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16/03/2006 | FRANCE | N°04DA01095

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3 (ter), 16 mars 2006, 04DA01095


Vu la requête, enregistrée le 29 décembre 2004 par télécopie et son original enregistré le 30 décembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société ATELIER D'ARCHITECTURE X Y, dont le siège est ... et la société Z ARCHITECTURE, dont le siège est ..., par la SCP Boulloche ; les sociétés demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-1517 en date du 26 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille les a condamnées à verser solidairement avec la SA Bureau Berim la somme de 576 652,20 euros en réparation des

désordres touchant le lycée Joliot Curie d'Oignies ;

2°) de rejeter la dema...

Vu la requête, enregistrée le 29 décembre 2004 par télécopie et son original enregistré le 30 décembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société ATELIER D'ARCHITECTURE X Y, dont le siège est ... et la société Z ARCHITECTURE, dont le siège est ..., par la SCP Boulloche ; les sociétés demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-1517 en date du 26 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille les a condamnées à verser solidairement avec la SA Bureau Berim la somme de 576 652,20 euros en réparation des désordres touchant le lycée Joliot Curie d'Oignies ;

2°) de rejeter la demande présentée par la région Nord/Pas-de-Calais devant le Tribunal administratif de Lille ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la SA Bureau Berim à les garantir de toute condamnation prononcée à leur encontre ;

4°) de condamner la région Nord/Pas-de-Calais et la SA Bureau Berim à leur verser la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Elles soutiennent que le lycée étant fermé en période estivale, les désordres le touchant ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination ; que le maître d'ouvrage avait accepté le parti pris architectural ; que la réparation préconisée par l'expertise implique une plus-value à l'ouvrage ; qu'elles ne sont pas responsables des erreurs de conception et que leur part de responsabilité est excessive ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 février 2005, présenté pour la société ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et la société Z ARCHITECTURE qui persistent dans leurs conclusions ; les sociétés soutiennent que les travaux provisoires étaient inutiles ; qu'ils ont été préconisés par la SA Bureau Berim ; que cette société est également responsable des désordres ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 mars 2005, présenté pour la SA Bureau Veritas, par la

SCP Guy-Vienot, Bryden, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation des sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE à lui verser la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; la société soutient qu'aucune demande n'est formée à son encontre ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2005, présenté pour la région

Nord/Pas-de-Calais, par la SCP Levasseur-Castille-Levasseur, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation des sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE à lui verser la somme de 762,25 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; la région soutient que l'ouvrage est impropre à sa destination ; que les sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE et la

SA Bureau Berim en sont responsables ; que les travaux provisoires n'ont pas été inutiles ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2005, présenté pour la société A, par Me Dhonte, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation des sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE à lui verser la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; la société soutient qu'aucune demande n'est formée à son encontre ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2005 par télécopie et son original enregistré le 27 octobre 2005, présenté pour la SA Bureau Berim, par la SCP Naba et associés, qui conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire à la condamnation des sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et de condamner la partie perdante à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; la société soutient que l'ouvrage n'a pas été rendu impropre à sa destination ; que le maître d'ouvrage a choisi les travaux entrepris ; que les architectes ont seuls engagé leur responsabilité ; que les travaux de réparation n'étaient pas nécessaires ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mars 2006 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et

M. Pierre Le Garzic, conseiller :

- le rapport de M. Pierre Le Garzic, conseiller ;

- les observations de Me Levasseur, pour la région Nord/Pas-de-Calais, de Me Tassoumian, pour la SA Bureau Berim et de Me Vienot, pour la SA Bureau Veritas ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a condamné solidairement les sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y, Z ARCHITECTURE et SA Bureau Berim à verser à la région Nord/Pas-de-Calais la somme de 576 652,20 euros en réparation des désordres touchant le lycée Joliot Curie d'Oignies ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 5 septembre 1995, la région

