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30/03/2006 | FRANCE | N°04DA01033

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 5 (ter), 30 mars 2006, 04DA01033


Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société en nom collectif (SNC) X, dont le siège est à Beaumont le Hareng (76850), par Me X... ; la société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0200365 en date du 17 septembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande qui tendait à l'annulation de la décision en date du

19 décembre 2001 par laquelle le préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime, a décidé de ne lui accorder aucun

e aide au titre du gel de l'utilisation de terres arables pour la campagne 1993/19...

Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société en nom collectif (SNC) X, dont le siège est à Beaumont le Hareng (76850), par Me X... ; la société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0200365 en date du 17 septembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande qui tendait à l'annulation de la décision en date du

19 décembre 2001 par laquelle le préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime, a décidé de ne lui accorder aucune aide au titre du gel de l'utilisation de terres arables pour la campagne 1993/1994 ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime, de lui verser la somme de 9 451,10 euros sous astreinte de 76 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 286 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Elle soutient que les droits de la défense n'ont pas été respectés ; que le contrôle n'a pas été effectué dans des conditions régulières en ce que l'Office national interprofessionnel des céréales était incompétent pour y procéder, en ce que le contrôleur était inapte et en ce que les moyens techniques étaient inadaptés ; que les nécessaires mesures d'application de la législation communautaire n'ont pas été prises ; qu'il serait inéquitable de lui laisser supporter les frais de l'instance ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance du président de la 1ère chambre, en date du 2 février 2006, fixant la clôture d'instruction au 2 mars 2006 à 16 heures 30 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 février 2006, présenté par le ministre de l'agriculture et de la pêche qui conclut au rejet de la requête ; le ministre soutient que le contradictoire a été respecté ; que l'Office national interprofessionnel des céréales était compétent pour procéder aux opérations de contrôle ; que les moyens de mesurage étaient appropriés ; que les conclusions indemnitaires sont irrecevables comme nouvelles en appel ;

Vu l'ordonnance du président de la 1ère chambre en date du 28 février 2006 portant réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 10 mars 2006 par télécopie et son original enregistré le 13 mars 2006, présenté pour la SNC X, qui persiste dans ses conclusions ; la société soutient que la demande de pénalités n'est pas nouvelle mais se rattache à la possibilité de demander au juge administratif de décider d'injonctions sous astreinte à l'administration ; que les droits de la défense ne se cantonnent pas au respect du contradictoire ; qu'il revient à l'administration d'apporter la preuve que les méthodes de mesurages étaient appropriées ; qu'elle n'a pas les moyens de justifier de l'incompétence du contrôleur qu'il avait lui-même admise ; qu'aucune directive, ni délégation ne permet à l'Office national interprofessionnel des céréales de procéder aux contrôles ; qu'il n'est pas compétent en dehors des cultures céréalières ; que le pouvoir de sanction ne peut être délégué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil du 30 juin 1992 instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables ;

Vu le règlement (CEE) n° 3508/92 du Conseil du 27 novembre 1992 établissant un système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires ;

Vu le règlement (CEE) n° 3887/92 de la Commission du 23 décembre 1992 portant modalités d'application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires ;

Vu le décret n° 82-389 du 10 mai 1982 relatif aux pouvoirs des préfets et à l'action des services et organismes publics de l'Etat dans les départements ;

Vu le décret n° 88-682 du 6 mai 1988 relatif au contrôle des instruments de mesure ;

Vu le décret n° 92-604 du 1er juillet 1992 portant charte de la déconcentration ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2006 à laquelle siégeaient M. Serge Daël, président de la Cour, Mme Christiane Tricot, président de chambre,

M. Olivier Yeznikian, président-assesseur, M. Christian Bauzerand, premier conseiller et

M. Pierre Le Garzic, conseiller :

- le rapport de M. Pierre Le Garzic, conseiller ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de la décision du préfet de la Seine-Maritime du 19 décembre 2001 :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du règlement (CEE) du Conseil susvisé du

