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31/01/2006 | FRANCE | N°04DA00626

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3, 31 janvier 2006, 04DA00626


Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DU NORD, 2 rue Jacquemars Giélée à Lille (59039 cedex) ; le PREFET DU NORD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-1614 du 8 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté son déféré tendant à l'annulation du marché d'achat de véhicules neufs, passé le 17 décembre 2002 par l'Etablissement public départemental de soins, d'adaptation et d'éducation du département du Nord (EPDSAE) ;

2°) d'annuler ledit mar

ché ;

Le PREFET DU NORD soutient que lors de sa séance du 2 décembre 2002 consac...

Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DU NORD, 2 rue Jacquemars Giélée à Lille (59039 cedex) ; le PREFET DU NORD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-1614 du 8 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté son déféré tendant à l'annulation du marché d'achat de véhicules neufs, passé le 17 décembre 2002 par l'Etablissement public départemental de soins, d'adaptation et d'éducation du département du Nord (EPDSAE) ;

2°) d'annuler ledit marché ;

Le PREFET DU NORD soutient que lors de sa séance du 2 décembre 2002 consacrée au marché contesté, la commission d'appel d'offres de l'EPDSAE a été présidée par M. X, membre titulaire de cette commission, sans que le président en titre ait pris de décision formalisée pour déléguer la présidence ; que, dès lors, l' EPDSAE a méconnu l'article 22 du code des marchés publics et l'article D 714-12-2 du code de la santé publique ; qu'en outre, le président de la commission d'appel d'offres ne pouvait désigner son représentant parmi ses membres ; qu'ainsi, la présidence irrégulière de la commission a vicié sa décision d'attribution du marché litigieux ; que dès lors, le marché est illégal ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2004, présenté pour l'Etablissement public départemental de soins, d'adaptation et d'éducation, dont le siège est 60 rue Abélard, BP 454 à Lille (59 021 cedex), représenté par son directeur général, par Me Cattoir ; l'Etablissement public départemental de soins, d'adaptation et d'éducation demande à la Cour de rejeter la requête ;

Il soutient :

- que lors de la réunion du 2 décembre 2002, la commission d'appel d'offres s'est bornée à examiner les candidatures, ce qui constitue une opération préparatoire à la décision de choix qui interviendra le 12 décembre 2002 et pour laquelle elle avait compétence liée ; qu'aucune offre n'a été rejetée ; que la circonstance que le directeur général, en sa qualité de président, a été amené à s'absenter pendant la réunion alors qu'il l'avait ouverte, n'entache pas la procédure d'irrégularité dès lors qu'un membre titulaire peut être momentanément remplacé par un membre suppléant en cas d'empêchement temporaire ; que deux membres à voix délibérative étant bien présents, le quorum était atteint ;

- à titre subsidiaire, qu'à supposer que la présidence de la commission ait été irrégulière, cette circonstance n'a pas entaché d'irrégularité la décision d'attribution du marché, dès lors que l'avis émis n'a pas été vicié, eu égard, comme l'a retenu le tribunal, à la composition de cet organisme, à son objet et aux conditions dans lesquelles il a délibéré ; qu'en effet, la commission n'avait qu'un caractère purement consultatif ; qu'aucun candidat n'a été évincé et que le marché sera bien attribué au moins-disant ; que le choix du titulaire a été opéré lors de la réunion du 12 décembre 2002, régulièrement présidée ; que d'ailleurs, le préfet n'a déféré qu'un seul des trois marchés mis à l'ordre du jour de ces réunions ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 novembre 2004, présenté par le PREFET DU NORD, concluant aux mêmes fins que sa requête ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 novembre 2004, présenté pour l'Etablissement public départemental de soins, d'adaptation et d'éducation, concluant aux mêmes fins que son précédent mémoire ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 décembre 2005, présenté pour la société Poids Lourd Paris dont le siège social est ZAC de la Villette aux Aulnes à Mitry Mory (77290), représenté par son président-directeur général, par Me Parenty ; la société Poids Lourd Paris demande à la Cour de rejeter la requête ; elle soutient qu'elle a régulièrement exécuté le marché qui lui a été attribué ; qu'elle est totalement étrangère au fonctionnement de la commission d'appel d'offres ; que l'égalité entre les candidats a été respectée et le marché attribué au moins-disant ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 décembre 2005, présenté pour la société Etablissements et Compagnie dont le siège est Zone Artoipole à Monchy le Preux (62118), représenté par son président du directoire, par Me Parenty ; la société Etablissements et Compagnie demande à la Cour de rejeter la requête ; elle soutient qu'elle a régulièrement exécuté le marché qui lui a été attribué ; qu'elle est totalement étrangère au fonctionnement de la commission d'appel d'offres ; que l'égalité entre les candidats a été respectée et le marché attribué au moins-disant ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 décembre 2005, présenté pour la société Reagroup France Nord, venant aux droits de la société Renault France Automobile Nord Lille Métropole, dont le siège social est 140 avenue de la République à La Madeleine (59110), par Me Meignié ; la société Reagroup France Nord demande à la Cour de rejeter la requête du PREFET DU NORD et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que la requête n'est pas recevable dès lors que le préfet ne critique pas le jugement lui-même dont la motivation n'est pas sérieusement remise en cause et se borne à reprendre les mêmes moyens qu'en première instance ;

