevant du traitement du malade hospitalisé ; qu'ainsi l'arrêté préfectoral autorisant ces sorties ne comportait aucune décision faisant grief dont M. Y... serait recevable à demander l'annulation ; que, dès lors, sa demande, enregistrée au tribunal administratif de Lille sous le n 96-1058, tendant à l'annulation dudit arrêté préfectoral, doit être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables résultant des décisions de placement ou de maintien de M. Y... au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant :

Considérant qu'il résulte des articles L. 333 et suivants du code de la santé publique, alors applicables, que l'autorité judiciaire est seule compétente, lorsque la juridiction administrative s'est prononcée sur la régularité de la décision administrative qui ordonne le placement ou son maintien, pour statuer sur les conséquences dommageables de l'ensemble des irrégularités entachant la mesure de placement d'office critiquée ;
Considérant que M. Y... recherche la responsabilité, en premier lieu, de l'Etat à raison de sa "séquestration" et de son maintien dans les locaux du commissariat de police de Marles-les-Mines le 7 décembre 1989 avant son placement d'office, en deuxième lieu, de l'Etat et de la commune de Marles-les-Mines à raison, d'une part, du retard avec lequel le maire a transmis son arrêté de placement provisoire au préfet du Pas-de-Calais et à raison, d'autre part, du retard avec lequel le préfet du Pas-de-Calais a pris son arrêté de placement d'office, en troisième lieu, de l'administration à raison des fautes commises dans la rédaction de ses actes, et, en, quatrième lieu, du centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant à raison, d'une part, des "décisions" d'admission et de maintien en placement d'office prises par le chef d'établissement et, d'autre part, à raison de l'absence de communication au préfet du rapport semestriel prévu à l'article L. 345 du code de la santé publique ; que l'ensemble de ces demandes tendent à voir réparer les préjudices que l'intéressé estime avoir subis du fait de diverses irrégularités commises à l'occasion ou à la suite de la mesure de placement d'office ou de maintien au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant ; qu'il n'appartient, dès lors, qu'à la juridiction judiciaire de connaître de telles conclusions ; qu'il suit de là que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté lesdites conclusions indemnitaires ;
Sur les conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables résultant des opérations de contrôle du centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 332 du code de la santé publique dans sa rédaction alors applicable : "Le préfet et les personnes spécialement déléguées à cet effet par lui ou par le ministre de la santé publique et de la population, le président du tribunal, le procureur de la République, le juge du tribunal d'instance, le maire de la commune, sont chargés de visiter les établissements publics et privés consacrés aux aliénés ou accueillant des malades soignés pour troubles mentaux. / Ils recevront les réclamations des personnes qui y sont placées, et prendront, à leur égard, tous renseignements propres à faire connaître leur position. / Les établissements visés au premier alinéa sont visités, à des jours indéterminés, une fois au moins chaque trimestre, par le procureur de la République. En outre, ces établissements sont visités, une fois par année, par les autres autorités visées au même alinéa. Il est rendu compte aux autorités compétentes" ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 332 du code de la santé publique que le contrôle des établissements consacrés aux aliénés a principalement pour objet, notamment à travers l'exercice du droit de réclamation organisé par ces dispositions, de veiller au respect de la liberté individuelle des personnes placées ou retenues dans les établissements consacrés aux aliénés et des conditions de leur internement ; que, dès lors, les préjudices qui pourraient résulter des carences de ce contrôle ne sont pas détachables du préjudice dont une personne internée pourrait rechercher la réparation auprès du juge judiciaire du fait d'une détention abusive ; que, par suite, M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions indemnitaires susmentionnées dirigées à la fois contre la commune de Saint-Venant et contre l'Etat ;
Sur les conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables résultant de l'hospitalisation de M. Y... au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant :
Considérant, en premier lieu, que M. Y... a recherché la responsabilité du centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant au titre de sa détention arbitraire en se plaignant des conditions mêmes de son hospitalisation ; que, compte tenu de la nature du préjudice dont il est demandé réparation, il appartient seulement au juge judiciaire de connaître de telles conclusions ; que, par suite, M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions indemnitaires susmentionnées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Considérant, en second lieu, que si, indépendamment du préjudice né du caractère abusif de son internement, M. Y... a également entendu se prévaloir de préjudices distincts qui résulteraient de fautes médicales ou de fautes dans l'organisation ou le fonctionnement du service public hospitalier révélées par l'aggravation de son stress psychologique, par l'absence de recherche de son consentement au traitement et par l'existence d'un traitement chimiothérapeutique inapproprié, il n'établit pas, en ce qui le concerne, la réalité de ces préjudices ; qu'il suit de là que M. Y... n'est pas fondé à demander la condamnation du centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant à raison desdits préjudices ;
Sur les conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables résultant de l'atteinte au secret médical, au secret de la correspondance et au secret professionnel :

