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27/12/2004 | FRANCE | N°03DA00567

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3, 27 décembre 2004, 03DA00567


Vu la requête, enregistrée le 26 mai 2003, présentée par l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » (AVESER) dont le siège est situé 589 route des roches à Orival (76500) ; l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0000474 du Tribunal administratif de Rouen en date du

28 mars 2003 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du 16 juillet 1999 qui a autorisé la société Maprochim à procéder à l'extension, sur le territoire de la commune de

Saint-Aubin-les-Elbeuf, de son activité du stockage de produits inflammables et to...

Vu la requête, enregistrée le 26 mai 2003, présentée par l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » (AVESER) dont le siège est situé 589 route des roches à Orival (76500) ; l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0000474 du Tribunal administratif de Rouen en date du

28 mars 2003 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du 16 juillet 1999 qui a autorisé la société Maprochim à procéder à l'extension, sur le territoire de la commune de Saint-Aubin-les-Elbeuf, de son activité du stockage de produits inflammables et toxiques en portant le volume à 3 300 tonnes réparti entre quatre cellules ;

2°) d'annuler ledit arrêté préfectoral du 16 juillet 1999 ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du 24 juillet 2002 relatif à la prise en compte des « effets dominos » d'un sinistre avec la société Aventis Pharma ;

4°) d'annuler l'autorisation préfectorale d'exploiter initiale en date du 1er décembre 1993 et son arrêté modificatif du 19 mai 1995 ;

5°) d'annuler les enquêtes publiques illégales qui ont précédé l'intervention des arrêtés précédents ;

Elle soutient que les actes attaqués sont entachés de vices de procédure, de diverses erreurs manifestes d'appréciation, d'erreurs de fait et de détournements de pouvoir ; que plus particulièrement, il est soutenu que le jugement qui n'a pas été notifié accompagné des conclusions du commissaire du gouvernement est entaché d'un vice de procédure ; qu'il est également irrégulier pour avoir été notifié tardivement ; que le jugement repose sur une mauvaise appréciation des éléments de fait propres au dossier ; que l'arrêté du 16 juillet 1999 n'est pas signé ; qu'il est devenu caduc ; que cet arrêté comme celui de 1993 repose sur des informations erronées et une sous-estimation des dangers qui justifient l'arrêt immédiat de l'activité et l'annulation des actes initiaux ; que l'arrêté de 1999 méconnaît le plan d'occupation des sols et le plan de prévention des risques d'inondation de la Seine ; que les délibérations de plusieurs communes n'ont pas été visées par l'arrêté ; que l'arrêté du 24 juillet 2002 ne se borne pas à imposer des prescriptions complémentaires plus sévères mais accroît fortement les capacités de stockage du site ; que l'arrêté en question ne prend pas en compte la notion d'installations classées composites ; que l'enquête publique préalable nécessaire n'est pas intervenue ; qu'il repose sur des éléments de fait erronés ; que le tribunal qui a rejeté l'exception d'illégalité n'a pas pris en compte le changement de circonstances tenant à l'intervention du nouvel arrêté du 24 juillet 2002 et qui a eu pour effet de proroger le délai de recours ouvert aux tiers contre l'arrêté initial en vertu de l'article L. 514-6 du code de l'environnement ; que le tribunal ne pouvait légaliser un arrêté préfectoral qui était devenu caduc ; que la demande incidente d'annulation de l'arrêté préfectoral du 24 juillet 2002 en appel se justifie pleinement par la notion de connexité ; que l'installation classée est située dans un site remarquable à plusieurs égards ; que le quai de chargement serait largement submergé en cas de crue importante de la Seine ; que l'installation ne serait pas en mesure, du fait de sa conception, de satisfaire aux prescriptions fixées par l'arrêté ; que l'entrepôt initial qui produit de multiples nuisances a été implanté au mépris des dispositions de la loi du 19 juillet 1976 ; que toutes les enquêtes publiques sont illégales ; que le commissaire enquêteur aurait pu prolonger la durée de l'enquête ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 février 2004, présenté par le ministre de l'écologie et du développement durable ; le ministre demande à la Cour de réformer le jugement du tribunal, de prononcer un non-lieu partiel sur la requête de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » et de rejeter le surplus des conclusions de cette dernière ; il soutient que l'arrêté du

