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23/09/2004 | FRANCE | N°01DA00136

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3, 23 septembre 2004, 01DA00136


Vu le recours, enregistré le 8 février 2001, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES ; le MINISTRE demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 2 novembre 2000, modifié par ordonnance portant rectification matérielle en date du 12 décembre 2000, par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé la décision en date du 21 novembre 1997 par laquelle le préfet du Nord avait refusé à

M. X le versement d'une aide compensatoire aux surfaces cultivées pour l'année 1997 ;

Il soutient que le jugement attaq

ué est insuffisamment motivé ; que les nombreuses irrégularités constatées...

Vu le recours, enregistré le 8 février 2001, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES ; le MINISTRE demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 2 novembre 2000, modifié par ordonnance portant rectification matérielle en date du 12 décembre 2000, par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé la décision en date du 21 novembre 1997 par laquelle le préfet du Nord avait refusé à

M. X le versement d'une aide compensatoire aux surfaces cultivées pour l'année 1997 ;

Il soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; que les nombreuses irrégularités constatées lors du contrôle, ajoutées à la gravité de certaines d'entre elles, de la déclaration sont constitutives d'une négligence grave ; qu'il n'a pas prévenu la direction départementale de l'agriculture et de la forêt du non emblavement de certaines parcelles ; que l'intéressé a délibérément produit une fausse déclaration ; que l'écart entre la déclaration et la réalité se mesure au regard des surfaces primables ; que la légalité d'une décision ne s'apprécie pas en fonction de ses conséquences ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2001, présenté pour M. X, par la

SCP Godin, Dragon, Biernacki, qui tend au rejet du recours, à ce que la Cour enjoigne au préfet du Nord de retenir comme base de calcul à l'aide compensatoire une superficie de 105,57 hectares de surface céréalière et 10,29 hectares de surface en jachère et à ce qu'elle fixe à 260 056 francs le montant de ladite aide ; il soutient qu'en faisant implicitement droit à l'argumentaire du requérant les juges ont suffisamment motivé le jugement ; que les erreurs commises sont minimes ; qu'elles sont peu nombreuses au regard de la surface totale ; qu'elles ont une faible incidence financière sur l'aide demandée ; que le montant total de la pénalité est disproportionné par rapport à leur conséquence financière totale ; que la mission de gestion des aides n'a pas été consultée ; que l'intention délibérée n'a pas été démontrée et ne se présume pas ; que l'administration accorde normalement un pourcentage d'erreur ; qu'il a respecté le taux de jachère obligatoire ; que son personnel a effectué des inversions d'îlots sans le prévenir, et sans avoir pour but d'augmenter l'aide reçue ; qu'il était impossible d'ensemencer plus tôt les 82 ares contrôlés ; que le délai prévu par une circulaire n'a pas été respecté ; qu'il conviendra de rectifier les erreurs pour le calcul de l'aide compensatoire ; que l'écart a été calculé par rapport à la seule surface primable et que le MINISTRE ne justifie pas que les écarts devraient être perçus au regard cette seule surface ; que le moyen tiré de la fausse déclaration est irrecevable comme se rattachant à une cause juridique nouvelle ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 juillet 2001, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES, qui persiste dans ses conclusions ; il soutient que la bonne foi de M. X n'est pas contestée et renonce au moyen tiré de ce que la déclaration aurait été délibérément fausse ; il soutient encore que le requérant compare les écarts à la surface totale exploitée ; que la mission de gestion des aides dont la consultation n'est en tout état de cause pas obligatoire a consulté son dossier ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil du 30 juin 1992 instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables et le règlement (CE) n° 762/94 de la Commission du 6 avril 1994 pris pour son application ;

Vu le règlement (CEE) n° 3508/92 du Conseil du 27 novembre 1992 établissant un système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires ;

Vu le règlement (CEE) n° 3887/92 de la Commission du 23 décembre 1992 portant modalités d'application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2004 où siégeaient