Considérant que, par une demande enregistrée devant le tribunal administratif de Lille sous le n 96-3278, M. Y... a recherché la responsabilité de l'Etat en se prévalant de la faute commise par le sous-préfet de Béthune qui, dans le cours de l'instruction de la demande enregistrée devant le même tribunal, sous le n 95-2150 , a, selon lui, au mépris du secret médical, du secret de la correspondance et du secret professionnel, produit, de sa propre initiative, le dossier qu'il détenait concernant M. Y... ; que de telles conclusions ressortissent à la compétence de la juridiction administrative ; que, dès lors, M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté lesdites conclusions indemnitaires ; que, par suite, l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Lille en date du 18 décembre 1997, en tant qu'il rejette les conclusions indemnitaires susanalysées présentées dans la demande enregistrée n 96-3278, doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu, dans cette mesure, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Lille ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les correspondances figurant au dossier produit par le sous-préfet de Béthune n'émanaient pas de M. Y... ; qu'il n'établit pas que la communication de ces documents auraient été de nature à lui causer un préjudice tiré de l'atteinte au secret de la correspondance ;
Considérant, en deuxième lieu, que, si le 17 avril 1996, deux certificats médicaux concernant M. Y... ont été produits, par le sous-préfet de Béthune, sans le consentement de l'intéressé, dans le cadre d'une demande enregistrée devant le tribunal administratif de Lille, sous le n 95-2150, opposant M. Y... à la commune de Marles-les-Mines à propos de son internement d'office et de sa mise en congé maladie, comme agent communal, suite à cet internement, il résulte de l'instruction que ces certificats médicaux qui portaient sur l'état mental de l'intéressé n'étaient, à l'époque, inconnus ni de M. Y..., ni de la commune de Marles-les-Mines ; qu'en outre, il résulte de l'instruction que, dès le 1er juin 1995, dans le cadre de l'instance n 95-1434 par laquelle M. Y... demandait l'annulation de l'arrêté, en date du 14 décembre 1989, du préfet du Pas-de-Calais plaçant d'office M. Y... au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant, l'intéressé a de lui-même produit les certificats médicaux concernant son état mental ; qu'ainsi, ni ces certificats médicaux, ni la description de la situation psychologique de M. Y... à l'époque de son internement ne pouvaient être ignorés du tribunal administratif de Lille lorsqu'il a pris connaissance du dossier communiqué par le sous-préfet de Béthune ; que, par suite, et alors même que le sous-préfet de Béthune ne s'est pas assuré, préalablement à la communication des certificats médicaux en question, de l'accord de l'intéressé, cette méconnaissance du principe qui régit le secret médical n'a pas été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à faire naître un préjudice dont M. Y... pourrait demander la réparation ; que, par suite, sa demande ne peut qu'être rejetée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ne résulte pas, en tout état de cause, de l'instruction que le sous-préfet de Béthune aurait, en communiquant les documents dont s'agit au tribunal administratif de Lille, manqué à un secret professionnel ou au devoir de discrétion professionnelle attaché à sa fonction ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel devenu l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que, M. Y... n'étant pas la partie perdante dans les instances relatives aux recours pour excès de pouvoir dirigés contre les arrêtés de placement pris par la commune de Marles-les-Mines et le préfet du Pas-de-Calais, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner la commune de Marles-les-Mines et l'Etat à payer chacun à M. Y... la somme de 5 000 francs au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que, pour le surplus des conclusions présentées par M. Y..., les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par M. Y... doivent dès lors être rejetées ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées présentées par la commune de Marles-les-Mines, la commune de Saint-Venant et le centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant ;
