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22/07/2003 | FRANCE | N°02DA00596

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ere chambre, 22 juillet 2003, 02DA00596


Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2002 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SA X dont le siège administratif est 12, rue de la Chapelle à La Chapelle-Felcourt (51800), par la SCP ACG et associés, avocats ; la société demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 8 janvier 2002 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a condamnée à payer une amende de 60 000 francs (9 146,94 euros) et à payer à Voies Navigables de France la somme de 77 943,32 francs (11 882,38 euros) ;

Elle fait valoir que l'auteur du procès-verbal n'a

fait que constater, le 13 octobre 1999, l'existence de dégradations ...

Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2002 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SA X dont le siège administratif est 12, rue de la Chapelle à La Chapelle-Felcourt (51800), par la SCP ACG et associés, avocats ; la société demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 8 janvier 2002 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a condamnée à payer une amende de 60 000 francs (9 146,94 euros) et à payer à Voies Navigables de France la somme de 77 943,32 francs (11 882,38 euros) ;

Elle fait valoir que l'auteur du procès-verbal n'a fait que constater, le 13 octobre 1999, l'existence de dégradations sur les chemins de service ; qu'il n'a pu voir les engins de la société X causer ces dégradations ; qu'en effet la société X ne possède pas d'engins de débardage de ce type ; que les travaux de débardage ont été réalisés par des sous-traitants, pour l'essentiel les établissements Gorsky ; que les dates et heures des dégradations ne sont pas précisées ; qu'en tout état de cause, la contravention dont il s'agit a été amnistiée ; que la réalisation des travaux et leur paiement n'ont fait l'objet d'aucune justification ; que seul le montant hors taxes peut être retenu ; qu'il n'est pas justifié de l'état de la dépendance du domaine public avant le passage des engins de débardage ; que les dégâts ont été réparés à la demande de la société X et aux frais des sous-traitants ;

Vu le jugement attaqué ;

Code C Classement CNIJ : 24-01-03-01-03

Vu le mémoire en intervention, enregistré le 23 juillet 2002, présenté pour la compagnie d'assurances Fortis A.G., en sa qualité d'assureur de la société X, par la SCP Marc Leclercq et Daniel Caron, qui conclut aux mêmes fins que la requête et à ce qu'il soit donné acte qu'elle garantira la S.A. X de toute condamnation pécuniaire prononcée à son encontre, dans les limites fixées par le contrat d'assurance ; qu'elle ne saurait supporter, ni le coût des dommages inévitables, ni le paiement de l'amende ; qu'elle fait siens les moyens de la requête ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2002, présenté par Voies Navigables de France qui conclut au rejet de la requête ; l'établissement fait valoir que la requérante n'a pas acquitté de droit de timbre ; que la contravention de grande voirie correspond à une infraction matérielle objective, indépendante de tout élément moral ; que la requérante a reconnu explicitement les dommages commis par son entreprise ; que son représentant, M. Y, était présent sur les lieux lors du constat des faits ; que de tels faits s'étaient déjà produits ; que la loi d'amnistie n'affecte pas l'action en réparation ; que la société ne peut se prévaloir de ce que Voies Navigables de France n'aurait justifié, ni avoir réalisé les travaux, ni avoir réglé les entreprises ; que le montant de la réparation inclut la taxe sur la valeur ajoutée, dès lors que Voies Navigables de France ne bénéficie d'aucun régime fiscal particulier lui permettant de déduire la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le coût de remise en état ; qu'elle ne peut davantage se prévaloir d'un éventuel mauvais état antérieur de l'ouvrage ; qu'une énonciation insuffisante des faits n'est pas cause de nullité de procès-verbal lorsque le contrevenant a reconnu la matérialité desdits faits ; que si l'agent verbalisateur a constaté les faits après la commission de l'infraction, les énonciations du procès-verbal ont été confirmées par l'instruction ; que la requérante n'a pas procédé à la remise en état du domaine mais a seulement effectué un nivellement grossier ; que les travaux doivent être réalisés dans les règles de l'art pour permettre l'accès, par tous temps, aux ouvrages de navigation par les chemins de service ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 10 octobre 2002, présenté pour la S.A. X qui conclut à ce que la Cour se déclare incompétente quant aux modalités d'application du contrat qui la lie à la société Fortis et à ce que cette société soit condamnée à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ; elle soutient qu'elle a acquitté le droit de timbre ; que l'amende a été amnistiée ; que le chemin a été remis en état ; qu'il n'appartient pas au juge administratif de statuer sur les modalités d'application du contrat d'assurances qui la lie à la compagnie Fortis ; qu'en tout état de cause la compagnie ne justifie nullement de l'existence de dommages inévitables non couverts par la police d'assurances ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 novembre 2002, présenté par Voies navigables de France, concluant aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens et à la condamnation de la S.A. X au paiement de la somme de 763 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; l'établissement soutient que les devis transmis, tant pour leurs descriptifs que pour leur montant, prouvent qu'il s'agit bien de dégradations commises par la société requérante ; que leur montant ne présente aucun caractère anormal ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 novembre 2002, présenté pour la compagnie d'assurances Fortis A.G. qui déclare s'en remettre à la sagesse de la Cour quant à sa compétence et conclut, par ailleurs, aux mêmes fins que son précédent mémoire ; elle déclare s'associer aux dires de la S.A. X ; que Voies Navigables de France ne rapporte pas la preuve qu'un engin appartenant à la société X aurait causé les dégâts dont s'agit ; qu'ils sont imputables à un sous-traitant ; que le préjudice n'est pas justifié dans son montant ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juillet 2003 où siégeaient Mme Sichler, président de chambre, Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur et M. Quinette, premier conseiller :

