La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/08/2006 | FRANCE | N°05DA01434

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 03 août 2006, 05DA01434


Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour le GAEC X, dont le siège est ..., par la SCP Y, Bavencoffe, Meillier ; le GAEC X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0404140, en date du 22 septembre 2005, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision, en date du 9 décembre 2002, par laquelle le maire de la commune de Feuchy a refusé de lui délivrer le permis de construire deux poulaillers de 1 200 m² et, d'autre part, à la

condamnation de la commune à lui verser la somme de 77 112 euros en r...

Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour le GAEC X, dont le siège est ..., par la SCP Y, Bavencoffe, Meillier ; le GAEC X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0404140, en date du 22 septembre 2005, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision, en date du 9 décembre 2002, par laquelle le maire de la commune de Feuchy a refusé de lui délivrer le permis de construire deux poulaillers de 1 200 m² et, d'autre part, à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 77 112 euros en réparation du préjudice financier subi ainsi que la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler le jugement et la décision attaqués ;

3°) de condamner la commune de Feuchy à lui verser la somme de 77 112 euros ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Feuchy la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le jugement est intervenu en violation de la procédure contradictoire et, par suite, sur la base d'une procédure irrégulière ; qu'il a, en effet, retenu une fin de non-recevoir opposée par la commune dans un mémoire produit peu de temps avant la clôture de l'instruction qui ne lui a jamais été transmis, quoique le Tribunal s'en défende ; qu'il n'a pas été mis, dans ces conditions, en mesure de répondre à cette fin de non-recevoir et de produire les pièces justifiant de la qualité à agir des gérants du GAEC ; que l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été violé ; qu'en appel, sont produits aux débats les statuts du GAEC ainsi qu'en tant que de besoin, une délibération de l'assemblée générale du GAEC autorisant les gérants à agir, tant en appel qu'en première instance ; qu'après annulation du jugement, la Cour annulera le refus de délivrance du permis de construire ; que le maire ne pouvait, compte tenu de l'indépendance des législations, se fonder sur la législation sur les installations classées pour refuser de délivrer le permis de construire sollicité ; que la commune n'a formé aucun recours contre l'arrêté préfectoral autorisant l'installation classée ; que cet arrêté est aujourd'hui définitif ; que la critique de cet arrêté ne saurait donc justifier la décision de refus du maire ; que la décision relative aux permis de construire appartient, dans les communes dotées d'un plan d'occupation des sols, au maire seul ; que ce dernier ne peut donc, sans commettre d'erreur de droit, se retrancher derrière un avis défavorable du conseil municipal pour refuser de délivrer une autorisation de construire ; que le risque de dépréciation de la valeur des biens immobiliers de propriétaires voisins n'est pas au nombre des motifs susceptibles de fonder un refus de permis de construire, un permis de construire étant toujours accordé sous réserve du droit des tiers ; que les trois motifs retenus par le maire étant illégaux, le refus attaqué devra être annulé ; que, depuis 2002, le GAEC s'est trouvé dans l'impossibilité d'entreprendre les travaux de réalisation des deux poulaillers dont l'exploitation a été autorisée par le préfet ; que l'appréciation des nuisances des bâtiments revient principalement au préfet dans le cadre de l'autorisation de l'installation classée ; que ce dernier a pu constater que le projet respectait les prescriptions s'imposant à ce type d'activités ; que si la commune entend, par substitution de motifs, opposer les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, il lui appartient de faire la démonstration de l'atteinte portée à la salubrité ou à la sécurité publique, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que la commune entend également opposer le motif tiré du caractère incomplet du dossier du fait de l'absence de document graphique satisfaisant ; que ce moyen manque en fait ; que la méconnaissance de l'article 10 NC3 manque également en fait ; que la parcelle est déjà desservie par un chemin rural d'accès et un chemin d'exploitation ; que cette desserte est suffisante pour assurer la défense incendie ; qu'enfin, si la méconnaissance de l'article 10 NC12 est également opposée, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il y ait besoin de créer des places de stationnement de véhicules supplémentaires ; que la décision de refus étant illégale et le préjudice économique subi par le GAEC important, la commune devra être condamnée à l'indemniser ; que la somme est justifiée au regard du manque à gagner subi depuis quatre ans, sous réserve d'une augmentation possible du préjudice en cours de procédure ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2006 par télécopie et régularisé par l'envoi de l'original reçu le 30 juin 2006, présenté pour la commune de Feuchy, représentée par son maire en exercice, par Me Dechelette, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à la confirmation du jugement, à titre subsidiaire, au rejet de la demande présentée devant les premiers juges et à ce que soit mise à la charge du GAEC X la somme de 3 000 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir que la motivation adoptée par le Tribunal administratif de Lille pour retenir l'irrecevabilité de la demande, tirée du défaut de production de la l'habilitation à agir du représentant du GAEC, est parfaitement claire et ne souffre aucune contestation ; que la procédure contradictoire et l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnus ; que le Tribunal n'a repris la fin de non-recevoir opposée par la commune qu'à titre surabondant ; qu'il s'agit d'un moyen d'ordre public ; qu'il appartenait ainsi au GAEC de produire spontanément ses statuts ou au moins de mentionner l'organe habilité à agir en justice et de justifier de cette habilitation sans avoir à attendre le mémoire en défense de la partie adverse ; que, par ailleurs, le mémoire contenant la fin de non-recevoir a été communiqué par la juridiction au conseil du GAEC le 28 juin 2005, soit antérieurement à l'audience, ainsi que l'atteste la lettre du président du Tribunal administratif de Lille en date du 15 novembre 2005 ; qu'en outre, ledit conseil était également présent à l'audience de sorte qu'il a pu avoir connaissance de la fin de non-recevoir soulevée par la commune ; que, pourtant, il n'a pris aucune initiative postérieurement à l'audience pour produire les justifications manquantes ; que, par suite, la Cour ne pourra que confirmer la solution de rejet adoptée par le Tribunal ; qu'en outre, les pièces produites en appel par le GAEC ne sauraient permettre à la Cour de considérer que la requête est désormais recevable ; qu'il n'apparaît pas, au vu des statuts, que le gérant disposerait d'une mission générale de représentation de la personne morale en justice mais que la gérance est seulement investie des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom du groupement en vue de la réalisation de son objet social ; qu'ainsi seule l'assemblée générale disposait du pouvoir d'agir en justice au nom du groupement ; que le GAEC n'a produit qu'une seule délibération décidant de former appel ; qu'elle n'a donc pas pour effet de régulariser la demande de première instance ; que, par ailleurs, les conclusions dirigées contre la décision du

