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09/12/2003 | FRANCE | N°00DA00785

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3, 09 décembre 2003, 00DA00785


Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2000, présentée par M. Roland X, demeurant ... ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-2722 en date du 11 mai 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôts sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1993, 1994 et 1995 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2500 francs au t

itre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administrative...

Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2000, présentée par M. Roland X, demeurant ... ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-2722 en date du 11 mai 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôts sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1993, 1994 et 1995 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2500 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Code D Classement CNIJ : 19-04-01-02-03-04

Il soutient que l'article 92 B du code général des impôts ne permet pas l'imposition d'une plus value ne résultant pas d'opérations de bourse effectuées à titre habituel ; qu'aucun impôt ne peut être légalement perçu sans qu'il ne soit fondé sur un texte l'ayant expressément prévu ; qu'il n'a jamais possédé de portefeuille de valeurs mobilières et qu'il n'y a eu qu'une seule opération, le 31 mars 1993, portant sur les 158 OPALYS du Crédit Agricole inscrites à titre d'achat en comptes titres de l'établissement bancaire par fractions mensuelles à mesures de ses tirages sur le crédit hypothécaire auquel elles étaient liées ; que le prêt hypothécaire, la souscription de fonds communs de placement émise par le banquier, concomitante à la mise en place d'un prêt pour les besoins de l'inscription hypothécaire et leur cession sont des éléments indissociables d'une seule et même opération bancaire de crédit hypothécaire à la consommation qui ne relève pas de l'article 92 B précité ; qu'à supposer l'existence d'une plus-value au sens de l'article 92 B du code général des impôts, il aurait dû bénéficier de l'application des dispositions de l'alinéa 2 du même article dès lors qu'il est établi qu'au moment des opérations litigieuses, il était au chômage suite à un licenciement ; que les intérêts acquittés au banquier émetteur des titres payés avec ses propres deniers s'ajoutent au prix d'acquisition pour le calcul de la plus value comme étant un élément de ce prix déductible du prix de cession ; qu'il est démontré que la procédure engagée à l'encontre de son employeur pour obtenir sa condamnation en vue d'exécuter son contrat de travail est à l'origine de dépenses effectuées en vue de l'acquisition du revenu au sens de l'article 13-1 du code général des impôts ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 février 2001, présenté par le directeur départemental de contrôle fiscal du Nord, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la domiciliation des titres chez le banquier n'empêche pas M. X d'en être resté le véritable propriétaire dès lors que les sommes nécessaires à l'achat de titres ont été débitées de son compte courant bancaire pour constituer le portefeuille et que ce sont ses tirages personnels sur le crédit hypothécaire pour faire face à ses besoins de trésorerie qui ont occasionné la reprise des titres par le banquier ; que si en pratique, l'article 92 du code général des impôts ne permet la taxation des plus-values de cessions de titres qu'envers les contribuables réalisant à titre habituel des opérations de bourse dépassant la simple gestion d'un portefeuille, le 1° du 2 du même article n'exclut pas les produits de cessions non habituelles dont les modalités d'imposition sont définies à l'article 92 B ; que le tempérament qui consiste pour apprécier le franchissement du seuil d'imposition, à prendre en considération la moyenne des cessions de l'année considérée et des deux suivantes trouve à s'appliquer aux personnes privées d'activité professionnelle pour des raisons indépendantes de leur volonté et sont inscrites comme demandeur d'emploi à l'ANPE, cette mesure n'est applicable que lorsque les titres ont été acquis avant la période de chômage ; or, en l'espèce, le requérant n'a acquis les titres en cause que postérieurement à son licenciement datant de février 1992 ; que les intérêts d'emprunt payés, qui au demeurant ne sont pas directement liés à l'acquisition des titres par elle même, ne figurent pas parmi les frais d'acquisition visés par l'article 94 A 1 du code général des impôts et ne peuvent donc être déduits ; que s'agissant de la déduction des frais professionnels, si M. X a effectivement intenté un procès contre son ancien employeur, il ne démontre pas qu'il visait ainsi à obtenir le paiement de salaire imposable ou des indemnités de licenciement ayant le caractère de dommages et intérêts ; que M.X n'est fondé à demander ni l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, ni l'application de l'article R. 217 du même code ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 23 mars 2001, présenté par M. X qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, qu'il établit que l'événement exceptionnel dont il fait état pour bénéficier de l'application des dispositions de l'article 92 B du code général des impôts est la persistance de sa situation de chômage et que la loi n'édicte aucune restriction quant à la date à laquelle l'événement qu'elle vise doit intervenir ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 avril 2001, présenté par le directeur départemental de contrôle fiscal Nord, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2003 où siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, M. Nowak, premier conseiller et Mme Eliot, conseiller :

- le rapport de Mme Eliot, conseiller,

- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Roland X forme appel du jugement susvisé du tribunal administratif de Lille en date du 11 mai 2000 qui a rejeté les demandes du contribuable tendant à la décharge des compléments d'impôts sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1993, 1994 et 1995 à raison d'une part de la plus value qu'il a réalisée en 1993 suite à une cession de titres et d'autre part de la réintégration des frais professionnels qu'il a déclarés en 1994 et 1995 ;

Sur la plus-value réalisée en 1993 :

