La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/01/2006 | FRANCE | N°05DA00320

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3, 26 janvier 2006, 05DA00320


Vu la requête, enregistrée le 22 mars 2005 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 23 mars 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE DE METEREN, représentée par son maire en exercice, dont le siège est à l'hôtel de ville La Place à Meteren (59270), par la SCP Savoye et associés ; la commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0204236-0204270 du 27 janvier 2005 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Lille a, à la demande de M. X, annulé l'arrêté du

5 septembre

2002 par lequel le préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord, a dé...

Vu la requête, enregistrée le 22 mars 2005 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 23 mars 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE DE METEREN, représentée par son maire en exercice, dont le siège est à l'hôtel de ville La Place à Meteren (59270), par la SCP Savoye et associés ; la commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0204236-0204270 du 27 janvier 2005 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Lille a, à la demande de M. X, annulé l'arrêté du

5 septembre 2002 par lequel le préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord, a déclaré d'utilité publique le projet de station d'épuration de la COMMUNE DE METEREN ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Lille ;

3°) de condamner M. X à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que sa station d'épuration ne constitue pas un grand ouvrage public et qu'elle ne compromet pas la structure de l'exploitation de M. X ; que M. X s'est abstenu de réclamer une indemnité en application de l'article L. 13-11 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; qu'il n'a pas non plus donné suite à des propositions faites par la commune de parcelles équivalentes à celle expropriée ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2005, présenté pour M. X par la SELAFA Febvay, Debavelaere ; il conclut au rejet de la requête et à ce que la COMMUNE DE METEREN soit condamnée à lui verser la somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ; il soutient que doit être considérée comme gravement déséquilibrée une exploitation agricole dont le pourcentage des terres expropriées représente une valeur de productivité supérieure à 10% et dont la surface restante est inférieure à la surface minimum mentionnée à l'article L. 312-5 du code rural ; que ce déséquilibre peut être considéré comme grave alors même que l'exploitation serait, avant expropriation, inférieure à cette surface minimale ; que la surface qui permet d'assurer la viabilité de l'exploitation fixée par l'autorité administrative pour la région naturelle du département où se trouve l'exploitation de M. X est de trente hectares ; que l'exploitation de M. X comprend, avant expropriation, une superficie de 20 hectares 42 ares 70 centiares ; que le projet de la COMMUNE DE METEREN concerne une parcelle d'une surface de 3 hectares, 67 ares 40 centiares ; que le projet a, par suite, eu pour effet d'amputer l'exploitation de M. X de près de 18% de sa superficie ; qu'ainsi, ce projet a pour effet de déséquilibrer gravement l'exploitation de M. X ; que la circonstance que M. X se serait abstenu de réclamer une indemnité en application de l'article L. 13-11 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, et qu'il n'aurait pas non plus donné suite à des propositions faites par la commune de parcelles équivalentes à celle expropriée, ne saurait établir que le projet n'était pas susceptible de compromettre la structure de son exploitation ; qu'il reprend également les autres moyens qu'il a présentés en première instance sur lesquels les premiers juges ne se sont pas prononcés ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 5 juillet 2005, présenté pour M. X ; il reprend les conclusions de son précédent mémoire par les même moyens ; il soutient en outre que si l'article L. 23-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique renvoie à l'article 10 de la loi du

8 août 1962, l'article 4 de la loi du 22 juillet 1993 a abrogé ledit article 10 de la loi du 8 août 1962 ; que ces dispositions sont désormais codifiées à l'article L. 123-24 du code rural, qui a remplacé la notion de grand ouvrage public par celle d'aménagements ou ouvrages mentionnés à l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, c'est à dire ceux qui, par l'importance de leurs dimensions ou leurs incidences sur le milieu naturel, peuvent porter atteinte à ce dernier et doivent comporter une étude d'impact permettant d'en apprécier les conséquences ; que le projet d'assainissement de la COMMUNE DE METEREN, qui a été chiffré à la somme de

