La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/09/2005 | FRANCE | N°03DA00935

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation a 3 (bis), 20 septembre 2005, 03DA00935


Vu la requête, enregistrée le 22 août 2003, présentée pour M. Gilles X, demeurant

..., par Me Engueleguele, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0103568-0103569-0103771 du 25 mars 2003 du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 septembre 2001 par laquelle le directeur du centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens a prononcé sa mise à la retraite d'office ;

2°) d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner l

e centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens à lui verser une somme de

2 500 euros au ...

Vu la requête, enregistrée le 22 août 2003, présentée pour M. Gilles X, demeurant

..., par Me Engueleguele, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0103568-0103569-0103771 du 25 mars 2003 du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 septembre 2001 par laquelle le directeur du centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens a prononcé sa mise à la retraite d'office ;

2°) d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner le centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens à lui verser une somme de

2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision le mettant d'office à la retraite a été prise au terme d'une procédure excessivement longue et qu'elle a, ainsi, méconnu les dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision de mise à la retraite d'office a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le principe du contradictoire a été méconnu et que le conseil de discipline n'a pas siégé en toute impartialité ; que suite à l'annulation, pour erreur de droit, de la décision mettant fin à sa mise à disposition, faite par les premiers juges, la décision le mettant d'office en retraite, prise par le centre hospitalier Philippe Pinel, est également entachée d'erreur de droit dès lors qu'elle ne pouvait être prise qu'à l'issue de sa mise à disposition ; que la réalité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie ; que la sanction qui lui a été infligée est disproportionnée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2003, présenté pour le centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens par la SCP Devauchelle, Cottignies, Leroux-Lepage, Cahitte, société d'avocats, par lequel il conclut, d'une part, au rejet de la requête et à la condamnation de M. X à lui verser une somme de 1 524 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'autre part, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement en tant qu'il a annulé sa décision du 6 juillet 2001 mettant fin à la mise à disposition de M. X du centre hospitalier d'Auxerre ; il soutient que sur le droit à être jugé dans un délai raisonnable il s'en remet à la sagesse de la Cour ; que le caractère contradictoire de la procédure disciplinaire a été respecté dès lors que M. X a reçu communication de l'intégralité de son dossier ; que contrairement à ce que soutient l'intéressé, il a été entendu lors de l'enquête administrative menée par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales ; que la partialité du collège des psychologues siégeant au conseil de discipline n'est pas fondée dès lors que celui-ci n'a exprimé aucune hostilité, ni aucune animosité notoire à l'égard de M. X mais seulement une interrogation sur le rétablissement de relations de travail correctes dans l'intérêt des patients au sein du service ; que, d'ailleurs, M. X, qui disposait d'un droit de récusation n'a pas souhaité user de celui-ci à l'encontre d'un ou plusieurs membres du conseil de discipline ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la décision mettant fin à la mise à disposition du requérant a été prise dans l'intérêt du service et non en considération de la personne de M. X ; au fond, que les nombreux témoignages nominatifs versés au dossier établissent la réalité des faits reprochés à M. X ; que le centre hospitalier, n'a pas, en tenant compte de la fréquence, du caractère répétitif des faits reprochés à l'intéressé et de la nature particulière de ses fonctions, commis d'erreur manifeste d'appréciation en prenant la décision attaquée, nonobstant la circonstance que le comportement antérieur de M. X était satisfaisant ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 février 2004, présenté pour M. X, par lequel il conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que l'appel incident formé par le centre hospitalier d'Amiens est irrecevable dès lors qu'il ne développe aucun moyen à l'appui de ses conclusions reconventionnelles ; au fond, que l'intérêt du service mis en avant par ledit centre hospitalier n'est pas de nature à couvrir le vice altérant la décision en litige ;

Vu les mémoires, enregistrés les 19 mars et 15 juillet 2004, présentés pour le centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens, par lesquels il conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que son appel incident est recevable dès lors qu'il porte critique du jugement attaqué et repose sur des moyens de fait et de droit précis ;

Vu l'examen des pièces desquelles il résulte que la requête a été communiquée au ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale qui n'a pas produit de mémoire en défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, modifiée ;

Vu le décret n°88-976 du 13 octobre 1988 relatif à certaines positions des fonctionnaires hospitaliers ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2005 à laquelle siégeaient M. Couzinet, président de chambre, M. Berthoud, président-assesseur et M. Platillero, conseiller :

- le rapport de M. Berthoud, président-assesseur ;

- les observations de M. X et de Me Leroux-Lepage, avocat, pour le centre hospitalier Philippe Pinel ;

- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par deux décisions en date du 6 juillet 2001, le directeur du centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens a suspendu de ses fonctions, à compter du 9 juillet 2001, M. X, directeur du service des soins infirmiers au sein de l'établissement, et a mis fin à sa mise à disposition du centre hospitalier d'Auxerre à la même date ; que le 28 septembre 2001, il a prononcé la mise à la retraite d'office de M. X, en raison de gestes et paroles déplacés envers des agents de sexe féminin de son service et des propos injurieux et méprisants à l'égard de supérieurs, de collègues et de subordonnés ;

