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17/11/2005 | FRANCE | N°04DA01048

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3 (ter), 17 novembre 2005, 04DA01048


Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Patrice Y demeurant ..., par la SCP Van Maris, Duponchelle, Missiaen ; le requérant demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0201964, 0201977, 0201979, 0201980, 0201981 et 0201982 du 19 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté en date du 23 juillet 2002 par lequel le maire de la commune d'Abbeville lui avait accordé un permis de construire un immeuble d'habitation ;

2°) de rejeter la demande présentée pa

r M. et Mme Z, M. et Mme A, M. Frédéric B, M. et Mme Laurent B, M. et Mme ...

Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Patrice Y demeurant ..., par la SCP Van Maris, Duponchelle, Missiaen ; le requérant demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0201964, 0201977, 0201979, 0201980, 0201981 et 0201982 du 19 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté en date du 23 juillet 2002 par lequel le maire de la commune d'Abbeville lui avait accordé un permis de construire un immeuble d'habitation ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme Z, M. et Mme A, M. Frédéric B, M. et Mme Laurent B, M. et Mme C, M. et Mme D devant le Tribunal administratif d'Amiens ;

Il soutient que la voie d'accès à l'immeuble mesure 4,72 mètres de large dans sa partie la plus étroite ; que son portail mesure 4,60 mètres ; qu'aucun véhicule de plus de deux mètres de large n'est autorisé à aller sur la voie d'accès ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 février 2005, présenté pour M. et Mme Z, M. et Mme A, M. Frédéric B, M. et Mme Laurent B, M. et Mme C et

M. et Mme D, par la Selafa Fidal, qui concluent au rejet de la requête et à la condamnation de M. Y à leur verser chacun la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; les défendeurs soutiennent que le permis nécessitait l'accord de l'architecte des Bâtiments de France ; que le permis a été illégalement prorogé ; que la prorogation n'a pas été régulièrement affichée ; que les conditions de desserte sont inadaptées ; que la défense contre les incendies n'est pas assurée ; que l'emplacement de l'immeuble aurait des conséquences dommageables sur l'ensoleillement et la visibilité des immeubles voisins ; qu'il porterait atteinte au site et à une perspective monumentale ; que les travaux risquent d'endommager les infrastructures environnantes ;

Vu la lettre en date du 3 octobre 2005 par laquelle le président de la formation de jugement a informé les parties qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 octobre 2005, présenté pour M. et Mme A, qui persistent dans leurs conclusions ; les défendeurs soutiennent que dès lors que les faits fondant le moyen de l'égalité externe qu'ils invoquent étaient inconnus d'eux, ils sont recevables à le soulever ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 19 octobre 2005 par télécopie et son original en date du 20 octobre 2005, présenté pour M. Y, qui persiste dans ses conclusions ; il soutient que l'immeuble « Les bains douches » n'était pas classé à la date de la décision attaquée ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 octobre 2005, présenté pour M. et Mme Z, M. et Mme A, M. Frédéric B, M. et Mme Laurent B, M. et Mme C et M. et Mme D qui maintiennent leurs précédentes conclusions, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2005, à laquelle siégeaient Mme Tricot, président de chambre, M. Dupouy, président-assesseur et M. Le Garzic, conseiller :

- le rapport de M. Le Garzic, conseiller ;

- les observations de Me Van Maris pour M. Y et de Me Hourcadette pour M. et Mme Z, M. et Mme A, M. Frédéric B, M. et Mme Laurent B, M. et Mme C et M. et Mme D ;

- et les conclusions de M. Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme : « Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. / Il peut également être refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic. » ;

Considérant que si l'immeuble projeté par M. Y, qui comprend trente-trois logements, ne comporte qu'un seul accès à l'entrée duquel se trouve un portail, il ressort des pièces du dossier que cet accès et son portail sont d'une largeur supérieure à quatre mètres et ne desservent que l'immeuble dont s'agit ; qu'en outre la rue sur laquelle débouche ledit accès sera interdite au stationnement sur dix mètres de part et d'autre du portail ; qu'il suit de là que

