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22/02/2006 | FRANCE | N°04DA00255

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3, 22 février 2006, 04DA00255


Vu la requête, enregistrée le 23 mars 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société anonyme GARAGE DU CHATEAU représentée par

Me Jean-Luc Y... administrateur judiciaire, dont le siège est ...

BP 221 à Villeneuve d'Ascq (59650), par Me X... ; la société GARAGE DU CHATEAU demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0101929 en date du 22 janvier 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur qui lui ont été réclamés

au titre de la période d'avril à août 1998, par avis de mise en recouvrement du 9 mai 2...

Vu la requête, enregistrée le 23 mars 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société anonyme GARAGE DU CHATEAU représentée par

Me Jean-Luc Y... administrateur judiciaire, dont le siège est ...

BP 221 à Villeneuve d'Ascq (59650), par Me X... ; la société GARAGE DU CHATEAU demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0101929 en date du 22 janvier 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur qui lui ont été réclamés au titre de la période d'avril à août 1998, par avis de mise en recouvrement du 9 mai 2000 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 8 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la procédure d'imposition est irrégulière faute pour l'administration d'avoir saisi la commission départementale des impôts ; qu'en méconnaissance des dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, l'intégralité des conséquences financières des rappels n'ont pas été indiquées à la requérante à l'issue de la vérification de comptabilité qui a été entreprise par le service ; que les conséquences financières de la vérification doivent également être indiquées à la personne vérifiée en ce qui concerne les pénalités qui lui sont appliquées, ainsi que le précise expressément l'instruction du 8 février 1990 parue au

BOI 13 L-4-90 ; que l'administration des impôts a fait une inexacte application de la

7ème directive européenne introduisant un régime particulier dans le domaine des biens d'occasion, en soumettant ses opérations à la taxe sur la valeur ajoutée pour le montant total des ventes réalisées et non sur la marge, alors que ses fournisseurs se prévalaient de ce dernier régime ; qu'il résulte des dispositions de l'article 256 bis I 2° du code général des impôts et de l'instruction du 17 février 1995 que le régime de taxe sur la valeur ajoutée attesté par la facture du fournisseur détermine le mode d'assujettissement du revendeur ; que la requérante entend également se prévaloir de la position prise par l'administration sur le régime de la taxe sur la valeur ajoutée applicable lors de la délivrance des certificats d'acquisition des véhicules ; que la requérante était en droit d'appliquer le régime de taxation à la marge s'agissant des deux véhicules d'occasion en provenance de France achetés à des particuliers, ainsi que s'agissant de celui acheté à la société Autolille, laquelle établit l'avoir acheté elle-même à un particulier ; que la circonstance que des assujettis-utilisateurs aient figuré sur les certificats d'immatriculation n'était pas de nature à faire obstacle à l'application du régime de taxation à la marge, dès lors que ces derniers sont les organismes de crédit-bail qui ont financé ces achats ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 août 2004, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui oppose une fin de non-recevoir aux conclusions de la requérante qui excèdent les limites de la réduction demandée dans le cadre de la réclamation préalable, conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'il est en droit de remettre en cause le régime de l'imposition à la marge, dès lors que le circuit économique de commercialisation révèle que les intermédiaires n'agissaient pas en leur nom propre et que la requérante a eu connaissance de la qualité des fournisseurs réels des véhicules ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 septembre 2004, présenté pour la société GARAGE DU CHATEAU ; la société GARAGE DU CHATEAU conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 janvier 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la 6ème directive n° 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du

17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2006 à laquelle siégeaient Mme Helmholtz, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et

M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller :

- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Le Goff, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de la période d'avril à août 1998, la société anonyme GARAGE DU CHATEAU dont l'objet est le négoce de voitures d'occasion, a acquis auprès de fournisseurs français soixante cinq véhicules immatriculés dans d'autres Etats membres de la Communauté européenne ; qu'elle a maintenu lors de la revente de ces véhicules le régime de taxation à la marge, mentionné dans les dispositions précitées, qui avait été appliqué par ses fournisseurs ;

Sur la procédure d'imposition :

Considérant que la SA GARAGE DU CHATEAU soutient que la procédure d'imposition est irrégulière faute d'indication par le service des conséquences financières des redressements à l'issue de la vérification de compte et de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que la requérante n'apporte cependant pas davantage en appel qu'en première instance, d'éléments de nature à permettre de regarder ces moyens comme fondés ; qu'il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges ; qu'enfin celle-ci ne saurait utilement, s'agissant de la procédure d'imposition, se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction administrative du 8 février 1990 parue au BOI sous le n° 13 L-4-90 ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'en vertu de l'article 26 bis de la 6ème directive n° 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977, les Etats membres appliquent aux livraisons de biens d'occasion effectuées par des assujettis-revendeurs un régime particulier d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge bénéficiaire réalisée par les intéressés ; qu'aux termes de l'article 256 bis du code général des impôts pris pour la transposition de l'article 26 bis de la 6ème directive n° 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes, dans sa version applicable à l'espèce : « I. 2° Les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquités effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque le vendeur ou l'assujetti est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'Etat membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet Etat prises pour la mise en oeuvre des B ou C de l'article 26 bis de la directive n° 77/388/CEE du Conseil de communautés européennes du 17 mai 1977 (…) » ; qu'aux termes de l'article 297 A du même code : « I. 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquité qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un négociant en véhicules automobiles d'occasion installé en France, vendant lesdits véhicules sur le marché intérieur français, peut calculer la taxe sur la valeur ajoutée due à raison de la vente de ces véhicules à partir de la marge définie à l'article 297 A du code général des impôts précité et non à partir du prix de vente total, si les véhicules proviennent de personnes implantées en France ou dans un autre Etat membres de l'Union européenne, qui, ou bien ne sont pas redevables de la taxe sur la valeur ajoutée ou bien ne sont pas autorisés à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de ces opérations ; que, dans le cas où, comme en l'espèce, une entreprise produit des factures émanant de ses fournisseurs qui mentionnent que les ventes de véhicules s'effectuaient sous le régime de la taxe à la marge mentionné ci-dessus, il incombe à l'administration, si elle s'y croit fondée, de démontrer d'une part que les mentions portées sur ces factures sont erronées, d'autre part que le bénéficiaire de ces achats de véhicules ne pouvait manifestement ignorer que les opérations présentaient le caractère d'acquisitions intracommunautaires taxables sur l'intégralité du prix de revente à ses propres clients ;

