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06/10/2005 | FRANCE | N°05DA00790

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des reconduites a la frontiere, 06 octobre 2005, 05DA00790


Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2005, présentée pour M. Muket X, demeurant

..., par Me Moreau ; M. X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-1397, en date du 26 mai 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 24 mai 2005 par lequel le préfet de l'Oise a décidé sa reconduite à la frontière et fixé la Mongolie comme pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

Il soutient qu'

ayant formé un recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apa...

Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2005, présentée pour M. Muket X, demeurant

..., par Me Moreau ; M. X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-1397, en date du 26 mai 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 24 mai 2005 par lequel le préfet de l'Oise a décidé sa reconduite à la frontière et fixé la Mongolie comme pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

Il soutient qu'ayant formé un recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant sa demande de réexamen de sa situation, aucune mesure d'éloignement ne pouvait être prise à son endroit dans l'attente de la décision de la Commission des recours des réfugiés ; que, sur le fond, le premier juge s'est mépris sur la réalité de sa situation en estimant que l'arrêté attaqué ne procédait pas d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en effet, il réside sur le territoire français depuis 2003 avec son épouse et leurs deux enfants ; que l'un de ses fils est malade et bénéficie, ainsi que sa mère, d'une protection sociale en France ; que sa belle-mère réside également en France en compagnie de son fils, sous couvert d'un titre de séjour temporaire ; qu'ainsi, l'essentiel de sa famille demeure en France, tandis qu'il n'a plus aucune attache dans son pays d'origine ; que, par ailleurs, le Tribunal s'est également mépris sur la réalité de sa situation en écartant le moyen tiré de la méconnaissance, par l'arrêté préfectoral attaqué, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que sa sécurité risque d'être gravement menacée en cas de retour dans son pays d'origine, compte tenu de son appartenance à une organisation clandestine d'opposition, comme en témoignent les tentatives d'intimidation et les poursuites ainsi que les recherches dont il a fait l'objet avant et après son départ ; qu'il a d'ailleurs subi deux périodes d'incarcération à la suite de fausses accusations ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance, en date du 17 août 2005, par laquelle le président délégué par le président de la Cour administrative d'appel de Douai a fixé la clôture de l'instruction au 16 septembre 2005 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2005, présenté par le préfet de l'Oise qui conclut au rejet de la requête et soutient que son arrêté attaqué, qui est suffisamment motivé, a été signé par une autorité compétente ; que l'étranger entrait dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'établit pas être menacé dans son pays d'origine ; que les décisions attaquées ne méconnaissent ni l'article 3, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la délégation du président de la Cour en date du 3 janvier 2005 prise en vertu de l'article R. 222-33 du code de justice administrative ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 septembre 2005 :

- le rapport de M. Yeznikian, président délégué :

- les conclusions de M. Le Goff, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( … ) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; ( … ) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que M. X, ressortissant de Mongolie, a formé une demande tendant à obtenir le bénéfice du statut de réfugié politique, laquelle a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 22 janvier 2004, confirmée par la Commission des recours des réfugiés le

12 juillet 2004 ; que l'intéressé s'est maintenu irrégulièrement en France plus d'un mois après la réception, le 17 septembre 2004, de l'invitation à quitter le territoire que lui avait adressée le préfet de l'Oise le 15 septembre 2004 ; qu'ainsi, M. X se trouvait, à la date de l'arrêté attaqué, dans la situation prévue par les dispositions précitées, qui autorisait le préfet de l'Oise à décider sa reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : ( … ) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. ( … ) » ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 742-6 du même code : « L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'Office. ( … ) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X s'est vu refuser la qualité de réfugié politique par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 22 janvier 2004, confirmée par la Commission des recours des réfugiés le 12 juillet 2004 ; que l'intéressé a présenté auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides une demande de réexamen de sa situation, le 25 octobre 2004, laquelle demande a été rejetée le 4 novembre 2004 comme irrecevable, M. X n'ayant fourni à l'appui de celle-ci aucun élément nouveau relatif aux risques qu'il encourrait dans son pays d'origine ; que si M. X a formé, le 7 juin 2005, un recours contre cette décision devant la Commission des recours des réfugiés, ce recours, qui intervient après la mesure de reconduite à la frontière contestée et doit être regardé, au surplus, comme ayant eu pour seul objet, dans un but dilatoire, de faire échec à celle-ci, est sans influence sur la légalité de cette mesure d'éloignement ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Oise ne pouvait légalement prendre une mesure de reconduite à la frontière à son encontre tant que la Commission des recours des réfugiés n'avait pas statué ;

Considérant que si M. X est entré en France en juin 2003, accompagné de son épouse et de leur fils, né le 29 janvier 2003, et si Mme Batgerel Y épouse X a donné naissance en France, le 6 décembre 2004, à un second fils, il ressort des pièces du dossier qu'eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment à la durée et aux conditions du séjour en France de M. X et de son épouse ainsi qu'au fait que leur demande d'asile ayant été rejetée, ils se trouvent tous les deux en situation irrégulière et font l'objet chacun d'une mesure d'éloignement, l'arrêté du préfet de l'Oise ordonnant la reconduite à la frontière de M. X n'a pas, nonobstant la présence de la mère de son épouse en France, porté au droit du requérant, qui se borne à alléguer qu'il n'aurait pas conservé d'attaches dans son pays d'origine, au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que si, par ailleurs, le fils aîné de M. X bénéficie de soins et d'une couverture sociale en France, il n'est ni établi ni même allégué que l'enfant ne pourrait recevoir un traitement adapté à son état de santé dans son pays d'origine ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du préfet de l'Oise attaqué, qui implique normalement que les enfants mineurs accompagnent leurs parents faisant l'objet de la mesure de reconduite à la frontière, reposerait sur une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une telle mesure sur l'état de santé de son enfant ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que si M. X soutient que, contrairement à ce qu'a estimé le vice-président délégué du Tribunal administratif d'Amiens, l'arrêté attaqué, en tant qu'il désigne la Mongolie comme pays de destination, aurait été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, aux motifs que, membre d'une organisation clandestine d'opposition, il aurait fait l'objet dans son pays d'origine de tentatives d'intimidation et de menaces, ainsi que de poursuites ayant donné lieu à son incarcération à deux reprises, il ne produit aucun document à caractère probant de nature à admettre qu'il pourrait être personnellement exposé à des risques en cas de retour en Mongolie ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le vice-président délégué du Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de l'Oise, en date du 24 mai 2005, décidant sa reconduite à la frontière et désignant la Mongolie comme pays de destination ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Mucket X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Copie sera adressée au préfet de l'Oise.

2

N°05DA00790


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05DA00790
Date de la décision : 06/10/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Le Goff
Avocat(s) : MOREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-10-06;05da00790 ?
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