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02/03/2006 | FRANCE | N°04DA00078

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3 (ter), 02 mars 2006, 04DA00078


Vu la requête, enregistrée le 28 janvier 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisée le 6 avril 2004, présentée pour M. et Mme François X demeurant

..., par Me Marmu ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-6155 en date du 28 octobre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord, en date du 4 août 2000, a instauré un périmètre d'insalubrité de l'îlot situé à Roubaix, 16 rue Montgolfier, dénommé « cité Montgolfier » e

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Vu la requête, enregistrée le 28 janvier 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisée le 6 avril 2004, présentée pour M. et Mme François X demeurant

..., par Me Marmu ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-6155 en date du 28 octobre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord, en date du 4 août 2000, a instauré un périmètre d'insalubrité de l'îlot situé à Roubaix, 16 rue Montgolfier, dénommé « cité Montgolfier » et a déclaré insalubre le groupe d'immeubles situé à l'intérieur de ce périmètre et frappé d'interdiction définitive d'habiter les mêmes immeubles ;

2°) d'annuler ledit arrêté préfectoral ;

3°) d'obtenir la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Ils soutiennent que l'arrêté préfectoral est intervenu en méconnaissance du principe du contradictoire de la procédure ainsi que de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'arrêté préfectoral n'a pas été pris en application de l'article L. 42 du code de la santé publique mais en application de l'article L. 48 dudit code ; qu'il n'a pas respecté les dispositions prévues par cet article ; qu'ils n'ont pas reçu communication des documents au vu desquels la décision a été prise ; qu'ils n'ont pas été convoqués devant le conseil départemental d'hygiène ; que l'analyse des fiches d'immeubles est « particulièrement succincte et tout à fait critiquable » ; que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lille a estimé, en se référant aux dispositions de l'article L. 42 précité, que les arrêtés préfectoraux délimitant un périmètre d'insalubrité n'avaient pas à être précédés d'une procédure contradictoire ; qu'ils ont apporté des pièces qui permettent d'établir que la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la commune de Roubaix, intéressée par ce groupe d'immeubles, entendait par cette procédure diminuer sensiblement son prix d'acquisition ; que l'arrêté est, par suite, entaché de détournement de pouvoir ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en observations, enregistré le 6 avril 2004 et régularisé le 14 avril 2004, présenté pour la commune de Roubaix, par Me Bailleul ; la commune de Roubaix demande à la Cour le rejet de la requête et la condamnation des époux X aux dépens et à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; elle soutient, à titre principal, que le recours est irrecevable en tant qu'il est dirigé contre elle qui n'est pas l'auteur de l'acte attaqué ; qu'à titre subsidiaire, l'article L. 48 du code de la santé publique n'est pas applicable ; que l'article L. 42 du code de la santé publique qui est applicable, a été respecté ; que l'inspection des immeubles a été faite en présence des propriétaires requérants ; que l'état d'insalubrité a été en l'espèce constaté ; que la procédure mise en oeuvre n'impose pas d'être diligentée contradictoirement ; que les requérants ne précisent pas quelles stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales auraient été méconnues ; que la dévalorisation de l'immeuble n'est due qu'au défaut d'entretien par les requérants ; que l'arrêté n'est entaché d'aucun détournement de pouvoir ou de procédure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2004 par télécopie et régularisé par l'envoi de l'original le 13 avril 2004, présenté par le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées qui conclut au rejet de la requête et soutient que l'article L. 48 du code de la santé publique n'est pas applicable ; que l'article L. 42 du code de la santé publique qui est applicable, a été respecté ; que l'arrêté n'a pas méconnu la procédure contradictoire prévue aux articles L. 26 et

L. 27 du code de la santé publique qui n'étaient pas applicables ; qu'aucun texte ni aucun principe n'imposent de mettre en oeuvre, dans ce type d'opérations, une procédure contradictoire à l'égard des propriétaires ; qu'au regard de l'enquête qui a été diligentée, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en déclarant les immeubles insalubres ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 mai 2004, par lequel le ministre de la santé et de la protection sociale déclare n'avoir pas d'observations à présenter en réponse au mémoire déposé par la commune de Roubaix ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 juin 2004, présenté pour M. et Mme François X qui concluent aux mêmes fins que leur requête ; qu'ils reprennent les mêmes moyens et font également valoir que la décision attaquée a été prise en méconnaissance du principe d'égalité ; qu'elle repose sur des faits matériellement inexacts ; que le montant des travaux à effectuer pour corriger l'état des immeubles n'est pas disproportionné par rapport à leur valeur vénale ; qu'ils n'ont pas laissé l'immeuble se détériorer et ont fait des travaux ; que l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatif au principe du contradictoire a été méconnu ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 juillet 2004, présenté par le ministre de la santé et de la protection sociale qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ; qu'il précise, en outre, que, malgré les travaux, la situation de l'immeuble justifiait l'arrêté d'insalubrité ; que l'arrêté délimitant le périmètre d'insalubrité n'a pas pour objet de prescrire des travaux ; que les propriétaires requérants ne précisent pas en quoi l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aurait été méconnu ; que cet article est, par ailleurs, inopérant à l'égard des procédures administratives ;

