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03/05/2006 | FRANCE | N°05DA00300

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3 (bis), 03 mai 2006, 05DA00300


Vu la requête, enregistrée le 16 mars 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Y... , demeurant ..., par Me X... ; M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0202954-0202955 du 16 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille, d'une part, a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995, 1996 et 1997, mises en recouvrement le 31 mai 1999 dans les rôles de la commune de Marcq-en-Baroeul et des droits supplémen

taires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre...

Vu la requête, enregistrée le 16 mars 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Y... , demeurant ..., par Me X... ; M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0202954-0202955 du 16 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille, d'une part, a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995, 1996 et 1997, mises en recouvrement le 31 mai 1999 dans les rôles de la commune de Marcq-en-Baroeul et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996 par avis de mise en recouvrement du 7 mai 1999 et, d'autre part, l'a condamné à payer une amende de 2 000 euros pour recours abusif ;

2°) de prononcer la décharge desdites impositions et de l'amende pour recours abusif ;

M. soutient que la procédure d'imposition est irrégulière, dès lors qu'il a été privé, à la suite de la vérification de comptabilité qui a été effectuée sur son entreprise, de la possibilité de saisir le supérieur hiérarchique du vérificateur puis l'interlocuteur départemental ; que la notification de redressements concernant l'imposition de l'année 1997 est insuffisamment motivée ; que l'imposition à laquelle il a été assujetti n'est pas fondée, dès lors qu'il remplissait toutes les conditions posées à l'article 35-I-1° du code général des impôts et que c'est par une appréciation erronée des dispositions de l'article précité que l'administration a refusé de le reconnaître comme marchand de biens ; qu'il est, en tout état de cause, fondé à se prévaloir sur le fondement des dispositions des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales de la prise de position formelle prise à son égard par l'administration le 28 avril 1998 admettant sa qualité de marchand de biens ; que les majorations exclusives de bonne foi qui lui ont été assignées ne sont pas fondées ; qu'il n'y avait pas lieu, pour le Tribunal, de lui infliger une amende pour recours abusif ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2005, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête ; il soutient que le requérant reprend son argumentation dans les mêmes termes que devant le Tribunal administratif ; que la procédure d'imposition est régulière, dès lors que M. a régulièrement été informé des possibilités de recours hiérarchique qui lui étaient offertes lors de la notification de l'avis de vérification de comptabilité du 12 août 1997 et qu'il ne soutient pas avoir sollicité les entrevues en cause ; que la notification de redressements du 11 septembre 1998 était suffisamment motivée ; que le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il remplissait toutes les conditions pour être considéré comme marchand de biens, dès lors que les opérations d'achats et de reventes d'immeubles ou de titres de sociétés immobilières réalisées par lui, tant au cours des années précédentes, qu'au cours des années 1995, 1996 et 1997, ne présentaient pas le caractère d'opérations effectuées à titre habituel dans une intention spéculative mais avaient le caractère d'actes de gestion patrimoniale privée ; que le requérant n'est pas fondé à se prévaloir sur le fondement des dispositions des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales de la prise de position formelle prise à son égard par l'administration le 28 avril 1998 admettant sa qualité de marchand de biens ; que M. ne peut soutenir qu'il n'a pas délibérément et, en toute connaissance de cause, porté en déduction de son revenu global au titre des années 1995 à 1997, les déficits résultant de l'activité litigieuse ; que la circonstance que l'administration ait remis en cause, à la suite des diverses vérifications de comptabilité effectuées par ses services, la qualification de l'activité de marchand de biens et que ces remises en cause aient été confirmées par les juridictions d'appel, justifie pleinement l'amende pour recours abusif infligée au requérant ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 décembre 2005, présenté pour M. ; M. conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, qu'en sa qualité de commerçant, il devait impérativement se conformer aux prescriptions fiscales et déclarer les revenus provenant de son activité dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et qu'une éventuelle contestation de cette qualité de commerçant ne pouvait intervenir que dans le cadre de la procédure de répression des abus de droit ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 avril 2006 à laquelle siégeaient

Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Corinne Signerin-Icre, président-assesseur et M. Olivier Mesmin d'Estienne, premier conseiller :

- le rapport de M. Olivier Mesmin d'Estienne, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Z... Le Goff, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que M. soutient que la procédure d'imposition est irrégulière, dès lors que la notification de redressements concernant l'imposition de l'année 1997 est insuffisamment motivée ; que le requérant n'apporte pas davantage en appel qu'en première instance d'éléments de nature à permettre de regarder ce moyen comme fondé ; qu'il y a lieu, dès lors, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter ce moyen ;

Considérant, en second lieu, que M. soutient que la procédure d'imposition est irrégulière, au motif qu'il aurait été privé, à la suite de la vérification de comptabilité qui a été effectuée sur son entreprise, de la possibilité de saisir le supérieur hiérarchique du vérificateur puis l'interlocuteur départemental ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction que, bien qu'ayant été régulièrement informé, lors de la notification de l'avis de vérification de comptabilité du

12 août 1997, des possibilités de recours hiérarchique qui lui étaient offertes, il n'établit ni même allègue avoir sollicité de tels entretiens ; que la seule circonstance qu'un agent des services fiscaux du grade d'inspecteur principal ait visé, ainsi que l'exige la réglementation, la première page de la notification de redressements qui appliquait au requérant les pénalités prévues à l'article 1729 du code général des impôts, ne faisait pas obstacle à ce que le contribuable, s'il l'estimait nécessaire, fasse usage des pouvoirs que lui offrait la procédure contradictoire de redressements ainsi qu'il en avait été informé dès l'avis de vérification ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les droits :

Considérant qu'aux termes de l'article 35 du code général des impôts : « I. Présentent ( … ) le caractère de bénéfices industriels et commerciaux pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : 1° Les personnes qui habituellement achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés. Ces personnes s'entendent notamment de celles qui achètent des biens immeubles, en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre, en bloc ou par locaux… » ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. n'a procédé à titre personnel durant les années 1995 à 1997 en litige à aucune acquisition d'immeubles ou de fonds de commerce suivie de la vente de ceux-ci ; que l'acquisition et la cession subséquente de parts des sociétés « La Vosgienne des Jeux » et « Thermes marins de Bénodet », lesquelles sociétés avaient pour seul objet l'exploitation d'un établissement de jeux et d'un établissement de thalassothérapie, ne peuvent être regardées comme des opérations portant sur des sociétés immobilières entrant dans le champ d'application des dispositions susmentionnées de l'article 35 du code général des impôts ; que, si M. a fait l'acquisition de parts de la société civile immobilière Iroise Galatée Marimatel, le 30 janvier 1992, et a acquis, les 31 décembre 1991 et

1er mars 1994, des parts de la Sarl Tim, agence immobilière dont il est le gérant, ces opérations ne procèdent pas d'une intention spéculative, dès lors qu'elles n'ont pas été suivies d'une cession des parts acquises ou qu'elles ont fait suite à une réduction du capital de la société en cause par diminution de la valeur nominale des parts puis par souscription d'une augmentation du capital de cette dernière société ; que l'ensemble de ces opérations, qui ont été suivies pour certaines d'une cession des parts détenues par le requérant à des membres de sa famille, doivent ainsi être regardées comme relevant d'une gestion privée du patrimoine personnel ; que l'annulation des parts détenues par le requérant dans la société SCUR Aquitaine n'a pas davantage procédé d'une cession mais de la dissolution de cette société ; que, s'agissant des garages situés dans la commune de Ronchin, acquis avant 1985 et vendus les 16 et 17 novembre 1992 et le 6 novembre 1996, ainsi que du terrain, sis dans la commune de Ramatuelle, acheté en 1984 et revendu le 19 octobre 1995, l'administration est fondée à faire valoir que ces biens étant entrés en possession du requérant plus de dix ans auparavant, le laps de temps s'étant écoulé entre leur acquisition et leur cession fait obstacle à ce que ces ventes soient qualifiées d'actes de commerce réalisés à titre habituel par un marchand de biens ; qu'ainsi M. ne justifie au regard des redressements en litige de la réalisation d'une quelconque opération entrant dans la catégorie de celles visées par l'article 35 du code général des impôts ;