30 juin 1992 alors en vigueur : « 1. Les producteurs communautaires de cultures arables peuvent revendiquer un paiement compensatoire (…) 2. (…) Le paiement compensatoire est accordé pour la superficie consacrée (…) au gel des terres (…) » ; qu'aux termes du 1 de l'article 1er du règlement (CEE) du Conseil susvisé du 27 novembre 1992 alors en vigueur : « Chaque Etat membre crée un système intégré de gestion et de contrôle, (…) qui s'applique : / a) dans le secteur de la production végétale : / - au régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables, établi par le règlement (CEE) n° 1765/92 (…) » ; qu'aux termes du 1 de son article 6 : « Pour être admis au bénéfice d'un ou de plusieurs régimes communautaires soumis aux dispositions du présent règlement, chaque exploitant présente, pour chaque année, une demande d'aides surfaces indiquant :/ - les parcelles agricoles, y compris les superficies fourragères, les parcelles agricoles faisant l'objet d'une mesure de retrait de terres arables et celles qui ont été mises en jachère (…) » ; qu'aux termes de son article 8 : « 1. L'Etat membre procède à un contrôle administratif des demandes d'aides. / 2. Les contrôles administratifs sont complétés par des contrôles sur place portant sur un échantillon des exploitations agricoles. / 3. Chaque Etat membre désigne une autorité chargée d'assurer la coordination des contrôles prévus par le présent règlement. (…) » ; qu'aux termes de l'article 1er du règlement (CEE) de la Commission susvisé du 23 décembre 1992 alors en vigueur : « Le présent règlement établit les modalités d'application relatives au système intégré de gestion et de contrôle (…) prévu par le règlement (CEE) n° 3508/92 (…) » ; qu'aux termes du 1 de son article 4 : « Sans préjudice des exigences établies dans les règlements sectoriels, la demande d'aides « surfaces » contient toute information nécessaire, et notamment : (…) les éléments devant permettre l'identification de toutes les parcelles agricoles de l'exploitation, leur superficie, leur localisation, leur utilisation, le cas échéant s'il s'agit d'une parcelle irriguée, ainsi que le régime d'aides concerné (…) Par « utilisation », on entend le type de culture ou de couverture végétale ou l'absence de culture » ; qu'aux termes de son article 6 : « 1. Les contrôles administratifs et sur place sont effectués de façon à assurer la vérification efficace du respect des conditions pour l'octroi des aides et primes. (…) 7. La détermination de la superficie des parcelles agricoles se fait par tout moyen approprié défini par l'autorité compétente et garantissant une exactitude de mesurage au moins équivalente à celle requise pour les mesurages officiels selon les dispositions nationales » ; qu'aux termes du 2 de son article 9 : « Lorsqu'il est constaté que la superficie déclarée dans une demande d'aides « surfaces » dépasse la superficie déterminée, le montant de l'aide est calculé sur base de la superficie effectivement déterminée lors du contrôle. (…) Au cas où l'excédent constaté est supérieur à 20 % de la superficie déterminée, aucune aide liée à la superficie n'est octroyée. (…) Au sens du présent article, on entend par « superficie déterminée », celle pour laquelle toutes les conditions réglementaires ont été respectées » ;

Considérant qu'à la suite d'un contrôle de l'exploitation de la SNC X, effectué le 11 juillet 1994, par un agent de l'Office national interprofessionnel des céréales, il a été constaté un dépassement supérieur à 20 % de la superficie déterminée par la superficie déclarée en gel ; qu'en application des dispositions de l'article 9 précité du règlement (CEE) de la Commission du

23 décembre 1992, le préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime a décidé le 13 octobre 2001 de ne lui octroyer aucune aide liée à la superficie pour la campagne 1993/1994 ;

Sur les textes applicables :

Considérant que les dispositions précitées des règlements (CEE) du Conseil du 30 juin 1992 et du 27 novembre 1992 et du règlement (CEE) de la Commission du 23 décembre 1992 étaient directement applicables sans que l'édiction d'une norme nationale ne soit un préalable nécessaire à leur application ; que, si elles laissaient aux Etats membres le soin de préciser certaines modalités de leur application, contrairement à ce que soutient la SNC X, l'absence d'édiction de ces précisions n'est pas de nature, dans les circonstances de l'espèce, à empêcher le préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime, d'appliquer à la société les sanctions prévues par l'article 9 précité du règlement (CEE) de la Commission du 23 décembre 1992 ;