Vu l'ordonnance, en date du 16 mai 2005 du président de la Cour, portant clôture de l'instruction au 24 juin 2005 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de la santé publique, ensemble l'ordonnance n° 2000-548 du 15 juin 2000 relative à la partie législative du code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 février 2006 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et

Mme Agnès Eliot, conseiller :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1331-23 du code de la santé publique dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué, et résultant de la codification opérée par l'ordonnance susvisée du 15 juin 2000 : « Le représentant de l'Etat dans le département peut déclarer l'insalubrité des locaux et installations utilisés aux fins d'habitation, mais impropres à cet objet pour des raisons d'hygiène, de salubrité ou de sécurité et situés à l'intérieur d'un périmètre qu'il définit. / L'arrêté du représentant de l'Etat dans le département est pris après avis du conseil départemental d'hygiène auquel le maire ou, le cas échéant, le président du groupement de communes ayant compétence en matière de logement est invité à présenter ses observations, et après délibération du conseil municipal ou, le cas échéant, de l'organe délibérant du groupement de communes ayant compétence en matière de logement. Cet arrêté vaut interdiction d'habiter au sens des articles

L. 1331-28 et L. 1336-2 pour les immeubles qu'il désigne. / Cet arrêté est publié au recueil des actes administratifs du département et affiché à la mairie du lieu de situation des biens. / Il est notifié aux propriétaires et usufruitiers intéressés » ;

Considérant que l'arrêté du préfet du Nord attaqué a été, contrairement à ce qui est soutenu, pris en application de l'ancien article L. 42 du code de la santé publique devenu l'article L. 1331-23 du même code dans sa rédaction résultant de l'ordonnance de codification du 25 juin 2000 ; que, sur le fondement de ces dispositions, la délimitation d'un périmètre d'insalubrité comporte une procédure particulière, distincte de celles qui sont prévues notamment aux articles L. 1331-26 à

L. 1331-28 du même code ; qu'aucune autre disposition, et notamment pas celles prévues par l'ancien article L. 48 du code de la santé publique cité par les requérants, n'impose que la délimitation du périmètre d'insalubrité soit précédée d'une procédure contradictoire avec les propriétaires des immeubles ; que les stipulations de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas applicables aux procédures administratives ; que, par suite, la procédure instituée par les dispositions susrappelées n'a pas à être précédée d'une communication du rapport établi par l'inspecteur de salubrité suite à sa visite des immeubles, d'une visite contradictoire de ces immeubles ou d'une audition de leurs propriétaires par le conseil départemental d'hygiène ; qu'au surplus, il est constant, d'une part, que M. et Mme X ont été informés des dates et heures des visites des immeubles dont ils sont propriétaires, de la possibilité d'être présents ou représentés, et, d'autre part, qu'ils ont été effectivement présents lors de ces visites puis ont reçu communication des fiches de visite d'immeubles dressées par l'inspecteur de salubrité pour chacun de leurs seize immeubles ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure et celui tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés ;

Considérant qu'il est établi par le rapport de visite des lieux que les immeubles appartenant aux époux X présentent un état irrémédiable d'insalubrité ; que si les propriétaires produisent l'état des montants de travaux réalisés dans les années qui ont suivi l'acquisition des biens, des factures concernant des travaux entrepris ou envisagés récemment, ces éléments ne suffisent pas à établir le caractère salubre des habitations comprises dans le périmètre fixé par l'arrêté préfectoral ; que, dès lors, en arrêtant la délimitation du périmètre d'insalubrité concernant l'îlot Montgolfier, le préfet du Nord qui ne s'est pas fondé sur des faits matériellement inexacts, n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 1331-23 du code de la santé publique ;

Considérant que M. et Mme X ne peuvent utilement se prévaloir de l'état d'autres immeubles situés dans le voisinage pour soutenir que le préfet du Nord aurait porté atteinte, par sa décision, au principe d'égalité ;

Considérant que si les époux X soutiennent que l'arrêté préfectoral n'a été pris qu'afin de permettre à la commune de Roubaix d'acquérir les immeubles de l'îlot Montgolfier à un prix très inférieur à leur valeur vénale réelle, un tel moyen tiré du détournement de pouvoir n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Roubaix aux conclusions de la requête, que M. et

Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande ; que les conclusions présentées par les intéressés sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme X la somme réclamée par la commune de Roubaix sur le fondement précité ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Roubaix en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme François X, à la commune de Roubaix et au ministre de la santé et des solidarités.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

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N°04DA00078


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 04DA00078
Date de la décision : 02/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : MARMU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-03-02;04da00078 ?
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