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29/12/2006 | FRANCE | N°06DA01333

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 29 décembre 2006, 06DA01333


Vu la requête, enregistrée le 27 septembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602074 du 7 août 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté en date du 3 août 2006 décidant la reconduite à la frontière de M. Sergiy X et lui a enjoint de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit statué sur son cas ;

2°) de rejeter la demande de M. Serg

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Il soutient que M. X ne remplit pas les conditions pour bénéficier des disp...

Vu la requête, enregistrée le 27 septembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602074 du 7 août 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté en date du 3 août 2006 décidant la reconduite à la frontière de M. Sergiy X et lui a enjoint de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit statué sur son cas ;

2°) de rejeter la demande de M. Sergiy X ;

Il soutient que M. X ne remplit pas les conditions pour bénéficier des dispositions de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'à cet égard, il ne justifie pas d'une résidence habituelle en France, il n'établit pas que le défaut de traitement de la pathologie dont il souffre entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé et ne produit aucun élément attestant de l'impossibilité de poursuivre un traitement approprié en Ukraine ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 3 octobre 2006 fixant la clôture de l'instruction au 24 octobre 2006 ;

Vu l'examen des pièces du dossier desquelles il ressort que la requête a été communiquée à M. X qui n'a pas produit de mémoire en défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 décembre 2006, à laquelle siégeaient : Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur, M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (…) » ; et qu'aux termes de l'article L 311-5 du même code : « La délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, d'un récépissé de demande de titre de séjour ou d'un récépissé de demande d'asile n'a pas pour effet de régulariser les conditions de l'entrée en France, sauf s'il s'agit d'un étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Sergiy X, de nationalité ukrainienne, à qui la qualité de réfugié politique a été refusée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, est entré et s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français après l'expiration de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivrée le 31 janvier 2001, valable jusqu'au 28 février 2001, dont il n'a pas demandé le renouvellement ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (…) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi » ;

Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière, M. X a fait valoir qu'il est atteint d'une hépatite chronique C nécessitant des soins qui ne seraient pas disponibles dans son pays d'origine ; que toutefois, le seul certificat médical produit devant le tribunal administratif, établi le 7 août 2006 et n'émanant pas du médecin qui suit habituellement l'intéressé, est très peu circonstancié et se borne à reproduire de manière stéréotypée les deux conditions visées au 10° de l'article L. 511-4 précité ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. X nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Ukraine ; que par suite, le PREFET DE LA SEINE-MARITIME n'a pas, en prenant le 3 août 2006 son arrêté de reconduite à la frontière, méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur ce moyen pour en prononcer l'annulation ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X en première instance ;

Considérant que le signataire de la décision attaquée, M. Claude Y, a reçu délégation de signature par arrêté du 21 juillet 2006, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Seine-Maritime du 24 juillet 2006 ;

Considérant qu'au vu de l'état de santé de l'intéressé, examiné ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME aurait commis une erreur de fait et une erreur d'appréciation de la situation personnelle de M. X ;

Considérant que si M. X déclare vivre en France depuis plusieurs années, il ne l'établit pas ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. X serait, comme il le soutient, dépourvu de toute attache dans son pays d'origine ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions du séjour de M. X, célibataire sans enfant et âgé de 32 ans à la date de l'arrêté en litige, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté aux droits de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant que si M. X fait état de risques qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine, il ne fournit aucune précision, ni aucun élément à l'appui de ses allégations ; que dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays dont il a la nationalité comme pays de destination aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 3 août 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter la demande d'annulation présentée par l'intéressé devant le tribunal administratif ainsi que ses conclusions à fin d'injonction ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0602074 du 7 août 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DE LA SEINE-MARITIME, à M. Sergiy X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

N°06DA01333 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Câm Vân (AC) Helmholtz
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Date de la décision : 29/12/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 06DA01333
Numéro NOR : CETATEXT000018003520 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-12-29;06da01333 ?
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