9 décembre 2002 ne sont pas recevables ; que tout recours dirigé contre une décision confirmative est regardé comme tardif ; que, faute pour le pétitionnaire d'avoir produit les pièces complémentaires réclamées dans le cadre de l'instruction du permis, une décision implicite de rejet était née deux mois après le 30 août 2000 ; que le courrier du 9 décembre 2002 se borne à confirmer cette décision implicite ; que les conclusions indemnitaires sont également irrecevables faute d'avoir été précédées d'une réclamation préalable ; que, contrairement à ce qui est soutenu, les motifs contenus dans la décision du 9 décembre 2002 sont fondés ; qu'en premier lieu, rien n'interdit à un maire de motiver son refus de permis de construire par des considérations de fait, dont la dépréciation de la valeur vénale, ou encore de rappeler le contexte dans lequel la demande est instruite, notamment l'opposition du conseil municipal au projet envisagé ; qu'en ce qui concerne la référence à l'arrêté préfectoral d'autorisation d'exploiter une installation classée, ce motif est en réalité surtout fondé sur les risques de nuisances olfactives et de prolifération des insectes ; qu'il était loisible au maire de se référer aux prescriptions contenues dans l'arrêté préfectoral pour déterminer si les constructions étaient de nature à porter atteinte à la salubrité publique ; qu'en troisième lieu, il dispose de la possibilité de procéder à une substitution de base légale ; qu'il entend, dès lors, en ce qui concerne les risques de nuisances et d'atteinte à la salubrité publique, se référer aux dispositions de l'article

