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01/07/2003 | FRANCE | N°00DA01057

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2eme chambre, 01 juillet 2003, 00DA01057


Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés les 4 septembre 2000 et 20 octobre 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentés pour la société Etablissements X dont le siège est situé place Leroux de Fauquemont à Lille (59004) en la personne de ses représentants légaux en exercice demeurant audit siège, par la SCP Vier et Barthélémy, avocats au Conseil ; la société Etablisssements X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 22 juin 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête tendant à l'annulat

ion de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé plus de 4 ...

Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés les 4 septembre 2000 et 20 octobre 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentés pour la société Etablissements X dont le siège est situé place Leroux de Fauquemont à Lille (59004) en la personne de ses représentants légaux en exercice demeurant audit siège, par la SCP Vier et Barthélémy, avocats au Conseil ; la société Etablisssements X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 22 juin 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé plus de 4 mois par le Premier ministre sur sa demande tendant à la réparation du préjudice subi par elle du fait de la suppression le 1er janvier 1993 des formalités douanières entre la France et les autres membres de l'Union européenne en vertu de l'Acte unique européen des 17 et 28 février 1986 ;

2°) d'annuler ladite décision et de condamner l'Etat à lui verser la somme de

11 003 879 francs avec intérêts et capitalisation des intérêts ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 francs en application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Code D Classement CNIJ : 60-01-02-01-01-02

Elle soutient que le jugement est insuffisamment motivé en ne répondant pas à l'argumentation sur la responsabilité sans faute de l'Etat ; qu'il est entaché d'une erreur de droit en ce que, pour écarter la responsabilité de l'Etat, il s'est fondé sur l'absence de disposition législative expresse prévoyant l'indemnisation des commissionnaires intéressés ; que la responsabilité pour faute peut être engagée en raison de l'absence de mesures transitoires alors que les commissionnaires en douane étaient dans l'obligation d'exercer leur activité jusqu'au 31 décembre 1992 ; que le préjudice subi est anormal et spécial ; que le protocole d'accord du 23 juillet 1992 a eu pour objet de mettre en place un système d'indemnisation des salariés des entreprises de commissionnaires en douane ; que l'absence totale d'indemnisation viole les dispositions de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en rompant le juste équilibre entre le but d'intérêt général poursuivi et la privation de propriété nécessaire pour le remplir ; que l'exclusion de principe de toute indemnisation la prive de tout recours juridictionnel effectif pour critiquer l'atteinte portée à son droit de propriété en violation des dispositions de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que c'est en violation du principe de confiance légitime et du principe de sécurité juridique que le jugement attaqué a écarté par principe l'indemnisation des conséquences dommageables de la transposition en droit interne des règles communautaires imposant la suppression des frontières entre Etats membres ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2000, présenté par le secrétaire d'Etat au budget ; il conclut au rejet de la requête et soutient qu'il n'y a pas, en l'espèce, rupture de l'égalité devant les charges publiques ; que le législateur a entendu exclure du droit à réparation les préjudices causés par une loi prise dans un intérêt général notamment en matière économique ; que les modifications apportées au code des douanes pour respecter les obligations communautaires n'étaient pas imprévisibles ; qu'il n'existe aucune indication formelle quant à la volonté des autorités communautaires d'indemniser ou non les commissionnaires en douane du préjudice subi ; que la profession devait aussi supporter une partie des charges liées à l'ouverture des frontières ; que le préjudice n'est pas spécial ; qu'il n'y a pas atteinte au droit de propriété ; que l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne prévoit pas le droit pour un justiciable d'obtenir une indemnisation en cas d'atteinte administrative au droit de propriété ; qu'en l'absence de garanties précises fournies par l'administration, la société requérante ne peut pas invoquer la violation du principe de protection et de confiance légitime ;

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative les parties ont été informées que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité de Rome en date du 25 mars 1957 modifié instituant la communauté économique européenne ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code des douanes ;

Vu la loi n° 92-677 du 17 juillet 1992 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2003 où siégeaient

M. Daël, président de la Cour, Mme Fraysse, président de chambre, Mme Lemoyne de Forges, président-assesseur, M. Nowak et M. Quinette, premiers conseillers :

- le rapport de Mme Lemoyne de Forges, président-assesseur,

- les observations de Me Deroide, avocat, membre de la SCP Vier et Barthélémy, avocats aux Conseils, pour la société Etablissements X,

- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société Etablissements X fait régulièrement appel du jugement en date du 22 juin 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à voir l'Etat condamné à réparer le préjudice subi par elle du fait de la suppression le 1er janvier 1993 des formalités douanières entre la France et les autres états membres de l'Union européenne en vertu de l'Acte unique européen des 17 et 28 février 1986 ;

Sur la responsabilité sans faute ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'article 111 de la loi du 17 juillet 1992, qui a inséré dans les dispositions du code des douanes un article 2 bis en vertu duquel ledit code ne s'applique pas à l'entrée et à la sortie du territoire des marchandises communautaires, a eu pour objet d'assurer le respect des obligations résultant pour la France du traité de Rome tel que modifié par l'Acte unique européen ; qu'en l'absence de disposition expresse prévoyant une indemnisation des commissionnaires en douane - et sans qu'à cet égard la société requérante puisse utilement se prévaloir de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du principe de confiance légitime - et compte tenu des objectifs d'intérêt général qu'elle poursuit, la loi du 17 juillet 1992 ne saurait engager la responsabilité de l'Etat ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, le protocole d'accord sur la mise en oeuvre du plan social concernant les salariés des entreprises titulaires d'un agrément en douane du 23 juillet 1992 n'a pas eu pour objet de mettre en place un régime d'indemnisation des commissionnaires en douane à raison des conséquences dommageables de la suppression des droits de douane pour les marchandises visées par la loi susmentionnée du 17 juillet 1992, mais seulement de permettre la reconversion des agents et commissionnaires en douane ;

Sur la responsabilité pour faute :

Considérant que la société Etablissements X ne s'est prévalue devant le tribunal administratif de Lille que de la responsabilité sans faute de l'Etat ; que les conclusions qu'elle fonde en appel sur la faute qu'aurait commise l'Etat pour ne pas avoir pris les mesures transitoires devant permettre aux commissionnaires en douane de se préparer à l'échéance du 1er janvier 1993 reposent ainsi sur une cause juridique distincte et constituent une demande nouvelle que la société requérante n'est pas recevable à présenter pour la première fois en appel ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Etablissements X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, au demeurant suffisamment motivé, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société Etablissements X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Etablissements X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Etablissements X ainsi qu'au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 17 juin 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 1er juillet 2003.

Le rapporteur

Signé :

P. Lemoyne de Forges

Le président de la Cour

Signé : S. Daël

Le greffier

Signé : M.T. Lévèque

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier

Marie-Thérèse Lévèque

N°00DA01057 6


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. le Prés Daël
Rapporteur ?: Mme Lemoyne de Forges
Rapporteur public ?: M. Michel
Avocat(s) : SCP VIER et BARTHELEMY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2eme chambre
Date de la décision : 01/07/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 00DA01057
Numéro NOR : CETATEXT000007601171 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-07-01;00da01057 ?
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