Nord/Pas-de-Calais a réceptionné les travaux de construction de locaux comprenant des ateliers desservis par un hall de circulation dans le lycée Joliot Curie d'Oignies ; qu'il a été relevé d'avril à juillet 1998, dans ces locaux, des températures dépassant trente degrés et pouvant atteindre

quarante-deux degrés ; que ces températures anormales trouvent leur origine dans les éclairages zénithaux par lanterneaux desdits locaux ; que ces désordres, qui surviennent pendant une importante partie de l'année scolaire, sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination, nonobstant la circonstance que les ateliers auraient néanmoins été utilisés par le lycée ; qu'ils sont imputables à la conception de l'ouvrage et non à l'exécution des travaux ; qu'il suit de là qu'ils engagent sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, la responsabilité, d'une part des sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE, architectes, et d'autre part de la SA Bureau Berim, bureau d'études techniques ; que toutefois, si la SA Bureau Berim n'établit pas avoir proposé des mesures permettant d'atténuer les conséquences des éclairages zénithaux, la région Nord/Pas-de-Calais ne pouvait ignorer ces conséquences ; que dès lors, en acceptant les choix architecturaux, la région a commis une faute par imprudence de nature à exonérer la responsabilité des maîtres d'oeuvre à hauteur de un tiers ;

Sur l'étendue du préjudice indemnisable :

Considérant que s'il résulte de l'instruction que les travaux, d'un montant de 1 241 818,49 francs (189 314,01 euros), réalisés dans l'urgence, consistant en la pose de bâches et l'installation d'une climatisation provisoire n'ont pas été suffisants, ils ont néanmoins conduit à une atténuation de la chaleur des locaux ; que dès lors ces travaux nécessaires n'ont pas à rester à la charge de la région Nord/Pas-de-Calais et doivent être pris en compte dans son préjudice indemnisable ; qu'il résulte en outre de l'instruction que les travaux définitifs de remise en état des lieux, qui impliquent le démontage de la climatisation provisoire et le remplacement des toitures afin d'installer un système d'occultation motorisée des verrières, s'élèvent à un montant de 2 540 772 francs (387 338,19 euros) ; que si ces travaux se sont révélés indispensables, ils ont néanmoins entraîné une plus-value de l'ouvrage équivalent à 10 % du coût des travaux ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, compte tenu de la plus-value apportée à l'ouvrage par les travaux de remise en état et de la faute partiellement exonératoire commise par la région Nord/Pas-de-Calais, il y a lieu de ramener la somme de 576 652,20 euros que les sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y, Z ARCHITECTURE et

SA Bureau Berim ont été solidairement condamnées à verser à la région à la somme de 358 612,26 euros ;

Sur les appels en garantie :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les désordres apparus trouvent leur origine tant dans une erreur de conception architecturale que dans une carence du bureau d'études techniques à attirer l'attention sur les conséquences de cette erreur ; qu'il suit de là que les sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE, d'une part, et la SA Bureau Berim, d'autre part, ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lille les a respectivement condamnées à se garantir mutuellement à hauteur de la moitié de cette condamnation ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant, en premier lieu, que les sociétés A et SA Bureau Veritas, qui ne sont pas parties à l'instance ne peuvent se voir accorder le remboursement des frais qu'elles ont exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens :

Considérant, en second lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE, qui ne sont pas parties perdantes à l'instance, soient condamnées à verser à la Région Nord/Pas-de-Calais et à la SA Bureau Berim une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'elles font pour la même raison obstacle à ce que la SA Bureau Berim soit condamnée à verser une somme aux sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE au titre de ces frais ; qu'il y a lieu en revanche de faire application de ces dispositions et de condamner la région Nord/Pas-de-Calais à verser, d'une part, aux sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE la somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et, d'autre part, à la SA Bureau Berim la somme de 1 000 euros à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 576 652,20 euros que les sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y, Z ARCHITECTURE et SA Bureau Berim ont été solidairement condamnées à verser à la région Nord/Pas-de-Calais par le jugement n° 99-1517 du 26 octobre 2004 du Tribunal administratif de Lille est ramenée à la somme de 358 612,26 euros.

Article 2 : La région Nord/Pas-de-Calais versera, d'une part, à la société ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et à la société Z ARCHITECTURE la somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et, d'autre part, à la SA Bureau Berim la somme de 1 000 euros à ce titre.

Article 3 : Le surplus des conclusions des sociétés ATELIER D'ARCHITECTURE X Y et Z ARCHITECTURE et de la SA Bureau Berim sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions de la région Nord/Pas-de-Calais, de la SA Bureau Veritas et de la société A relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société ATELIER D'ARCHITECTURE X Y, à la société Z ARCHITECTURE, à la région Nord/Pas-de-Calais, à la SA Bureau Berim, à la SA Bureau Veritas, à la société A et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Copie sera transmise au préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord.

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N°04DA01095


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 04DA01095
Date de la décision : 16/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: M. Pierre Le Garzic
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SCP PH. ET FR. BOULLOCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-03-16;04da01095 ?
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