3 677 680,09 euros, largement supérieur au seuil de dispense d'étude d'impact prévu par le décret du 12 octobre 1977, ne correspond pas à un autre cas de dispense d'étude d'impact, et qu'une étude d'impact a été réalisée ; que l'article L. 13-11 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique n'est pas applicable en l'espèce ;

Vu la lettre, enregistrée le 8 juillet 2005, présentée pour l'Etat par le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ; le ministre informe la Cour que la requête n'appelle pas d'observations de sa part ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 26 septembre 2005, présenté pour la COMMUNE DE METEREN ; elle reprend les conclusions de sa requête initiale par les mêmes moyens ; elle soutient en outre que l'obligation de mentionner, dans le dispositif de l'acte déclaratif d'utilité publique, l'obligation faite au maître de l'ouvrage de remédier aux dommages causés en participant financièrement à l'exécution d'opérations d'aménagement foncier et de travaux connexes n'a pas un caractère substantiel ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 4 janvier 2005, présenté pour M. X ; il reprend les conclusions de son précédent mémoire par les même moyens ;

Vu la note en délibéré, enregistrée par télécopie le 16 janvier 2006 et régularisée par la production de l'original le 20 janvier 2006, présentée pour la COMMUNE DE METEREN ;

Vu la note en délibéré, enregistrée par télécopie le 19 janvier 2006, présentée pour

M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code rural ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 62-933 du 8 août 1962 complémentaire à la loi d'orientation agricole ;

Vu la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ;

Vu la loi n° 93-934 du 22 juillet 1993 relative à la partie législative du livre III (nouveau) du code rural ;

Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977, pris pour l'application de l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2006 à laquelle siégeaient Mme Tricot, président de chambre, M. Dupouy, président-assesseur et M. Stéphan, premier conseiller :

- le rapport de M. Stéphan, premier conseiller,

- les observations de Me Delgorgue, pour la COMMUNE DE METEREN, et de Me Febvay, pour M. X,

- et les conclusions de M. Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, si l'article L. 23-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique renvoie à l'article 10 de la loi du 8 août 1962, l'article 4 de la loi du 22 juillet 1993 a abrogé ledit article 10 de la loi du 8 août 1962 ; que ces dispositions sont désormais codifiées à l'article L. 123-24 du code rural aux termes duquel : « Lorsque les expropriations en vue de la réalisation des aménagements ou ouvrages mentionnés à l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature sont susceptibles de compromettre la structure des exploitations dans une zone déterminée, l'obligation est faite au maître de l'ouvrage, dans l'acte déclaratif d'utilité publique, de remédier aux dommages causés en participant financièrement à l'exécution d'opérations d'aménagement foncier… et de travaux connexes. » ;

Considérant que, si l'arrêté attaqué du 5 septembre 2002 par lequel le préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord, a déclaré d'utilité publique le projet de station d'épuration de la COMMUNE DE METEREN, vise et résume les dispositions précitées, l'obligation faite au maître de l'ouvrage de remédier aux dommages causés en participant financièrement à l'exécution d'opérations d'aménagement foncier et de travaux connexes ne figure pas dans le dispositif dudit arrêté déclaratif d'utilité publique ; que, pour ce motif, le Tribunal administratif de Lille a annulé ledit arrêté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, qui a codifié une partie des dispositions de l'article 2 de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature : « Les études, préalables à la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages qui, par l'importance de leurs dimensions ou leurs incidences sur le milieu naturel, peuvent porter atteinte à ce dernier, doivent comporter une étude d'impact permettant d'en apprécier les conséquences. » ; qu'aux termes de l'article L. 122-3 du même code, qui a également codifié une partie des dispositions de l'article 2 susmentionné : « Un décret en Conseil d'Etat…/… fixe notamment :…/ La liste limitative des ouvrages qui, en raison de la faiblesse de leurs répercussions sur l'environnement, ne sont pas soumis à la procédure de l'étude d'impact. » ; qu'aux termes du C de l'article 3 du décret du

