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24/05/2006 | FRANCE | N°05DA00690

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3 (bis), 24 mai 2006, 05DA00690


Vu le recours, enregistré le 10 juin 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ; le ministre demande à la Cour :

11) d'annuler l'ordonnance n° 0407365 en date du 25 avril 2005 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Lille a, à la demande de M. Cédric X, annulé sa décision en date du 25 novembre 2004 retirant trois points du permis de conduire de M. X, l'informant des divers retraits de points précédents et de la perte de validité de son permis de conduire ;

2°) de rejeter la demande de M. X devant le Tribunal administratif de Li...

Vu le recours, enregistré le 10 juin 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ; le ministre demande à la Cour :

11) d'annuler l'ordonnance n° 0407365 en date du 25 avril 2005 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Lille a, à la demande de M. Cédric X, annulé sa décision en date du 25 novembre 2004 retirant trois points du permis de conduire de M. X, l'informant des divers retraits de points précédents et de la perte de validité de son permis de conduire ;

2°) de rejeter la demande de M. X devant le Tribunal administratif de Lille en tant qu'elle porte sur les décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les

15 octobre 2002, 27 juin 2003, 7 janvier, 27 avril et 1er août 2004 ;

Il soutient que si l'intéressé n'a pas reçu, pour des raisons contingentes, les lettres simples qui notifient les retraits de points précédents, ces derniers conservent toutefois un caractère exécutoire ; qu'en l'espèce, les divers retraits de points ont été notifiés à M. X par la décision attaquée et ont ainsi acquis un caractère d'opposabilité à son encontre ; que, pour les infractions commises par M. X les 24 avril 1997, 3 juillet 1997, 11 février 1999 et 10 novembre 2000, les points retirés lui ont été restitués ; que, pour les infractions commises par l'intéressé les 15 octobre 2002,

27 juin 2003, 7 janvier, 27 avril et 1er août 2004, l'intéressé a été dûment et régulièrement informé des retraits de points qu'il était susceptible d'encourir sur son permis de conduire ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2005, présenté pour M. Cédric X, demeurant ..., par Me Rio ; M. X demande à la Cour d'annuler la notification globale opérée par le ministre de l'intérieur le 25 novembre 2005, d'enjoindre la restitution des points dans un délai de quinze jours en application de l'article L. 911-1 de code de justice administrative et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 824 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que l'administration s'est abstenue de procéder à la notification régulière de chacun des retraits des points opérés après que la réalité de chaque infraction a été établie ; que la notification globale ne peut remplacer les notifications individuelles ; que le retrait des douze points est devenue définitivement opposable ; que, par ailleurs, l'administration est défaillante dans l'administration de la preuve de la délivrance d'une information préalable régulière et complète à l'occasion de la constatation de chaque infraction en cause ; que, concernant l'infraction du 15 octobre 2002, la réalité de l'infraction n'est pas établie dès lors qu'il n'a jamais réglé l'amende forfaitaire ; que, pour les infractions commises les 27 juin 2003, 7 janvier 2004, 1er mars 2004 et 27 avril 2004 qui emportent ensemble le retrait de huit points, faute de règlement des amendes forfaitaires, la réalité des infractions n'est pas établie ; que l'amende est aujourd'hui prescrite ; que, si l'administration soutient qu'un titre exécutoire a été émis, la réclamation adressée contre ce titre a eu pour effet d'annuler le titre exécutoire émis relatif à l'amende ; que le retrait de points est donc irrégulier ; que l'article L. 223-1 du code de la route viole le principe constitutionnel de sécurité juridique qui s'évince de l'article 8 de la Déclaration de l'homme et du citoyen ; que le ministre viole également le principe de la présomption d'innocence ; que le ministre ne verse au débat aucun titre exécutoire ; que les retraits de points sont donc irréguliers ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route, ensemble l'ordonnance n° 2000-930 du 22 septembre 2000 modifiée, le décret n° 2001-250 du 22 mars 2001, la loi n° 2003-495 du 12 juin 2003 et le décret n° 2003-642 du 11 juillet 2003 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2006 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et

Mme Agnès Eliot, conseiller :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par une décision du 25 novembre 2004 notifiée par lettre recommandée, le ministre a prononcé les retraits de points correspondant aux infractions commises par M. X les 24 avril 1997, 3 juillet 1997, 11 février 1999, 10 novembre 2000, 15 octobre 2002, 27 juin 2003,

7 janvier 2004, 27 avril 2004 et 1er août 2004 et a informé ce dernier de la perte de validité de son permis de conduire ; que le ministre relève appel de l'ordonnance du vice-président du Tribunal administratif de Lille en date du 3 mars 2005 en tant qu'elle a annulé les retraits de points correspondant aux infractions commises les 15 octobre 2002, 27 juin 2003, 7 janvier 2004,

27 avril 2004 et 1er août 2004 ;

Considérant qu'il résulte des dispositions, insérées au chapitre 3 du titre 2 du livre 2 du code de la route relatives au permis à points que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, qui constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tous moyens, qu'elle a satisfait à cette obligation préalable d'information ; que les dispositions de l'article 537 du code de procédure pénale, selon lesquelles les procès-verbaux établis par les officiers ou agents de police judiciaire font foi jusqu'à preuve contraire, ne trouvent à s'appliquer qu'en ce qui concerne la constatation des faits constitutifs des infractions ; qu'elles ne s'appliquent pas à la mention portée sur ces procès-verbaux selon laquelle le contrevenant a reçu l'information prévue par les articles précités du code de la route ;

