La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/06/2003 | FRANCE | N°01DA00840

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2eme chambre, 17 juin 2003, 01DA00840


Vu la requête, enregistrée le 10 août 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Valérie X, demeurant ..., par la SCP Julia-Chabert, avocat ; Mme X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 99-2230 en date du 20 juin 2001 par lequel le tribunal administratif de Rouen a condamné le centre hospitalier régional universitaire de Rouen à lui verser une indemnité de 7 000 francs, qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice qu'elle a subi à la suite d'une infection survenue à l'occasion de soins dispensés par cet éta

blissement ;

2°) de condamner ledit centre hospitalier régional univers...

Vu la requête, enregistrée le 10 août 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Valérie X, demeurant ..., par la SCP Julia-Chabert, avocat ; Mme X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 99-2230 en date du 20 juin 2001 par lequel le tribunal administratif de Rouen a condamné le centre hospitalier régional universitaire de Rouen à lui verser une indemnité de 7 000 francs, qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice qu'elle a subi à la suite d'une infection survenue à l'occasion de soins dispensés par cet établissement ;

2°) de condamner ledit centre hospitalier régional universitaire à lui verser la somme globale de 38 000 francs au titre des différents chefs de préjudice subis ;

3°) de condamner le centre hospitalier régional universitaire à lui verser la somme de 10 000 francs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que la somme de 2 500 francs représentant les frais et honoraires de l'expert ;

Code C Classement CNIJ : 60-02-01-01-01-01

60-04-03-02

60-04-03-05

60-04-03-06

60-05-04-01

Elle soutient qu'à la suite de l'infection nosocomiale dont elle a été victime lors de perfusions reçues entre le 12 et le 16 juin 1997 dans un établissement du centre hospitalier de Rouen, elle a subi une incapacité temporaire totale de deux mois entraînant pour elle la perte de chance d'obtenir un emploi, ces chefs de préjudice économique devant être estimés à 15 000 francs ; que l'indemnisation de 7 000 francs allouée par les premiers juges au titre des souffrances physiques est insuffisante, ce chef de préjudice devant être évalué à 20 000 francs ; qu'elle subit également un préjudice esthétique, lui ouvrant droit à une indemnité de 3 000 francs ; qu'enfin, elle a pris en charge elle-même les frais irrépétibles liés à la procédure de référé, antérieure à l'obtention de l'aide juridictionnelle, ainsi que les frais d'expertise judiciaire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 octobre 2001, présenté pour le centre hospitalier régional universitaire de Rouen, représenté par son directeur en exercice, par la SCP Emo-Hébert et associés, avocats ; le centre hospitalier conclut au rejet de la requête ; il soutient que Mme X ne justifie ni d'un préjudice économique, étant alors demandeur d'emploi, ni de la réalité d'une perte de chance d'embauche ; que l'expert a estimé qu'il n'existait pas de préjudice esthétique quantifiable ; que le tribunal a correctement fixé l'indemnisation du pretium doloris ; que les frais d'expertise n'ont pas été mis à la charge de Mme X ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 avril 2002, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen, représentée par son directeur en exercice, par Me Legendre, avocat ; la caisse primaire d'assurance maladie demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a rejeté ses conclusions tendant au remboursement des dépenses qu'il a exposées pour le compte de Mme X ;

2°) de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Rouen à lui verser, d'une part, la somme de 9 679,43 euros, majorée des intérêts de droit à compter du jour de sa demande, et, d'autre part, les sommes de 762,25 euros correspondant à l'indemnité forfaitaire prévue au quatrième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et de 762,25 euros au titre de l'article L. 8 -1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; elle soutient qu'en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, elle est fondée à demander le remboursement de ses prestations consécutives aux faits ayant engagé la responsabilité de l'hôpital ; que le relevé définitif de ses débours correspond aux frais médicaux, pharmaceutiques, de transport et d'hospitalisation ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 mai 2002, présenté pour le centre hospitalier régional universitaire de Rouen, tendant au rejet des conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen ; il soutient que les droits de la caisse primaire d'assurance maladie ne peuvent en l'espèce s'imputer sur aucun chef d'indemnisation entrant dans les postes de préjudice soumis à recours ; que c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que l'infection bénigne dont Mme X avait été victime n'avait généré d'autre préjudice que strictement personnel, en l'espèce un pretium doloris, échappant dès lors à l'assiette du recours de la Caisse ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 juillet 2002, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen, tendant aux mêmes fins que son mémoire précédent, par les mêmes moyens, et, en outre, par le moyen que le rapport d'expertise judiciaire a justifié de l'incapacité de travail ayant résulté par Mme X des soins nécessités par l'infection dont elle fut victime, et non du fait des lombalgies qui avaient conduit à sa première hospitalisation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2003 où siégeaient Mme Fraysse, président de chambre, M. Laugier, président-assesseur et M. Nowak, premier conseiller :

- le rapport de M. Laugier, président-assesseur,

- les observations de Me Jegu, avocat, membre de la société d'avocats Julia-Chabert, pour Mme X, de Me Campergue, avocat, membre de la société d'avocats Emo Hebert et associés, pour le centre hospitalier régional universitaire de Rouen ;

- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il est constant que Mme Valérie X, admise le 12 juin 1997 dans un établissement du centre hospitalier régional universitaire de Rouen pour des dorsalgies, a été atteinte d'une infection du poignet, suivie de complications, en raison de l'introduction accidentelle de staphylocoque lors de perfusions pratiquées au cours de cette hospitalisation ; que, par jugement du 20 juin 2001, le tribunal administratif de Rouen a déclaré ce centre hospitalier responsable des conséquences dommageables ayant résulté de ladite infection et l'a condamné à payer la somme de 7 000 francs en principal à Mme X ; qu'en appel, celle-ci critique l'insuffisance de ladite réparation tandis que la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen conteste le rejet par le tribunal de ses conclusions à fin de remboursement de ses débours ;

Sur les conclusions de Mme X :

Considérant, en premier lieu, que si Mme X demande à être indemnisée d'un préjudice économique au titre de la période de deux mois d'interruption temporaire totale reconnue par l'expert, il est constant qu'elle était alors demandeur d'emploi et qu'elle ne justifie pas de perte de revenus ; que la requérante n'apporte, par ailleurs, aucun élément ni commencement de preuve de nature à établir la promesse d'emploi ou la perspective d'embauche dont elle fait état ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte du rapport d'expertise que Mme X n'a gardé qu'une petite cicatrice de trois millimètres sous le poignet gauche et qu' il ne persiste aucun préjudice esthétique quantifiable ; qu'il y a lieu, par suite d'écarter ce chef de préjudice ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les souffrances physiques endurées par Mme X du fait de l'infection ont été évaluées par l'expert à un degré d'1,5, soit très léger à léger , sur une échelle de sept termes ; qu'en fixant ainsi à 7 000 francs la réparation due à ce titre, le tribunal administratif n'a pas fait une estimation insuffisante de ce chef de préjudice ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a condamné le centre hospitalier régional universitaire de Rouen à lui verser une indemnité en principal de 7 000 francs (1 067,14 euros) ;

Sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen :

Considérant qu'en vertu des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale, la caisse primaire d'assurance maladie exerce un droit propre lorsqu'elle saisit le juge d'une demande tendant à ce que l'auteur du dommage dont son assuré a été victime soit condamné à lui rembourser les prestations qu'elle a versées en raison de l'accident ;

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen demande le remboursement des frais médicaux et pharmaceutiques et des frais de transport et d'hospitalisation qu'elle a exposés pour le compte de Mme X ; qu'elle a droit, en vertu des dispositions susrappelées, au remboursement des débours directement imputables à la faute commise par l'établissement hospitalier et qui faisaient partie de la détermination du préjudice global ouvrant droit à indemnisation ; qu'il suit de là que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a écarté la totalité de la demande de la Caisse du seul fait que ce remboursement ne pouvait pas s'imputer sur l'indemnité allouée à Mme X et réparant un préjudice personnel à celle-ci ;

Considérant toutefois qu'il y a lieu de déduire du décompte de 9 679,43 euros (63 492,90 francs) non contesté par l'hôpital, établi par la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen, d'une part, les frais d'hospitalisation initiale, du 12 au 17 juin 1997, qui étaient liés aux dorsalgies dont souffrait Mme X, soit 1 888,08 francs (ou 287,84 euros), et, d'autre part, les frais d'hospitalisation ultérieurs, du 7 mai 1998, postérieurs à la date de consolidation fixée par l'expert au 17 août 1997, et qui ne présentent pas de lien établi, ni même allégué, avec la faute commise par l'établissement hospitalier, soit 474,24 francs (ou 72,30 euros) ; qu'ainsi, après défalcation de cette somme globale de 360,14 euros (2 362,36 francs), le préjudice indemnisable de la Caisse s'établit au montant de 9 319,30 euros (61 130,58 francs) ; qu'il y a lieu de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Rouen à verser cette somme à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen ;

Sur les intérêts :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen a droit aux intérêts de la somme de 9 319,30 euros à compter de sa première demande, soit du 11 avril 2000, date d'enregistrement de son mémoire devant le tribunal administratif ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant que les frais d'expertise du docteur Y, taxés et liquidés à la somme de 2 500 francs, ont été mis à bon droit à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Rouen par le jugement attaqué ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir que la charge définitive de ces frais lui aurait incombé ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, en contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement de ses débours, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 760 euros et d'un montant minimum de 76 euros ( ...) ; qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen tendant à l'application de ces dispositions et de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Rouen à lui verser la somme de 760 euros à ce titre ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel devenu L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le centre hospitalier régional universitaire de Rouen, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante à l'égard de Mme X, soit condamné à payer à celle-ci les sommes qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Rouen à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen la somme de 762,25 euros qu'elle demande au titre de ces mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le centre hospitalier régional universitaire de Rouen est condamné à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen la somme de 9 319,30 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 11 avril 2000.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Rouen en date du 20 juin 2001 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier régional universitaire de Rouen versera à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen la somme de 760 euros à titre d'indemnité prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et la somme de 762,25 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la requête de Mme Valérie X et le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen sont rejetés.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Valérie X, à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen, au centre hospitalier régional universitaire de Rouen ainsi qu'au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 3 juin 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 17 juin 2003.

Le rapporteur

Signé : L-D Laugier

Le président de chambre

Signé : G. Fraysse

Le greffier

Signé : M.T. Lévèque

La République mande et ordonne au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier

Marie-Thérèse Lévèque

N°01DA00840 8


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : Mme Fraysse
Rapporteur ?: M. Paganel
Rapporteur public ?: M. Michel
Avocat(s) : SCP EMO HEBERT et ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2eme chambre
Date de la décision : 17/06/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 01DA00840
Numéro NOR : CETATEXT000007599456 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-06-17;01da00840 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award