La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/03/2002 | FRANCE | N°99DA00616

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre, 27 mars 2002, 99DA00616


Vu l'ordonnance en date du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Philippe X..., demeurant ..., par Me Carbonel, avocat ;
Vu la requête, enregistrée le 16 mars 1999 au greffe de la cour administrative d'appel de

Nancy, par laquelle M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annule...

Vu l'ordonnance en date du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée pour M. Philippe X..., demeurant ..., par Me Carbonel, avocat ;
Vu la requête, enregistrée le 16 mars 1999 au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy, par laquelle M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement, en date du 31 décembre 1998, par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision le licenciant, du titre exécutoire émis à son encontre le 14 avril 1997 et limité à 70 000 F le montant des dommages et intérêts que la ville de Laon a été condamnée à lui payer ;
2 ) de fixer la date de son licenciement au 1er septembre 1995, de le déclarer illégal et de condamner la ville de Laon à lui payer les sommes de 100 000 F de dommages et intérêts pour licenciement abusif, 471 605 F au titre des salaires dus du 1er septembre 1995 au 1er mai 1998, 44 213 F à titre de préavis, 51 579 F en application de l'article 13 de son contrat de travail et de l'article 10 du décret du 15 février 1988, et subsidiairement, si la Cour jugeait que le licenciement est intervenu le 9 octobre 1996, de le juger dépourvu de fondement et de condamner la ville au paiement de 100 000 F pour licenciement abusif, 276 428 F au titre des salaires dus du 9 octobre 1996 jusqu'au 1er mai 1998, 44 213 F à titre de préavis, 51 579 F en application de l'article 13 de son contrat de travail et de l'article 10 du décret du 15 février 1988, d'annuler le titre exécutoire émis à son encontre le 14 avril 1997, subsidiairement de condamner la ville de Laon à lui verser une indemnité de 201 748 F en réparation de son préjudice, d'ordonner la compensation judiciaire et de condamner la ville de Laon à le faire bén éficier des mesures d'indemnisation du chômage ;
3 ) de condamner la ville de Laon à lui payer une somme de 20 000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'a ppel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n 88-145 du 15 février 1988 ;
Vu le décret n 99-435 du 28 mai 1999 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2002
- le rapport de Mme Brenne, premier conseiller,
- les observations de Me Carbonel, avocat de M. X... et Me
Bouckheloua, substituant Me Garreau, avocat de la commune de Laon,
- et les conclusions de M. Evrard, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Philippe X... a été recruté en qualité d'agent non titulaire par le maire de la ville de Laon, à compter du 1er mai 1989, pour une durée de trois ans, pour assurer les fonctions de chargé de mission à la communication et à l'information ; que son contrat a été renouvelé, pour la même durée, une première fois le 10 mars 1992, puis le 1er mai 1995 ; qu'en septembre 1995, le maire a placé M. Y... en congé et l'a verbalement informé que sa présence dans les locaux de la mairie n'était plus souhaitée ; qu'il lui a néanmoins maintenu son traitement au cours des mois qui ont suivi, le convoquant occasionnellement à des entretiens pour évoquer les missions qui pourraient lui être confiées ; qu'à la suite des refus de M. X... d'assurer de nouvelles fonctions, formulés les 23 septembre et 7 octobre 1996, le maire de la ville de Laon, après l'avoir mis en demeure de reprendre son service, l'a radié de son emploi pour abandon de poste à compter du 9 octobre 1996, puis le 14 avril 1997 lui a ordonné de reverser les traitements qui lui avaient été payés du 1er septembre 1995 au 9 octobre 1996, et a émis le 6 juin 1997 un titre de recettes d'un montant de 201 748,81F ; que M. X... demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 31 décembre 1998 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de son licenciement, de l'ordre de reversement et du titre de recette et a limité à 70 000 F le montant des dommages et intérêts dus par la ville de Laon ; que cette dernière relève appel de ce même jugement en tant qu'il l'a condamnée à payer cette somme ;
Sur l'abandon de poste :
Considérant, en premier lieu, que la circonstance que la ville de Laon n'apporte pas la preuve d'un différend survenu entre le maire et le requérant est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que celle-ci n'est pas motivée par l'existence d'un tel différend ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant qu'aucune décision de licenciement à compter du 1er septembre 1995 n'a été notifiée à M. X... ; que ce dernier, qui a continué à percevoir son traitement jusqu'au 9 octobre 1996, s'est présenté aux entretiens auxquels le maire l'a convoqué au cours de cette période ; qu'enfin il a été invité à participer aux élections professionnelles au comité d'hygiène et de sécurité ainsi qu'au comité technique paritaire ; que, par suite, et quand bien même le maire avait prié M. X... de ne plus se présenter dans les locaux des services municipaux, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été, en fait, illégalement, licencié dès le 1er septembre 1995 ;