R. 111-2 du code de l'urbanisme ; que ces risques sont ici parfaitement avérés et le refus est donc justifié ; qu'en quatrième lieu, la commune fait valoir que la décision est justifiée par d'autres motifs ; que la commune aurait pris la même décision si elle s'était fondée sur la méconnaissance des dispositions des 6°) et 7°) de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme dès lors que le dossier du projet ne répond pas aux exigences posées par ces dispositions ; que d'autres motifs tirés de l'incompatibilité du projet avec le plan d'occupation des sols auraient encore pu fonder la décision ; qu'il en va ainsi de la méconnaissance des dispositions de l'article 10 NC 3 du règlement du plan d'occupation des sols en ce qui concerne l'accessibilité du terrain ou de l'article 10 NC 12 à propos du stationnement des véhicules ; qu'enfin, les conclusions indemnitaires sont mal fondées dès lors que la Cour ne pourra que constater que la décision litigieuse est légale ; qu'en outre, le GAEC ne fait aucunement la démonstration du lien de causalité entre la faute présumée et le préjudice qu'il estime avoir subi ; que le manque à gagner allégué n'est que le résultat de l'inertie du GAEC et non du retard de l'administration ; qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la commune les frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 juillet 2006 à la Cour, soit après la clôture d'instruction, présenté pour le GAEC X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative, ensemble notamment le décret n° 2005-1586 du

19 décembre 2005 modifiant sa partie réglementaire ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juillet 2006 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et

M. Alain Stéphan, premier conseiller :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;

- les observations de Me Y, avocat, pour le GAEC X, et de Me Dechelette, avocat, pour la commune de Feuchy ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que l'article L. 5 du code de justice administrative énonce que : « L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence » ; qu'aux termes de l'article R. 611-1 du même code : « La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux » ; qu'en vertu de l'article R. 611-3, la notification aux parties des décisions prises pour l'instruction des affaires peut être effectuée au moyen de lettres simples ;

Considérant que, le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) X ayant saisi le Tribunal administratif de Lille d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 9 décembre 2002 par laquelle le maire de la commune de Feuchy avait refusé de lui délivrer un permis de construire deux poulaillers et tendant, d'autre part, à la condamnation de cette commune à l'indemniser des préjudices économiques subis du fait du refus de délivrance du permis de construire, les premiers juges ont rejeté sa demande comme étant irrecevable, faute pour le groupement agricole d'exploitation en commun d'avoir produit les éléments justifiant que les gérants avaient été habilités à agir en justice ; qu'aucun moyen d'ordre public n'ayant été communiqué sur ce point par la juridiction en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, le Tribunal s'est fondé, ainsi que le jugement le confirme, sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'habilitation à agir explicitement opposée par la commune dans son mémoire enregistré au greffe du Tribunal par télécopie le 24 juin 2005 et régularisé par la réception de l'original le 1er juillet 2005 ; que, toutefois, le GAEC X soutient que le mémoire contenant cette fin de non-recevoir ne lui a jamais été communiqué ou à tout le moins ne lui est jamais parvenu ; que la commune de Feuchy, pour sa part, fait valoir que ce défaut de transmission, à le supposer établi, s'est trouvé régularisé ultérieurement et ne peut plus être opposé faute de production, à l'issue de l'audience, d'une note en délibéré ;