12 octobre 1977 pris pour l'application de l'article 2 précité : « Ne sont pas soumis à la procédure de l'étude d'impact… les aménagements, ouvrages et travaux dont le coût total est inférieur à

1 900 000 euros… » ; qu'il est constant que le projet d'assainissement de la COMMUNE DE METEREN a été chiffré à la somme de 3 677 680,09 euros, qu'il ne correspond pas à un autre cas de dispense d'études d'impact, et qu'une étude d'impact a été réalisée ; qu'ainsi, la COMMUNE DE METEREN n'est pas fondée à soutenir que l'expropriation n'avait pas pour objet la réalisation des aménagements ou ouvrages mentionnés à l'article 2 de la loi du 10 juillet 1976 ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 351-2 du code rural : « …doit être en principe considérée comme gravement déséquilibrée toute exploitation agricole qui, du fait des expropriations, répond à l'une au moins des conditions ci-après : …/… 3° Le pourcentage des terres expropriées représente une valeur de productivité supérieure à 10 p. 100 et la surface restante est inférieure à la surface minimum mentionnée à l'article L. 312-5… » ; que ce déséquilibre peut être considéré comme grave alors même que la surface de l'exploitation serait avant expropriation, inférieure à cette surface minimale ; qu'il est constant que la surface qui permet d'assurer la viabilité de l'exploitation fixée par l'autorité administrative pour la région naturelle du département où se trouve l'exploitation de M. X est de 30 hectares ; que l'exploitation de M. X comprend, avant expropriation, une superficie de 20 hectares 42 ares 70 centiares ; que le projet de la COMMUNE DE METEREN concerne une parcelle d'une surface de 3 hectares, 67 ares

40 centiares ; que le projet a ainsi amputé l'exploitation de M. X de près de 18% de sa superficie ; que, par suite, il a eu pour effet de déséquilibrer gravement son exploitation ; que la circonstance que M. X n'aurait, postérieurement à l'arrêté attaqué, ni réclamé une indemnité en application de l'article L. 13-11 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ni donné suite à des proposition faites par la commune de parcelles équivalentes à celle expropriée, ne saurait, en tout état de cause, établir que le projet n'était pas susceptible de compromettre la structure de son exploitation ; qu'au surplus, la commune ne peut utilement soutenir à la fois que M. X n'a pas demandé d'indemnité au titre de l'article L. 13-11 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et faire état d'une telle demande que le juge de l'expropriation, par une décision, au demeurant non produite et qui ne serait frappée d'appel, aurait rejetée ;

Considérant que le moyen tiré de ce que l'exploitation de M. X serait inclus dans un groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) n'est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier la portée et le bien fondé ; qu'en particulier, aucun justificatif n'est produit en ce qui concerne la consistance exacte et la superficie de ce GAEC ;

Considérant que la circonstance que la structure de la seule exploitation agricole de

M. X serait compromise par la réalisation de l'ouvrage est sans incidence sur l'obligation, qui a un caractère substantiel, de mentionner dans le dispositif de l'acte déclaratif d'utilité publique, l'obligation faite au maître de l'ouvrage de remédier aux dommages causés en participant financièrement à l'exécution d'opérations d'aménagement foncier et de travaux connexes ; qu'ainsi qu'il a été dit, l'arrêté attaqué a omis de mentionner cette obligation dans le dispositif de l'acte déclaratif d'utilité publique ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la COMMUNE DE METEREN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a, à la demande de M. X, annulé l'arrêté du 5 septembre 2002 par lequel le préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord, déclaré d'utilité publique son projet de station d'épuration ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de la COMMUNE DE METEREN le paiement à M. X de la somme de 1 500 euros au titre des frais que celui ;ci a exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE METEREN est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE METEREN versera à M. X la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.

Article 3 :Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE METEREN, à M. Vincent X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Copie sera transmise au préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord.

2

N°05DA00320


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05DA00320
Date de la décision : 26/01/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: M. Alain Stéphan
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SCP SAVOYE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-01-26;05da00320 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award