Considérant que, par la voie de l'appel principal, M. X demande à la Cour d'annuler le jugement du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 septembre 2001 par laquelle le directeur du centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens a prononcé sa mise à la retraite d'office ; que, par la voie de l'appel incident, le centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens demande l'annulation du même jugement en tant qu'il a annulé la décision du 6 juillet 2001 mettant fin à la mise à disposition de

M. X ;

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la légalité externe de la décision du 28 septembre 2001 :

Considérant, en premier lieu, que l'autorité compétente pour exercer le pouvoir disciplinaire à l'encontre d'un fonctionnaire est celle qui est investie du pouvoir de nomination ; que le fonctionnaire placé en position de mise à disposition demeure soumis aux règles disciplinaires de sa situation d'origine ; qu'ainsi, le lien qui le rattache à son administration d'origine n'est pas rompu durant la période de mise à disposition ; que, par suite, le directeur du centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens était compétent pour prononcer la mise à la retraite d'office de M. X alors même que ce dernier devait être regardé comme étant toujours placé en position de mise à disposition ;

Considérant, en deuxième lieu, que si M. X fait valoir que la décision prononçant sa mise à la retraite d'office a été prise au terme d'une procédure excessivement longue, il ne saurait utilement se prévaloir des stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lesquelles ne sont pas applicables à la procédure administrative disciplinaire ;

Considérant, en troisième lieu, que si M. X soutient que le principe du contradictoire a été méconnu, il ressort des pièces du dossier que, contrairement, à ses allégations, il a été entendu lors de l'enquête administrative menée par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) ; qu'il ressort, également, des pièces du dossier qu'il a reçu communication de toutes les pièces utiles à sa défense, notamment, du rapport introductif à la procédure disciplinaire et de l'ensemble des pièces annexées dont les dix-sept témoignages nominatifs recueillis lors de l'enquête interne ; que la circonstance qu'il n'aurait eu communication du rapport définitif de l'enquête menée par la DDASS qu'après la réunion du conseil de discipline, est sans incidence sur la régularité de la procédure dès lors que la sanction qui lui a été infligée n'a pas été prise au vu de ce rapport mais sur la base des résultats de l'enquête interne susmentionnée ; que, par ailleurs, et sans que cela soit contesté par le requérant, il a été entendu, assisté par deux défenseurs de son choix, par le conseil de discipline, lors de sa réunion du 17 septembre 2001, laquelle avait fait l'objet d'un report à sa demande, et a, ainsi, pu présenter ses observations en défense ;

Considérant, en quatrième lieu, que si M. X soutient que le conseil de discipline n'a pas siégé en toute impartialité, la seule circonstance que l'un des membres dudit conseil faisait partie du collège des psychologues, dont certains membres, extérieurs au conseil de discipline, avaient fait part de leurs inquiétudes auprès du directeur de l'hôpital quant à la réaffectation dans son ancien service de M. X, sans d'ailleurs entrer dans des considérations de fond, ne suffit pas à établir que ce membre du conseil de discipline aurait manifesté à son encontre une animosité personnelle notoire et fait preuve de partialité ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant qu'en vertu du 1er alinéa de l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relative à la fonction publique hospitalière, les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes ; que les sanctions du quatrième groupe comprennent la mise à la retraite d'office, la révocation ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, directeur du service des soins infirmiers, a eu, à de nombreuses reprises, un comportement inconvenant et déplacé à l'égard de plusieurs agents féminins de l'établissement placés sous son autorité ; qu'il a également tenu, lors de réunions internes au service, des propos irrespectueux et méprisants à l'égard de supérieurs, de collègues et de subordonnés ; que l'ensemble de ces faits, dont la matérialité et le caractère répété sont établis par les différents témoignages et éléments, précis et concordants, figurant au dossier, était de nature à justifier une sanction ; qu'eu égard à la gravité d'un tel comportement, et quel qu'ait pu être le passé professionnel de M. X, le directeur du centre hospitalier en prononçant la mise à la retraite d'office de l'intéressé n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 septembre 2001 ;

Sur l'appel incident :

Considérant que, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, la décision du 6 juillet 2001 mettant fin à la mise à disposition de M. X auprès du centre hospitalier d'Auxerre est motivée par la manière de servir de l'intéressé et constitue ainsi, même si elle est dépourvue de caractère disciplinaire, une mesure prise en considération de la personne ; qu'elle ne pouvait, par suite, intervenir sans que l'intéressé ait été préalablement mis à même de demander la communication de son dossier ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X ait été averti préalablement de l'intention du centre hospitalier de mettre fin à sa mise à disposition et ait été ainsi mis à même de prendre connaissance de son dossier ; que par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de ses conclusions incidentes, le centre hospitalier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision dont s'agit ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que l'article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner M. X à payer au centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens une somme de 1 000 euros en remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel d'incident du centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens sont rejetées.

Article 3 : M. X est condamné à payer au centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Gilles X, au centre hospitalier Philippe Pinel d'Amiens et au ministre de la santé et des solidarités.

''

''

''

''

2

N°03DA00935


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation a 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 03DA00935
Date de la décision : 20/09/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Couzinet
Rapporteur ?: M. Joël Berthoud
Rapporteur public ?: M. Michel
Avocat(s) : ENGUELEGUELE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-09-20;03da00935 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award