Considérant, en premier lieu, que les mentions d'un jugement font foi jusqu'à preuve contraire et que, dans les motifs de son jugement, le Tribunal administratif de Lille a énoncé que le dernier mémoire de la commune de Feuchy avait été communiqué au conseil du groupement après la clôture de l'instruction fixée au 27 juin 2005 ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier de première instance que figure, à la date du 28 juin 2005, sur une même ligne, dans l'historique de la fiche requête émanant du greffe de la juridiction, au niveau de la colonne « commentaire », la mention suivante : « pas de communication » à propos de l'« événement » : « communication d'un mémoire » pour l'« acteur concerné » « Me Y », qui est le conseil du groupement ; qu'une telle indication qui confirme l'affirmation du conseil du groupement et qui ne se trouve contredite par aucun autre élément du dossier établissant soit l'envoi soit la réception des mémoires, doit être regardée comme apportant, en l'espèce, la preuve que le dernier mémoire de la commune de Feuchy n'a pas été transmis au GAEC X ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ce défaut de transmission du mémoire en question ait été, par la suite, corrigé ; qu'ainsi, le GAEC X n'a pas été mis à même d'en prendre connaissance et d'y répondre, le cas échéant, avant l'audience du

8 septembre 2005 ;

Considérant, en second lieu, qu'il est reproché au GAEC X dont le conseil était présent à l'audience du 8 septembre 2005 de n'avoir pas produit de note en délibéré après avoir pris connaissance de l'existence du dernier mémoire de la commune lors du rapport du magistrat rapporteur ou, à tout le moins, de la nouvelle fin de non-recevoir qu'il contenait lors de l'audition des conclusions du commissaire du gouvernement ; que s'il est vrai que la faculté de produire une note en délibéré à l'issue de l'audience était admise par la jurisprudence avant même sa reprise dans le code de justice administrative sous l'article R. 731-5 introduit par le décret n° 2005-1586 du

19 décembre 2005, l'abstention d'une partie à présenter une note en délibéré ne saurait la priver de son droit au respect de la procédure contradictoire telle qu'elle est garantie par l'article L. 5 du code de justice administrative et organisée par les dispositions de l'article R. 611-1 et suivants du même code qui imposent à la juridiction administrative notamment de veiller à la communication des mémoires mentionnés par ces dispositions ;

Considérant que, dans ces conditions, le GAEC X est fondé à soutenir que le jugement est entaché d'une irrégularité de procédure et à en demander, par suite, l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par le GAEC X devant le Tribunal administratif de Lille ;

Considérant que le GAEC X présente des conclusions d'excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un refus en date du 9 décembre 2002 du maire de la commune de Feuchy de délivrer un permis de construire deux nouveaux bâtiments d'élevage et des conclusions de plein contentieux tendant à la condamnation de la commune de Feuchy à réparer le préjudice subi du fait du refus de lui délivrer le permis de construire sollicité ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à l'ensemble des conclusions :

Considérant qu'en vertu de l'article R. 323-24 du code rural, les statuts des groupements agricoles d'exploitation en commun prévoient les conditions de désignation du ou des associés ayant pouvoir d'agir au nom de la société ; qu'en application de ces dispositions, l'article 6 a) des statuts du GAEC X confie à la gérance, constituée de plusieurs gérants, les pouvoirs les plus étendus de représentation de la société ; que, par suite, les gérants du GAEC X disposaient en vertu de l'article R. 323-24 du code rural et des statuts du groupement, le pouvoir d'agir devant le Tribunal administratif de Lille afin de solliciter l'annulation du refus de délivrance d'un permis de construire des bâtiments d'exploitation et d'obtenir l'indemnisation du préjudice résultant de ce refus regardé comme illégal ; qu'au demeurant, la délibération de l'assemblée générale extraordinaire du GAEC du 22 novembre 2005 a pour effet, dans le cadre de la présente évocation, de régulariser l'ensemble de l'action contentieuse ;

