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11/04/2006 | FRANCE | N°04DA00842

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation a 3 (ter), 11 avril 2006, 04DA00842


Vu le recours, reçu par télécopie du 16 septembre 2004 confirmé par courrier enregistré le 22 septembre 2004, présenté par le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE ; le ministre demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 993562 en date du 7 juillet 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 12 juillet 1999 par lequel le préfet de la région

Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord, a abrogé l'arrêté du 24 septembre 1986 chargeant

M. Gérard X des fonctions de directeur de la maison de retraite de La Gorgue ;
>2°) de rejeter la demande de M. X ;

Il soutient que les premiers juges ont commis une er...

Vu le recours, reçu par télécopie du 16 septembre 2004 confirmé par courrier enregistré le 22 septembre 2004, présenté par le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE ; le ministre demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 993562 en date du 7 juillet 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 12 juillet 1999 par lequel le préfet de la région

Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord, a abrogé l'arrêté du 24 septembre 1986 chargeant

M. Gérard X des fonctions de directeur de la maison de retraite de La Gorgue ;

2°) de rejeter la demande de M. X ;

Il soutient que les premiers juges ont commis une erreur de droit en se fondant sur la méconnaissance des termes de l'engagement de M. X ; que si l'arrêté du 24 septembre 1986 prévoit l'engagement de M. X jusqu'à la nomination d'un directeur de 4ème classe, le décret du 13 février 1996 a rendu inapplicable cette disposition de l'arrêté en raison de la mise en extinction de la 4ème classe du corps des directeurs ; qu'en revanche, le préfet restait tenu de faire assurer l'intérim des fonctions de directeur, chef d'établissement, dès la vacance du poste ; que les fonctions de directeur, chef d'établissement ne peuvent être assurées que par un directeur d'établissement sanitaire et social ou par un agent de catégorie A de la fonction publique hospitalière ; que c'est ainsi en stricte application du décret précité que le préfet a mis fin aux fonctions de M. X et nommé à titre intérimaire, par arrêté du 12 juillet 1999, un directeur de 2ème classe pour assurer les fonctions de chef d'établissement de la maison de retraite ; que, par ailleurs, dès lors qu'il appartenait à la maison de retraite d'établir un contrat conforme à la réglementation en matière de recrutement, l'Etat ne peut être responsable des engagements pris par celle-ci, dont le préfet n'a eu connaissance qu'au moment du litige ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 janvier 2005, présenté pour M. Gérard X, par Me Debavelaere, avocat, qui conclut au rejet du recours et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que le conseil d'administration de la maison de retraite n'a pas été consulté alors qu'il avait délibéré dans le cadre de l'arrêté de nomination ; que le ministre ne peut utilement invoquer l'article 40 du décret du 13 février 1996, dès lors que son engagement prévoyait qu'il exercerait ses fonctions de directeur jusqu'à la nomination d'un directeur de

4ème classe ; que le placement en voie d'extinction de la 4ème classe n'emporte pas extinction immédiate ; que les dispositions du décret du 6 février 1991, notamment son article 44, n'ont pas été respectées ; qu'il n'a pas bénéficié d'un délai de préavis ; que le préfet a outrepassé ses pouvoirs ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 8 février 2005, présenté par le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE, qui conclut aux mêmes fins que son recours par les mêmes moyens ; il soutient en outre que le préfet n'était pas tenu de consulter le conseil d'administration de la maison de retraite ; qu'à la date de l'arrêté litigieux, aucune nomination de directeur de 4ème classe n'était possible ; que la nomination d'un directeur de 2ème classe était régulière, en application de l'article 20 du décret du 13 février 1996 ; que, dès lors que l'autorité signataire du contrat de travail est la maison de retraite, l'Etat ne peut être mis en cause quant au non respect des droits qu'aurait tenu M. X de ce contrat ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 24 juin 2005, présenté pour M. X, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 88-163 du 19 février 1988 portant statut particulier des grades et emplois des personnels de direction des établissements mentionnés à l'article 2 (1°, 2° et 3°) de la loi

n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 91-155 du 6 février 1991, relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du