Considérant qu'en vertu de l'article 92 B du code général des impôts, les gains nets retirés de la cession, à titre onéreux, de valeurs mobilières par un contribuable qui n'effectue pas habituellement des opérations de bourse sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, lorsque le montant des cessions réalisées par ce contribuable au cours d'une même année excède une somme qui, pour l'année 1980, était fixée à 166 000 francs ; qu'aux termes du deuxième alinéa de ce même article : Toutefois, dans des cas et conditions fixés par décret en Conseil d'Etat et correspondant à l'intervention d'un évènement exceptionnel dans la situation personnelle, familiale ou professionnelle du contribuable, le franchissement de la limite précitée... est apprécié par référence à la moyenne des cessions de l'année considérée et des deux années précédentes. Les évènements exceptionnels mentionnés ci-dessus doivent notamment s'entendre de la mise à la retraite, du chômage, de l'invalidité, du règlement judiciaire ou de la liquidation de biens du contribuable ou de son conjoint, ou du décès de son conjoint ; qu'aux termes de l'article 39 A de l'annexe II au code général des impôts, pris en application de ces dispositions, est pris en compte : ...1°) le licenciement du contribuable ou de son conjoint... 7°Tout autre évènement exceptionnel affectant la situation personnelle, familiale ou professionnelle du contribuable et revêtant un caractère de gravité tel qu'il contraigne le contribuable, pour y faire face, à liquider tout ou partie de son portefeuille ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Roland X, licencié en février 1992, a contracté, auprès de la caisse régionale du crédit mutuel du Pas-de-Calais, un emprunt hypothécaire à la consommation d'un montant de 360 000 francs ; que dans le cadre de la même opération bancaire, il a ouvert un compte titres constitué de fonds communs de placement, financé par les fractions non immédiatement utilisées par ce prêt et lui permettant de disposer d'un supplément de trésorerie à l'occasion de chacun de ses tirages mensuels sur son crédit ; qu'au cours de la même année, il a cédé, pour un montant de 166 172,44 francs, une partie des titres ainsi acquis afin de répondre à la nécessité de compenser la perte de revenus qu'il subissait depuis son licenciement en février 1992 ; qu'il a réalisé à cet effet une plus-value de 4 755,48 francs ;

Considérant qu'il est constant qu'en 1993, M. X a géré un portefeuille de titres nonobstant la circonstance que l'acquisition et la revente de ceux-ci étaient liées au prêt hypothécaire qu'il avait obtenu ; que dès lors, les opérations bancaires réalisées par M. X au cours de cette année, contrairement à ce qu'il soutient, rentrent dans le champ d'application des dispositions de l'article 92 B du code général des impôts précitées ;

Considérant, que si le licenciement constitue en lui-même un événement exceptionnel au sens de l'article 92 B du code général des impôts et de l'article 39 A-1° de l'annexe II dudit code, les opérations de cession de valeurs mobilières réalisées au cours de la période précédant ou suivant cet événement ne peuvent toutefois bénéficier des dispositions du 2ème alinéa précité de l'article 92 B du code général des impôts, que dans la mesure où elles peuvent être regardées comme liées à la modification de la situation personnelle du contribuable résultant dudit événement ; qu'en l'espèce, si M. X soutient en particulier, qu'il doit assurer les besoins vitaux de sa famille dont les études universitaires de deux de ses enfants majeurs, il n'établit pas, en l'absence d'éléments de justification, que l'achat de titres auquel il a procédé après son licenciement et par voie de conséquence la cession d'une partie de ceux-ci, étaient nécessairement et directement liés à la modification de sa situation consécutive à la cessation de son activité professionnelle ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du 1 de l'article 94 A du code général des impôts, alors en vigueur et relatives à la détermination du montant imposable des plus-values de cession de certains titres ou valeurs mobilières, ce montant est constitué par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci... ; qu'il résulte de l'instruction que les intérêts de l'emprunt souscrit par M. X en 1993 ne sont pas directement liés à l'achat des fonds communs de placement ; que, par suite, et en tout état de cause, le requérant n'est pas fondé à demander qu'ils soient pris en compte pour le calcul de la plus-value issue de la cession de titres, objet de la présente instance ;

Sur la déduction de frais professionnels au titre des années 1994 et 1995 :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 du code général des impôts : le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu ; qu'en vertu des dispositions de l'article 83 du même code, la déduction à effectuer des revenus provenant de traitements et salaires du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement, sauf faculté pour les contribuables de justifier de leurs frais réels inhérents à leur fonction ou emploi ;

Considérant que si M. X soutient qu'il a exposé des frais dans la procédure prud'homale qui l'oppose à son ancien employeur sur la réalité de la faute grave qui a justifié son licenciement prononcé en février 1992, il résulte de l'instruction que les dommages et intérêts qu'il a demandés à titre principal dans cette instance, ne présentent pas le caractère de revenu imposable au sens des dispositions sus rappelées de l'article 13 du code général des impôts ; que, par suite, les dépenses qu'il a engagées, qui ne constituent pas des dépenses professionnelles, ne peuvent être admises en déduction de ses revenus des années 1994 et 1995 ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a appliqué aux salaires de M. X la déduction forfaitaire de 10 % plus avantageuse que la déduction des frais réels qu'il avait calculés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1993, 1994 et 1995 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par M.Roland X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Roland X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 25 novembre 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 9 décembre 2003.

Le rapporteur

Signé : A. Eliot

Le président de chambre

Signé : J.F. Gipoulon

Le greffier

Signé : G. Vandenberghe

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier

Guillaume Vandenberghe

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N°00DA00785


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Gipoulon
Rapporteur ?: Mme Eliot
Rapporteur public ?: M. Paganel

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3
Date de la décision : 09/12/2003
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 00DA00785
Numéro NOR : CETATEXT000007601383 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-12-09;00da00785 ?
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