Sur les conclusions d'excès de pouvoir :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté des conclusions d'excès de pouvoir :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-13 du code de l'urbanisme : « Si le dossier est incomplet, l'autorité compétente pour statuer, dans les quinze jours de la réception de la demande, invite, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal, le demandeur à fournir les pièces complémentaires dans les conditions prévues à l'article R. 421-9. Lorsque ces pièces ont été produites, il est fait application de l'article R. 421-12. Le délai d'instruction part de la réception des pièces complétant le dossier. / Les dispositions du présent article sont applicables au cas où des exemplaires supplémentaires du dossier sont réclamés au demandeur comme il est dit à l'article

R. 421-8 (2ème alinéa) » ; que la circonstance que le maire de la commune de Feuchy ait adressé, le

29 juin 2000, au GAEC X une demande de pièces complémentaires relative au dépôt d'un dossier d'installations classées en préfecture n'a pas eu pour effet de faire naître à l'expiration du délai imparti pour cette production, au regard des dispositions mentionnées ci-dessus de l'article

R. 421-13 du code de l'urbanisme, une décision implicite de rejet de la demande de permis de construire sollicité ; que, dès lors, par sa décision attaquée du 9 décembre 2002, le maire de la commune n'a pas pris une décision confirmative d'un précédent refus mais a refusé, pour la première fois, de délivrer le permis de construire qui avait été sollicité par le GAEC X ; que cette décision n'ayant pas été, par ailleurs, assortie de la mention des voies et délais de recours, la demande enregistrée le 19 juillet 2004 au greffe du Tribunal administratif de Lille n'était pas, contrairement à ce qui est soutenu, tardive ;

En ce qui concerne la légalité des motifs de la décision du 9 décembre 2002 :

Considérant que, pour rejeter la demande de permis de construire sollicité par le GAEC X, la commune de Feuchy a retenu, dans la décision du maire en date du 9 décembre 2002, trois motifs tirés, en premier lieu, des risques de nuisances olfactives et de la prolifération d'insectes, en deuxième lieu, de l'existence d'un avis défavorable du conseil municipal au projet et, enfin, de craintes de voisins tenant au risque de dépréciation de leurs propriétés ;

Considérant, en premier lieu, que si pour justifier son premier motif, le maire a indiqué que l'arrêté préfectoral autorisant l'extension de l'installation classée ne comportait pas des mesures appropriées pour lutter contre les nuisances olfactives et la prolifération d'insectes à certaines périodes de l'année, il a entendu, en réalité, fonder ce premier motif, comme il s'en est prévalu en cours d'instance, sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme selon lesquelles : « Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique » ; que, cependant, compte tenu notamment des prescriptions nombreuses et précises de l'autorisation préfectorale du 23 juillet 2002 concernant l'implantation des bâtiments par rapport aux immeubles d'habitations ou assimilés occupés par des tiers, aux puits et forage, aux lieux de baignage, ainsi que celles prises dans le domaine de l'aménagement de l'installation et de son fonctionnement, il ne ressort pas des pièces du dossier que les risques de nuisances allégués par la commune à propos de l'épandage soient avérés ; que, par suite, en se fondant sur ce premier motif, le maire de Feuchy a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en s'estimant lié par l'avis défavorable rendu par le conseil municipal, le maire de la commune de Feuchy a entaché son deuxième motif d'une erreur de droit ;

Considérant, en dernier lieu, que le permis de construire est délivré sous réserve du droit des tiers ; que, par suite, le maire de Feuchy ne pouvait, sans entacher sa décision d'erreur de droit, se fonder sur une prétendue violation du droit des tiers pour refuser la délivrance de l'autorisation sollicitée ;

En ce qui concerne la légalité des motifs dont la commune demande la substitution en cours d'instance :

Considérant que, pour justifier sa décision de refus, le maire de la commune de Feuchy a également présenté, devant le Tribunal administratif de Lille, trois nouveaux motifs tirés, en premier lieu, du caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire, en deuxième lieu, de la méconnaissance de l'article 10 NC 3 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune et, en dernier lieu, de la violation de l'article 10 NC 12 du même règlement ;