M. Y est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif d'Amiens s'est fondé sur ce que le maire de la commune d'Abbeville avait commis une erreur manifeste d'appréciation des conditions de la desserte et de la sécurité des accès à l'immeuble pour annuler le permis de construire qu'il avait délivré le 23 juillet 2002 ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par M. et Mme Z, M. et Mme A, M. Frédéric B, M. et Mme Laurent B, M. et Mme C et M. et Mme D tant devant le tribunal administratif que devant elle ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-38-4 du code de l'urbanisme : « Lorsque la construction est située dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit, le permis de construire ne peut être délivré qu'avec l'accord de l'architecte des Bâtiments de France. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commission régionale du patrimoine et des sites avait émis le 26 juin 2002 un avis favorable à l'inscription à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques de l'immeuble Les bains douches ; que, toutefois, cette inscription n'a été arrêtée par le préfet de la région Picardie, préfet de la Somme, que le 23 juillet 2003, soit postérieurement au permis de construire contesté du 23 juillet 2002 ; que dès lors le moyen tiré de ce que ledit permis de construire n'aurait pu être délivré qu'avec l'accord de l'architecte des Bâtiments de France ne peut en tout état de cause qu'être rejeté ;

Considérant, en deuxième lieu, que la légalité d'une décision s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise ; que dès lors le moyen tiré de ce que le permis de construire aurait été irrégulièrement prolongé est inopérant ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'avis du service départemental d'incendie et de secours de la Somme, que les voies desservant l'immeuble permettront l'accès et l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie ;

Considérant, en quatrième lieu, que le moyen tiré de l'atteinte de la construction projetée aux dispositions du plan d'occupation des sols de la commune d'Abbeville n'est pas assorti des précisions nécessaires pour permettre au juge administratif d'en apprécier le bien-fondé et la portée ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : « Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. » ;

Considérant, d'une part, que le permis de construire, qui est délivré sans préjudice des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité de la construction projetée à la réglementation qui lui est applicable ; que, par suite, les défendeurs ne peuvent utilement se prévaloir de la privation d'ensoleillement, des problèmes de co-visibilité, du danger pesant sur différentes infrastructures ou encore de la chute de la valeur des immeubles avoisinants qui résulterait du permis de construire demandé par M. Y ;

Considérant, d'autre part, qu'une atteinte à l'intérêt des lieux avoisinants par la construction projetée est purement alléguée par les défendeurs ; qu'ils n'établissent aucune erreur manifeste d'appréciation sur ce point par le maire de la commune d'Abbeville ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif d'Amiens a annulé le permis de construire que le maire de la commune d'Abbeville lui avait délivré le 23 juillet 2002 ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. Y, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à M. et Mme Z, M. et Mme A, M. Frédéric B, M. et Mme Laurent B, M. et Mme C et M. et Mme D une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement nos 0201964, 0201977, 0201979, 0201980, 0201981 et 0201982 du 19 octobre 2004 du Tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. et Mme Alain Z, M. et Mme M. Mathieu A, M. Frédéric B, M. et Mme Laurent B, M. et Mme Claude C et M. et Mme Alain D devant le Tribunal administratif d'Amiens et leurs conclusions relatives aux frais au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Patrice Y, à M. et Mme Alain Z, à M. et Mme Mathieu A, à M. Frédéric B, à M. et Mme Laurent B, à M. et Mme Claude C, à M. et Mme Alain D, à la commune d'Abbeville et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

Copie sera transmise au préfet de la région Picardie, préfet de la Somme.

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N°04DA01048


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: M. Pierre Le Garzic
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SCP VAN MARIS - DUPONCHELLE - MISSIAEN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3 (ter)
Date de la décision : 17/11/2005
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 04DA01048
Numéro NOR : CETATEXT000007603440 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-11-17;04da01048 ?
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