Considérant, en troisième lieu, qu'à supposer même que les fonctions que le maire de la ville de Laon avait décidé de confier à M. X..., à compter du mois de septembre 1996, étaient substantiellement différentes de celles que stipulait son contrat d'engagement, cette circonstance, qui ne résultait pas d'une décision manifestement illégale et de nature à compromettre gravement un intérêt public, et que M. X... pouvait contester devant le juge administratif, ne l'autorisait pas à refuser de se présenter au service pour y exercer lesdites fonctions ; que M. X..., qui malgré deux mises en demeure, a maintenu ce refus, doit être regardé comme ayant intentionnellement rompu le lien qui l'unissait à son service ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que la décision du maire de Laon le radiant de son emploi pour abandon de poste est entachée d'excès de pouvoir ;
Sur l'indemnisation du licenciement et du chômage :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du décret du 15 février 1988 : " L'agent non titulaire engagé pour une durée déterminée ne peut être licencié par l'autorité territoriale avant le terme de son engagement qu'après un préavis qui lui est notifié dans les délais prévus à l'article 39 " ; qu'aux termes de l'article 43 du même texte : " Sauf lorsque le licenciement intervient pour des motifs disciplinaires, soit au cours ou à l'expiration d'une période d'essai, une indemnité de licenciement est due aux agents : 2 Qui engagés à terme fixe, ont été licenciés avant ce terme ; qu'enfin, aux termes de l'article 44 du même décret : " Toutefois l'indemnité n'est pas due aux agents mentionnés à l'article 43 lorsque ceux-ci : 4 Sont démissionnaires de leurs fonctions " ;
Considérant, en premier lieu, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que M. X... a intentionnellement rompu le lien qui l'unissait à la ville de Laon ; que par suite il n'est pas fondé à soutenir que la ville devait lui verser les indemnités de préavis et de licenciement légalement prévues en cas de licenciement, ainsi que les allocations pour perte involontaire d'emploi ;
Considérant, en second lieu, que ces mêmes circonstances font obstacle à ce que la ville de Laon, qui n'a pas commis de faute en radiant M. X... de son emploi, soit condamnée à lui payer une indemnité pour licenciement abusif et les salaires qu'il aurait perçus s'il était resté en fonctions jusqu'au terme de son engagement ;
Sur l'ordre de reversement des salaires perçus par M. X... du 1er septembre 1995 au 9 octobre 1996 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'absence d'exercice de ses fonctions par M. X... du 1er septembre 1995 au 6 septembre 1996 trouve uniquement son origine dans la décision du maire qui l'a écarté des services municipaux pendant cette période ; que, par suite, le maire ne pouvait se fonder sur l'absence de service fait pour mettre en recouvrement à l'encontre de M. X... les salaires qui lui avaient été versés pendant cette même période ;

Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que M. X... s'est refusé à reprendre ses fonctions après la réception de la lettre du maire, datée du 6 septembre 1996 ; qu'en l'absence de service fait, M. X... n'avait pas droit à son traitement, lequel doit, pour la période courant de cette date jusqu'au 9 octobre 1996 être fixé à la somme de 15 000 F ; que par suite M. X... est seulement fondé à demander la réduction du titre de recettes émis à son encontre d'une somme de 186 748,81 francs ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à ce que la ville de Laon soit condamnée à l'indemniser du préjudice résultant de l'émission à son encontre du titre de recettes et sur les conclusions de la ville de Laon, tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lille en tant qu'il l'a condamnée à payer à M. X... une somme de 70 000 F :
Considérant que M. X... avait, à titre principal demandé l'annulation du titre de recettes d'un montant de 201 748,81 francs émis à son encontre et à titre subsidiaire la condamnation de la ville de Laon à lui payer une somme du même montant ainsi que la compensation entre les sommes qu'il devait rembourser à la ville et celle que celle-ci serait condamnée à lui payer ; que la réduction du titre de recettes d'un montant de 186 748,81 francs rend sans objet ses conclusions subsidiaires à hauteur de cette somme ;
Considérant que la ville de Laon n'a commis aucune faute en émettant, dans la limite de 15 000 francs, un titre de recettes à l'encontre de M. X... en recouvrement des traitements qui lui avaient été indûment versés du 6 septembre au 7 octobre 1996 ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a condamné la ville à lui payer la somme de 70 000 francs et de rejeter les conclusions de M. X... tendant à ce que la ville soit condamnée à l'indemniser du préjudice résultant de l'émission de ce titre de recette ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est seulement fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre le titre de recettes émis à son encontre le 28 avril 1997 et la réduction de ce titre d'un montant de 186 748,81 francs et la ville de Laon est fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lille en tant qu'il l'a condamnée à verser une somme de 70 000 francs à M. X... ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la ville de Laon à payer à M. X... une somme de 1 000 euros (6 559,57 francs) au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce il n'y a pas lieu de condamner M. X... à payer à la ville de Laon une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif d'Amiens sont annulés.
Article 2 : Le titre de recette émis le 28 avril 1994 à l'encontre de M. Philippe X... est réduit à la somme de 28 469,67 euros (186 748,81 francs)
Article 3 : La ville de Laon est condamnée à payer à M. Philippe X... une somme de 1 000 euros (6 559,57 francs) au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 5 : Les conclusions par lesquelles la ville de Laon demande que M. Philippe X... soit condamné à lui payer une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe X..., à la ville de Laon, et au ministre de l'intérieur. Copie sera transmise au préfet de l'Aisne.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 99DA00616
Date de la décision : 27/03/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

36-10-04 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CESSATION DE FONCTIONS - ABANDON DE POSTE


Références :

Code de justice administrative L761-1
Décret 88-145 du 15 février 1988 art. 39, art. 43


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Brenne
Rapporteur public ?: M. Evrard

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2002-03-27;99da00616 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award