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15/09/2005 | FRANCE | N°04DA00478

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3 (ter), 15 septembre 2005, 04DA00478


Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de

Douai, présentée pour la SARL ARRAS FRUITS, dont le siège est ..., représentée par son gérant en exercice, par Me X... ; la société ARRAS FRUITS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0105900 du 25 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution supplémentaire sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de

s exercices clos en 1997 et 1998, mises en recouvrement le 15 juin 2001 ainsi que des...

Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de

Douai, présentée pour la SARL ARRAS FRUITS, dont le siège est ..., représentée par son gérant en exercice, par Me X... ; la société ARRAS FRUITS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0105900 du 25 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution supplémentaire sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1997 et 1998, mises en recouvrement le 15 juin 2001 ainsi que des pénalités dont ces suppléments d'imposition ont été assortis ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à lui rembourser les frais exposés pour constituer des garanties ;

La SARL ARRAS FRUITS soutient que, si les premiers juges comme l'administration ont considéré que les abandons de créances consentis par elle au profit de la société Krysfruit Hellemmes présentaient un caractère financier, ces abandons de créances étaient, par leur montant, nullement en disproportion de la valorisation de ladite société et que cette dernière présentait une valeur potentielle pour la requérante ; que ces abandons de créances doivent par suite, être considérés comme déductibles en totalité, eu égard à la situation d'actif net négative présentée à la date de clôture des exercices en cause par ladite société ; que la valorisation intrinsèque des fonds de la société Krysfruit au montant de 3 000 000 francs, retenue initialement par la requérante, n'était valable qu'au moment de la reprise de cette filiale et ne doit, dès lors, pas servir à la détermination de la situation de son actif net comptable à la clôture des exercices 1997 et 1998 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2004, présenté le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient que la société ARRAS FRUITS ne démontre pas la contrepartie qu'elle aurait retirée des abandons de créances consentis à la société Krysfruit et n'établit pas que ces abandons de créances auraient eu pour effet de rendre positif l'actif net de cette société ; qu'elle ne démontre pas davantage que la valeur nette réelle de la société Krysfruit devait être tenue aux dites dates comme négative ; que la situation nette négative alléguée par elle de 2 786 765 francs au

30 septembre 1998 ne saurait être considérée, dès lors qu'elle ne résulte que de l'augmentation des charges de salaires, des dotations financières aux provisions sur titres immobilisés, c'est à dire des facteurs exogènes à la valorisation propre du fonds de commerce de cette entreprise et qu'il ressort de ses propres écritures que la valorisation de société Krysfruit était à la date de sa reprise au moins égale à 3 000 000 francs ; que, par suite, la valeur nette réelle de la société Krysfruit à la date des abandons de créances consentis doit être tenue pour positive ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 janvier 2005, présenté pour la société ARRAS FRUITS ; la société ARRAS FRUITS conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ; et, en outre, par le moyen qu'ayant répondu à la notification de redressements du 3 août 1999 avec toute la célérité requise, il ne peut lui être opposé un défaut de réponse valant acceptation tacite dudit redressement ; que l'analyse opérée par le fisc procède d'une mauvaise compréhension des données comptables de la société Krysfruit dont l'exercice clos au 30 septembre 1997 ne couvre qu'une durée de six mois tandis que celui clos le 30 septembre 1998 a une durée de douze mois ; qu'il ressort de la comparaison des résultats au cours de la période considérée, qu'une chute de 25 % du chiffre d'affaires annuel doit être relevée ainsi que l'existence d'une situation nette négative résultant des facteurs propres à la valorisation du fonds de commerce ; que la situation nette comptable négative de la société Krysfruit de 105 894 francs, telle que constatée au

30 juillet 1999, ne saurait être compensée par une sur valorisation de l'actif incorporel de ladite société, dès lors que les éléments incorporels de ce fonds s'élevaient, lors de son acquisition, à plus de 2,5 millions de francs, dont une survaleur, alors estimée à environ 1,5 million de francs, devenue par la suite nulle compte tenu de l'évolution de son chiffre d'affaires ; que le contexte dans lequel de tels abandons de créances ont été consentis ne justifiait en aucune manière l'application par le service de pénalités de mauvaise foi ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 juillet 2005, présenté le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment et, en outre, par le motif que la SARL ARRAS FRUITS n'est pas fondée à justifier la déductibilité du second abandon de créances consenti à la société Krisfruit par l'existence d'une situation d'actif net négative au 30 septembre 1998, alors que cet abandon ayant été accordé plus de sept mois avant la clôture de l'exercice, il ne saurait en tout état de cause être considéré comme lié à la dégradation des résultats de la société constatée en fin d'exercice ;

Vu l'ordonnance en date du 20 juin 2005 par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour a fixé la date de clôture de l'instruction au 16 août 2005 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er septembre 2005 à laquelle siégeaient Mme Helmholtz, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et

M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller :

- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Le Goff, commissaire du gouvernement ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 30 septembre 1997 et le 11 février 1998, la société ARRAS FRUITS a consenti à sa filiale, la société Krisfruit Hellemmes, des abandons de créances d'un montant respectif de 400 000 francs et de 500 000 francs qu'elle a déduits des résultats imposables des exercices clos le 30 septembre 1997 et le 30 septembre 1998 ; que l'administration a refusé la déduction de ces sommes au motif que la société ARRAS FRUITS ne justifiait pas de l'intérêt qu'elle aurait eu à ces abandons de créances ;

Considérant que les abandons de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve, dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;