9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 96-113 du 13 février 1996 portant statut particulier du corps des directeurs d'établissements sanitaires et sociaux ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2006 à laquelle siégeaient M. Philippe Couzinet, président de chambre, M. Alain Dupouy, président-assesseur et M. Fabien Platillero, conseiller :

- le rapport de M. Fabien Platillero, conseiller ;

- et les conclusions de M. Jérôme Michel, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Nord en date du 12 juillet 1999 :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 19 février 1988, dans sa rédaction applicable jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 13 février 1996 : « Les personnels de direction relevant du présent statut exercent leurs fonctions dans les établissements mentionnés aux 1°, 2° et 3° de l'article 2 de la loi susvisée du 9 janvier 1986 ... » ; qu'aux termes de l'article 2 du même décret : « Les personnels de direction mentionnés au premier alinéa de l'article 1er ci-dessus qui ont vocation à occuper les emplois énumérés à l'article 3 ci-après constituent un corps de catégorie A… III. - Le corps de direction comprend quatre classes … » ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 13 février 1996, applicable à la date de l'arrêté litigieux : « Les personnels de direction relevant du présent titre constituent le corps des directeurs d'établissements sanitaires et sociaux, qui est un corps de catégorie A. Ils exercent leurs fonctions dans les établissements publics de santé et dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées comptant au plus 150 lits mentionnés à l'article 2 (1°, 2° et 3°) de la loi du 9 janvier 1986 modifiée susvisée, en qualité de directeurs, chefs d'établissement … » ; qu'en vertu de l'article 3 de ce décret, le corps des directeurs d'établissements sanitaires et sociaux comprend trois grades, la hors-classe, la 1ère classe et la 2ème classe ; qu'aux termes de l'article 20 dudit décret : « La nomination à chaque emploi est prononcée par le ministre chargé de la santé, après avis de la commission de classement. Pour les directeurs, chefs d'établissement, celle-ci prend connaissance des observations orales ou écrites du président de l'assemblée délibérante de l'établissement intéressé… Le préfet du département prend toute mesure nécessaire en vue de faire assurer l'intérim des fonctions de directeur, chef d'établissement. Lorsqu'elles ne peuvent être assurées par un fonctionnaire relevant du présent statut, ces fonctions peuvent être confiées à un agent de catégorie A de la fonction publique hospitalière » ; qu'aux termes de l'article 40 du même décret : « La 4ème classe du corps des personnels de direction régi par le décret du

19 février 1988 modifié susvisé est placée en voie d'extinction … » ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la maison de retraite de La Gorgue est un établissement d'hébergement pour personnes âgées comptant au plus 150 lits mentionné à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 ; qu'à compter de l'entrée en vigueur du décret du

13 février 1996, le poste de directeur de cette maison de retraite devait être occupé par un directeur d'établissements sanitaires et sociaux hors-classe, de 1ère classe ou de 2ème classe ; que, contrairement à ce que soutient M. X, aucune vacance d'emploi d'un directeur de 4ème classe ne pouvait plus être déclarée, du fait de la mise en extinction de la 4ème classe, en application des dispositions précitées de l'article 40 de ce décret ; que, par suite, l'arrêté du 24 septembre 1986 du préfet du Nord par lequel M. X a été nommé, en application du décret n° 69-662 du

13 juin 1969, directeur économe de la maison de retraite de La Gorgue à titre intérimaire, jusqu'à la nomination d'un directeur d'un grade conforme au statut de cette maison de retraite, soit un directeur de 4ème classe à la date de cet arrêté, et ce dans la mesure où, à la date dudit arrêté, aucune condition relative au statut de l'agent chargé de l'intérim de ces fonctions n'était posée, devait nécessairement s'entendre, à la date d'entrée en vigueur du décret du 13 février 1996, comme chargeant M. X des fonctions de directeur de la maison de retraite de La Gorgue jusqu'à la nomination d'un directeur d'un grade conforme au statut de cette maison de retraite, soit un directeur d'établissements sanitaires et sociaux hors-classe, de 1ère classe ou de

