La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/10/2005 | FRANCE | N°04DA00689

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3 (bis), 25 octobre 2005, 04DA00689


Vu la requête, enregistrée le 6 août 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Christian X, demeurant ..., par Me Parrain ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 01-3531 du 27 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1996 et 1997 dans les rôles de la commune d'Ennevelin, mis en recouvrement le 30 avril 2001 ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ;

2°) de pro

noncer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°...

Vu la requête, enregistrée le 6 août 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Christian X, demeurant ..., par Me Parrain ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 01-3531 du 27 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1996 et 1997 dans les rôles de la commune d'Ennevelin, mis en recouvrement le 30 avril 2001 ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. Christian X soutient que c'est à tort que les premiers juges ont considéré la procédure d'imposition comme régulière, alors que l'envoi au seul représentant de l'indivision et non à l'ensemble des quirataires qui, pratiquant une politique autonome d'amortissement, ont la qualité de véritables propriétaires exploitants et doivent donc disposer des droits attachés à leur qualité d'indivisaires, constitue une méconnaissance des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ; que l'acquisition du navire doit être considérée, en application des dispositions de l'article 1604 du code civil et de celles de l'article 6 de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer et en l'absence de dispositions contractuelles contraires lors de la signature du procès-verbal de recettes, comme ayant eu lieu le 26 décembre 1996 ; que la date effective de l'opération juridique de vente est authentifiée par les mentions portées sur le procès-verbal de recette du navire ; que le caractère authentique de cet acte en garantit le contenu jusqu'à inscription de faux ; que l'administration par la seule référence à des documents qui ne peuvent être délivrés qu'une fois le navire achevé ou émanant de son constructeur et relatifs au règlement d'une partie du prix de ce navire, n'établit pas l'existence d'une date de livraison matérielle de ce dernier, différente de celle stipulée ; que l'investissement correspondant à l'acquisition du navire entrant dans le champ d'application de la réglementation afférente à l'acquisition des quirats, le requérant est fondé à prétendre au bénéfice du régime transitoire d'application des dispositions de l'article 156-1-1° bis du code général des impôts qui autorisent la déduction des déficits provenant de l'exploitation de biens meubles corporels acquis à l'état neuf, non encore livrés au 1er janvier 1996, dès lors qu'avant cette date, l'acquisition du navire avait déjà donné lieu à la formulation d'une commande accompagnée du versement d'acomptes d'un montant au moins égal à 50 % de son prix ; que le requérant entend se prévaloir de l'interprétation de l'article 156-1-1° bis précité donnée par la doctrine administrative dans l'instruction du 14 août 1996 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2005, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête ; il soutient que l'administration peut diligenter à la fois un contrôle à l'encontre de la copropriété d'un navire et des quirataires et que les garanties prévues à l'article

L. 47 du livre des procédures fiscales n'ont pas été méconnues, dès lors que les rappels concernés ne procèdent pas de la vérification de la copropriété, mais d'un contrôle sur pièces portant sur la situation d'un des quirataires, distinct d'une telle vérification ; que l'appréciation de l'activité réelle de M. X n'avait, par suite, pas à être précédée de l'envoi d'un avis de vérification ; que l'administration était fondée à refuser l'imputation sur le revenu global du requérant du déficit commercial résultant de la déduction fiscale que celui-ci a pratiquée au titre de 1996 ainsi que du résultat déficitaire généré par l'exploitation en 1997 du bateau par la copropriété, dès lors que l'investissement dont s'agit ne peut être regardé comme réalisé par la copropriété des quirataires durant l'année 1996 ; que le transfert de propriété du navire ne pouvait, en effet, s'effectuer distinctement de sa livraison qui n'est intervenue que postérieurement au 31 décembre 1996 ; que les stipulations de l'acte de cession des quirats ne permettent pas de considérer que le navire aurait été livré à la copropriété à une date antérieure à celle-ci ; que, tout au contraire, le navire qui n'était pas achevé en 1996, est resté sous la responsabilité de son constructeur jusqu'au 28 mars 1997 ; que les actes de cession de quirats ne sauraient, par eux-mêmes, constituer la preuve de la matérialité de la livraison du navire ; qu'en effet, la prise de jouissance des quirats n'emporte celle du navire que dans l'état où il se trouve à la date de la signature de l'acte ; que le requérant ne saurait, enfin, se prévaloir d'une éligibilité de l'opération aux mesures transitoires visées au dernier alinéa de l'article 156-1-1° bis du code général des impôts, dès lors que la copropriété n'a pu commander le navire litigieux avant le 31 décembre 1995, puisqu'elle n'a été constituée que le 28 août 1996 et que, contrairement à ce qui figure sur l'attestation qu'a délivrée au requérant le constructeur du navire, aucun acompte sur cette commande n'a été versé avant le début de l'année 1996 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer et le décret n° 67-967 du 27 octobre 1967 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2005 à laquelle siégeaient Mme Helmholtz, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et

