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23/11/2004 | FRANCE | N°03DA00699

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3, 23 novembre 2004, 03DA00699


Vu le recours, enregistré le 27 juin 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présenté par le MINISTRE DE LA JUSTICE ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-483 en date du 22 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du directeur régional des services pénitentiaires de Lille du 27 janvier 2000 qui a rejeté la demande de M. X dirigée contre la sanction disciplinaire prise à son encontre le 22 décembre 1999 par la commission disciplinaire du Val de Reuil lui infligeant une sanction de cinq jours

de cellule disciplinaire ;

2°) de rejeter la demande d'annulation...

Vu le recours, enregistré le 27 juin 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présenté par le MINISTRE DE LA JUSTICE ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-483 en date du 22 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du directeur régional des services pénitentiaires de Lille du 27 janvier 2000 qui a rejeté la demande de M. X dirigée contre la sanction disciplinaire prise à son encontre le 22 décembre 1999 par la commission disciplinaire du Val de Reuil lui infligeant une sanction de cinq jours de cellule disciplinaire ;

2°) de rejeter la demande d'annulation de la décision précitée, présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Rouen ;

Il soutient que l'article D. 250-4 du code de procédure pénale a été respecté ; que la loi du

12 avril 2000 n'était pas entrée en vigueur au moment des faits ; que les textes en vigueur ne faisaient pas obligation à l'administration de proposer au détenu à l'encontre de qui la sanction disciplinaire était envisagée, l'assistance d'un avocat ; que dès lors, l'administration n'avait pas à démontrer que l'assistance d'un avocat était incompatible avec le fonctionnement de l'instance disciplinaire ; que l'article D. 249-3, 3° du code de procédure pénale réprime, sans condition de publicité, le fait pour un détenu de formuler, dans des lettres adressées à des tiers, des outrages ou injures à l'encontre de toute personne ayant mission dans l'établissement ou à l'encontre des autorités administratives et judiciaires ; que le caractère injurieux et outrageant des accusations formulées par M. X ne fait pas de doute ; que les accusations portées dépassent les faits relatés par la presse et mettent en cause globalement la probité et l'intégrité de l'ensemble des membres du personnel pénitentiaire ; que c'est donc, à bon droit, qu'une sanction de cinq jours de cellule disciplinaire a été infligée à l'intéressé ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2004, pour M. X, par Me

Karouby-Suganas, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que le respect des droits de la défense est un principe général du droit et que la présence d'un avocat constitue un des aspects essentiels de ces droits ; qu'en matière disciplinaire et eu égard aux textes relatifs à la profession d'avocat et notamment la loi du 31 décembre 1971, les intéressés ont droit à la présence d'un avocat sauf si elle est incompatible avec le fonctionnement de l'organisme en cause ou exclue par les dispositions statutaires des personnes intéressées ; qu'en l'espèce, aucune incompatibilité n'est établie ; qu'au moment des faits litigieux, si les textes ne faisaient pas obligation à l'administration de proposer un avocat au détenu, passible d'une sanction, ils imposaient à l'administration d'autoriser un détenu, qui le demandait, à se faire assister d'un avocat ; que l'écrit litigieux, adressé à ses parents, ne détenait aucun outrage, ni injure à l'encontre de toute personne ayant mission dans l'établissement ou à l'encontre des autorités administratives et judiciaires ; qu'il n'a pas fait l'objet pour ces faits, de poursuites pénales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 octobre 2004 à laquelle siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et Mme Eliot, conseiller :

- le rapport de Mme Eliot, conseiller ;

- les observations de M. X, défendeur ;

- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par une décision en date du 27 janvier 2000, le directeur des services pénitentiaires de Lille, sur recours administratif préalable, a infligé à M. X, détenu au centre de détention du Val de Reuil, la sanction de cinq jours de placement en cellule disciplinaire en raison de la faute disciplinaire commise par l'intéressé le 20 décembre 1999 ; que le MINISTRE DE LA JUSTICE fait appel du jugement du Tribunal administratif de Rouen qui a annulé la décision administrative précitée ;

Concernant la légalité externe :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques : Les avocats peuvent assister et représenter autrui devant les administrations publiques, sous réserve des dispositions législatives et réglementaires et qu'aux termes de l'article D. 250-4 du code de procédure pénale : Lors de sa comparution devant la commission de discipline, le détenu présente, en personne, ...., ses explications écrites et orales ; qu'en application de ces dispositions, sans que le requérant puisse, dès lors, utilement invoquer la méconnaissance du principe général des droits de la défense, l'administration n'était pas tenue, alors même que l'intéressé en avait fait la demande, de permettre à ce dernier de se faire assister d'un avocat devant la commission de discipline ; qu'en outre, l'intéressé ne saurait se prévaloir de la loi du 12 avril 2000, qui n'était pas encore adoptée au moment des faits litigieux ; que dès lors, c'est à tort que le Tribunal administratif de Rouen a annulé la décision de sanction litigieuse, au motif qu'en refusant à M. X la possibilité d'être assisté d'un avocat, l'administration avait entaché ladite décision d'illégalité ;

Considérant toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Rouen ;

Concernant la légalité interne :

Considérant qu'aux termes de l'article de l'article D. 249-3 du code de procédure pénale : Constitue une faute disciplinaire du troisième degré le fait, pour un détenu : 2° De formuler dans des lettres adressées à des tiers, des menaces, injures, propos outrageants à l'encontre de toute personne ayant mission dans l'établissement ou à l'encontre des autorités administratives et judiciaires... ; qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que dans sa lettre en date du 16 décembre 1999 adressée à ses parents, M. X a tenu des propos outrageants à l'égard des sous-directeurs et responsables des établissements pénitentiaires ; que ces faits sont constitutifs d'une faute disciplinaire du troisième degré ; que, par suite, en prenant la décision attaquée le directeur régional des services pénitentiaires de Lille s'est fondé sur des faits qui sont de nature à justifier une sanction disciplinaire de mise en cellule disciplinaire ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA JUSTICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a annulé la décision de placement en cellule disciplinaire prise à l'encontre de M. X le 27 janvier 2000 ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement en date du 22 mai 2003 du Tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE et à M. Jean-Marie X.

Délibéré après l'audience du 26 octobre 2004, à laquelle siégeaient :

- M. Gipoulon, président de chambre,

- Mme Signerin-Icre, président-assesseur,

- Mme Eliot, conseiller,

Lu en audience publique, le 23 novembre 2004.

Le rapporteur,

Signé : A. ELIOT.

Le président de chambre,

Signé : J.F. GIPOULON

Le greffier,

Signé : G. VANDENBERGHE

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

G. VANDENBERGHE

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N°03DA00699


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03DA00699
Date de la décision : 23/11/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gipoulon
Rapporteur ?: Mme Agnès Eliot
Rapporteur public ?: M. Paganel
Avocat(s) : KAROUBY-SUGANAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2004-11-23;03da00699 ?
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