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14/11/2006 | FRANCE | N°04DA00917

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 14 novembre 2006, 04DA00917


Vu la requête, enregistrée le 8 octobre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société GEFÜBE GESELLSCHAFT FÜR BERATUNG GMBH, dont le siège social est Barbarossaplatz 2, à Cologne (50674), Allemagne, par Me Derveaux ; la société GEFÜBE GESELLSCHAFT FÜR BERATUNG GMBH demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0103529-0301651 du 29 avril 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles le groupement européen

d'intérêt économique Réseau Animation et Recherche a été assujetti au titre d...

Vu la requête, enregistrée le 8 octobre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société GEFÜBE GESELLSCHAFT FÜR BERATUNG GMBH, dont le siège social est Barbarossaplatz 2, à Cologne (50674), Allemagne, par Me Derveaux ; la société GEFÜBE GESELLSCHAFT FÜR BERATUNG GMBH demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0103529-0301651 du 29 avril 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles le groupement européen d'intérêt économique Réseau Animation et Recherche a été assujetti au titre des exercices clos en 1992, 1993 et 1994 ainsi que des pénalités y afférentes, dont elle a été déclarée débiteur solidaire, et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 10 432 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées, majorations, pénalités et intérêts de retard y afférents à hauteur de 1 904 157,59 euros ainsi que le dégrèvement des frais, dont les intérêts moratoires, à hauteur de 328 168 euros ;

3°) de condamner l'Etat au paiement de la somme de 35 000 euros hors taxes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et aux dépens éventuels ;

Elle soutient que le groupement européen d'intérêt économique Réseau Animation et Recherche dont elle était membre ne pouvait être assujetti à l'impôt sur les sociétés dans la mesure où le vérificateur n'a pas démontré qu'il ne fonctionnait pas conformément au règlement communautaire n° 2137/85 du 25 juillet 1985 ; que, pour ce faire, il était nécessaire d'examiner l'activité de tous les membres du groupement et de les comparer à l'activité effective du groupement ; qu'il ne peut être reproché au groupement des faits imputables à titre personnel au gérant du groupement ; que l'article 239 quater C du code général des impôts ne peut fonder les redressements compte tenu du principe d'interprétation stricte de la loi fiscale ; que la seule voie qui s'ouvrait à l'administration pour mauvais fonctionnement du GEIE était sa dissolution ainsi que le prévoit l'article 32 du règlement communautaire ; que la requérante ne pouvait pas être tenue pour débitrice solidaire, car le mauvais fonctionnement du GEIE lui faisait perdre sa qualité de GEIE et en conséquence faisait disparaître la solidarité de ses membres face aux dettes du GEIE ; que le rôle est irrégulier dès lors qu'il désigne ce GEIE sous la dénomination « SARL GEIE Animation et Recherche » ; que cette erreur substantielle n'a pu créer d'obligation régulière de payer à l'égard du GEIE non plus que de la requérante ; que le principe du contradictoire entre l'administration et la requérante n'a pas été respecté car l'administration ne lui a pas communiqué l'ensemble des pièces relatives au redressement du GEIE ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2005, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête par les motifs que le principe du contradictoire a été respecté ; qu'il doit être apprécié au regard de la procédure de vérification concernant le GEIE ; que la circonstance que la société requérante concernée au titre de la solidarité, n'aurait pas eu connaissance de certains documents est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ; qu'elle a d'ailleurs été parfaitement informée ; que l'erreur matérielle sur les avis d'impositions est sans incidence sur la régularité des impositions ; qu'elle n'a n'entraîné aucune erreur sur l'identité du redevable ; que l'assujettissement du GEIE à l'impôt sur les sociétés est justifié dès lors que ce dernier ne fonctionnait pas conformément au règlement communautaire du 25 juillet 1985 en ce qu'il avait participé au développement des activités de sociétés non-membres du groupement ; que les différents actes effectués par son gérant sont opposables au GEIE dès lors qu'ils n'avaient pas été dénoncés ; que l'imposition du GEIE n'est pas fondée sur une application a contrario de l'article 239 quater C du code général des impôts mais sur l'application des articles 202 ter et 206-1 du même code ; que les problèmes de solidarité et d'opposabilité de la dette du GEIE à la requérante relèvent du contentieux du recouvrement et qu'en conséquence les moyens invoqués sont irrecevables ; que la société ne pourra prétendre aux sommes demandées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dès lors que sa requête sera rejetée ; qu'au demeurant les sommes demandées ne sont pas justifiées ;

