La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/02/2004 | FRANCE | N°01DA00525

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation a 3 (bis), 10 février 2004, 01DA00525


Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Christine X, demeurant ... ; Mme X demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 9903320 du 15 mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Lille a seulement condamné le centre communal d'action sociale (C.C.A.S.) de Neuville-en-Ferrain à lui verser une somme de 15 000 francs, en réparation du préjudice moral causé par l'illégalité fautive de son licenciement, et une indemnité, à liquider par l'administration dans la limite d'un montant de 34 40

0,64 francs, en réparation des pertes de revenu subies de ce fait ;

2...

Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Christine X, demeurant ... ; Mme X demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 9903320 du 15 mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Lille a seulement condamné le centre communal d'action sociale (C.C.A.S.) de Neuville-en-Ferrain à lui verser une somme de 15 000 francs, en réparation du préjudice moral causé par l'illégalité fautive de son licenciement, et une indemnité, à liquider par l'administration dans la limite d'un montant de 34 400,64 francs, en réparation des pertes de revenu subies de ce fait ;

2°) de porter à 30 000 francs l'indemnité qui lui a été allouée en réparation de son préjudice moral, à 34 400,64 francs l'indemnité pour pertes de revenus qui lui a été allouée, et de condamner le centre communal d'action sociale de Neuville-en-Ferrain à lui verser des rappels de salaires de 9 796,05 francs au titre de la période d'octobre 1997 à juin 1998, une indemnité compensatrice de congés payés de 438,08 francs, une indemnité légale de licenciement de 2 866, 70 francs et une somme de 8 000 francs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la responsabilité du C.C.A.S. est engagée à raison de la rupture illégale de son contrat de travail ; que le C.C.A.S. a mené une campagne de dénigrement injustifiée à son encontre, ce qui a aggravé son préjudice moral ; que la perte de revenus qu'elle a subie en raison de l'illégalité de son licenciement ne peut être inférieure à 34 400,64 francs, si l'on prend en compte le salaire de référence retenu pour l'indemnité légale de licenciement ; qu'elle a subi les conséquences financières de la décision prématurée du C.C.A.S. de ne plus lui confier d'enfant ; qu'elle avait lié le contentieux sur ce point par une demande formée devant le conseil des prud'hommes, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal ; que la perte de revenus dont elle demande l'indemnisation doit inclure l'indemnité compensatrice de congés payés de 438,08 francs qui lui était due pour la période où elle aurait dû bénéficier d'un préavis ; qu'elle a également droit à l'indemnité de licenciement prévue par l'article 18 du décret du 14 octobre 1994 ; que sa réclamation adressée au C.C.A.S. et la décision rejetant cette réclamation, pour un motif d'ailleurs erroné, ont lié le contentieux sur ce dernier point ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 août 2001, présenté pour le centre communal d'action sociale de Neuville-en-Ferrain, par Me Petit, qui demande à la Cour d'une part, de rejeter la requête, d'autre part, par la voie du recours incident, d'annuler le jugement attaqué et de rejeter la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Lille, et enfin de condamner Mme X à lui verser une somme de 8 000 francs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient, à titre principal, que la demande présentée devant les premiers juges, qui ne faisait pas référence à la décision explicite rejetant sa réclamation préalable, n'était pas recevable ; à titre subsidiaire, qu'il n'a commis aucune faute de nature à ouvrir droit à réparation, dès lors que les fautes commises par l'intéressée justifiaient légalement le non-renouvellement de son contrat et son licenciement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 94-909 du 14 octobre 1994 ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 janvier 2004 où siégeaient Mme de Segonzac, président de chambre, M. Berthoud, président-assesseur et Mme Brenne, premier conseiller :

- le rapport de M. Berthoud, président-assesseur,

- les observations de Me Parafiniuk, avocat, pour Mme X,

- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;

Sur la réparation des préjudices causés par l'illégalité fautive du licenciement :

En ce qui concerne la recevabilité des conclusions présentées à cette fin devant les premiers juges :

Considérant que dans sa demande préalable, en date du 3 août 1998, Mme X, assistante maternelle licenciée, par décision du 10 avril 1998, à compter du 14 avril 1998, par le centre communal d'action sociale de Neuville-en-Ferrain, s'est bornée à réclamer des indemnités conventionnelles de licenciement sur le fondement des articles L. 122-4 à L. 122-17 du code du travail ; qu'il résulte cependant de l'instruction que s'agissant de la réparation des préjudices causés par la rupture abusive de l'engagement de l'intéressée, le contentieux a été lié par le silence gardé par le centre communal sur la demande formée à cette fin par Mme X devant le conseil des prud'hommes de Tourcoing ; qu'ainsi, alors même que la demande à fin d'indemnité présentée devant le tribunal administratif de Lille ne faisait pas référence à la décision du 4 septembre 1998 rejetant la réclamation préalable de l'intéressée, c'est à bon droit que les premiers juges ont regardé comme recevables les conclusions tendant à cette réparation ;