Sur le retrait de points correspondant à l'infraction commise le 15 octobre 2002 :

Considérant qu'il ressort des documents produits par l'administration que M. X a signé le procès-verbal de l'infraction commise le 15 octobre 2002, qui mentionne non seulement que le contrevenant est susceptible de perdre un point de son permis de conduire mais également que : « le contrevenant reconnaît avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention » ; que cet avis de contravention contenant l'ensemble des informations prévues par les dispositions précitées, l'administration doit être regardée comme établissant que l'intéressé en a reçu communication lors de la constatation de l'infraction ;

Sur les retraits de points correspondant aux infractions commises le 27 juin 2003 et le

27 avril 2004 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les procès-verbaux de contravention, non signés par M. X, correspondant aux infractions commises les 27 juin 2003 et 27 avril 2004 font seulement état de la perte respectivement de quatre et un points ; que de tels procès-verbaux ne suffisent pas à établir que M. X se serait vu délivrer l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées du code de la route ;

Sur les retraits de points correspondant aux infractions commises les 7 janvier 2004 et

1er août 2004 :

Considérant qu'il ressort des documents produits par l'administration que M. X a signé les procès-verbaux des infractions commises les 7 janvier 2004 et 1er août 2004, qui mentionnent non seulement que le contrevenant est susceptible de perdre respectivement un et deux points de son permis de conduire mais également que : « Le contrevenant reconnaît avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention » ; que, si les dispositions des articles L. 323-3 et R. 323-3 du code de la route ont reçu une nouvelle rédaction issue respectivement de la loi n° 2003-495 du 12 juin 2003 et du décret n° 2003-642 du 11 juillet 2003, une telle modification n'a pas rendu obsolètes les mentions figurant sur les imprimés Cerfa de contravention ; que les avis de contravention remis à l'intéressé contenant l'ensemble des informations prévues par les dispositions précitées, l'administration doit être regardée comme établissant que l'intéressé en a reçu communication lors de la constatation de ces deux infractions ; que, si la possibilité d'effectuer un stage pour la reconstitution du capital de points ne figure pas sur les avis de contravention, une telle mention n'est pas au nombre de celles qui conditionnent la régularité de la procédure de retraits de points ;

Considérant que les modalités de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire prévues par les dispositions précitées ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et, partant, la légalité de ces retraits ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lille s'est fondé sur le défaut d'information préalable et de notification pour annuler la décision ministérielle en date du 25 novembre 2004 en tant qu'elle porte sur les trois retraits de points du permis de conduire de M. X consécutivement aux infractions commises les 15 octobre 2002,

7 janvier 2004 et 1er août 2004 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Lille et la Cour à l'encontre de ces trois décisions de retrait de points ;

Considérant que M. X soutient que la réalité de l'infraction n'est pas établie dès lors que le ministre n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la délivrance et de la notification à l'intéressé d'un titre exécutoire du montant de l'amende forfaitaire majorée pour les infractions commises les 15 octobre 2002, 7 janvier 2004 et 1er août 2004 ; qu'il résulte de l'instruction que la lettre récapitulative des infractions commises retient, pour chacune d'elles, que l'intéressé a réglé l'amende forfaitaire ; que, par ailleurs, le contrevenant a expressément reconnu les infractions lorsqu'il a signé les procès-verbaux de contravention et n'apporte, au cours de la procédure devant la juridiction administrative, aucun élément permettant de constater qu'il aurait, par la suite, contesté dans le délai légal ces infractions et renoncé à payer l'amende forfaitaire ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que, pour ces trois infractions mentionnées ci-dessus, leur réalité ne serait pas établie et ne peut utilement invoquer à cette occasion la violation de la présomption d'innocence ou une violation du principe de sécurité juridique par l'article L. 223-1 du code de la route ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la décision du 25 novembre 2004 du ministre est illégale en tant qu'elle procède au retrait de quatre et un points consécutivement aux infractions commises par M. X les 27 juin 2003 et 27 avril 2004 ; que, par suite, le ministre est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du Tribunal administratif de Lille a annulé sa décision du 25 novembre 2004 en tant qu'elle retire quatre points du capital de points affecté au permis de conduire de M. X consécutivement aux infractions qu'il a commises les 15 octobre 2002, 7 janvier 2004 et 1er août 2004 et lui a enjoint de rétablir ces quatre points au capital de points du titre de conduite de l'intéressé ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X la somme que ce dernier demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 0407365 en date du 3 mars 2005 du vice-président du Tribunal administratif de Lille est annulée en tant qu'elle annule la décision du 25 novembre 2004 du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES prononçant le retrait de quatre points du capital des points affecté au permis de conduire de M. X consécutivement aux infractions commises par l'intéressé les 15 octobre 2002,

7 janvier 2004 et 1er août 2004 et en tant qu'il lui a enjoint de rétablir ces quatre points au capital de points affecté à son titre de conduite.

Article 2 : La demande de M. X, dans la mesure où elle tendait, devant le Tribunal administratif de Lille, à l'annulation de la décision ministérielle du 25 novembre 2004 prononçant le retrait de quatre points à la suite des infractions commises les 15 octobre 2002, 7 janvier 2004 et

1er août 2004 et au rétablissement de ces quatre points au capital de points affecté à son titre de conduite, est rejetée.

Article 3 : Le surplus du recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de M. X tendant au bénéfice des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE et à M. Cédric X.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

N°05DA00690 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 05DA00690
Date de la décision : 24/05/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: M. Olivier (AC) Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : RIO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-05-24;05da00690 ?
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