16 juillet 1999 était, à la date où le tribunal a statué, devenu caduc faute d'avoir été mis en application en ce qui concerne tout au moins l'extension de la capacité de stockage par la création d'une quatrième cellule ; que les premiers juges auraient dû, dès lors, prononcer un non-lieu partiel ; que si la société Maprochim a ultérieurement sollicité l'autorisation de modifier les quantités de stockage de produits dangereux dans l'enceinte de son établissement du port X, elle a finalement renoncé à son projet, ce dont le préfet de la Seine-Maritime a pris acte par un arrêté du

15 janvier 2002 ; que les conclusions prononcées par le commissaire du gouvernement devant la juridiction administrative n'ont pas à être communiquées aux parties ; qu'aucune disposition ne fixe le délai dans lequel le jugement doit être lu ou notifié ; que le tribunal a rejeté comme irrecevables les conclusions de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » dirigées contre l'arrêté préfectoral du 24 juillet 2002 ; que l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » ne remet pas en question le jugement sur ce point et n'est pas recevable à présenter directement devant le juge d'appel des conclusions d'annulation dirigées contre cet arrêté ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 mars 2004, présenté par l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » qui conclut aux mêmes fins que sa requête et, en outre, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 7 500 euros au titre des frais irrépétibles ainsi que des dommages et intérêts ; qu'elle reprend et développe à nouveau ses précédents moyens et critique les arguments en défense présentés par le ministre ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 avril 2004, présenté pour la société Maprochim (société de manutention de produits chimiques et miniers), dont le siège est situé centre tertiaire et portuaire 19 boulevard du midi à Rouen (76100), par la SELAS Y et associés ; la société demande à la Cour de rejeter la requête de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » qui n'a plus d'objet et de la condamner à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle déclare s'associer pleinement aux écritures du ministre ; qu'elle soutient également que, dès lors qu'elle n'a pas eu besoin d'augmenter en définitive sa capacité de stockage pour faire face aux besoins de sa clientèle, l'arrêté du 16 juillet 1999 est devenu au bout de trois ans caduc en vertu de l'article 24 du décret du

21 septembre 1977 ; que, par suite, la demande de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » devant le tribunal était devenue sans objet ; que cette caducité ne doit pas s'étendre aux prescriptions complémentaires contenues dans l'arrêté du 24 juillet 2002 qui étaient justifiées par les conséquences de l'augmentation du stockage sur la définition des zones de danger ; qu'il conviendra seulement d'actualiser à nouveau ces zones de danger en fonction de la nouvelle situation résultant de l'absence d'extension des capacités de stockage ; que la prétendue incompatibilité de l'installation avec le plan de prévention des risques d'Elbeuf est dépourvue de toute pertinence ;

Vu la lettre en date du 8 novembre 2004, informant les parties, en application de l'article

R. 612-2 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2004 à laquelle siégeaient M. Merloz, président de chambre, M. Dupouy et M. Yeznikian, présidents-assesseurs :

- le rapport de M. Yeznikian, président-assesseur ;

- les observations de Me Aguignier, pour la société Maprochim ;

- et les conclusions de M. Lepers, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

En ce qui concerne les critiques formulées par l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » :

Considérant qu'il ne résulte d'aucun principe ni d'aucune disposition législative ou réglementaire que la notification du jugement devrait être accompagnée des conclusions du commissaire du gouvernement ou que la lecture du jugement serait subordonnée au respect d'un délai ; que, par suite, l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » n'est pas, en tout état de cause, fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier et devrait être annulé pour avoir été lu deux mois après l'audience et non un mois comme il avait été annoncé puis notifié sans être accompagné des conclusions du commissaire du gouvernement ;