M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller :

- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Le Goff, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société Viking et la société Compagnie des Longs Liners ont créé le

28 août 1996 une copropriété dénommée « Viking Albacore » portant sur un navire de pêche en construction désigné sous le même nom ; que M. Christian X est devenu l'un des quirataires de cette copropriété de navire ; que, par notification en date du 29 décembre 1998, confirmée le

25 mai 1999, l'administration fiscale a, au titre des bénéfices industriels et commerciaux des années 1996 et 1997 remis en cause, d'une part, la déduction effectuée de ses revenus par M. X du montant représentant le prix d'acquisition de ses quirats et, d'autre part, l'imputation sur son revenu global par l'intéressé du déficit tiré de l'exploitation du navire au cours de l'année 1997 ; que

M. X fait appel du jugement du 27 mai 2004 du Tribunal administratif de Lille qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre desdites années, ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sur la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 quater du code général des impôts : « Chaque membre des copropriétés de navire régies par le chapitre IV de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer est personnellement soumis à l'impôt sur le revenu à raison de la part correspondant à ses droits dans les résultats déclarés par la copropriété » ; qu'aux termes respectivement des articles 39 E et 61 A du même code : « Chaque membre des copropriétés de navires amortit le prix de revient de sa part de copropriété suivant les modalités prévues à l'égard des navires ( … ) » et que « Les résultats à déclarer par les copropriétés de navires sont déterminés dans les conditions prévues pour les exploitants individuels soumis au régime du bénéfice réel avant déduction de l'amortissement du navire » ; qu'aux termes de l'article 35-I-7° dudit code, présentent le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques qui sont « …membres des copropriétés de navires mentionnées à l'article 8 quater » du même code ; qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : « Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix ( … ) » ; qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées du code général des impôts et du livre des procédures fiscales et sans qu'y fassent obstacle, tant les dispositions des articles 1604 et 1606 du code civil que la circonstance qu'en vertu de la loi du

3 janvier 1967 les quirataires détiennent un droit de propriété direct sur le navire à proportion de leurs parts dans la copropriété, que l'administration peut vérifier la comptabilité d'une copropriété de navire en adressant à cette dernière un avis de vérification sans être tenue d'en informer individuellement l'ensemble des copropriétaires ; que, dès lors, M. X, n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait dû en application des dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales lui adresser en tant que copropriétaire du navire « Viking Albacore » l'avis de vérification de comptabilité de la copropriété et l'informer des garanties afférentes à la vérification alors qu'en tout état de cause les redressements litigieux ne résultent pas de la vérification de comptabilité de la copropriété mais d'un contrôle sur pièces des déclarations de l'intéressé en matière de bénéfices industriels et commerciaux ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi susmentionnée du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer : « Sauf convention contraire, le constructeur est propriétaire du navire en construction jusqu'au transfert de propriété au client. Ce transfert se réalise avec la recette du navire après essais » ; qu'aux termes de l'article 238 bis HA du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'époque des faits : « I. Les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés ou assujetties à un régime réel d'imposition peuvent déduire de leurs résultats imposables une somme égale au montant total des investissements productifs réalisés dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion à l'occasion de la création ou de l'extension d'exploitation appartenant aux secteurs d'activité de l'industrie, de la pêche, de l'hôtellerie, du tourisme, des énergies nouvelles, de l'agriculture, du bâtiment et des travaux publics, des transports et de l'artisanat. La déduction est opérée sur le résultat de l'exercice au cours duquel l'investissement est réalisé, le déficit éventuel de l'exercice étant reporté dans les conditions prévues au I des articles 156 et 209 ( … ) » ; qu'aux termes de l'article 46 quaterdecies D de l'annexe III audit code : « La déduction est pratiquée par l'entreprise propriétaire. Elle est opérée sur les résultats imposables, déterminés avant toute autre déduction ou abattement, de l'exercice au cours duquel l'immobilisation a été livrée à l'entreprise ou créée par elle » ;