Vu l'ordonnance en date du 20 mars 2006 par laquelle le président de la

2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Douai fixe la clôture de l'instruction au

20 avril 2006 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement n° 2137-85 du 25 juillet 1985 du Conseil des communautés européennes ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 octobre 2006 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Manuel Delamarre, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le groupement européen d'intérêt économique Réseau Animation et Recherche, autrement dénommé GEIE A et R, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle il a été mis à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1992, 1993 et 1994 ; que la société GEFÜBE GESELLSCHAFT FÜR BERATUNG GMBH, anciennement Sozialforschung und Gesellschaftpolitik GMBH, qui faisait partie des cinq membres du groupement et à laquelle il a été demandé de répondre solidairement de ses dettes, demande la décharge de ces impositions ;

Considérant, en premier lieu, que la société requérante conteste le principe de l'assujettissement du GEIE à l'impôts sur les sociétés ;

Considérant qu'aux termes de l'article 239 quater C du code général des impôts : « Les groupements européens d'intérêt économique qui sont constitués et fonctionnent dans les conditions prévues par le règlement nº 2137-85 du 25 juillet 1985 du Conseil des communautés européennes n'entrent pas dans le champ d'application du 1 de l'article 206. » ; et qu'aux termes du premier alinéa du I. de l'article 202 ter du code général des impôts : « L'impôt sur le revenu est établi dans les conditions prévues aux articles 201 et 202 lorsque les sociétés ou organismes placés sous le régime des sociétés de personnes défini aux articles 8 à 8 ter cessent totalement ou partiellement d'être soumis à ce régime ou s'ils changent leur objet social ou leur activité réelle ou lorsque les personnes morales mentionnées aux articles (...) 239 quater C (...) deviennent passibles de l'impôt sur les sociétés. » ; qu'enfin, aux termes de l'article 3 du règlement communautaire n° 2137/85 du 25 juillet 1985, réglementant les groupements européens d'intérêt économique : « 1. Le but du groupement est de faciliter ou de développer l'activité économique de ses membres, d'améliorer ou d'accroître les résultats de cette activité ; il n'est pas de réaliser des bénéfices pour lui-même. Son activité doit se rattacher à l'activité économique de ses membres et ne peut avoir qu'un caractère auxiliaire par rapport à celle-ci. 2. En conséquence, le groupement ne peut : a) exercer, directement ou indirectement, le pouvoir de direction ou de contrôle des activités propres de ses membres ou des activités d'une autre entreprise, notamment dans les domaines relatifs au personnel, aux finances et aux investissements ; (...) » ;

Considérant qu'il est constant que le GEIE A et R a été utilisé pour assurer le développement de sociétés extérieures au groupement par des opérations conclues avec des sociétés auxquelles le gérant du GEIE, M. X, était personnellement lié et qu'ainsi ce groupement ne fonctionnait pas en conformité avec le règlement communautaire n°2137/85 du 25 juillet 1985 ; que la seule circonstance que le vérificateur n'aurait pas examiné l'activité de tous les membres du GEIE et ne les auraient pas comparées à l'activité effective du GEIE, à la supposer établie est sans incidence sur le constat de ce que le GEIE ne fonctionnait pas conformément aux dispositions du règlement communautaire ; que, par ailleurs, la circonstance que les opérations en cause aient été conclues avec des entités auxquelles le gérant du groupement était personnellement lié est sans incidence dès lors que les opérations en cause, qui n'ont jamais été remises en cause par les membres du GEIE, étaient menées au nom du GEIE