En ce qui concerne la responsabilité du centre communal d'action sociale :

Considérant que le centre communal d'action sociale ne pouvait légalement se fonder, pour mettre fin au contrat de Mme X, sur une décision de non-renouvellement de son agrément, qui n'avait pas été prise à la date de la décision de licenciement, et qui d'ailleurs n'est pas intervenue par la suite, l'agrément de l'intéressée ayant été renouvelé, à compter du 14 avril 1998, par décision du président du conseil général du département du Nord en date du 23 octobre 1998 ; que si le centre communal d'action sociale de Neuville-en-Ferrain allègue que ce licenciement était, en tout état de cause, justifié par le comportement fautif de Mme X, il ne fournit aucun élément sérieux permettant d'établir la matérialité des griefs formulés à son encontre ; que dans ces conditions, l'illégalité dont est entaché ledit licenciement est constitutive d'une faute de nature à ouvrir droit à réparation, ainsi que l'a relevé le tribunal, et contrairement à ce que soutient le centre communal d'action sociale dans son appel incident ;

En ce qui concerne le droit à réparation :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation du préjudice moral résultant de l'atteinte portée à la réputation professionnelle de Mme X en fixant à 15 000 francs le montant de la réparation due à ce titre ;

Considérant, en revanche, qu'il résulte de l'instruction qu'en estimant à un montant total de 34 838,72 francs (5 311,13 euros) les pertes de revenus causées par l'illégalité fautive de son licenciement, qui l'a privée de ses salaires, ainsi que des indemnités compensatrices de congés payés prévues à l'article L. 773-6 du code du travail, applicable, en vertu des dispositions de l'article L. 123-5 du code de la famille et de l'aide sociale, aux assistantes maternelles employées par des personnes morales de droit public, Mme X n'a pas fait, eu égard au caractère définitif de son éviction, une évaluation exagérée de ce préjudice ; qu'elle est, dès lors, fondée à demander que la somme que le centre communal d'action sociale a été condamné à lui payer à ce titre, et que les premiers juges ont laissé à son employeur le soin de liquider, soit fixée à ce montant ;

Considérant qu'il y a lieu de réformer en ce sens le jugement attaqué, et de rejeter les conclusions incidentes présentées par le centre communal d'action sociale ;

Sur les autres conclusions à fin d'indemnité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X n'a pas présenté de réclamation tendant au versement de l'indemnité contractuelle accordée en cas de réduction du nombre d'enfants confiés à sa garde durant la période d'octobre 1997 à juin 1998, ou au versement des indemnités légales de licenciement prévues, indépendamment de toute faute de l'employeur, par l'article 18 du décret susvisé du 14 octobre 1994 ; que la demande dont elle a saisi le conseil des prud'hommes ne saurait être regardée comme tendant à l'obtention de ces indemnités ; que le silence gardé à cet égard par le centre communal d'action sociale n'a pas lié le contentieux sur ces deux points ; que par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté comme irrecevables ses conclusions tendant à la condamnation du centre communal d'action sociale à lui verser lesdites indemnités ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme X, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer au centre communal d'action sociale de Neuville-en-Ferrain la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en application des mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le centre communal d'action sociale à verser à Mme X une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que le centre communal d'action sociale de Neuville-en-Ferrain a été condamné à verser à Mme Christine X par l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Lille du 15 mars 2001 est fixée à un montant de 5 311,13 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 15 mars 2001 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le recours incident du centre communal d'action sociale de Neuville-en-Ferrain est rejeté.

Article 4 : Le centre communal d'action sociale de Neuville-en-Ferrain versera à Mme Christine X la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme Christine X est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Christine X, au centre communal d'action sociale de Neuville-en-Ferrain ainsi qu'au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

Copie sera adressée au préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord.

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 27 janvier 2004 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 10 février 2004.

Le rapporteur

J. Berthoud

Le président de chambre

M. de Segonzac

Le greffier

P. Lequien

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier

Philippe Lequien

N°01DA00525 7

Code D


Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : Mme de Segonzac
Rapporteur ?: M. Berthoud
Rapporteur public ?: M. Michel
Avocat(s) : SCM DESURMONT - PLAYOUST - DELEPLANQUE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation a 3 (bis)
Date de la décision : 10/02/2004
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 01DA00525
Numéro NOR : CETATEXT000007602958 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2004-02-10;01da00525 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award