Sur la régularité des opérations de contrôle :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6 du décret susvisé du 10 mai 1982 alors en vigueur : « Le préfet prend les décisions dans les matières entrant dans le champ des compétences des administrations civiles de l'Etat exercées à l'échelon du département » ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 4 du décret susvisé du 1er juillet 1992 : « Sous réserve des dispositions des articles 3 et 5 et sauf disposition législative contraire ou exception prévue par décret en Conseil d'Etat, la circonscription départementale est l'échelon territorial de mise en oeuvre des politiques nationale et communautaire » ;

Considérant que le régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables sous forme de paiements compensatoires, tel que défini et organisé par les règlements communautaires susmentionnés, présente le caractère d'une politique communautaire dont la mise en oeuvre relève, à défaut d'une disposition législative contraire ou d'une exception prévue par un décret en Conseil d'Etat, de la circonscription départementale en application de l'article 4 précité du décret du

1er juillet 1992 ; qu'en application de l'article 6 précité du décret du 10 mai 1982 et, en l'absence de toute disposition législative ou réglementaire contraire, le représentant de l'Etat en assure l'exécution ; que le préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime, doit, dès lors, être regardé comme l'autorité chargée d'assurer, dans le département de la Seine-Maritime, la coordination des contrôles prévus par le règlement (CEE) du Conseil du 27 novembre 1992 et précisés par le règlement (CEE) de la Commission du 23 décembre 1992 ;

Considérant, en premier lieu, que s'il revient au représentant de l'Etat de prendre les sanctions à l'encontre des exploitants, aucune disposition législative ou réglementaire ne lui interdit de s'appuyer sur des contrôles qu'il a fait réaliser par l'Office national interprofessionnel des céréales ; qu'ainsi le contrôle sur place de l'exploitation de la SNC X, réalisé le

11 juillet 1994, pouvait valablement être effectué par un agent de cet établissement public ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, comme l'affirme la société requérante, ledit agent ait été inapte à un tel contrôle ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que les techniques de mesure utilisées n'étaient pas, dans les circonstances de l'espèce, des moyens appropriés au sens du règlement (CEE) susmentionné de la Commission du 23 décembre 1992 ;

Sur le caractère contradictoire de la procédure :

Considérant que la société requérante soutient que si l'administration l'a invitée, préalablement à la sanction contestée du 19 décembre 2001, à faire valoir ses observations par une lettre en date du 15 octobre 2001, le délai qui s'est écoulé entre le contrôle de son exploitation du

11 juillet 1994 et cette invitation a été tel qu'il lui a été impossible de présenter utilement sa défense ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue du contrôle sur place,

M. Y a pris connaissance des anomalies constatées dans le compte rendu détaillé de contrôle qu'il a signé ; que la société a, ensuite, produit des mémoires à l'encontre de la sanction, annulée par la juridiction administrative, qu'avait prise l'administration à la suite du même contrôle ; qu'il résulte de ces circonstances que, nonobstant le délai écoulé entre le contrôle et l'invitation faite à la SNC X à présenter ses observations, la sanction prononcée ne peut être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant été prise en méconnaissance des droits de la défense ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNC X n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de la décision en date du 19 décembre 2001 par laquelle le préfet de la région

Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime a décidé de ne lui accorder aucune aide au titre du gel de l'utilisation de terres arables pour la campagne 1993/1994 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de

non-recevoir opposée par le ministre de l'agriculture et de la pêche :

Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que par suite ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la SNC X une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SNC X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC X et au ministre de l'agriculture et de la pêche.

Copie sera transmise au préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime.

2

N°04DA01033


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 5 (ter)
Numéro d'arrêt : 04DA01033
Date de la décision : 30/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Pierre Le Garzic
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : HENRY

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-03-30;04da01033 ?
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