En ce qui concerne le non-lieu pour caducité de l'arrêté préfectoral du 16 juillet 1999 :

Considérant qu'il n'est pas contesté qu'à la date à laquelle le Tribunal administratif de Rouen a statué sur la demande présentée par l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES », soit le 28 mars 2003, la quatrième cellule de stockage de produits inflammables et toxiques dont la création avait été autorisée au bénéfice de la société Maprochim sur son site de Saint-Aubin-les-Elbeuf, par l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du 16 juillet 1999, n'avait pas été mise en service dans le délai de trois ans prévu par l'article 24 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 susvisé ; que, dans ces conditions et en l'absence de cas de force majeure, l'arrêté d'autorisation d'extension du 16 juillet 1999 avait, en vertu du même article, cessé de produire effet ; que, par suite, les conclusions de l'association tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 16 juillet 1999 étaient, à la date du jugement attaqué, devenues sans objet ; que, dès lors, c'est à tort que le Tribunal administratif de Rouen a rejeté comme non fondée la demande de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement en date du

28 mars 2003 en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du 16 juillet 1999 susmentionné et, par la voie de l'évocation, de prononcer un non-lieu sur ladite demande de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » ;

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du

24 juillet 2002 :

Considérant qu'il résulte de l'article 1er des statuts de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES », que celle-ci a comme objet social : « La défense du bien-être et du patrimoine de ses adhérents » ; que l'intérêt à agir d'une association ne s'apprécie pas au regard du lieu de résidence de ses membres mais uniquement au regard de son objet social ; que compte tenu de la généralité de son projet, l'association requérante ne justifiait pas d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du 24 juillet 2002 imposant à la société Maprochim exploitant un site de stockage des prescriptions complémentaires ; que, par suite, l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté les conclusions qu'elle avait présentées contre l'arrêté préfectoral du 24 juillet 2002 comme irrecevables ;

Sur les autres conclusions d'annulation présentées par l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » :

Considérant que l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » a demandé directement au juge d'appel de prononcer l'annulation des arrêtés préfectoraux ayant initialement autorisé en 1993 et 1995 l'activité de stockage exploitée par la société Maprochim à Saint-Aubin-les-Elbeuf ainsi que l'annulation de plusieurs enquêtes publiques qui ont précédé l'intervention des mesures préfectorales contestées ; qu'il n'appartient pas, en tout état de cause, au juge d'appel de prononcer de telles annulations qui n'auraient pas préalablement fait l'objet d'une demande devant le tribunal administratif ; que, par suite, ces conclusions nouvelles en appel doivent être rejetées comme irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ou tendant à l'octroi de dommages et intérêts :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'elle n'est pas, par ailleurs, davantage fondée à réclamer la même somme au titre de dommages et intérêts ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » la somme de 1 000 euros sur les

3 000 euros que la société Maprochim réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Rouen en date du 28 mars 2003 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du

16 juillet 1999.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » dirigées contre l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime en date du 16 juillet 1999.

Article 3 : Le surplus des conclusions de l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » est rejeté.

Article 4 : L'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES » versera à la société Maprochim la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION « VIVRE ENTRE SEINE ET ROCHES »(AVESER), à la société (de manutention de produits chimiques et miniers) Maprochim et au ministre de l'écologie et du développement durable.

Copie sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2004 à laquelle siégeaient :

- M. Merloz, président de chambre,

- M. Dupouy, président-assesseur,

- M. Yeznikian, président-assesseur,

Lu en audience publique, le 27 décembre 2004.

Le rapporteur,

Signé : O. YEZNIKIAN

Le président de chambre,

Signé : G. MERLOZ

Le greffier,

Signé : B. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre de l'écologie et du développement durable en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

B. ROBERT

N° 03DA00567 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03DA00567
Date de la décision : 27/12/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Merloz
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : BOURDON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2004-12-27;03da00567 ?
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