En ce qui concerne les véhicules d'occasion immatriculés à l'étranger :

Considérant, en premier lieu, que l'administration fait valoir sans être contredite, d'une part, que pour seize des soixante-deux véhicules en provenance de l'étranger acquis par la société GARAGE DU CHATEAU, la taxe sur la valeur ajoutée avait été facturée par ses fournisseurs sur le prix de vente de ces automobiles ou que l'achat de ceux-ci avait été déclaré par la requérante, elle-même, comme des acquisitions intra-communautaires taxables ; que, par suite, elle ne pouvait appliquer auxdites ventes une taxation différente de celle appliquée à leur achat ; que, d'autre part, l'administration établit que les autres véhicules qui conservaient leur immatriculation d'origine, avaient été acquis, ainsi que l'indiquaient clairement leurs cartes grises, directement par la société ou introduits en France par la société TAG qui les avaient préalablement achetés, auprès d'entreprises de location de véhicules ou de financement qui étaient, elles-mêmes, en mesure de déduire la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat initial de ces automobiles ; qu'ainsi bien que les factures délivrées par les propriétaires précédents ou par la société TAG aient mentionné des prix toutes taxes comprises ou qu'elles aient fait expressément référence aux dispositions fiscales permettant une taxation lors de la vente selon le régime de la marge, l'administration qui établit l'inexactitude des mentions portées sur les factures émises par les fournisseurs dont la société en sa qualité de professionnel de la commercialisation de véhicules d'occasion avait parfaitement connaissance au vu des informations sur la provenance des véhicules qu'elle vendait, était en droit de remettre en cause le régime de taxation à la marge appliquée à ces ventes ; qu'enfin pour certains véhicules, en l'absence de toute mention claire sur le régime de la taxe sur la valeur ajoutée applicable sur les factures dont disposait la requérante, cette dernière ne pouvait, par suite, appliquer lors de leur revente le régime de la taxation à la marge ;

Considérant, en second lieu, que la société GARAGE DU CHATEAU n'est pas fondée à soutenir, en invoquant le contenu des instructions n° 3 L-1-97 du 13 août 1997 et 3 L-1-99 du

3 août 1999 portant, pour la première, sur le contrôle formel des documents obligatoires présentés à l'appui des demandes de délivrance des certificats visés par les dispositions des articles 242 terdecies et 242 quaterdecies de l'annexe II au code général des impôts et, pour la seconde, sur les conditions dans lesquelles les services fiscaux doivent contrôler les opérations qui leur sont soumises avant de viser lesdits certificats, que la simple apposition d'un visa sur les certificats attestant que les véhicules introduits en France étaient en situation régulière au regard de la taxe sur la valeur ajoutée présentait le caractère d'une prise de position formelle sur l'appréciation de la situation de fait de la société au regard de la loi fiscale ; qu'elle ne peut, de même, se prévaloir d'une interprétation de la loi fiscale contenue dans les lettres du secrétaire d'Etat au budget des 13 mai 1998 et 14 septembre 1999 qui ne s'appliquent qu'aux rappels notifiés au titre de la période comprise entre mars 1992 et juin 1997, soit antérieurement à celle du 1er avril au 31 août 1998 visée par les rappels en cause ; qu'ainsi, l'administration était en droit d'écarter le régime d'imposition retenu par la SA GARAGE DU CHATEAU et soumettre la vente en France de l'ensemble des véhicules immatriculés à l'étranger à la taxe sur la valeur ajoutée sur le prix total ;

En ce qui concerne les véhicules d'occasion immatriculés en France :

Considérant que si la SA GARAGE DU CHATEAU soutient qu'elle a acquis trois véhicules d'occasion immatriculés en France auprès de particuliers, elle ne conteste pas sérieusement en se bornant à produire la copie de deux cartes grises et d'un certificat de cession, établis au nom d'organismes de crédit, les précisions apportées par les services fiscaux qui font valoir que les certificats d'immatriculation de ces trois véhicules désignaient des sociétés commerciales comme propriétaires desdites automobiles ; que, par suite, la revente de ces véhicules ne pouvait bénéficier du régime de taxation sur la marge ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que la société GARAGE DU CHATEAU n'est pas fondée à soutenir, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a refusé de lui accorder la décharge d'une partie des impositions qui lui ont été assignées ;

Sur les conclusions de la société GARAGE DU CHATEAU tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SA GARAGE DU CHATEAU demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société anonyme GARAGE DU CHATEAU est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme GARAGE DU CHATEAU et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

2

N°04DA00255


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 04DA00255
Date de la décision : 22/02/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: M. Olivier Mesmin d'Estienne
Rapporteur public ?: M. Le Goff
Avocat(s) : GUELOT et BARANEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-02-22;04da00255 ?
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