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20/11/2003 | FRANCE | N°00DA00136

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3, 20 novembre 2003, 00DA00136


Vu la requête, enregistrée le 25 janvier 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée par M. X... , demeurant ... ; il demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n° 96-228 en date du 18 novembre 1999 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juin 1995 par lequel le recteur de l'académie de Lille a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux du 10 juillet 1995 ;

2') d'annuler l'arrêté du recteur de

l'académie de Lille du 22 juin 1995 ;

3') d'ordonner sous astreinte sa ré...

Vu la requête, enregistrée le 25 janvier 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée par M. X... , demeurant ... ; il demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n° 96-228 en date du 18 novembre 1999 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juin 1995 par lequel le recteur de l'académie de Lille a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux du 10 juillet 1995 ;

2') d'annuler l'arrêté du recteur de l'académie de Lille du 22 juin 1995 ;

3') d'ordonner sous astreinte sa réintégration au sein de l'éducation nationale ;

4') à titre accessoire, d'ordonner une expertise relative à ses capacités pédagogiques ;

5') de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Code C Classement CNIJ : 36-10-06-02

Il soutient que le jugement n°est pas suffisamment motivé ; qu'il n°a pas été répondu à des arguments qu'il a présentés ; que le tribunal administratif a ainsi manqué à l'obligation d'impartialité qui s'impose à lui ; que la désignation d'un expert s'imposait pour vérifier ses compétences en anglais ; qu'en se bornant à indiquer que le licenciement est fondé sur son insuffisance professionnelle, l'arrêté attaqué n°est pas suffisamment motivé ; que le retrait de sa délégation constitue une sanction disciplinaire qui entre dans le champ d'application de la loi d'amnistie du 3 août 1995 dont il doit bénéficier ; que le tribunal administratif qui a mis en évidence l'erreur de fait dont s'est rendue coupable l'administration devait annuler l'arrêté attaqué ; que la décision attaquée est fondée sur une inspection qui s'est déroulée irrégulièrement et sur des faits relatés de manière inexacte ; qu'elle est entachée de détournement de pouvoir et d'une erreur manifeste d'appréciation concernant l'insuffisance professionnelle qui lui est reprochée ; que les propos à caractère raciste dont il a fait l'objet devaient être pris en compte pour apprécier les difficultés à enseigner au sein de sa classe ; que la décision attaquée est disproportionnée par rapport aux faits reprochés et repose sur l'appréciation de fait antérieurs et ayant fait l'objet d'une précédente inspection ; qu'il a bénéficié de bonnes notes avant que sa situation ne se dégrade ;

Vu la décision et le jugement attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2003, présenté par le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que le tribunal administratif a répondu à toutes les conclusions et à tous les moyens et a suffisamment motivé son jugement ; que les juges, en ne retenant que certains motifs ont précisé les motivations pour lesquelles le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. X était justifié et n°ont donc pas fait preuve de partialité ; que la décision mettant fin aux fonctions du requérant est suffisamment motivée ; que le recteur n°a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des compétences de l'intéressé ; que l'insuffisance professionnelle ne constitue pas une faute susceptible d'être sanctionnée sur le terrain disciplinaire ; que, compte tenu des lacunes d'ordre pédagogique importantes de l'intéressé et des problèmes de discipline rencontrés, qui pouvaient compromettre la sécurité des élèves, la mesure prise à l'encontre de M. n°est pas disproportionnée ; que le licenciement pour insuffisance professionnelle ne constituant pas une sanction, M. ne peut invoquer le bénéfice de la loi du 3 août 1995 portant amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles ; qu'en mettant fin aux fonctions de M. , le recteur n°a entaché sa décision ni d'erreur manifeste d'appréciation ni de détournement de pouvoir ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;

Vu le décret n° 62-379 du 3 avril 1962 fixant les dispositions applicables aux maîtres

auxiliaires ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2003 où siégeaient M. Merloz, président de chambre, Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur et M. Lequien, premier conseiller :

- le rapport de M. Lequien, premier conseiller,

- les observations de M. X... X, requérant,

- et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête de M. est dirigée contre un jugement en date du 18 novembre 1999 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juin 1995 par lequel le recteur de l'académie de Lille a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que M. soutient que le tribunal n°a pas tenu compte des pièces du dossier qui lui étaient favorables, qu'il a laissé un délai important à l'administration pour défendre à l'instance et qu'il n°a pas répondu à l'ensemble de ses arguments ; que, toutefois, par ses seules allégations, M. n°établit pas que le tribunal administratif aurait manqué d'impartialité et aurait méconnu les dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué que le tribunal, en répondant que la décision attaquée comportait les éléments de droit et de fait justifiant la mesure prise a suffisamment répondu au moyen de M. tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée et a mis, en l'espèce, le juge d'appel à même de contrôler son raisonnement ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision attaquée :