Considérant qu'il résulte des articles 38 et 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu du I de l'article 209 du même code que le bénéfice net est établi sous déduction des charges supportées dans l'intérêt de l'entreprise ; que ne peuvent être déduites du bénéfice net passible de l'impôt sur les sociétés les charges qui sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que c'est au regard du seul intérêt propre de l'entreprise qu'il doit être apprécié si des charges assumées par une société en vue d'assurer certains avantages à une autre société correspondent à des actes de gestion commerciale normale ;

Considérant, d'une part, que les sociétés ARRAS FRUITS et Krysfruit sont deux sociétés spécialisées dans le commerce de détail de fruits et légumes, exerçant leur activité dans des secteurs géographiques différents, la première à Arras, la seconde dans la métropole lilloise ; que si la société ARRAS FRUITS présente la structure et l'intérêt commercial de sa participation dans le capital de la société Krysfruit et rappelle à cet effet, que cette société qui exploite quatre magasins, disposait par ce biais d'un puissant outil de distribution dont l'acquisition pouvait avoir des avantages directs pour elle, qu'elle précise que l'implantation de la société Krysfruit dans la commune de Capenghem devait lui permettre d'établir une plateforme d'achat commune et que cette dernière disposait, en outre, de certains moyens matériels et d'un savoir-faire dans le domaine de l'informatisation et du négoce en matière de produits crémiers qu'elle ne possédait pas, que l'opération de reprise effectuée devait entraîner pour elle une économie d'échelle, tant au regard de l'approvisionnement, que s'agissant de ses frais généraux, ces allégations ne sont assorties d'aucune justification de nature à en prouver la pertinence ; que la société ARRAS FRUITS n'établit pas davantage qu'elle aurait entretenu avec la société Krysfruit au cours des exercices litigieux des relations commerciales particulières qui lui auraient permis de maintenir ses approvisionnements ; que les allégations à caractère général, dépourvues de justifications, de la société requérante quant aux nouvelles dessertes géographiques pouvant résulter de l'acquisition de la société Krisfruit ne permettent pas d'établir l'existence des contreparties qu'elle estimait devoir obtenir des abandons de créances qu'elle a consentis ; qu'elle ne justifie, par suite, d'aucun intérêt propre commercial de nature à justifier l'aide qu'elle aurait entendu apporter à la société Krysfruit, en abandonnant à celle-ci les créances litigieuses ;

Considérant, d'autre part, que, si la société ARRAS FRUITS pour démontrer qu'elle avait un intérêt financier à l'abandon de créances qu'elle a consenti à la société Krysfruit, produit la liasse fiscale afférente à l'exercice clos le 30 septembre 1998 qui indique l'existence de pertes sur exercices de la société Krysfruit et, par suite, une situation nette négative de 181 688 francs au 30 septembre 1997 et de 2 786 765 francs au 30 septembre 1998, elle n'établit pas que, contrairement aux termes contenus dans sa réclamation aux services fiscaux, en date du

20 septembre 2001, selon lesquels l'intégration dans la situation d'actif net de la valeur du fonds qui avait été créé conduisait à donner à la société une valorisation au moins égale à trois millions de francs, la survaleur dudit fonds de commerce serait par la suite devenue nulle en raison de la diminution du chiffre d'affaires enregistré par la société ; qu'ainsi la société ARRAS FRUITS n'apporte pas la preuve que les pertes cumulées de la société avaient atteint un montant tel que la situation financière de la société Krysfruit se trouvait compromise et qu'elle avait cherché à éviter le dépôt de bilan de sa filiale par ces abandons de créances ;

Considérant que la situation évoquée par la société ARRAS FRUITS pour justifier la déduction des sommes correspondant aux abandons de créances litigieux, selon laquelle lesdits abandons n'auraient entraîné aucun accroissement de la valeur de sa participation dans le capital de la société Krysfruit, ne peut être appréciée qu'à la date de clôture des exercices de la société mère au cours desquels les abandons de créances ont été opérés ; que la société requérante, dont il n'est pas contesté qu'elle détenait la totalité du capital de la société Krysfruit, doit justifier, par voie de conséquence, qu'à la date du 30 septembre 1997 et du 30 septembre 1998, la situation nette comptable de la société Krysfruit était négative ; que la société ARRAS FRUITS n'établit cependant pas que les pertes cumulées de la société Krysfruit avaient atteint un niveau tel que le montant des créances des tiers, y compris les siennes, fût devenu supérieur à la valeur de réalisation de l'actif social ; que dans ces conditions l'abandon de créances litigieux doit être regardé comme ayant nécessairement augmenté la valeur de la participation détenue par la société ARRAS FRUITS dans la société Krysfruit à concurrence d'un montant égal aux deux créances abandonnées ; que dans ces conditions, l'administration était fondée à regarder ces abandons de créances comme des opérations étrangères à une gestion commerciale normale de la société et à refuser d'admettre en déduction du bénéfice imposable des exercices de la société ARRAS FRUITS, les sommes litigieuses ;

Sur les pénalités :

Considérant que la société requérante ne saurait contester l'application des pénalités de mauvaise foi en se bornant à faire état du contexte dans lequel les abandons de créances ont été consentis ;

Sur les conclusions de la société ARRAS FRUITS tendant au remboursement des frais exposés pour constituer les garanties :

Considérant qu'en tout état de cause, les conclusions de la requérante tendant à l'application des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ne peuvent en l'absence de litige né et actuel qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société ARRAS FRUITS est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société ARRAS FRUITS et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°04DA00478


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: M. Olivier Mesmin d'Estienne
Rapporteur public ?: M. Le Goff
Avocat(s) : SCP DUTAT LEFEVRE et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3 (ter)
Date de la décision : 15/09/2005
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 04DA00478
Numéro NOR : CETATEXT000007604981 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-09-15;04da00478 ?
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