A et R ; que, dès lors, ce groupement ne pouvait bénéficier des dispositions de l'article 239 quater C du code général des impôts et était assujetti à l'impôt sur les sociétés par application des dispositions de l'article 202 ter du même code ; qu'ainsi, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'aucune disposition fiscale ne fondait directement l'assujettissement du GEIE à l'impôt sur les sociétés ni à soutenir que seule la voie de la dissolution du groupement était offerte en cas de constatation d'un fonctionnement non conforme aux dispositions du règlement communautaire ;

Considérant, en deuxième lieu, que la société requérante invoque la méconnaissance à son égard du principe du contradictoire ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales alors applicable : « Sous réserve des dispositions de l'article L. 56, lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts, les redressements correspondants sont effectués suivant la procédure de redressement contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61A. » ; qu'aux termes de l'article L. 57 du même livre : « L'administration adresse au contribuable une proposition de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la vérification des déclarations déposées par le GEIE A et R devait être suivie entre l'administration des impôts et ce groupement ; que la société requérante n'apporte aucun élément de nature à établir que la procédure suivie aurait été irrégulière ; que les conditions dans lesquelles la société requérante, en sa seule qualité de débiteur solidaire des impositions, a obtenu des informations sur la procédure menée envers le GEIE A et R est sans incidence sur la régularité de la procédure de redressement en cause ;

Considérant, en troisième lieu, que la société requérante se prévaut d'une erreur dans la dénomination du contribuable sur les rôles d'imposition ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1658 premier alinéa du code général des impôts : « Les impôts directs et les taxes y assimilées sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet. » ; et qu'aux termes de l'article 1659 du même code : « La date de mise en recouvrement des rôles est fixée par l'autorité compétente pour les homologuer en application de l'article 1658 d'accord avec le trésorier-payeur général. Cette date est indiquée sur le rôle ainsi que sur les avis d'imposition délivrés aux contribuables. Lorsque des erreurs d'expédition sont constatées dans les rôles, un état de ces erreurs est dressé par le directeur des services fiscaux et approuvé dans les mêmes conditions que ces rôles, auxquels il est annexé à titre de pièce justificative. Le directeur rédige de nouveaux avis d'imposition et les fait parvenir aux intéressés. » ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, la mention figurant sur le rôle « SARL GEIE Animation et Recherche » présente le caractère d'une erreur matérielle n'ayant pu induire aucune confusion sur la désignation du redevable légal de l'impôt et non, comme le soutient la société, d'une erreur substantielle affectant le rôle ;

Considérant, enfin, que la société requérante, qui peut en sa qualité de débiteur solidaire contester dans la présente instance l'exigibilité de la somme en ce qui la concerne, soutient qu'elle ne pouvait être déclarée solidaire des impositions en cause et que la dette d'impôt ne lui était pas opposable ; que si l'article 32 du règlement précité du 25 juillet 1985 permet à un tribunal, lorsqu'un GEIE ne fonctionne pas conformément audit règlement, de prononcer sa dissolution, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'administration compétente tire les conséquences fiscales de ce comportement qui n'a pas pour effet de faire disparaître la solidarité des membres du groupement auxquels la dette d'impôt est opposable ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société GEFÜBE GESELLSCHAFT FÜR BERATUNG GMBH n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société GEFÜBE GESELLSCHAFT FÜR BERATUNG GMBH la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société GEFÜBE GESELLSCHAFT FÜR BERATUNG GMBH est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société GEFÜBE GESELLSCHAFT FÜR BERATUNG GMBH et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré après l'audience du 31 octobre 2006, à laquelle siégeaient :

- Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre,

- Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur,

- M. Manuel Delamarre, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 novembre 2006.

Le rapporteur,

Signé : B. PHEMOLANT

Le président de chambre,

Signé : C.V. HELMHOLTZ

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

M.T. LEVEQUE

2

N°04DA00917


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 04DA00917
Date de la décision : 14/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Brigitte Phémolant
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : DERVEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-11-14;04da00917 ?
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