Sur les conclusions à fin d'astreinte :
Considérant que M. Y... demande à la cour de condamner l'Etat à une astreinte pour assurer le versement des sommes auxquels il aurait été condamné ; que, compte tenu du rejet par la présente décision des conclusions indemnitaires du requérant, il n'y pas lieu de prononcer une telle astreinte ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 18 décembre 1997 en tant qu'il rejette, en son article 4, les conclusions de M. Aldo Y... tendant à l'annulation de l'arrêté de la commune de Marles-les-Mines, en date du 7 décembre 1989, prononçant le placement provisoire d'office de M. Aldo Y... au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant et ledit arrêté, sont annulés.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 18 décembre 1997 en tant qu'il rejette, en son article 4, les conclusions de M. Aldo Y... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Pas-de-Calais, en date du 14 décembre 1989, prononçant le placement d'office de M. Y... au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant et ledit arrêté, sont annulés.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 18 décembre 1997 en tant qu'il rejette, en son article 1er, les conclusions de M. Aldo Y... présentées dans la demande enregistrée devant le tribunal sous le n 96-1058 et tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Pas-de-Calais, en date du 21 décembre 1989, prononçant la sortie provisoire de M. Aldo Y... du centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant, comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, est annulé. Lesdites conclusions de M. Aldo Y... présentées dans la demande enregistrée devant le tribunal sous le n 96-1058 sont rejetées.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 18 décembre 1997 en tant qu'il rejette, en son article 1er, les conclusions indemnitaires de M. Aldo Y... présentées dans la demande enregistrée devant le tribunal sous le n 96-3278, comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, est annulé. La demande enregistrée devant le tribunal sous le n 96-3278 est rejetée.
Article 5 : L'Etat versera à M. Aldo Y... la somme de 5 000 francs en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : La commune de Marles-les-Mines versera à M. Aldo Y... la somme de 5 000 francs en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Aldo Y... est rejeté.
Article 8 : Les conclusions de la commune de Marles-les-Mines, de la commune de Saint-Venant et du centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant, présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 9 : La présente décision sera notifiée à M. Aldo Y..., à la commune de Marles-les-Mines, à la commune de Saint-Venant, au centre hospitalier spécialisé de Saint-Venant, au ministre de l'intérieur, au ministre de la justice et au ministre de l'emploi et de la solidarité. Copie sera transmise au préfet du Pas-de-Calais.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 98DA00428
Date de la décision : 12/07/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR UN CRITERE JURISPRUDENTIEL - LIBERTE INDIVIDUELLE - PROPRIETE PRIVEE ET ETAT DES PERSONNES - LIBERTE INDIVIDUELLE - ALIENES.

POLICE ADMINISTRATIVE - POLICES SPECIALES - POLICE DES ALIENES - PLACEMENT D'OFFICE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - ABSENCE OU EXISTENCE DU PREJUDICE - ABSENCE.

SANTE PUBLIQUE - LUTTE CONTRE LES FLEAUX SOCIAUX - LUTTE CONTRE LES MALADIES MENTALES - ETABLISSEMENTS DE SOINS - MODE DE PLACEMENT DANS LES ETABLISSEMENTS DE SOINS - PLACEMENT D'OFFICE.

SANTE PUBLIQUE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE DES HOPITAUX (VOIR RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE).


Références :

Code de justice administrative L761-1
Code de la santé publique L343, L333, L345, L332
Code des communes L122-13
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Bouchier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2001-07-12;98da00428 ?
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