M. Merloz, président de chambre, M. Yeznikian, président-assesseur et M. Le Garzic, conseiller :

- le rapport de M. Le Garzic, conseiller ;

- et les conclusions de M. Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil du 30 juin 1992 instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables : 1. Les producteurs communautaires de cultures arables peuvent revendiquer un paiement compensatoire (...) 2. (...) / Le paiement compensatoire est accordé pour la superficie consacrée aux cultures arables ou au gel des terres (...) ; qu'aux termes de l'alinéa 3 de l'article 10 dudit règlement : La demande doit être accompagnée des documents de référence permettant d'identifier les terres considérées. (...) ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6 du règlement (CEE) n°3508/92 du Conseil du 27 novembre 1992 établissant un système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires : Pour être admis au bénéfice d'un ou de plusieurs régimes communautaires soumis aux dispositions du présent règlement, chaque exploitant présente, pour chaque année, une demande d'aides surfaces indiquant : / -les parcelles agricoles, y compris les superficies fourragères, les parcelles agricoles faisant l'objet d'une mesure de retrait de terres arables et celles qui ont été mises en jachère, (...) ; qu'aux termes de l'article 8 dudit règlement : 1. L'État membre procède à un contrôle administratif des demandes d'aides. / 2. Les contrôles administratifs sont complétés par des contrôles sur place portant sur un échantillon des exploitations agricoles. (...) ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 4 du règlement (CEE) n° 3887/92 de la Commission du 23 décembre 1992 portant modalités d'application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires : Sans préjudice des exigences établies dans les règlements sectoriels, la demande d'aides surfaces contient toute information nécessaire, et notamment : (...) / - les éléments devant permettre l'identification de toutes les parcelles agricoles de l'exploitation, leur superficie, leur localisation, leur utilisation, le cas échéant s'il s'agit d'une parcelle irriguée, ainsi que le régime d'aides concerné, (...) Par utilisation on entend le type de culture ou de couverture végétale ou l'absence de culture. ; qu'aux termes de l'article 9 dudit règlement : 1. Lorsqu'il est constaté que la superficie effectivement déterminée est supérieure à celle déclarée dans la demande d'aides surfaces, la superficie déclarée est prise en compte pour le calcul du montant de l'aide. / 2. Lorsqu'il est constaté que la superficie déclarée dans une demande d'aides surfaces dépasse la superficie déterminée, le montant de l'aide est calculé sur base de la superficie effectivement déterminée lors du contrôle. (...) Toutefois, s'il s'agit d'une fausse déclaration faite délibérément ou par négligence grave : / - l'exploitant en cause est exclu du bénéfice du régime d'aides concerné au titre de l'année civile en cause (...) Au sens du présent article, on entend par superficie déterminée, celle pour laquelle toutes les conditions réglementaires ont été respectées. (...) ; qu'aux termes de l'article 3 du règlement (CE) n° 762/94 de la Commission du

6 avril 1994 pris pour l'application du règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil du 30 juin 1992 précité : 1. Les terres gelées conformément au présent règlement doivent couvrir une surface d'au moins 0,3 hectare d'un seul tenant et avoir une largeur de 20 mètres au minimum. (...) / 2. Les superficies gelées doivent faire l'objet d'un entretien assurant le maintien de bonnes conditions agronomiques. ;

Considérant qu'il est constant que M. X a déclaré en date du 2 mai 1997 des surfaces en céréales d'une superficie de 103,12 hectares et des surfaces en gel d'une superficie de

