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02/03/2006 | FRANCE | N°05DA00638

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3 (ter), 02 mars 2006, 05DA00638


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 31 mai 2005 et régularisée par la production de l'original le 1er juin 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE », dont le siège social est ..., par Me de X... ; la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE » demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0200630 en date du 24 février 2005 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

7 février 2002 par lequel le maire de

la commune de Blangy-Tronville a interdit la circulation des poids lourds de plus de ...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 31 mai 2005 et régularisée par la production de l'original le 1er juin 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE », dont le siège social est ..., par Me de X... ; la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE » demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0200630 en date du 24 février 2005 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

7 février 2002 par lequel le maire de la commune de Blangy-Tronville a interdit la circulation des poids lourds de plus de 10 tonnes sur la voie communale n° 2 ;

2°) d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner la commune de Blangy-Tronville à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'il est constant que l'arrêté attaqué vise uniquement les véhicules qu'elle utilise pour son activité commerciale et forestière, les véhicules à usage agricole bénéficiant d'une dérogation ; que le critère discriminatoire ressort des motifs de l'arrêté ; que cette discrimination porte atteinte au principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques qui ne permet pas de réglementer la circulation de manière à interdire l'accès à une voie publique à une catégorie de véhicules en raison de sa seule nature industrielle ou commerciale ; que l'arrêté a pour effet, en méconnaissance de l'article 682 du code civil, d'empêcher l'accès normal d'un riverain à un fonds qu'il utilisait depuis de nombreuses années pour son exploitation forestière ; qu'il suffisait pour la commune, pour limiter les effets de son arrêté, d'interdire la circulation à la seule partie de la voie débutant une centaine de mètres à compter de son intersection avec la RN39 ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2005, présenté par la commune de Blangy-Tronville, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE » à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la société requérante se borne à réitérer certains des moyens présentés en première instance ; que sa requête est donc irrecevable au titre de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que la société n'exploitant plus la parcelle

ZK n° 3 à la date du jugement attaqué, elle n'a pas d'intérêt à agir dans la présente instance ; qu'il convient de préciser que lorsque la société a débuté ses activités d'exploitation de la parcelle

ZK n° 3, les conditions de circulation sur la voie communale n° 2 étaient règlementées par un arrêté en date du 28 décembre 1981 interdisant la circulation des poids lourds sur ladite voie du petit Blangy à Gentelle ; que les conclusions de la société sont, dès lors, dilatoires car ayant pour effet de remettre en vigueur l'arrêté précité du 28 décembre 1981 ; que l'arrêté attaqué a été pris sur le fondement de l'article L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales afin d'assurer la sécurité de la circulation et de préserver le domaine public ; que la société requérante a continuellement détérioré le domaine public, en l'empiétant et en ne se souciant pas de la sécurité des autres usagers de la voie communale ; que l'arrêté édicte une mesure en adéquation avec la gravité des troubles à la circulation sur la voie communale et les détériorations occasionnées au domaine public ; que l'administration est en droit de réglementer l'usage anormal du domaine ; qu'à la suite d'une plainte déposée par la commune à l'encontre de la société, celle-ci a été condamnée à verser à la collectivité la somme de 13 106,16 euros en réparation des dégradations commises sur la voie communale n° 2 ; que l'arrêté n'a pas pour conséquence d'empêcher l'accès normal d'un riverain à un fonds qu'il utilisait depuis de nombreuses années dès lors que la société dispose d'un accès distinct à son dépôt de grumes s'effectuant par la route nationale n° 29 ; qu'en tout état de cause, la société n'étant pas propriétaire de la parcelle ZK n° 3, elle ne peut se prévaloir de l'article 682 du code civil ; que le maire de la commune n'a donc pas méconnu les principes d'égalité des citoyens devant les charges publiques et ne s'est pas livré à un détournement de pouvoir ; que, par suite, les premiers juges n'ont pas commis d'erreur en rejetant la requête de la société ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 4 février 2006, régularisé par la production de l'original le 7 février 2006, présenté pour la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE », qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 février 2006, à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et

Mme Agnès Eliot, conseiller :

- le rapport de Mme Agnès Eliot, conseiller,

- les observations de Me de X..., pour la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE »,

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non recevoir opposées par la commune de Blangy-Tronville :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales : « Le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et les voies de communications à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation.. » ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des différents courriers échangés entre la commune de Blangy-Tronville et la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE », du constat d'huissier établi le 18 février 2002 et des procès-verbaux d'audition établis la même année à la suite de plaintes déposées par le maire de la commune, que, pour transporter les grumes approvisionnant le dépôt qu'elle exploitait, la société requérante utilisait, pour ses camions, la voie communale n° 2 dans des conditions qui dégradaient la voie publique, perturbaient la circulation des autres véhicules et mettaient en cause la sécurité des usagers sur ladite voie ; qu'ainsi les atteintes portées au domaine public et à la sécurité des usagers, alors même qu'ils ne portaient que sur une portion de la voirie en cause, justifiaient la mesure d'interdiction prononcée par l'arrêté du maire de Blangy-Tronville en date du 7 février 2002, faite aux poids lourds de plus de 10 tonnes d'utiliser la voirie n° 2 du petit Blangy à Gentelles ; que, ni le constat d'huissier établi, au demeurant, plusieurs années après les faits litigieux, produit par la société appelante devant la Cour, ni la circonstance selon laquelle la commune de Blangy-Tronville n'aurait pas réalisé les travaux pour remédier aux dégradations de la voie dont il s'agit ne sont, dans les circonstances de l'espèce, de nature à remettre en cause la matérialité des faits ayant fondé la décision attaquée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il n'est pas contesté que l'exploitation du dépôt de grumes pouvait être poursuivie grâce à un autre accès s'effectuant à partir de la route nationale n° 29 ; que dès lors l'arrêté attaqué n'était pas de nature à compromettre la poursuite de l'activité de la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE » et ne portait, dès lors, pas atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie ;

Considérant, en troisième lieu, que, compte tenu de ce qui vient d'être dit, la société appelante ne saurait valablement invoquer, au sens de l'article 682 du code civil, la notion d'enclavement des terrains sur lesquels elle exerce son activité ;

Considérant, en quatrième lieu, que contrairement à ce que soutient la société appelante, il ne ressort pas des pièces du dossier que les véhicules agricoles et les conditions d'utilisation par ceux-ci de la voie publique, objet de l'arrêté litigieux, auraient les mêmes effets sur ladite voie que les camions de plus de 10 tonnes visés par l'arrêté attaqué ; que, dès lors, en exceptant de l'interdiction à la circulation de la voirie communale n° 2 les engins agricoles, le maire n'a pas édicté une discrimination illégale ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté méconnaîtrait le principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques n'est pas fondé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE » n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté contesté en date du 7 février 2002 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Blangy-Tronville, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE » au profit de la commune de Blangy-Tronville, en application des mêmes dispositions, la somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE » est rejetée.

Article 2 : La société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE » versera à la commune de Blangy-Tronville la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société « L'INTERNATIONALE FORESTIERE », à la commune de Blangy-Tronville et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Copie sera transmise au préfet de la Somme.

2

N°05DA00638


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 05DA00638
Date de la décision : 02/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: Mme Agnès Eliot
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : DE GUBERNATIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-03-02;05da00638 ?
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