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27/07/2006 | FRANCE | N°05DA01097

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation a 3, 27 juillet 2006, 05DA01097


Vu la requête et le mémoire, enregistrés les 24 août 2005 et 17 février 2006, présentés pour la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE, représentée par son maire en exercice, par la SCP Carlier, Bertrand, Khayat, avocats ; la commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0102619 en date du 30 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté, en date du 30 janvier 2001, du maire de la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE radiant Mlle X des cadres de la commune à l'issue de son stage et lui a enjoint de réintégrer Mlle X en qualité d'agent administratif stagia

ire et de procéder à l'examen de ses droits à compter de son éviction ;
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Vu la requête et le mémoire, enregistrés les 24 août 2005 et 17 février 2006, présentés pour la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE, représentée par son maire en exercice, par la SCP Carlier, Bertrand, Khayat, avocats ; la commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0102619 en date du 30 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté, en date du 30 janvier 2001, du maire de la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE radiant Mlle X des cadres de la commune à l'issue de son stage et lui a enjoint de réintégrer Mlle X en qualité d'agent administratif stagiaire et de procéder à l'examen de ses droits à compter de son éviction ;

2°) de rejeter entièrement la demande présentée par Mlle X devant le Tribunal administratif de Lille ;

3°) de mettre à la charge de Mlle X la somme de 1 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que Mlle X a été mise en mesure d'effectuer normalement son stage ; que l'arrêté n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation relative à l'aptitude professionnelle de l'intéressée ; qu'il a été pris par le maire de la commune dans le respect des règles de procédure applicables à un refus de titularisation en fin de stage ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision, en date du 15 novembre 2005, du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai attribuant à

Mlle X le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les mémoires, enregistrés les 24 janvier et 13 mars 2006, présentés pour Mlle X, par Me Tachon, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la Cour condamne la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; à cette fin, elle fait valoir que la décision de refus de titularisation n'était pas motivée ; que les droits de la défense n'ont pas été respectés ; que, s'agissant d'une mesure à caractère disciplinaire, il y avait matière à communication de son dossier ; qu'elle n'a pas été mise en mesure d'effectuer normalement son stage ; que la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE dénature les services accomplis par l'intimée pendant le déroulement de ce stage et les modalités de déroulement de ce dernier ;

Vu l'ordonnance en date du 30 janvier 2006 fixant la clôture de l'instruction au

30 mars 2006 ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 mars 2006, présenté pour la COMMUNE DE

GRANDE-SYNTHE, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que les fonctions dévolues à Mlle X n'excédaient pas les compétences d'un agent de catégorie C ;

Vu l'ordonnance en date du 3 avril 2006 portant report de la clôture d'instruction au

27 avril 2006 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 26 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 87-1110 du 30 décembre 1987 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juillet 2006 à laquelle siégeaient

M. Philippe Couzinet, président de chambre, M. Alain Dupouy, président-assesseur et M. Jean-Eric Soyez, premier conseiller :

- le rapport de M. Jean-Eric Soyez, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Pierre Le Garzic, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté en litige :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé du 30 décembre 1987 modifié portant statut particulier du cadre d'emploi des agents administratifs territoriaux : « Les agents administratifs et les agents administratifs qualifiés sont chargés de tâches administratives d'exécution. Ils peuvent seconder ou suppléer les adjoints administratifs. Ils peuvent être chargés d'effectuer les divers travaux de bureautique et être affectés à l'utilisation des matériels de communication. Ils peuvent être chargés d'effectuer des enquêtes administratives et d'établir des rapports nécessaires à l'instruction de dossiers. Ils peuvent être chargés de placer les usagers d'emplacements publics, de calculer et de percevoir le montant des taxes, droits et redevances exigibles de ces usagers (…) » ;

Considérant que si Mlle X, recrutée en qualité d'agent administratif stagiaire par la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE à compter du 1er février 2000 et affectée dans un centre de loisirs pour enfants et adolescents, s'est vu confier durant son stage, dans le cadre d'une régie d'avances et de recettes, l'encaissement des participations des familles et, de façon ponctuelle, le paiement des fournisseurs et prestataires de service en cas d'organisation de sorties ou de séjours, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces tâches, qui n'exigeaient pas une formation comptable approfondie, excédaient par leur importance ou leur niveau celles pouvant être confiées à un agent administratif territorial, en application des dispositions précitées du décret du 30 décembre 1987 ; que, dans ces conditions, Mlle X a été mise en mesure d'accomplir normalement son stage ; qu'eu égard aux graves insuffisances relevées dans la manière de servir de l'intéressée, qui étaient relatives à l'absence de récapitulatif des heures de présence, à la non transmission des dossiers d'inscription, à la conservation de fonds au domicile personnel, aux factures non rentrées en régie et aux chèques non encaissés depuis plusieurs mois, il ne ressort pas des pièces du dossier, nonobstant la double circonstance qu'elle aurait disposé d'un coffre-fort d'un maniement difficile et que son cautionnement n'a pas été constitué dans les délais normaux, qu'en estimant, à l'issue du stage, que Mlle X n'était pas apte à exercer les fonctions auxquelles elle pouvait être appelée en tant qu'agent administratif territorial, et en la radiant, par arrêté du 30 janvier 2001, le maire de

Grande-Synthe se serait livré à une appréciation manifestement erronée ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé, pour annuler cet arrêté, sur les motifs tirés de ce que le stage de Mlle X ne s'était pas déroulé dans des conditions permettant d'apprécier une telle aptitude et de ce que ledit arrêté était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle X ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige a été signé par le maire de Grande-Synthe, autorité investie du pouvoir de nommer Mlle X et de mettre fin à ses fonctions ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le signataire ne bénéficierait pas d'une délégation de signature régulière doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire ; qu'il en résulte qu'alors même que la décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne, elle n'est pas - sauf à revêtir le caractère d'une mesure disciplinaire - au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier, et n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et les règlements ; qu'ainsi, le licenciement de Mlle X, fondé uniquement sur une insuffisance professionnelle et n'ayant aucun caractère de sanction, n'avait à être précédé ni d'une consultation du conseil de discipline, ni d'une procédure contradictoire permettant à l'intéressée de présenter ses observations, notamment devant la commission mixte paritaire consultée par le maire ; qu'enfin, ce licenciement, intervenu en fin de stage, n'était pas au nombre des décisions dont la loi du 11 juillet 1979 impose la motivation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1er et 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 30 janvier 2001 et lui a enjoint, par voie de conséquence, de réintégrer Mlle X en qualité d'agent administratif stagiaire et de procéder à l'examen de ses droits à compter de son éviction ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE tendant au remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la somme que demande Mlle X au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, soit mise à la charge de la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement n° 0102619 en date du 30 juin 2005 du Tribunal administratif de Lille sont annulés.

Article 2 : Les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction de la demande présentées par Mlle X devant le Tribunal administratif de Lille sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE

GRANDE-SYNTHE est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de Mlle X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE et à

Mlle Emmanuelle X.

Copie sera transmise au préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05DA01097
Date de la décision : 27/07/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Couzinet
Rapporteur ?: M. Jean-Eric Soyez
Rapporteur public ?: M. Le Garzic
Avocat(s) : SCP WABLE TRUNECEK TACHON AUBRON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-07-27;05da01097 ?
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