Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Edouard Y, demeurant ..., par Me Farcy ; M. Y demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 01-1999 en date du 29 avril 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997 à 1999 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens ainsi qu'à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que la procédure d'imposition est irrégulière, la notification de redressement qui lui a été adressée étant insuffisamment motivée ; qu'en ce qui concerne le bien-fondé des impositions contestées, son activité professionnelle lui imposait de se déplacer fréquemment, au cours des années litigieuses, dans la capitale, ainsi que dans les départements des Yvelines, de l'Essonne, des Hauts de Seine, de la Seine Saint-Denis et du Val de Marne ; que, par ailleurs, le maintien de son domicile à 110 kilomètres de son lieu de travail était justifié par sa situation personnelle, en particulier par la circonstance qu'il vivait de façon continue, dans le cadre d'un concubinage notoire, avec une personne dont le lieu de travail était distant de 30 kilomètres de là ; qu'en outre, cette domiciliation lui permettait de se rendre auprès de son père malade ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 octobre 2004, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que la notification de redressement contestée était suffisamment motivée et a d'ailleurs permis au contribuable d'apporter des arguments pour contester les redressements effectués ; que, sur le bien-fondé desdits redressements, la situation professionnelle de
M. Y ne justifiait pas le maintien de son domicile dans l'Eure ; que, par ailleurs, les attestations produites par l'intéressé pour justifier de la réalité de sa situation personnelle durant les années d'imposition en litige ne sont pas probantes et sont d'ailleurs contredites par d'autres éléments portés à la connaissance du service ; que, dans ces conditions, la situation de concubinage stable et continu invoquée n'est pas établie ; qu'en outre, M. Y ne produit pas d'élément permettant de justifier de la réalité de l'état de santé de son père au cours des années en litige, ni des motifs qui auraient rendu nécessaire sa présence quotidienne à ses côtés ; que, dès lors, M. Y doit être regardé comme ayant fixé son domicile dans l'Eure pour des raisons de pures convenances personnelles et les frais qu'il a exposés ne peuvent être considérés comme inhérents à sa fonction ou à son emploi ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 décembre 2004 à laquelle siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et
Mme Eliot, conseiller :
- le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ; que la notification de redressement, adressée le 4 décembre 2000 par l'administration à
M. Y, mentionnait l'imposition visée, la nature et le montant des redressements envisagés et exposait, en droit et en fait, les motifs de ces redressements ; que si ce document ne précisait pas que les revenus redressés ressortissaient à la catégorie des traitements et salaires, cette circonstance n'est pas de nature à l'entacher d'irrégularité, dès lors qu'y est cité le texte applicable, l'article 83-3°) du code général des impôts, qui permet aux salariés de faire état de leurs frais réels et, notamment, des frais de déplacement de moins de quarante kilomètre entre le domicile et le lieu de travail et que le contribuable n'a déclaré, au titre des années d'imposition en litige, que des traitements et salaires ; que, dans ces conditions, cette notification était suffisamment motivée et permettait au contribuable d'engager valablement une discussion avec l'administration ; que, par suite, et peu important les précisions de fait supplémentaires apportées par la décision de rejet de sa réclamation, M. Y n'est pas fondé à soutenir que la procédure d'imposition suivie à son égard serait irrégulière ;
Sur le bien-fondé des impositions contestées :
Considérant qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : ... 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut... ; elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu... Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels... Les frais de déplacement de moins de quarante kilomètres entre le domicile et le lieu de travail sont admis, sur justificatifs, au titre des frais professionnels réels. Lorsque la distance est supérieure, la déduction admise porte sur les quarante premiers kilomètres, sauf circonstances particulières notamment liées à l'emploi justifiant une prise en compte complète ; qu'en vertu de ces dispositions, les frais de transport réellement exposés par les contribuables pour se rendre à leur lieu de travail et en revenir doivent, en règle générale, et à condition qu'ils ne soient pas couverts par des allocations spéciales, être regardés comme inhérents à leur fonction ou à leur emploi et, par suite, admis, sur demande, en déduction de leurs rémunérations brutes ; qu'il n'en va autrement que s'ils installent ou maintiennent leur domicile dans une localité éloignée de plus de quarante kilomètres de leur lieu de travail sans que ce choix soit justifié par des circonstances particulières ; qu'au nombre de ces circonstances particulières figure la situation du contribuable dont le domicile, où demeure aussi son conjoint ou la personne avec laquelle il vit en concubinage de manière stable et continue, est éloigné de la localité où il travaille mais proche du lieu où ce conjoint ou cette personne exerce sa propre activité professionnelle ;
Considérant que si M. Y fait valoir qu'il vivait, au cours des années 1997 à 1999, en concubinage stable et continu avec Mlle Z au domicile de son beau-père à Tournedos-sur-Seine (Eure), il ne l'établit pas, par les deux attestations qu'il produit, établies postérieurement aux-dites années d'imposition en litige, alors, d'une part, que Mlle Z a fait connaître à l'administration, dans les déclarations de revenu qu'elle a souscrites au titre des années en cause, être domiciliée chez ses parents, successivement à Bois-Guillaume puis à
Mont-Saint-Aignan (Seine-Maritime) et, d'autre part, que M. Y a lui-même indiqué, dans la déclaration de revenus qu'il a souscrites au titre de l'année 1999, être domicilié à Connelles (Eure) ; que, par ailleurs, si le requérant invoque l'état de santé de son père en faisant valoir que celui-ci a subi plusieurs hospitalisations dans le département de l'Eure au cours des années en litige, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de cette situation ; que, par suite, M. Y ne justifie d'aucune circonstance particulière qui l'aurait contraint à maintenir, au cours des années d'imposition en litige, son domicile dans le département de l'Eure alors que son lieu de travail était situé à Paris, soit à une centaine de kilomètres ; qu'enfin, si le requérant fait valoir qu'il a effectué, durant cette même période, de nombreux trajets à caractère professionnel pour se rendre dans différents studios d'enregistrement situés en région parisienne, il n'apporte, en tout état de cause, aucun élément de nature à en établir la réalité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y, qui doit être regardé comme n'ayant maintenu son domicile dans l'Eure que pour des motifs de pures convenances personnelles, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;
Sur les dépens :
Considérant que la présente instance ne donne lieu à aucun dépens ; que, dès lors, les conclusions de M. Y tendant à la condamnation de l'Etat aux entiers dépens ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que l'article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. Y la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non-compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. Y est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Edouard Y et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience du 7 décembre 2004 à laquelle siégeaient :
- M. Gipoulon, président de chambre,
- Mme Signerin-Icre, président-assesseur,
- et Mme Eliot, conseiller,
Lu en audience publique le 27 décembre 2004.
Le rapporteur,
Signé : C. SIGNERIN-ICRE
Le président,
Signé : J.F. GIPOULON
Le greffier,
Signé : G. VANDENBERGHE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
G. VANDENBERGHE
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N°04DA00568