12,83 hectares ; qu'il a été constaté lors d'un contrôle sur place effectué le 13 juin 1997 la présence d'une culture de blé sur 3,79 hectares déclarés en jachère, d'une culture de maïs sur 74 ares déclarés en jachère, d'un jardin sur 9 ares déclarés en jachère et d'une surface en gel sur 2,52 hectares déclarés en maïs ; que M. X allègue mais ne prouve pas que ces irrégularités résulteraient pour une part d'une inversion de parcelles et pour une autre part de la vente d'une parcelle de 9 ares qui n'auraient pas été déclarées ; que par ailleurs il résulte notamment de l'alinéa 3 de l'article 10 du règlement (CEE) du Conseil du 30 juin 1992 précité et du premier alinéa de l'article 9 du règlement (CEE) de la Commission du 23 décembre 1992 précité que les textes relatifs à l'aide compensatoire ne permettent pas d'admettre une compensation entre les parcelles, lesquelles doivent être identifiées ; qu'il a en outre été constaté que 2,6 hectares de surface en gel n'étaient pas conformes aux dispositions de l'article 3 du règlement (CE) de la Commission du 6 avril 1994 précité, 1,78 hectares ayant une largeur inférieure à 20 mètres et 82 ares, dont M. X allègue sans le prouver qu'il était impossible d'y accéder, n'ayant pas fait l'objet de l'entretien obligatoire ;

Considérant que, contrairement à ce qu'affirme M. X, le fait de pratiquer sur une parcelle une culture autre que celle déclarée ne constitue pas une erreur minime ; que la gravité d'une négligence au sens de l'alinéa 2 de l'article 9 du règlement (CEE) de la Commission du 23 décembre 1992 précité n'est pas évaluée en la rapportant à la superficie ou à l'aide totales ; que M. X n'est pas fondé à affirmer que les irrégularités constatées ne seraient pas nombreuses ni davantage qu'elles auraient une faible incidence financière, le calcul effectué par lui-même reposant sur une compensation entre les parcelles ; qu'en outre l'importance des conséquences financières de la sanction prévue par ledit alinéa et consécutive à la qualification de fausse déclaration faite par négligence grave est sans incidence sur ladite qualification ; qu'enfin il ne peut utilement se prévaloir d'une circulaire qui n'a pas pu légalement déroger ou ajouter aux dispositions précitées ni du fait qu'il a respecté l'obligation de geler 5% des surfaces pour laquelle l'aide est demandée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce que les irrégularités de la déclaration de M. X ne seraient pas constitutives d'une fausse déclaration par négligence grave au sens de l'article 9 du règlement (CEE) de la Commission du 23 décembre 1992 précité pour annuler la décision du préfet du Nord en date du

21 novembre 1997 ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel de Douai, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Lille ;

Considérant que la qualification de négligence grave ne remettant pas en cause la bonne foi de M. X, le moyen tiré de ce que celle-ci aurait été reconnue est inopérant ; que le moyen tiré de ce que les contrôles constatés n'auraient relevé que de simples écarts entre les superficies déclarées et déterminées manque en fait ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé la décision en date du 21 novembre 1997 par laquelle le préfet du Nord avait refusé à M. X le versement d'une aide compensatoire aux surfaces cultivées pour l'année 1997 ;

Sur les conclusions de M. X à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution dans un sens déterminé ; qu'il y a lieu de rejeter les conclusions tendant à ce que la Cour enjoigne au préfet de retenir comme base de calcul à l'aide compensatoire 105,57 hectares de surface céréalière et

10,29 hectares de surface en jachère et à ce qu'elle fixe à 260 056 francs le montant de ladite aide ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lille en date du 2 novembre 2000 est annulé.

Article 2 : La demande et les conclusions d'appel de M. X sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales et à M. X.

Copie sera transmise au préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord.

Délibéré après l'audience du 9 septembre 2004, où siégeaient :

- M. Merloz, président de chambre,

- M. Yeznikian, président-assesseur,

- M. Le Garzic, conseiller,

Lu en audience publique, le 23 septembre 2004.

Le rapporteur,

Signé : P. LE GARZIC

Le président de chambre,

Signé : G. MERLOZ

Le greffier,

Signé : B. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

B. ROBERT

2

N°01DA00136


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01DA00136
Date de la décision : 23/09/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Merloz
Rapporteur ?: M. Pierre Le Garzic
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SCP GODIN DRAGON BIERNACKI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2004-09-23;01da00136 ?
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