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29/11/2005 | FRANCE | N°03DA00660

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation a 5, 29 novembre 2005, 03DA00660


Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2003, présentée pour l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée AUTOCLEAN, dont le siège est ..., par Me X..., avocat ; l'entreprise AUTOCLEAN demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 00-1051 en date du 29 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er septembre 1998 au

31 mars 1999 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge

demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 500 euros en applicatio...

Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2003, présentée pour l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée AUTOCLEAN, dont le siège est ..., par Me X..., avocat ; l'entreprise AUTOCLEAN demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 00-1051 en date du 29 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er septembre 1998 au

31 mars 1999 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la notification de redressements du 22 avril 1999 ne précise pas les textes législatifs ou réglementaires de droit interne sur lesquels est fondé le redressement, en violation de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; que la réponse aux observations du contribuable est insuffisamment motivée ; qu'elle a été redressée sur la taxe sur la valeur ajoutée applicable à la vente de véhicules terrestres à moteur en provenance de la CEE au motif d'avoir déclaré une taxe assise sur la marge et non sur le prix de vente total des véhicules cédés, en application de la 7ème directive du 14 février 1994 entrée en vigueur le 1er janvier 1995 et transposée dans la réglementation nationale au bulletin officiel des impôts 3 K-1-95, alors que la doctrine ne peut constitutionnellement déterminer les règles d'assiette de l'impôt ni transposer une directive ; que même si la directive est d'application directe, le régime particulier des assujettis revendeurs n'est pas incompatible avec la taxation sur la marge ; que cette directive a été imparfaitement transposée dans les textes législatifs et commentée par une instruction incomplète et peu claire ; que tous les contribuables n'ont pas été traités de manière identique, en méconnaissance du principe d'égalité des citoyens devant l'impôt ; que les articles 256 bis I-1° et 256 bis 2° du code général des impôts ne peuvent fonder un redressement de taxe sur la valeur ajoutée en matière d'acquisitions intracommunautaires de véhicules d'occasion ; qu'en vertu de l'instruction 3 K-1-95, l'acquisition d'un véhicule d'occasion auprès d'un assujetti d'un autre Etat membre qui ne facture pas de taxe sur la valeur ajoutée au titre de sa livraison doit pouvoir être soumise au régime de la marge ; qu'en vertu de l'article 297 A-I-1° du code général des impôts, la base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion est constituée par la marge lorsque les biens lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison ; qu'elle doit se voir appliquer ces dispositions, dès lors qu'elle n'est pas en mesure de vérifier les raisons pour lesquelles son fournisseur ne lui a pas facturé de taxe sur la valeur ajoutée ; que l'article 16-I de la loi de finances rectificative du 29 décembre 1994 modifiant l'article 256 bis I du code général des impôts manque de clarté dans sa transposition de la 7ème directive et demande au contribuable de vérifier que son fournisseur applique des dispositions internes d'autres Etats membres édictées pour la mise en oeuvre de cette directive ; que les articles 256 bis-I 2° bis et 297 A-I 1° du code général des impôts ne disposent pas que les biens qui ont fait l'objet d'une acquisition intracommunautaire sont soumis à la taxe sur la valeur ajoutée sur la totalité du prix ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la notification de redressements et la réponse aux observations du contribuable sont suffisamment motivées ; qu'il résulte des dispositions des articles 256 bis-I 2° bis et 297 A-I 1° du code général des impôts, issus de la loi du 29 décembre 1994, que ne peuvent être soumises au régime de la marge les reventes de biens ayant fait l'objet d'une acquisition intracommunautaire taxable ; que, dès lors que l'entreprise AUTOCLEAN s'est placée sous ce régime en indiquant sur les certificats d'acquisition que la taxe relative aux achats intracommunautaires de voitures d'occasion effectués de septembre 1998 à mars 1999 serait déclarée et payée sur les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée portant sur cette période, les cessions de ces véhicules relèvent du régime de droit commun prévu aux articles 256 et suivants du code général des impôts ; que cette taxation procédant des achats imposables déclarés par elle-même, la société ne peut justifier son erreur par des difficultés d'appréciation de la législation applicable à ses fournisseurs ; que la requérante se prévaut à tort de l'interprétation a contrario de l'instruction 3 K-1-95, dès lors qu'en l'absence de facturation de la taxe et de stipulation d'un prix exprimé toutes taxes comprises par ses fournisseurs, elle était conduite à taxer ses acquisitions intracommunautaires de véhicules dont cette doctrine, qui ne comporte ainsi pas d'interprétation différente de la loi, exclut expressément les reventes du régime de la marge ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 23 février 2004, présenté pour l'entreprise AUTOCLEAN qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et demande également à la Cour d'ordonner le remboursement des impositions contestées assorti des intérêts moratoires et de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient en outre que le paragraphe 25 de l'instruction 3 K-1-95 n'exclut le régime de la marge que dans les trois cas qui sont expressément visés, l'application du régime de la marge aux reventes de biens qui ont fait l'objet d'une acquisition intracommunautaire étant prévue au paragraphe 24 ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 11 octobre 2004, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2005 à laquelle siégeaient M. Daël, président de la Cour, M. Couzinet, président de chambre, M. Berthoud, président-assesseur, M. Platillero et M. Le Garzic, conseillers :

- le rapport de M. Platillero, conseiller ;

- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation… Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée » ;