2ème classe ;

Considérant, par ailleurs, qu'en l'absence de nomination d'un directeur titulaire, l'intérim des fonctions de directeur, chef d'établissement devait être assuré par un directeur d'établissements sanitaires et sociaux ou, à défaut, par un agent de catégorie A de la fonction publique hospitalière ; que M. X n'étant ni directeur d'établissements sanitaires et sociaux ni agent de catégorie A de la fonction publique hospitalière, il ne pouvait, à compter de l'entrée en vigueur du décret du 13 février 1996, continuer à assurer l'intérim des fonctions de directeur de la maison de retraite de La Gorgue ; que le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE est ainsi fondé à soutenir que, par son arrêté du 12 juillet 1999, le préfet du Nord s'est borné à faire application des dispositions du décret du 13 février 1996 en abrogeant l'arrêté du 24 septembre 1986 et en nommant un directeur de 2ème classe pour assurer les fonctions de directeur de la maison de retraite de La Gorgue à titre intérimaire, et, par suite, que le Tribunal administratif de Lille a commis une erreur de droit en annulant cet arrêté, au motif qu'il ne respectait pas les termes de l'arrêté du 24 septembre 1986 précité ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X tant devant la Cour que devant le tribunal administratif ;

Considérant que, par arrêté du préfet du Nord du 15 juin 1999, M. Y, secrétaire général de la préfecture du Nord, a reçu délégation de signature en toutes matières à l'exception de la réquisition du comptable ; que le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté du

12 juillet 1999 n'aurait pas reçu une délégation de signature régulière manque ainsi en fait ;

Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet de consulter le conseil d'administration d'un établissement sanitaire ou social avant de mettre fin à la nomination de son directeur intérimaire ; que le moyen tiré de ce que le conseil d'administration de la maison de retraite de La Gorgue n'a pas été consulté antérieurement à l'arrêté litigieux ne peut ainsi qu'être rejeté ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, seul le préfet est compétent, en application des dispositions précitées de l'article 20 du décret du 13 février 1996, pour prendre les mesures nécessaires afin de faire assurer l'intérim des fonctions de directeur, chef d'établissement ; que le moyen tiré de la violation des dispositions du décret susvisé du

6 février 1991 par la maison de retraite de La Gorgue, qui avait signé un contrat de travail avec M. X, est ainsi et en tout état de cause inopérant à l'encontre de l'arrêté du 12 juillet 1999 ;

Considérant que la circonstance que le préfet du Nord n'a pas respecté le délai de préavis prévu par l'article 42 du décret du 6 février 1991 est en tout état de cause sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 12 juillet 1999 ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, les dispositions du décret du 13 février 1996 dont il a été fait application en l'espèce n'ont aucun caractère rétroactif ;

Considérant que M. X n'est pas fondé à se plaindre de ce que la nomination d'un directeur de 2ème classe en tant que directeur de la maison de retraite de La Gorgue par l'arrêté du 12 juillet 1999 n'était que provisoire, dès lors qu'il s'agissait seulement pour le préfet du Nord de faire assurer l'intérim de ces fonctions ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 12 juillet 1999 par lequel le préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord, a abrogé l'arrêté du 24 septembre 1986 chargeant

M. X des fonctions de directeur de la maison de retraite de La Gorgue ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 9903562 en date du 7 juillet 2004 du Tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande de M. X et les conclusions de sa requête tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE LA SANTE ET DES SOLIDARITES et à M. Gérard X.

Copie sera transmise au préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord.

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N°04DA00842


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation a 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 04DA00842
Date de la décision : 11/04/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Couzinet
Rapporteur ?: M. Fabien Platillero
Rapporteur public ?: M. Michel
Avocat(s) : SCP DEBAVELAERE BECUWE THEVELIN TEYSSEDRE DELANNOY

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-04-11;04da00842 ?
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