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14/11/2006 | FRANCE | N°05DA00947

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 14 novembre 2006, 05DA00947


Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Lucette X, demeurant ..., par Me Julia ; Mme JOLIVET demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0200565 en date du 2 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a, d'une part, rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier régional universitaire de Rouen à lui verser, à titre de réparation du préjudice subi à la suite de l'intervention chirurgicale réalisée le 10 mars 1994 les sommes de 37 125 euros au titre de son

préjudice professionnel, de 33 550 euros au titre de son préjudice pe...

Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Lucette X, demeurant ..., par Me Julia ; Mme JOLIVET demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0200565 en date du 2 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a, d'une part, rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier régional universitaire de Rouen à lui verser, à titre de réparation du préjudice subi à la suite de l'intervention chirurgicale réalisée le 10 mars 1994 les sommes de 37 125 euros au titre de son préjudice professionnel, de 33 550 euros au titre de son préjudice personnel, et

1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, d'autre part, mis à sa charge les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 7 631 francs (1 163,34 euros) ;

2°) de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Rouen à lui payer les sommes respectives de 37 125 euros et de 33 550 euros en réparation de ses préjudices professionnel et personnel et de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le défaut d'information médicale relatif à l'intervention chirurgicale qu'elle a subie a généré une perte de chance de se soustraire à ladite intervention, dès lors que la preuve n'est pas rapportée par le centre hospitalier régional universitaire de Rouen que d'autres moyens thérapeutiques n'étaient pas envisageables ; qu'en outre, ce défaut d'information a privé Mme JOLIVET de la possibilité de manifester un consentement libre et éclairé ; qu'enfin, le chirurgien a commis, au cours de l'intervention, une faute médicale de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier régional universitaire de Rouen ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 février 2006, présenté pour le centre hospitalier universitaire régional de Rouen, par Me Campergue ; le centre hospitalier universitaire régional de Rouen demande à la Cour de rejeter la requête ou, à titre subsidiaire, de ramener les demandes indemnitaires de Mme JOLIVET à de plus justes proportions ; il soutient que Mme JOLIVET a été suffisamment informée des conséquences potentielles de l'intervention chirurgicale qu'elle allait subir, et qu'en tout état de cause un éventuel défaut d'information n'a occasionné aucun préjudice à la requérante ; qu'en outre, aucune faute médicale ne peut être reprochée au chirurgien qui a réalisé l'intervention, celle-ci s'étant déroulée conformément aux règles de l'art ; qu'enfin, les demandes indemnitaires présentées par Mme JOLIVET ne tiennent pas compte de l'état antérieur de la patiente, et la réalité des préjudices n'est pas établie ;

Vu la décision en date du 29 juin 2006, près le Tribunal de grande instance de Douai, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à

Mme JOLIVET ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 octobre 2006 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,

président-assesseur et M. Manuel Delamarre, premier conseiller :

- le rapport de M. Manuel Delamarre, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme Lucette JOLIVET, qui souffrait depuis 1993 de douleurs

rétro-sternales liées à une hernie hiatale avec reflux gastro-oesophagien, a été adressée, à la suite de l'échec d'un traitement médicamenteux, au service de chirurgie générale du centre hospitalier régional universitaire de Rouen, où elle a subi, le 10 mars 1994, une intervention consistant en la réalisation d'une valve anti-reflux ; que les suites de cette opération se sont notamment accompagnées de douleurs épigastriques quasi-permanentes et de troubles du transit intestinal ;

Au fond :

En ce qui concerne la faute médicale :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que l'intervention chirurgicale constituait, au vu de l'état médical de Mme JOLIVET, la meilleure indication de traitement et qu'elle a été réalisée conformément aux données acquises de la science ; qu'en effet, l'expert a expressément écarté deux des trois types de causes d'une sclérose hiatale, à savoir une complication liée à la chirurgie laparoscopique et l'utilisation d'un bistouri électrique ; qu'ainsi, et nonobstant les allégations de la requérante qui ne sont assorties d'aucun élément de preuve sur les fautes commises lors de l'opération, la sclérose hiatale subie par

Mme JOLIVET ne peut s'expliquer que par une ischémie progressive au niveau des bords de l'orifice oesophagien du diaphragme, qui constitue un aléa thérapeutique ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont décidé que la responsabilité pour faute du centre hospitalier régional universitaire de Rouen ne pouvait être retenue ;

En ce qui concerne le défaut d'information :

Considérant qu'il n'est pas contesté par le centre hospitalier régional universitaire de Rouen que Mme JOLIVET n'a pas été informée des risques que comportait l'intervention chirurgicale qu'elle a subie au mois de mars 1994, alors même qu'une telle information constitue une obligation pour les établissements hospitaliers, y compris lorsque lesdits risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ; que ce manquement à l'obligation d'information, alors même qu'aucune urgence n'est alléguée, constitue une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier régional universitaire de Rouen ;

Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction, comme il a été dit, qu'il n'existait aucune alternative thérapeutique moins risquée que l'intervention chirurgicale réalisée, compte tenu de l'état de santé de Mme JOLIVET ; que, par suite, la faute commise par le centre hospitalier régional universitaire de Rouen n'a pas entraîné, dans les circonstances de l'espèce, de perte de chance pour Mme JOLIVET de se soustraire au risque qui s'est réalisé ; qu'ainsi, les préjudices professionnel et personnel de Mme JOLIVET, qui sont les seuls invoqués par la requérante, ne peuvent être indemnisés sur le fondement de cette faute ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme JOLIVET n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article s'opposent à ce que la somme que

Mme JOLIVET réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens soit mise à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Rouen, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme JOLIVET est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Lucette JOLIVET, au centre hospitalier régional universitaire de Rouen et à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen.

Délibéré après l'audience du 31 octobre 2006 à laquelle siégeaient :

- Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre,

- Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur,

- M. Manuel Delamarre, premier conseiller.

Lu en audience publique le 14 novembre 2006.

Le rapporteur,

Signé : M. DELAMARRE

Le président de chambre,

Signé : C. V. HELMHOLTZ

Le greffier,

Signé : M. T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de la santé et des solidarités en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

M. T. LEVEQUE

2

N°05DA00947


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: M. Manuel Delamarre
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS JEAN-BENOIT JULIA

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Date de la décision : 14/11/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 05DA00947
Numéro NOR : CETATEXT000018003317 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-11-14;05da00947 ?
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