Considérant, en premier lieu, que la notification de redressements du 22 avril 1999 adressée à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée AUTOCLEAN précise que le redressement relatif à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er septembre 1998 au 2 avril 1999, effectué suivant la procédure contradictoire, est dû à la modification du régime de taxation applicable aux véhicules d'occasion par la 7ème directive 94/5/CE du 14 février 1994 ; que le vérificateur a détaillé les modifications apportées à ce régime par cette directive et les motifs qui le conduisaient à écarter l'application du régime de la marge au profit de la taxation sur le prix de vente total des véhicules, en concluant par le détail des droits rappelés ; que cette notification de redressements est ainsi suffisamment motivée, dès lors que, eu égard à son caractère détaillé, la citation des articles 256 bis et 297 A du code général des impôts, qui constituaient la base légale du redressement, n'était pas nécessaire à sa compréhension, l'entreprise AUTOCLEAN ayant d'ailleurs produit des observations circonstanciées sur le redressement notifié ; que la circonstance que le vérificateur a indiqué que la 7ème directive avait été transposée dans une instruction administrative est par ailleurs sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation de la notification de redressements litigieuse ;

Considérant, en second lieu, que la réponse aux observations du contribuable adressée à l'entreprise AUTOCLEAN le 8 juin 1999, répond aux moyens soulevés par cette société à l'encontre du redressement qui lui a été notifié, tirés du défaut de motivation de la notification de redressement, de l'absence de transposition correcte en droit interne de la 7ème directive précitée et de l'applicabilité du régime de la taxation sur la marge aussi bien sur le fondement de la loi fiscale que de la doctrine ; que, par suite, le service, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble de l'argumentation de la requérante, a suffisamment motivé sa réponse aux observations présentées par l'entreprise AUTOCLEAN ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 256 bis du code général des impôts : « I… 2° bis. Les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquité effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque le vendeur ou l'assujetti est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'Etat membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet Etat prises pour la mise en oeuvre des B ou C de l'article 26 bis de la directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 » ; qu'aux termes de l'article 297 A du même code : « I. 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquité qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat » ;

Considérant, en premier lieu, que la 7ème directive n°94/5/CE du 14 février 1994, entrée en vigueur le 1er janvier 1995, modifiant l'article 26 bis de la 6ème directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977, qui a institué le régime de la marge en matière de taxe sur la valeur ajoutée pour, notamment, les biens d'occasion, a fait l'objet d'une transposition par la loi de finances rectificative pour 1994 du 29 décembre 1994, reprise aux articles 256 bis et 297 A précités du code général des impôts ; qu'ainsi, les moyens tirés par l'entreprise AUTOCLEAN de ce que le redressement opéré ne pouvait avoir pour base légale les dispositions de la 7ème directive précitée ni l'instruction administrative 3 K-1-95 publiée au bulletin officiel des impôts du 17 février 1995 manquent en tout état de cause en fait, dès lors que le redressement contesté procède de l'application des dispositions susmentionnnées du code général des impôts ; qu'en se bornant à soutenir que les textes de transposition, d'une part, manquent de clarté et, d'autre part, imposent au contribuable de vérifier que ses fournisseurs appliquent les dispositions issues du droit communautaire, alors que les articles 256 bis et 297 A du code général des impôts n'imposent pas au contribuable une telle obligation, l'entreprise AUTOCLEAN n'apporte aucun élément à l'appui du moyen tiré de ce que la directive en litige n'aurait pas été parfaitement transposée en droit interne et, par suite, que le redressement contesté serait fondé sur des dispositions législatives incompatibles avec la 7ème directive ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il n'est pas contesté que les certificats d'acquisition, complétés par l'entreprise AUTOCLEAN, indiquaient que la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux achats intracommunautaires de voitures d'occasion effectués de septembre 1998 à mars 1999 serait déclarée et payée sur les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée de cette période ; qu'il résulte de l'instruction que ces déclarations mentionnent des acquisitions intracommunautaires soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, reportée comme taxe à déduire ; que l'entreprise AUTOCLEAN a ainsi appliqué le régime des acquisitions intracommunautaires taxables, la circonstance que les factures établies par les fournisseurs de la société n'auraient comporté ni mentionné la taxe sur la valeur ajoutée étant sans influence sur le caractère taxable déclaré par elle de ces acquisitions, alors que la requérante n'allègue d'ailleurs pas que le régime de la marge aurait été appliqué par les vendeurs des biens ; que, par suite, c'est à bon droit que l'entreprise AUTOCLEAN a été imposée à la taxe sur la valeur ajoutée sur la totalité du prix de vente des biens litigieux, et non sur la marge bénéficiaire ;

Considérant, enfin, que, dès lors qu'il a été fait une correcte application des dispositions précitées du code général des impôts, le moyen tiré de ce que les contribuables ne seraient pas tous traités de manière identique, en violation du principe d'égalité des citoyens devant l'impôt, ne peut qu'être rejeté ;

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : « Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration » ;

Considérant que l'entreprise AUTOCLEAN n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction 3 K-1-95 publiée au bulletin officiel des impôts du 17 février 1995, notamment son paragraphe 25, qui, dès lors qu'elle exclut du régime de la marge les reventes de biens qui ont fait l'objet d'une acquisition intracommunautaire taxable, ne comporte pas d'interprétation différente de la loi de celle faite par le présent arrêt ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'entreprise AUTOCLEAN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er septembre 1998 au 31 mars 1999 et des pénalités y afférentes et, en tout état de cause, à demander le remboursement de l'imposition contestée assorti des intérêts moratoires ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'entreprise AUTOCLEAN la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée AUTOCLEAN est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée AUTOCLEAN et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au directeur des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.

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N°03DA00660


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation a 5
Numéro d'arrêt : 03DA00660
Date de la décision : 29/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Fabien Platillero
Rapporteur public ?: M. Michel
Avocat(s) : GARNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-11-29;03da00660 ?
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