Considérant, en second lieu, que M. ne saurait utilement soutenir que sa qualité de commerçant, qu'au demeurant l'administration, qui n'a pas mis en oeuvre la procédure de répression des abus de droit, ne conteste pas, devait impérativement le conduire à déclarer les revenus provenant de la gestion des biens dont il disposait dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, dès lors que les opérations immobilières en cause, nonobstant la circonstance qu'elles avaient été inscrites sur le registre qu'il tenait en sa qualité de marchand de biens, devaient, en raison de leur caractère, être soumises à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus fonciers ou des plus-values immobilières réalisées par les particuliers ; que, si le requérant entend se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales de la prise de position formelle qu'aurait prise selon lui l'administration dans ces lettres du 28 avril 1998 et du 9 avril 2002 quant à la qualification de son activité comme étant celle de marchand de biens au sens de l'article 35-I-1° précité, il est constant que ces documents se rapportent à l'impôt de solidarité sur la fortune dû par le requérant ; que M. ne peut, dès lors, se prévaloir au soutien de conclusions en décharge de rappels d'impôt sur le revenu ou de taxe sur la valeur ajoutée, de l'appréciation de la situation de fait à laquelle l'administration s'est livrée pour l'établissement d'un autre impôt ;

En ce qui concerne les pénalités de mauvaise foi :

Considérant, d'une part, que l'administration apporte la preuve que le contribuable, qui a fait l'objet de cinq vérifications de comptabilité à l'issue desquelles le bénéfice des dispositions de l'article 35-I-1° du code général des impôts lui a été refusé, a délibérément, et en connaissance de cause du risque qu'il encourrait, persisté au cours des années litigieuses à se placer sous le régime de marchands de biens à l'effet de déduire de ses revenus globaux des déficits à tort déclarés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; qu'est sans incidence sur la qualification des agissements répétés du contribuable dans le temps, la circonstance que l'administration a adopté, s'agissant de l'impôt sur le revenu, une position différente de celle qu'elle aurait retenue en matière d'impôt de solidarité sur la fortune ; que M. n'est, par suite, pas fondé à soutenir que c'est à tort que les suppléments d'impôts qui lui ont été assignés ont été assortis des pénalités exclusives de bonne foi ;

Considérant, d'autre part, que M. ne peut utilement évoquer à l'appui d'une demande de décharge des pénalités qui lui ont été appliquées sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, le bénéfice des dispositions de l'article 1732 du code général des impôts, qui permettent que les intérêts de retard ne sont pas appliqués lorsque le contribuable a, par une indication expresse portée dans sa déclaration ou dans une note y annexée, fait connaître les motifs de droit ou de fait pour lesquels il avait procédé à des déductions ultérieurement reconnues injustifiées ;

Sur l'amende pour recours abusif :

Considérant que les requêtes nos 0202954-0202955 présentées par M. devant le Tribunal administratif de Lille présentent, ainsi que l'ont justement qualifié les premiers juges, un caractère abusif ; que c'est, par suite, à bon droit que les premiers juges ont appliqué à M. par le jugement attaqué du 16 décembre 2004 l'amende prévue par l'article R. 741-12 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté ses

demandes ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

N° 05DA00300 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 05DA00300
Date de la décision : 03/05/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: M. Olivier Mesmin d'Estienne
Rapporteur public ?: M. Le Goff
Avocat(s) : SOCIETE JURIDIS CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-05-03;05da00300 ?
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