Considérant que M. , qui exerçait les fonctions de maître auxiliaire d'anglais au collège Gérard A... d'..., a été licencié pour insuffisance professionnelle par arrêté du recteur de l'académie de Lille du 22 juin 1995 ; que cet arrêté qui comporte les éléments de droit et les circonstances de fait qui ont conduit au licenciement pour insuffisance professionnelle de l'intéressé est suffisamment motivé ;

Considérant que l'arrêté de licenciement pour insuffisance professionnelle a été décidé pour les motifs suivants : 'ne maîtrise pas certaines classes ; mise en oeuvre du projet linguistique superficielle ; ne s'est pas rendu capable d'assumer un enseignement de qualité acceptable' ; qu'il s'agit de motifs liés à l'inaptitude professionnelle de M. et non à des raisons d'ordre disciplinaire ; qu'en outre la circonstance que la procédure contradictoire a été accomplie, même sans obligation, n°a pas pour effet de transformer la décision prise en sanction disciplinaire déguisée ; qu'ainsi, le requérant n°est pas fondé à invoquer le bénéfice de la loi d'amnistie du 3 août 1995, dès lors que l'administration n°a prononcé aucune sanction disciplinaire à son encontre ;

Considérant, en tout état de cause, que si le tribunal administratif a cru devoir censurer le motif de la décision attaquée lié à la non maîtrise de certaines classes par M. , les deux autres motifs d'ordre purement pédagogique ont pu être formulés par l'inspecteur à l'issue d'une inspection dans une classe et pendant une seule heure ; qu'en outre, il est constant que M. a fait l'objet entre 1990 et 1995 de trois inspections dont les résultats sont totalement convergents sur le plan pédagogique ; qu'ainsi, il y a lieu d'écarter le moyen du requérant tiré de la contradiction dans le raisonnement des premiers juges pour censurer le premier motif de la décision rectorale et pour justifier ensuite les deux autres motifs de la même décision ;

Considérant que la décision du recteur prononçant le licenciement de M. pour insuffisance professionnelle repose principalement sur les difficultés pédagogiques rencontrées par l'enseignant ; que, toutefois, M. rencontrait également des difficultés d'ordre disciplinaire dans ses classes, même si une partie d'entre elles dépassait le cas individuel de l'enseignant ; que, contrairement à ce que soutient M. , l'inspecteur régional d'anglais pouvait régulièrement, au cours de l'inspection conduite en mai 1995, rendre compte des deux autres inspections qui se sont déroulées en mai 1990 et juin 1991 pour comparer ses impressions et analyses à celles de ses deux collègues précédents ; que la circonstance que des expressions ont été empruntées aux deux premiers rapports est sans influence sur la légalité du troisième ; qu'en outre, les problèmes d'ordre purement pédagogique de M. et ses difficultés à enseigner l'anglais aux classes sont relevées dans les trois rapports d'inspection précités et ses difficultés à gérer les classes sur le plan disciplinaire sont également chroniques ainsi que l'attestent certaines de ses notes administratives annuelles ; qu'enfin, la circonstance que ses insuffisances pédagogiques aient été analysées à l'occasion du passage de M. dans des collèges difficiles ne prive pas la mesure de sa pertinence ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de licenciement pour insuffisance professionnelle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que si M. se prévaut d'un détournement de pouvoir, ce moyen, qui n°est pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier le bien fondé, doit être écarté ;

Sur les conclusions aux fins d'expertise :

Considérant que M. demande à la Cour de désigner un expert dans le but de déterminer ses mérites professionnels ; que l'état du dossier permet à la Cour de statuer sur la requête de M. sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise sollicitée ; que, par suite, les conclusions du requérant aux fins d'expertise doivent être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. n°est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt n°implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions de M. tendant à ce que la Cour ordonne sous astreinte sa réintégration au sein de l'éducation nationale ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel devenu L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n°est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Lille.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 6 novembre 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 20 novembre 2003.

Le rapporteur

Signé : A. Y...

Le président de chambre

Signé : G. Z...

Le greffier

Signé : B. B...

La République mande et ordonne au ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier

B. B...

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N°00DA00136

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N°00DA00136


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00DA00136
Date de la décision : 20/11/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Merloz
Rapporteur ?: M. Lequien
Rapporteur public ?: M. Yeznikian

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-11-20;00da00136 ?
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