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19/06/2003 | FRANCE | N°01DA00373

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3eme chambre, 19 juin 2003, 01DA00373


Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Roger X, détenu au centre de détention ... par Me Agnès Pannier, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-2250 du 29 décembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 novembre 1997 par laquelle le directeur régional des services pénitentiaires de Lille lui a infligé la sanction de mise en cellule disciplinaire pour une durée de dix jours, dont six jours ave

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Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Roger X, détenu au centre de détention ... par Me Agnès Pannier, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-2250 du 29 décembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 novembre 1997 par laquelle le directeur régional des services pénitentiaires de Lille lui a infligé la sanction de mise en cellule disciplinaire pour une durée de dix jours, dont six jours avec sursis et, d'autre part, à la suppression de cette sanction de son dossier ;

2°) d'annuler ladite décision et de décider, en conséquence, notamment, la suppression de cette sanction de son dossier ;

Code C+ Classement CNIJ : 37-05-02-01

Il soutient que la décision attaquée du 26 novembre 1997 n'est pas suffisamment motivée ; que la maîtrise de la procédure par le directeur du centre de détention ne répond pas aux exigences du procès équitable au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la fouille de sa cellule à laquelle a procédé le surveillant et qui lui a permis de prendre connaissance de courriers destinés à diverses autorités administratives et judiciaires est irrégulière car elle méconnaît l'article D 262 du code de procédure pénale et a constitué une ingérence dans sa vie privée contraire à l'article 8 de cette convention ; que les menaces ou outrages reprochés et tels que visés par l'article 249-3-1° dudit code ne sont pas constitués ; qu'un détenu a le droit de présenter des plaintes contre des faits dont il est victime de la part de certains personnels pénitentiaires ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2001, présenté par le garde des sceaux, ministre de la justice qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la décision attaquée contient les considérations de fait et de droit qui la fondent ; que l'élaboration ou le prononcé des sanctions par les autorités administratives n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ; que les documents trouvés dans la cellule ne sont que des doubles de courriers et n'étaient pas placés sous enveloppe cachetée ; que l'article D 262 du code de procédure pénale a été respecté ; que le moyen fondé sur cet article est inopérant puisque l'auteur de la décision attaquée a requalifié les faits ; que le contrôle sur ces courriers est prévu par l'article D 269 dudit code et ne saurait constituer une violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ; que les termes des courriers sont diffamants et sont constitutifs d'une faute disciplinaire ; qu'aucune erreur manifeste d'appréciation ne saurait être retenue en l'espèce, la sanction prononcée apparaissant parfaitement proportionnée à la gravité de la faute et à la personnalité de son auteur ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 25 juin 2001 admettant M. Roger X au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment ses articles 6 et 8 ;

Vu le code de procédure pénale modifié dans sa rédaction issue du décret n° 96-287 du 2 avril 1996 relatif au régime disciplinaire des détenus ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juin 2003 où siégeaient Mme de Segonzac, président de chambre, Mme Brin, président-assesseur, MM. Lequien et Rebière, premiers conseillers et M. Baranès, conseiller :

- le rapport de Mme Brin, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Evrard, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par décision en date du 26 novembre 1997, le directeur régional des services pénitentiaires de Lille, sur recours administratif préalable de M. X, détenu au centre de détention de ..., a infligé à ce dernier une sanction de mise en cellule disciplinaire de dix jours dont six avec sursis en raison de la faute disciplinaire du troisième degré prévue à l'article D. 249-3-1° du code de procédure pénale commise par celui-ci ; que M. X fait appel du jugement du tribunal administratif de Rouen qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de ladite décision et conclut à la suppression de la mention de cette sanction dans son dossier ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'examen de la décision attaquée qu'elle comporte les énonciations de fait et de droit qui la fondent ; qu'elle est suffisamment motivée au sens de l'article D. 250-5 du code de procédure pénale ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article D. 269 du code de procédure pénale : Les surveillants procèdent, en l'absence des détenus, à l'inspection fréquente et minutieuse des cellules et locaux divers où les détenus séjournent, travaillent ou ont accès ; qu'aux termes de l'article D. 262 du même code : Les détenus peuvent, à tout moment, adresser des lettres aux autorités administratives et judiciaires françaises... Ces lettres peuvent être remises sous pli fermé et échappent alors à tout contrôle... ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que les documents appréhendés par le surveillant qui a procédé à la fouille de la cellule de M. X sont des doubles de lettres adressées par celui-ci au directeur du centre de détention qui n'étaient pas sous pli fermé ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ce serait irrégulièrement que le surveillant se serait saisi de ces documents n'est pas fondé ;

Considérant, en troisième lieu, que M. X invoque la méconnaissance des articles 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, d'une part, que le requérant ne saurait utilement invoquer que la procédure suivie à son encontre par le directeur du centre de détention, qui ne prend pas en commission de discipline une décision de caractère juridictionnel mais prononce une sanction administrative, méconnaîtrait l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui n'est applicable qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique... à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales... ou à la protection des droits et libertés d'autrui... ; que l'appréhension dans les conditions relatées ci-dessus de doubles de lettres adressées par M. X au directeur du centre de détention, dont les originaux ont été remis à leur destinataire, n'a pas excédé ce qui était nécessaire à la préservation de la sécurité et de l'ordre au sein de l'établissement pénitentiaire ; que cette mesure, dans ces conditions, n'a pas été prise en violation des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article D. 249-3 du code de procédure pénale : Constitue une faute disciplinaire du troisième degré le fait, pour un détenu : 1° De formuler des outrages ou des menaces dans les lettres adressées aux autorités administratives et judiciaires ; que selon les articles D. 251 et D. 251-3 du même code peut être prononcée la sanction disciplinaire de mise en cellule disciplinaire dont la durée ne peut excéder quinze jours pour une faute disciplinaire du troisième degré ; qu'il ressort des pièces du dossier que les réclamations du 13 octobre 1997 adressées au directeur du centre de détention dans lesquelles M. X se plaint des agissements des membres du personnel à son égard comporte des propos à l'égard du sous-directeur de l'établissement et des surveillants dont la teneur présente un caractère outrageant ; que ces faits sont constitutifs d'une faute disciplinaire du troisième degré ; que, par suite, en prenant la décision attaquée le directeur régional des services pénitentiaires de Lille s'et fondé sur des faits qui sont de nature à justifier une sanction disciplinaire de mise en cellule disciplinaire ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;

Considérant, en dernier lieu, que le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions de la requête tendant à ce que la mention de ladite sanction soit supprimée du dossier de M. X doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Roger X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Roger X et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 4 juin 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 19 juin 2003.

Le rapporteur

Signé : D. Brin

Le président de chambre

Signé : M. de Segonzac

Le greffier

Signé : P. Lequien

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier

Philippe Lequien

6

N°01DA00373


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme de Segonzac
Rapporteur ?: Mme Brin
Rapporteur public ?: M. Evrard
Avocat(s) : PANNIER

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3eme chambre
Date de la décision : 19/06/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 01DA00373
Numéro NOR : CETATEXT000007599423 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-06-19;01da00373 ?
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