En ce qui concerne la déduction de l'investissement :

Considérant que M. X soutient que la livraison du navire était réalisée à la date du

31 décembre 1996 lors de l'acquisition des parts de copropriété par acte notarié qui a opéré un transfert de propriété à due concurrence ainsi qu'il résulte du procès-verbal de recette du navire signé contradictoirement entre la compagnie Vicking et le constructeur le 26 décembre 1996 ;

Considérant toutefois qu'il résulte de l'instruction que contrairement à ce que soutient le requérant, le navire ne pouvait être regardé comme livré à la date d'acquisition des quirats bien que le procès-verbal de recette susmentionné soit intervenu, dès lors que la société ne conteste pas davantage qu'en première instance l'existence d'une clause figurant dans l'acte notarié de cession de quirats du 31 décembre 1996 qu'elle produit de manière tronquée faisant obligation au constructeur d'assurer le navire jusqu'à sa livraison et à la copropriété de le faire à compter de l'entrée en possession du bien dès lors que ce dernier n'a été assuré par la copropriété que le 29 mars 1997 ; qu'ainsi M. X qui ne saurait utilement invoquer l'instruction administrative 4 A 2133 du

1er septembre 1993 laquelle ne contient aucune interprétation de la loi fiscale, n'est pas fondé à soutenir que l'investissement a été réalisé par la copropriété des quirataires en 1996 ;

En ce qui concerne l'imputation des déficits sur le revenu global :

Considérant qu'aux termes de l'article 156-I du code général des impôts, dans sa rédaction applicable pour l'année 1996 : « L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé ( … ) sous déduction : I. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement. Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : 1° bis. Des déficits provenant, directement ou indirectement, des activités relevant des bénéfices industriels et commerciaux lorsque ces activités ne comportent pas la participation personnelle continue et directe de l'un des membres du foyer fiscal à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité. ( … ) Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables au déficit provenant de l'exploitation de biens meubles acquis à l'état neuf, non encore livrés au 1er janvier 1996 et ayant donné lieu avant cette date à une commande accompagnée du versement d'acomptes au moins égaux à 50 % de leur prix » ;

Considérant que M. X ne remplit pas la condition édictée au dernier alinéa précité de l'article 156-I 1° du code général des impôts dans sa version applicable à l'année 1996 pour pouvoir bénéficier de l'imputation des déficits tirés de l'exploitation du navire au titre de son revenu global, dès lors qu'il résulte de l'instruction que la copropriété « Viking Albacore » n'a été constituée que le 28 août 1996 et n'a pu, contrairement à ce qu'allègue l'intéressé, passer une commande du navire avant le 1er janvier 1996 et verser avant cette date des acomptes au moins égaux à 50 % du prix ; que le requérant ne saurait, par ailleurs, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, invoquer l'instruction administrative 4-A-7 1996 du 14 mai 1996 dans les prévisions de laquelle il n'entre pas ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que l'article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Christian X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Christian X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

N°04DA00689 2


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: M. Olivier Mesmin d'Estienne
Rapporteur public ?: M. Le Goff
Avocat(s) : PARRAIN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3 (bis)
Date de la décision : 25/10/2005
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 04DA00689
Numéro NOR : CETATEXT000007605659 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-10-25;04da00689 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award