Considérant, en premier lieu, qu'à supposer même établi le caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire au regard des 6° et 7° de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire, qui disposait d'un dossier comprenant plusieurs documents sous forme de plans et un volet paysager, ait invité le pétitionnaire à compléter son dossier sur ce point compte tenu d'une insuffisance des documents graphiques ou une absence de notice sur l'impact visuel du projet pour en apprécier la portée ; que, par suite, il ne résulte pas de l'instruction que le maire aurait pris la même décision s'il s'était fondé initialement sur ce motif ;

Considérant, en deuxième lieu, que le premier alinéa de l'article 10 NC 3 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Feuchy dispose que : « Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage sur fonds voisin éventuellement obtenu par application de l'article 682 du code civil. L'accès doit présenter les caractéristiques permettant de satisfaire aux exigences de la sécurité, de la défense contre l'incendie et de la protection civile » ; qu'il ressort des pièces figurant notamment dans le dossier de demande de permis de construire que le terrain d'implantation des deux nouveaux bâtiments à proximité desquels existe déjà un bâtiment d'élevage du GAEC X, est desservi par deux chemins, l'un rural, l'autre d'exploitation, dont il n'apparaît pas qu'ils ne seraient pas suffisants pour satisfaire aux exigences de sécurité et notamment de défense contre l'incendie ; que, par suite, ce motif n'est pas de nature à fonder la décision attaquée ;

Considérant, en dernier lieu, que l'article 10 NC 12 du même règlement prévoit que : « le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions et installations doit être réalisé en dehors des voies publiques » ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les besoins de stationnement de l'exploitation se trouveraient sensiblement modifiés du fait du projet de construction des deux nouveaux bâtiments en vue d'assurer l'extension de l'élevage de volailles et auraient nécessité la création de nouveaux emplacements sur le terrain ; que, par suite, ce motif n'est pas davantage de nature à fonder la décision attaquée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le GAEC X est fondé à demander l'annulation de la décision, en date du 9 décembre 2002, par lequel le maire de la commune de Feuchy a refusé de lui délivrer le permis de construire deux nouveaux poulaillers ;

Considérant, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'aucun autre moyen invoqué par le GAEC X n'est susceptible de fonder l'annulation prononcée par le présent arrêt ;

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée aux conclusions indemnitaires :

Considérant que l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : « Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée » ; qu'en l'absence de décision préalable, le contentieux peut toutefois se trouver lié et la demande régularisée par la production devant le juge, par l'autorité compétente, d'un mémoire en défense tendant à titre principal au rejet au fond des prétentions du requérant ; qu'il est constant que le GAEC X s'étant abstenu d'adresser à la commune de Feuchy une demande indemnitaire préalable, cette dernière a opposé devant le Tribunal administratif de Lille, à titre principal, une fin de non-recevoir tirée du défaut de décision administrative ; que, dès lors, la circonstance que la commune ait également, dans son mémoire en défense, répondu, à titre subsidiaire, sur le fond, n'a pas eu pour effet de lier le contentieux ; que, par suite, la demande indemnitaire du GAEC X qui n'était pas présentée en matière de travaux publics, n'était pas recevable ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Feuchy la somme totale de 2 000 euros sur le montant que le GAEC X réclame tant en première instance qu'en appel en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, les mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du GAEC X, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la commune de Feuchy demande à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0404140, du Tribunal administratif de Lille, en date du

22 septembre 2005, et la décision du maire de la commune de Feuchy, en date du 9 décembre 2002, sont annulés.

Article 2 : La commune de Feuchy versera au GAEC X la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions du GAEC X et les conclusions de la commune de Feuchy présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au GAEC X et à la commune de Feuchy.

Copie sera transmise en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative au Procureur de la République près le Tribunal de grande instance d'Arras.

Copie sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais.

2

N°05DA01434


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05DA01434
Date de la décision : 03/08/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SCP LEFRANC- BAVENCOFFE-MEILLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-08-03;05da01434 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award