La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/07/2003 | FRANCE | N°01DA01036

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ere chambre, 22 juillet 2003, 01DA01036


Vu le recours, enregistré le 5 novembre 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présenté par le ministre de l'intérieur qui demande à la Cour d'annuler le jugement n° 01-245 du 25 septembre 2001 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision par laquelle le préfet de l'Oise a implicitement refusé l'admission au séjour de Mme Kheira X ;

Il soutient que l'intéressée ne justifiait pas son état de grossesse au moment où elle a demandé à bénéficier de l'article 7 de l'accord franco-algérien ; que rien ne s'opposait à ce que Mme X re

gagne l'Algérie pour permettre à son époux d'engager à son égard une procé...

Vu le recours, enregistré le 5 novembre 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présenté par le ministre de l'intérieur qui demande à la Cour d'annuler le jugement n° 01-245 du 25 septembre 2001 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision par laquelle le préfet de l'Oise a implicitement refusé l'admission au séjour de Mme Kheira X ;

Il soutient que l'intéressée ne justifiait pas son état de grossesse au moment où elle a demandé à bénéficier de l'article 7 de l'accord franco-algérien ; que rien ne s'opposait à ce que Mme X regagne l'Algérie pour permettre à son époux d'engager à son égard une procédure de regroupement familial ;

Vu le jugement attaqué ;

Code C Classement CNIJ : 335-01-03

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 février 2002, présenté pour Mme Kheira X, par Me Engueleguele, avocat ; elle conclut au rejet du recours et à la condamnation du ministre de l'intérieur à lui verser une somme de 1 372 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que les documents médicaux sont parfaitement cohérents contrairement à ce qui est prétendu par le ministre ; que sa situation d'épouse d'un ressortissant français dont elle attendait un enfant caractérisait des liens tels qu'un refus de séjour violerait les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales nonobstant la possibilité qui lui était offerte de pouvoir se rendre dans son pays d'origine pour y amorcer la procédure de regroupement familial ; que la légalité de la décision doit s'apprécier à la date à laquelle elle est intervenue ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juillet 2003 où siégeaient Mme Sichler, président de chambre, Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur et M. Quinette, premier conseiller :

- le rapport de M. Quinette, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de la décision du préfet de l'Oise :

Considérant que l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié par le premier avenant du 22 décembre 1985, fixe les conditions de délivrance aux ressortissants algériens d'un certificat de résidence valable un an, selon que les demandeurs sollicitent le bénéfice d'un tel titre en qualité de visiteur, de travailleur salarié, en vue de l'exercice d'une activité professionnelle soumise à autorisation ou au titre du regroupement familial ; que l'article 7 bis de l'accord précité fixe les conditions de délivrance du certificat de résidence de dix ans et précise les catégories de personnes auxquelles ce certificat est délivré de plein droit ; qu'aux termes de l'article 9 de cet accord : Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7 et 7 bis, alinéa 4 (lettres a à d)... Les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. Ce visa de long séjour accompagné de pièces et documents justificatifs permet d'obtenir un certificat de résidence dont la durée de validité est fixée par les articles et titre mentionnés à l'alinéa précédent ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions, que la délivrance d'un certificat de résidence au titre des articles 5, 7 et 7 bis, est subordonnée à la possession d'un visa long séjour ; qu'il est constant que Mme Touati, ressortissante algérienne, est entrée en France sous couvert d'un visa touristique délivré par les autorités consulaires grecques en poste à Alger et non d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ; que, par suite, le préfet était susceptible sur le fondement des dispositions précitées de lui refuser l'admission au séjour ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2° il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des actions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que Mme X-Touati s'est mariée le 3 juillet 2000 à M. X, ressortissant français avec lequel elle vivait en union maritale depuis avril 2000 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle la décision de rejet implicite de sa demande de délivrance d'un certificat de résidence portant la mention visiteur est intervenue, elle attendait un enfant dont M. X est le père ; que, dans les circonstances de l'espèce, ladite décision a porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et a donc méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que les membres de la famille qui peuvent bénéficier du regroupement familial prévu par l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié par l'article 3 de son 1er avenant du 22 décembre 1985 s'entendent, aux termes du titre II du protocole qui s'y trouve annexé, du conjoint d'un ressortissant algérien, de ses enfants mineurs ainsi que des enfants de moins de dix-huit ans dont il a juridiquement la charge en vertu d'une décision de l'autorité judiciaire algérienne ; que Mme X, mariée à un ressortissant français, ne figure pas au nombre des ressortissants algériens susceptibles de bénéficier de la procédure de regroupement familial ; que le moyen invoqué par le ministre de l'intérieur et tiré de la faculté qui serait ouverte à l'intéressée de solliciter le bénéfice d'un tel regroupement est, par suite inopérant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision par laquelle le préfet de l'Oise a implicitement rejeté sa demande de délivrance d'un certificat de résidence portant la mention visiteur ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à Mme Kheira X la somme de 1 372 euros qu'elle demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à Mme Kheira X une somme de 1 372 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et à Mme Kheira X.

Copie sera transmise au préfet de l'Oise.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 8 juillet 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 22 juillet 2003.

Le rapporteur

Signé : J. Quinette

Le président de chambre

Signé : F. Sichler

Le greffier

Signé : M. Milard

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier

Muriel Milard

5

N°01DA01036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 01DA01036
Date de la décision : 22/07/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Sichler
Rapporteur ?: M. Quinette
Rapporteur public ?: M. Yeznikian
Avocat(s) : ENGUELEGUELE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-07-22;01da01036 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award