La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/07/2006 | FRANCE | N°05DA00578

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3, 27 juillet 2006, 05DA00578


Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Dominique X, demeurant ..., par la SCP Herce et Poirot-Bourdain ; Mme X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0102029 en date du 14 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil à l'indemniser des préjudices résultant de la chute dont elle a été victime le 24 février 2000 et à lui verser la somme de 100 000 francs à titre de

provision et tendant à la nomination d'un expert afin de chiffrer son...

Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Dominique X, demeurant ..., par la SCP Herce et Poirot-Bourdain ; Mme X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0102029 en date du 14 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil à l'indemniser des préjudices résultant de la chute dont elle a été victime le 24 février 2000 et à lui verser la somme de 100 000 francs à titre de provision et tendant à la nomination d'un expert afin de chiffrer son préjudice ;

2°) de déclarer le centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil responsable de sa chute, de le condamner à lui verser la somme de 100 000 francs, soit 15 245 euros, à titre de provision et de nommer un expert afin de chiffrer son préjudice ;

3°) de condamner le centre hospitalier à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que la responsabilité du centre hospitalier est engagée pour défaut d'entretien normal d'un ouvrage public compte tenu du caractère anormalement glissant du sol de l'entrée de l'hôpital, dont le revêtement a occasionné à plusieurs reprises des chutes importantes ; que le Tribunal aurait dû indiquer les raisons pour lesquelles les témoignages produits ont été jugés insuffisants ; qu'elle n'a pas les moyens de solliciter un huissier ; que tant la conception du revêtement particulièrement glissant que son entretien sont constitutifs d'un défaut d'entretien normal ;

- qu'elle est fondée, en outre, à rechercher la responsabilité du centre hospitalier à raison des soins qui lui ont été prodigués et des graves conséquences qu'ils ont provoquées ; qu'elle a été victime d'un accident anesthésique en raison de l'anesthésie générale qui a été pratiquée alors qu'elle était asthmatique, ce que n'ignorait pas l'hôpital ; qu'en pratiquant néanmoins une anesthésie de ce type, l'hôpital a commis une faute ; que l'hôpital n'établit pas qu'aucune autre possibilité de sédation n'était possible ; qu'en outre, elle n'a reçu aucune information sur les risques à la fois de l'anesthésie et sur ceux de l'intervention pratiquée, le centre ne pouvant se prévaloir d'aucune urgence ; que l'hôpital n'a pas apporté la démonstration que la décision d'approfondir l'anesthésie avait été prise alors que l'intervention était avancée à un tel stade que l'urgence était manifeste ;

- que son état n'étant pas consolidé, mais l'expert ayant évalué son pretium doloris à 2,5 et l'exposante se trouvant toujours en état d'incapacité totale de travail, elle est fondée à solliciter la somme de 100 000 francs à titre provisionnel ;

- que l'absence de consolidation justifie un complément d'expertise ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 février 2006, présenté pour le centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil, dont le siège est ZAC Feugrais Saint-Aubin les Elbeuf (76410), par Me Le Prado ; le centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil demande à la Cour de rejeter la requête ;

Il soutient :

- en premier lieu, que le jugement attaqué est suffisamment motivé, le Tribunal n'ayant pas à préciser en quoi chacun des témoignages apportés n'était pas de nature à établir le caractère particulièrement glissant du sol et alors que la motivation retenue par le juge doit être proportionnée à l'argumentation du demandeur ;

- en deuxième lieu, que le sol du hall ne présentait aucun danger excédant les risques normaux dont les usagers sont tenus de se prémunir en prenant les précautions utiles ; que le sol ne présentait aucune trace d'humidité, était nettoyé et essuyé régulièrement et répondait aux exigences de sécurité ; qu'alors que des centaines de personnes passent quotidiennement, aucune chute n'a été à déplorer ;

- en troisième lieu, que les préjudices dont la requérante peut se prévaloir au titre de ce prétendu défaut d'entretien sont distincts de ceux liés à l'accident d'anesthésie ;