- le rapport de Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention de la compagnie d'assurances Fortis :

Considérant que la compagnie d'assurances Fortis, assureur de la société X, a intérêt à intervenir dans l'instance introduite par cette société devant la Cour ; que, toutefois, celles de ses conclusions qui tendent à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle n'indemnisera son assurée que dans les limites fixées par le contrat d'assurances doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Sur les conclusions de la requête relatives à l'amende :

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la requérante ait acquitté le montant de l'amende qui lui a été infligée par le tribunal administratif avant la publication de la loi d'amnistie du 6 août 2002 ; que les dispositions de cette loi font obstacle à l'exécution de la condamnation à l'amende ; que les conclusions de la requête tendant à la décharge de l'amende étant ainsi devenues sans objet, il n'y a pas lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions de la requête relatives à la réparation des dommages :

Considérant qu'aux termes de l'article 24 du code du domaine public fluvial : il est interdit de dégrader, détruire ou enlever les ouvrages construits pour la sûreté et la facilité de la navigation et du halage sur les rivières et canaux navigables ou flottables ou le long de ces voies ;

Considérant que, le 13 octobre 1999, un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé à l'encontre de la société X pour avoir, d'une part, causé d'importantes dégradations sur les chemins de service de la rigole d'alimentation du canal de l'Oise à l'Aisne, dépendances du domaine public fluvial et, d'autre part, détérioré des panneaux de signalisation, des garde-corps et des mains courantes ; que ces dommages, causés par le passage d'engins forestiers lors de travaux de débardage, ont pu être imputés à la société X qui ne nie pas être attributaire des marchés de coupe de bois en cause ; que si la société soutient pour la première fois devant le juge d'appel que les dommages auraient été causés par les engins de débardage d'entreprises sous-traitantes, elle ne produit aucun élément de preuve à l'appui de ses allégations ;

Considérant que la circonstance que le procès-verbal ne précise pas la date et l'heure des dégradations n'est pas une cause de nullité ; que lorsqu'il a été établi par un agent verbalisateur qui n'a pas été témoin des faits, il peut néanmoins servir de base aux poursuites et motiver une condamnation si, comme en l'espèce, ses énonciations sont corroborées par l'instruction ;

Considérant que le contrevenant peut être condamné à rembourser à la collectivité publique concernée le montant des frais exposés ou à exposer par celle-ci pour la remise en état du domaine public ; que la collectivité n'est au demeurant pas tenue de consacrer l'indemnité destinée à compenser l'atteinte au domaine public à la réalisation effective des travaux de remise en état ; que la société requérante ne peut donc utilement se prévaloir de ce que l'administration ne justifierait, ni de la réalisation, ni du règlement préalable desdits travaux ; qu'il résulte de l'instruction que le montant des travaux nécessaires à la remise en état des ouvrages endommagés s'élève à 77 943,32 francs ; que ce montant ne présente pas un caractère anormal ; que la réparation domaniale inclut la taxe sur la valeur ajoutée, qui est un élément indissociable des frais de réparation, dès lors que l'établissement public Voies Navigables de France n'est pas soumis à un régime fiscal qui lui permet normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle dont il est redevable au titre de ses propres opérations ; que la société X ne peut utilement se prévaloir pour échapper à cette réparation, ni du prétendu état antérieur des dépendances domaniales, ni de ce qu'elle aurait spontanément fait procéder à leur remise en état, dès lors qu'il résulte de l'instruction que les travaux effectués consistent en un nivellement grossier des chemins endommagés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens l'a condamnée à payer à l'établissement public Voies Navigables de France la somme de 77 943,32 francs (11 882,38 euros) ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de la compagnie d'assurances Fortis est admise.

Article 2 : Les conclusions de la compagnie d'assurances Fortis tendant à ce qu'il soit donné acte de ce qu'elle n'indemnisera son assurée que dans les limites fixées par le contrat d'assurances sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête relatives à l'amende.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société X est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société X, à l'établissement public Voies Navigables de France, à la compagnie d'assurances Fortis et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 8 juillet 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 22 juillet 2003.

Le rapporteur

Signé : M. Merlin-Desmartis

Le président de chambre

Signé : F. Sichler

Le greffier

Signé : M. Milard

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le Greffier

Muriel Milard

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N°02DA00596


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 02DA00596
Date de la décision : 22/07/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Composition du Tribunal
Président : Mme Sichler
Rapporteur ?: Mme Merlin-Desmartis
Rapporteur public ?: M. Yeznikian
Avocat(s) : SCP ACG et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-07-22;02da00596 ?
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