- que la requête n'est pas fondée ; qu'en effet, la procédure de passation du marché a été parfaitement régulière ; que le préfet confond la réunion du 2 décembre 2002, qui n'avait qu'un but technique tenant à l'étude des offres et qui n'est qu'une réunion préparatoire, avec celle du 12 décembre 2002 ; que la commission n'a rejeté aucune offre ; que le marché a été attribué à l'entreprise la moins disante ; que l'exposante est, en toute hypothèse, étrangère aux difficultés opposant l'établissement public au préfet ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 janvier 2006 à laquelle siégeaient Mme Helmholtz, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et M. Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur ;

- les observations de Me Cappelaere, avocat, substituant Me Cattoir, pour l'Etablissement public départemental de soins, d'adaptation et d'éducation ;

- et les conclusions de M. Le Goff, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 17 décembre 2002, l'Etablissement public départemental de soins, d'adaptation et d'éducation du département du Nord a passé un marché d'achat de véhicules neufs avec la société Renault France Automobile Nord, la société commerciale Citroën, la société du Poids Lourd Paris et les Etablissements ; que le PREFET DU NORD fait appel du jugement du 8 juin 2004 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté son déféré tendant à l'annulation dudit marché ;

Sur la fin de non recevoir opposée par la société Reagroup France Nord :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : « La requête (…) contient l'exposé des faits et moyens (…) L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la requête d'appel présentée dans le délai par le PREFET DU NORD ne constitue pas la seule reproduction littérale de son mémoire de première instance et énonce à nouveau, de manière précise les critiques adressées au marché dont cette autorité avait demandé l'annulation au tribunal administratif ; que cette requête développe notamment le moyen tiré de ce que la commission d'appel d'offres ne pouvait être régulièrement présidée par l'un des membres désignés par l'organe délibérant de l'établissement ; qu'une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 précité du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la société Reagroup France Nord n'est pas fondée et doit, dès lors, être rejetée ;

Au fond :

Considérant qu'aux termes de l'article 22 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable au marché déféré : « I. - Pour les collectivités territoriales et les établissements publics locaux, la commission d'appel d'offres est composée des membres suivants : ( …) g) Lorsqu'il s'agit d'un établissement public de santé ou d'un établissement public médico-social, le représentant légal de l'établissement ou son représentant, président, ainsi que deux membres de l'organe délibérant désignés par celui-ci.(…) V. - Ont voix délibérative les membres mentionnés au I. En cas de partage égal des voix, le président a voix prépondérante… » ; qu'il résulte de ces dispositions que l'organe délibérant d'un établissement public de santé ou d'un établissement public médico-social élit les membres de la commission d'appel d'offres en leur seule qualité de représentant de l'assemblée délibérante alors que le directeur général de l'établissement est président de droit en sa qualité d'exécutif de la collectivité, chargé à ce titre de passer et d'exécuter les marchés au nom de l'établissement après décision de l'organe délibérant ; qu'en introduisant une telle distinction au sein de la commission, le législateur a entendu interdire au président de choisir son représentant parmi les membres déjà élus de la commission ;

Considérant qu'il est constant que le directeur général de l'Etablissement public départemental de soins, d'adaptation et d'éducation du département du Nord, président de droit de la commission d'appel d'offres de cet établissement, a désigné M. X, élu membre de cette commission par l'organe délibérant de l'établissement, pour le représenter lors de la réunion qui s'est tenue 2 décembre 2002 et au cours de laquelle ont été ouvertes les enveloppes contenant les candidatures et les offres reçues dans le cadre de l'appel d'offres ouvert en vue de l'attribution du marché déféré ; qu'en tant que membre de la commission désigné par l'organe délibérant de l'établissement, M. X ne pouvait être choisi comme représentant par le président au titre de l'article 22 précité du code des marchés publics ; qu'ainsi la commission d'appel d'offres était irrégulièrement composée, lorsqu'elle a délibéré le 2 décembre 2002 ; que compte tenu de sa nature, qui affecte la présidence de la commission, cette irrégularité a vicié l'avis émis par celle-ci ; que, dans ces conditions, le marché déféré a été attribué sur une procédure irrégulière ; que, par suite, le PREFET DU NORD est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté son déféré ;

Sur les conclusions de la société Reagroup France Nord tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Reagroup France Nord demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 03-1614 du 8 juin 2004 du tribunal administratif de Lille et le marché d'achat de véhicules neufs, passé le 17 décembre 2002 par l'Etablissement public départemental de soins, d'adaptation et d'éducation du département du Nord (EPDSAE) avec la société Renault France Automobile Nord, la société commerciale Citroën, la société du Poids lourd Paris et les Etablissements , sont annulés.

Article 2 : Les conclusions de la société Reagroup France Nord tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU NORD, à l'Etablissement public départemental de soins, d'adaptation et d'éducation du département du Nord, à la société Reagroup France Nord, à la société commerciale Citroën, à la société du Poids lourd Paris, aux Etablissements et compagnie et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

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N°04DA00626


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 04DA00626
Date de la décision : 31/01/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Corinne Signerin-Icre
Rapporteur public ?: M. Le Goff
Avocat(s) : CATTOIR

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-01-31;04da00626 ?
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