- enfin, que la responsabilité médicale de l'exposant ne saurait davantage être recherchée ; que, d'une part en effet, il résulte du rapport d'expertise que l'anesthésie locale d'abord réalisée s'est révélée insuffisante, sans qu'une faute ait été commise, qu'il était nécessaire de modifier la technique anesthésique, que l'anesthésie générale a été réalisée dans les règles de l'art et que le syndrome de Mendelson survenu en fin d'intervention n'est pas dû à une faute médicale ; que les praticiens ont pris en compte les antécédents médicaux de la requérante en procédant d'abord à une anesthésie locale ; qu'ainsi, aucune faute médicale n'a été commise ; que la responsabilité de l'exposant n'est pas davantage engagée pour défaut d'information dès lors que la décision de réaliser une anesthésie générale a du être prise en urgence, ce qui a rendu impossible toute information de la patiente sur les risques encourus ; qu'en outre, l'anesthésie locale n'ayant pu aboutir, l'anesthésie générale était la seule alternative thérapeutique possible ; que la requérante n'a dès lors perdu aucune chance d'éviter les préjudices subis ; qu'enfin, il y a tout lieu de penser que même informée des risques liés à une anesthésie générale et devant la douleur liée à sa fracture, la requérante aurait accepté cette anesthésie ;

- enfin, et à titre subsidiaire, que la requérante ne saurait être indemnisée que des conséquences liées à la prétendue faute médicale et non de celles résultant de la chute ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 mars 2006, présenté par Mme X, concluant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu la décision en date du 30 mai 2006 par laquelle le président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accorde à Mme Dominique X l'aide juridictionnelle totale pour la présente procédure ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2006 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Corinne Signerin-Icre, président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de Mme Corinne Signerin-Icre, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Robert Le Goff, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'en retenant dans les motifs de son jugement, que les attestations versées au débat ne permettaient pas d'établir que l'état du sol du hall du centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil présentait un danger excédant ceux contre lesquels il appartient aux usagers de se prémunir en faisant preuve de vigilance et d'attention, le Tribunal a implicitement mais nécessairement considéré que ces attestations étaient imprécises et insuffisantes pour établir à elles seules que la chute dont Mme X a été victime était imputable à l'état du sol et a, ainsi, suffisamment motivé sa décision ;

Au fond :

Considérant, en premier lieu, que s'il est constant que Mme X a été victime le

24 février 2000 d'une chute dans le hall du centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val-de-Reuil, l'intéressée n'établit pas que cette chute soit due à l'état du sol, alors qu'en tout état de cause, le centre hospitalier, qui fait valoir l'absence d'accident en ce lieu très fréquenté, établit que l'ouvrage mis en cause était normalement entretenu ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Rouen que les soins prodigués à Mme X sur le plan orthopédique et les procédés anesthésiques mis en place ont été conformes aux règles de l'art, la décision de recourir à une anesthésie générale, malgré les antécédents asthmatiques de la patiente, après une tentative infructueuse d'anesthésie locorégionale ne révélant aucune faute médicale ;

Considérant, enfin, que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité, de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation ; que si, en l'espèce, Mme X n'a pas été informée des risques que comportait la réalisation d'une anesthésie générale, alors que le centre hospitalier n'établit pas, ni même n'allègue que préalablement à l'opération une situation d'urgence y ait fait obstacle, il résulte de l'instruction que du fait de l'échec de l'anesthésie locale, le recours à une anesthésie générale était impératif ; que, par suite, la faute commise par le centre hospitalier n'a pas entraîné, dans les circonstances de l'espèce, de perte de chance pour Mme X, de se soustraire au risque qui s'est réalisé ; qu'aucune indemnisation n'est, par conséquent, due à ce titre ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, la somme que demande

Mme X au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme Dominique X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Dominique X, au centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil et à la caisse primaire d'assurance maladie d'Elbeuf.

2

N°05DA00578


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05DA00578
Date de la décision : 27/07/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Corinne Signerin-Icre
Rapporteur public ?: M. Le Goff
Avocat(s) : SCP HERCE POIROT-BOURDAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-07-27;05da00578 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award