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05/10/2004 | FRANCE | N°01DA00526

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation a 3 (bis), 05 octobre 2004, 01DA00526


Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2001, présentée pour la société anonyme CEISA, dont le siège est ..., représentée par son

président-directeur-général en exercice, par la société d'avocats X... Ernst et Young ; la société CEISA demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 96-1737 du 15 mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1

993 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°...

Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2001, présentée pour la société anonyme CEISA, dont le siège est ..., représentée par son

président-directeur-général en exercice, par la société d'avocats X... Ernst et Young ; la société CEISA demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 96-1737 du 15 mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1993 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 30 000 francs en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'instruction ministérielle du 22 février 1990 a une portée normative ; qu'elle est incompatible avec les directives communautaires ; qu'elle est en droit de se prévaloir du régime de dispense de taxation tel qu'il est prévu par l'article 5 § 8 de la sixième directive communautaire, dès lors que l'instruction du 22 février 1990 n'a pas correctement transposé cette directive ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2002, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'en subordonnant la dispense de taxe sur la valeur ajoutée à un engagement dans l'acte de fusion, d'apport ou de vente de soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée les cessions ultérieures de biens et de procéder le cas échéant aux régularisations prévues aux articles 210 et 215 de l'annexe II au code général des impôts, l'instruction ne vient ni contredire la 6ème directive communautaire, ni y ajouter une condition supplémentaire ; qu'elle ne fait que déterminer les conditions d'absence de taxation, faculté qui était laissée à chaque Etat par la 6ème directive ; que la norme en matière de taxe sur la valeur ajoutée est la taxation ; que les régimes particuliers, comme celui qui peut être mis en place par les Etats membres lors de la transmission d'une universalité totale ou partielle de biens en application de l'article 5 § 8 de la 6ème directive sont des exceptions ; que l'instruction du 22 février 1990 n'est donc pas incompatible avec l'ensemble des directives ; qu'au contraire elle permet une plus juste application du principe de neutralité en s'assurant d'un engagement de soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée les cessions ultérieures de biens et des régularisations prévues aux articles 210 et 215 de l'annexe II au code général des impôts ; que seule la partie perdante peut être tenue aux frais irrépétibles ;

Vu le mémoire enregistré le 5 juillet 2002, présenté pour la société anonyme CEISA qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 15 octobre 2002, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut aux même fins que son mémoire en défense, par les mêmes moyens ; il soutient en outre que l'article 5 § 8 de la 6ème directive est trop imprécis pour être invocable devant le juge national ;

Vu le mémoire enregistré le 22 novembre 2002, présenté pour la société anonyme CEISA qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle soutient en outre que le caractère inconditionnel et suffisamment précis d'une directive communautaire n'exige pas que celle-ci institue une obligation ; qu'une directive offrant une simple faculté peut remplir les conditions de l'effet direct ; que les dispositions de l'article 5 § 8 sont inconditionnelles et suffisamment précises, dans le cas où le bénéficiaire est un assujetti total ; qu'elle en demande donc l'application directe ;

Vu le mémoire enregistré le 10 mars 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut aux même fins que ses précédents mémoires, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive du Conseil des Communautés européennes nº77/388/CEE du 17 mai 1977 modifiée ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 2004 où siégeaient M. Couzinet, président de chambre, M. Berthoud, président-assesseur et Mme Brenne, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brenne, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société anonyme CEISA qui exploitait une activité de transformation de matières plastiques, soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, avait inscrit différents biens mobiliers à l'actif de son bilan ; qu'elle a cédé deux fonds de commerce et les biens correspondant à la société SMS, par acte du 5 mai 1993, sans assujettir cette cession à la taxe sur la valeur ajoutée et sans que la société SMS souscrive aucune des déclarations prévues aux articles 210 et 215 de l'annexe II au code général des impôts ; qu'à l'issue d'une vérification de sa comptabilité, portant sur la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1993, la société CEISA a été assujettie notamment à des compléments de taxe sur la valeur ajoutée à raison de ladite cession ; qu'elle relève appel du jugement du Tribunal administratif de Rouen en date du 15 mars 2001, en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la décharge de ces compléments de taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 261-3 du code général des impôts, dont la rédaction applicable aux faits de la cause est issue de l'article 31-I de la loi de finances pour 1990, pris pour la transposition de la sixième directive susvisée du Conseil des Communautés européennes : Sont exonérés de taxe sur la valeur ajoutée : 1º- a (...).les ventes de biens usagés faites par les personnes qui les ont utilisés pour les besoins de leurs exploitations. Toutefois, l'exonération ne s'applique pas aux biens qui ont ouvert droit à déduction complète ou partielle de la taxe sur la valeur ajoutée lors de leur acquisition, importation ou livraison à soi-même ; qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, qu'entrent dans le champ de cette taxe les cessions et apports de biens usagés précédemment utilisés pour les besoins de l'exploitation du cédant et ayant ouvert droit à la déduction complète ou partielle de cette taxe lors de leur acquisition, importation ou livraison à soi-même par ledit cédant, d'autre part, que, si l'article 5 § 8 de la sixième directive susmentionnée ouvre le droit, aux Etats membres qui le souhaitent, d'exonérer de taxe, sous certaines conditions, ces mêmes cessions et apports, le législateur français a entendu renoncer à cette faculté ; que, dès lors, après avoir relevé que la société CEISA avait cédé le 5 mai 1993 à la société SMS des actifs mobiliers qu'elle exploitait auparavant, alors que ces biens avaient ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, le service a pu en déduire, sans commettre d'erreur de droit, que la cession dont s'agit devait donner lieu au paiement de cette taxe ;

Considérant, en deuxième lieu, que la société CEISA ne peut utilement invoquer l'incompatibilité entre l'instruction ministérielle 3 A-6-90 du 22 février 1990, laquelle n'a aucun caractère normatif et ne peut être regardée comme constituant la transposition en droit interne de l'article 5 § 8 de la sixième directive, et ladite directive ;

Considérant, en troisième lieu, que les dispositions de l'article 5 § 8 de la sixième directive susvisée aux termes desquelles les Etats membres peuvent considérer que, à l'occasion de la transmission, à titre onéreux ou à titre gratuit ou sous forme d'apport à une société, d'une universalité totale ou partielle de biens, aucune livraison de biens n'est intervenue et que le bénéficiaire continue la personne du cédant. Les Etats membres peuvent prendre le cas échéant, les dispositions nécessaires pour éviter des distorsions de concurrence dans le cas où le bénéficiaire n'est pas un assujetti total , ne sont, contrairement à ce que soutient la société requérante, ni inconditionnelles, ni suffisamment précises ; que, par suite, la société CEISA ne peut, en tout état de cause, sur leur fondement faire valoir aucun droit devant le juge national ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société CEISA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté le surplus de sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société CEISA la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société CEISA est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société CEISA et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au directeur des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2004, où siégeaient :

- M. Couzinet, président de chambre,

- M. Berthoud, président-assesseur,

- Mme Brenne, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 5 octobre 2004.

Le rapporteur,

Signé : A. BRENNE

Le président de chambre,

Signé : Ph. COUZINET

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

M.T. LEVEQUE

2

N°01DA00526


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation a 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 01DA00526
Date de la décision : 05/10/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Couzinet
Rapporteur ?: Mme Annick Brenne
Rapporteur public ?: M. Michel
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS HSD ERNST et YOUNG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2004-10-05;01da00526 ?
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