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26/05/2005 | FRANCE | N°04DA00251

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3 (bis), 26 mai 2005, 04DA00251


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le

23 mars 2004, présentée pour la COMMUNE DE FERIN, représentée par son maire, par

Me Caffier ; la COMMUNE DE FERIN demande à la cour :

1') d'annuler le jugement n° 03-2844 du 15 janvier 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé la décision du maire de ladite commune, en date du 18 avril 2003, refusant de réduire le nombre des sonneries civiles de la cloche de l'église communale ;

2') de rejeter la demande présentée par M. et Mme X et la société Y dev

ant le Tribunal administratif de Lille ;

3°) de condamner M. et Mme X et la société Y ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le

23 mars 2004, présentée pour la COMMUNE DE FERIN, représentée par son maire, par

Me Caffier ; la COMMUNE DE FERIN demande à la cour :

1') d'annuler le jugement n° 03-2844 du 15 janvier 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé la décision du maire de ladite commune, en date du 18 avril 2003, refusant de réduire le nombre des sonneries civiles de la cloche de l'église communale ;

2') de rejeter la demande présentée par M. et Mme X et la société Y devant le Tribunal administratif de Lille ;

3°) de condamner M. et Mme X et la société Y à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'immense majorité des habitants de la commune souhaite le maintien des sonneries diurnes de l'horloge de l'église ; que les nuisances sonores alléguées, dont aucun autre riverain ne s'est plaint, ne sont pas établies ; que le bruit généré par les sonneries n'excède par les seuils admis par la réglementation sur les bruits de voisinage ; que le décret du 16 mars 1906 permet au maire de réglementer l'usage des cloches d'un édifice cultuel lorsque cet usage résulte des traditions locales ; qu'il est d'usage constant dans les communes rurales de faire sonner les cloches pour marquer les heures diurnes ; que cet usage, qui a l'accord de l'association cultuelle, est souhaité par l'immense majorité des habitants ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2004, présenté pour M. et Mme Denis X et la société Y, par Me Rousseaux ; M. et Mme X et la société Y concluent au rejet de la requête et demandent en outre à la Cour de condamner la COMMUNE DE FERIN à leur payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils soutiennent que les nuisances sonores générées par les sonneries ont été suffisamment établies par les certificats médicaux produits ; que les opérations de mesures effectuées par le bureau Véritas n'ont pas de caractère contradictoire ; que l'article 51 du décret du

16 mars 1906 définit clairement les conditions dans lesquelles les sonneries des cloches peuvent être utilisées à des fins civiles ; qu'aucun usage local n'autorise les sonneries civiles sur la COMMUNE DE FERIN ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 27 avril 2005, présenté pour la COMMUNE DE FERIN, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ;

Vu le décret du 16 mars 1906 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2005 à laquelle siégeaient

M. Merloz, président de chambre, M. Dupouy, président-assesseur et M. Stéphan, premier conseiller :

- le rapport de M. Dupouy, président-assesseur ;

- les observations de Me Caffier, pour la COMMUNE DE FERIN ;

- et les conclusions de M. Lepers, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de la décision du 18 avril 2003 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, de la police municipale... ; qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : ...2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que...les bruits, y compris les bruits de voisinage... ; et qu'en vertu de l'article 27 de la loi du

9 décembre 1905 et de l'article 51 du décret du 16 mars 1906 pris pour son application, il appartient au maire de réglementer l'usage des cloches dans l'intérêt de l'ordre public, en conciliant l'exercice de ce pouvoir avec le respect de la liberté des cultes ; que l'emploi des cloches d'un édifice cultuel à des fins civiles est légal lorsque, notamment, les sonneries sont autorisées par les usages locaux ;

Considérant que M. et Mme X et la société Y, installés à proximité de l'église de Férin, ont demandé au maire de cette commune de limiter à une seule sonnerie à 13 heures l'usage civil des sonneries de la cloche de l'église marquant chaque heure pendant la journée entre 8 heures et 20 heures ; que, par lettre du 18 avril 2003, le maire de Férin, estimant que lesdites sonneries, dont l'intensité et le nombre avaient déjà été réduits, ne généraient pas un bruit excessif, a rejeté la demande des intéressés ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, si la pratique des sonneries civiles avait cessé lorsque les époux X ont acquis leur maison en 1997, ladite pratique a été rétablie, conformément au souhait d'une grande partie des habitants et avec l'accord du comité paroissial de Férin, au cours de l'année 2000 après réparation du mécanisme de fonctionnement de l'horloge installée dans le clocher de l'église ; qu'ainsi, c'est à tort que, pour annuler la décision du maire de Férin du 18 avril 2003, le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence de justification par la commune d'un usage local autorisant, en application de l'article 51 du décret du 16 mars 1906, les sonneries civiles des cloches de l'église communale ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. et Mme X et la société Y devant le Tribunal administratif de Lille et tiré des nuisances sonores excessives provoquées par les sonneries de l'horloge de l'église ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des mesures de bruits effectuées par un organisme spécialisé aux abords de la propriété des époux X le 9 mars 2004 et faisant apparaître une émergence sonore réelle de 8 dB(A) inférieure à la limite admissible de 12 dB(A), que les nuisances sonores engendrées par les sonneries de la cloche de l'église de Férin ne peuvent être regardées comme portant une atteinte à la tranquillité publique à laquelle le maire aurait été tenu de remédier ; que, si les époux X et la société Y critiquent le caractère non contradictoire des opérations de mesures, ils n'en contestent pas sérieusement la fiabilité technique ; qu'ainsi, en refusant de donner suite à la demande de ces derniers, le maire n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE FERIN est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé la décision de son maire du 18 avril 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la COMMUNE DE FERIN, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser aux époux X et à la société Y la somme que demandent ces derniers au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner

M. et Mme X et la société Y à verser à la COMMUNE DE FERIN une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par cette collectivité et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 03-2844 du Tribunal administratif de Lille en date du

15 janvier 2004 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme X et la société Y devant le Tribunal administratif de Lille est rejetée.

Article 3 : M. et Mme X et la société Y verseront à la COMMUNE DE FERIN une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE FERIN, à M. et Mme Denis X, à la société à responsabilité limitée Y et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2005, à laquelle siégeaient :

- M. Merloz, président de chambre,

- M. Dupouy, président-assesseur,

- M. Stéphan, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 26 mai 2005.

Le rapporteur,

Signé : A. DUPOUY

Le président de chambre,

Signé : G. MERLOZ

Le greffier,

Signé : B. ROBERT

2

N°04DA00251


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 04DA00251
Date de la décision : 26/05/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Merloz
Rapporteur ?: M. Alain Dupouy
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : CAFFIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-05-26;04da00251 ?
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